La mise en place du SIG sur les diagnostics du projet gazier « Val-de-Saône »
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Mots-clés :
archéologie préventive, tracé linéaire, gazoduc, système d’information géographique (SIG), analyse spatiale, base de données cartographique, travail collaboratifKeywords:
preventive archaeology, linear development, gas pipeline, geographic information system (GIS), spatial analysis, cartographical database, collaborative workPalabras claves:
arqueología preventiva, trazado lineal, gasoducto, sistema de información geográfica (SIG), análisis espacial, base de datos cartográfica, travail collaboratifPlan
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Faciliter la préparation des interventions et la collaboration
- 1 Logiciels utilisés : Qgis et Access.
1Le recours au Système d’information géographique (SIG) sur les opérations de diagnostic a déjà été expérimenté sur les 80 km de tracé linéaire champenois qui ont précédé le programme Val-de-Saône. En s’appuyant sur l’expérience acquise, il a été décidé de poursuivre le déploiement du SIG sur les opérations de l’artère Val-de-Saône afin d’améliorer le processus et les outils mis en place1, tout en les adaptant aux impératifs locaux (problématiques ou axes de recherche variant suivant les régions traversées, demandes des services régionaux de l’Archéologie [SRA] différentes en matière de rendu…).
- 2 Le programme « Val-de-Saône » vise à développer la fluidité du transit entre les marchés du Nord et (...)
- 3 Sous la responsabilité d’Antony Gaillard, Stéphanie Morel, Didier Lamotte, Frédéric Devevey, Thomas (...)
2L’intégralité de l’artère Val-de-Saône2 a fait l’objet de plusieurs opérations de diagnostic archéologique s’étendant sur une période allant de juillet 2015 à la fin de 20163. Les prescriptions sur le gazoduc ont été subdivisées en tronçons d’environ 10 km de long sur une emprise de 28 m de large couvrant l’axe de la future canalisation ainsi qu’une partie de l’emprise des travaux. Disposées en quinconce, deux lignes de sondages, de 3 m de largeur et de 30 m de longueur théorique, ont été réalisées pour chaque prescription.
3Dans le cadre du programme Val-de-Saône, GRTgaz a également fait le choix de mettre en place un SIG multithématique pour faciliter le suivi des différentes études menées tout au long du projet (environnementales, agricoles et techniques…). Ce choix permet de faciliter les échanges avec les différents acteurs territoriaux travaillant avec un SIG, dont l’Inrap. Ainsi, dès la phase de préparation, avant le démarrage des opérations, GRTgaz a fourni de nombreux fonds de cartes : drainage, couverture boisée, parcellaire, parcelles indisponibles, contraintes environnementales, tracé du gazoduc, lidar, etc. Ils ont servi de support à la production de corpus cartographiques, fournis au responsable d’opération, avant l’intervention de terrain, dans le but de l’aider à préparer son opération, à se repérer sur le terrain et à localiser les différentes contraintes techniques, environnementales et écologiques.
Structurer et harmoniser l’enregistrement de la donnée spatiale
4La mise en place du SIG repose sur un protocole d’enregistrement, de gestion et d’exploitation de l’information archéologique sur l’intégralité de la chaîne opératoire de l’archéologie préventive. Seules seront présentées ici les méthodes d’acquisition et d’enregistrement de la donnée spatiale, par le topographe, et de la donnée sémantique, par l’archéologue, ainsi que les outils mis en place pour mutualiser l’ensemble des données produites.
5L’acquisition de la donnée spatiale repose sur la géocodification, méthode qui permet d’optimiser le relevé topographique en diminuant, d’une part, le nombre de points relevés sur le terrain (deux points suffisent pour un trou de poteau de forme circulaire) et en automatisant, d’autre part, la réalisation du plan topographique dans le logiciel de cartographie (une forme géométrique est créée pour chaque groupe de points comportant le même numéro d’identifiant). S’inspirant de géocodifications existantes, celle utilisée sur le gazoduc est construite sur un modèle simple : on attribue à chaque point relevé un code définissant le type d’entité à laquelle il se réfère (tranchée, vestige, mobilier…), un numéro d’identifiant unique et un code relatif à la géométrie de l’entité relevée (point, ligne ou polygone). Le numéro d’identifiant unique est indispensable car il permet de gérer, de retrouver et d’identifier tout objet relevé sur le terrain. Mais il permet aussi d’assurer la liaison entre la donnée spatiale et la donnée descriptive d’un objet. Du fait des deux lignes de décapage simultanées, les sondages ont été numérotés de façon à assurer l’enregistrement de chaque ligne de sondages de manière indépendante tout en garantissant l’attribution d’un numéro d’identifiant unique à chaque vestige observé.
Structurer et harmoniser l’enregistrement de la donnée descriptive
6L’utilisation systématique de SIG nécessite une normalisation des données descriptives. Ce n’est évidemment pas une spécificité liée au SIG : toute opération archéologique a besoin d’un système d’enregistrement cohérent. Mais la formalisation de ce système dans une base de données permet une liaison aisée entre les données descriptives générales et les données spatiales. La base de données permet également de gérer les autres aspects de la collecte de données archéologiques : analyse hors spatiale, production rapide d’inventaires… Le couple SIG-base de données s’avère alors d’une grande efficacité pour la gestion des informations archéologiques.
- 4 Construite sous MS Access et adaptée à partir du noyau des SGBDR (Système de gestion de base de don (...)
7La base de données4 doit répondre à plusieurs objectifs : gérer les trois aspects classiques de la description archéologique (vestiges, documentation, mobilier) tout en les mettant en relation ; rendre utilisable les descriptions sur chaque tronçon et les adapter à un contexte de diagnostic majoritairement peu stratifié, tout en gardant la possibilité de décrire des situations plus complexes ; faire en sorte que les données saisies puissent aussi bien servir pour l’analyse et la gestion des sites que pour la production automatisée des documents finaux (inventaires, étiquettes…) selon les normes du SRA Bourgogne ; pouvoir travailler à plusieurs opérateurs simultanément.
8La base de données repose sur un triptyque classique structure/documentation/mobilier auquel viennent s’ajouter les sondages et les informations générales du tronçon (opération). La prise en main est assurée par une série de formulaires et de menus qui permettent de s’occuper de toutes les saisies, consultations et éditions courantes. Mais des requêtes plus complexes ou plus spécifiques sont possibles. Une fois saisis, les documents ou les lots de mobiliers afférents sont consultables depuis chaque fiche « structure » ou « sondage ». Des formulaires adaptés aux tablettes graphiques de terrain sont disponibles. La saisie des informations descriptives a en effet été réalisée par certaines équipes directement sur tablettes graphiques pendant la phase terrain afin d’évaluer si cela permettait de gagner du temps sur la phase d’étude. Enfin, un système de réplicas permet de travailler conjointement sur des copies d’une base centrale avant une mise en commun régulière.
Centraliser et mutualiser les données
9La documentation numérique utilisée et produite au cours d’une opération est centralisée dans un dossier localisé sur un espace de stockage dédié en réseau (NAS), d’après le modèle mis en place au niveau national à l’Inrap. Ce dossier se compose de plusieurs sous-dossiers dans lesquels les différents intervenants sur une opération de diagnostic peuvent ranger et stocker leurs données. L’utilisation d’une arborescence de dossiers commune permet d’améliorer la gestion de la documentation, de la rendre accessible, de favoriser la collaboration entre les différents intervenants d’une même opération et de faciliter l’archivage de l’information archéologique.
Atouts de l’utilisation des SIG
10Comme d’autres logiciels, les SIG ne sont pas d’un usage intuitif. Or si l'on veut les développer dans leur pleine utilité, on ne saurait les cantonner à être un outil réservé à un spécialiste « producteur de cartes ». Du fait de leur position dans la chaîne opératoire, les SIG peuvent amener à redéfinir certaines habitudes de travail. En tant qu’outil fédérateur, leur utilisation passe, au même titre que d’autres éléments du système d’enregistrement et en particulier du fait de l’informatisation, par une certaine discipline dans les procédures et un langage commun. Les équipes ont suivi une formation afin d’appréhender les possibilités d’utilisation propre aux différentes tâches de l'opération et de mener une réflexion en amont de l’intervention sur l’utilisation du SIG car les contraintes ne doivent pas devenir des gênes et le travail des équipes ne doit pas se retrouver axé sur l’outil. L’usage systématique du SIG sur le gazoduc était donc une bonne occasion d'en tester l'emploi au sein de la chaîne opératoire et de favoriser l’appropriation de l’outil SIG par les agents.
Rapidité de traitement
11En matière de gestion de l’information, l’un des principaux intérêts du SIG réside dans les gains de temps qu’il permet. Plus les données sont abondantes, plus ce gain est important. Dans une opération archéologique, un grand nombre de travaux et d’analyses cartographiques présentent des aspects systématiques et peuvent être considérablement accélérés par l’utilisation d’un SIG. Ces gains de temps permettent de s’affranchir des contraintes matérielles pour se concentrer sur le travail de réflexion archéologique sans être freiné, comme auparavant, dans le croisement de données spatiales. Bien conçu, le SIG permet de rationaliser et d'optimiser certains processus de travail grâce notamment à l’automatisation des tâches. Sur le gazoduc, le SIG a permis d’automatiser la production « en masse » de cartes et d’illustrations planimétriques en phase de préparation puisqu’il offre la possibilité d’éditer plusieurs cartes en une action, d’après un modèle de mise en page unique. Cette fonction a été utilisée pour la réalisation de corpus de cartes pour chaque opération (cartes de localisation des diverses contraintes et des « points rencontre sécurité »). En traitant de cette manière les 186 km du tracé, ce sont plus d’une centaine d’illustrations planimétriques qui ont été générées. De même a été automatisée la succession de tâches identiques à l’ensemble des levés topographiques pour l’élaboration plus rapide du plan. Tous les numéros de sondage et de structure accompagnés des renseignements géographiques issus du plan topographique (commune, parcelle et section) ont été importés dans la base de données.
12En se basant sur les renseignements contenus dans la base de données liée au SIG, le rendu graphique des objets s’adapte automatiquement, ce qui permet de réaliser rapidement différents types de cartes thématiques lors de la phase d’étude (par type de structure, par datation…) pour aider l’archéologue dans sa réflexion ou préparer les illustrations du rapport final d’opération.
Partage des données
13Sur les opérations du gazoduc, chaque utilisateur travaille avec son propre environnement SIG, que l’on nomme « projet » et sur lequel il est le seul à intervenir. Ce fonctionnement permet de garantir la qualité de la donnée produite par un spécialiste. Tous les utilisateurs d’une même opération font référence dans leurs projets à la même source de données spatiales. Cette procédure offre la possibilité de mettre à jour des données à n’importe quel moment du processus, les modifications se répercutant sur l’ensemble des projets. Par exemple, si le responsable d'opération change la datation d’un vestige, la modification sera prise en compte sur le projet de l’infographiste (même si celui-ci a déjà commencé les illustrations). De plus, le fait de partager et d’échanger de la donnée spatiale géoréférencée avec l’aménageur facilite son intégration dans les SIG des deux organismes, offrant ainsi une plus grande réactivité. En fournissant, par exemple, à l’issue du diagnostic, les emprises géoréférencées des zones à fort potentiel archéologique, GRTgaz peut rapidement prendre en compte ces informations pour anticiper la position des sondages géotechniques, en évitant les zones sensibles à ne pas endommager.
Aller plus loin
14L’intérêt du SIG réside également dans la possibilité d’établir une liaison entre les informations spatiales voulues – le plus souvent, les structures archéologiques – et les données descriptives correspondantes. Les relations internes de la base de données permettent de mettre en lien des données (via des requêtes), sans se limiter à une seule catégorie. Par exemple, au-delà des descriptions de vestiges (interprétation, forme, nature du comblement, etc.), on peut établir une quantification de tel ou tel type de mobilier.
15De plus, mutualiser l’information archéologique permet de proposer de nouveaux outils aux utilisateurs. Ainsi, un catalogue de la donnée spatiale, récemment mis en place au niveau national, a pour objectif de rassembler l’ensemble des données spatiales, accompagnées de données descriptives minimales (identifiant, période, type de vestige), des opérations archéologiques réalisées par l’Inrap. En Bourgogne depuis 2000, toutes les opérations ont été rentrées dans ce catalogue. Dans le cas du gazoduc, pour pallier le manque de lisibilité dû à l’étroitesse de l’emprise, le recours au catalogue de la donnée spatiale permet de prendre du recul et d’élargir le faisceau d’observation. Ainsi, en replaçant les vestiges découverts dans leur contexte archéologique, le catalogue a parfois permis de faciliter leur interprétation.
Notes
1 Logiciels utilisés : Qgis et Access.
2 Le programme « Val-de-Saône » vise à développer la fluidité du transit entre les marchés du Nord et du Sud de l’Europe et à renforcer la sécurité d’approvisionnement.
3 Sous la responsabilité d’Antony Gaillard, Stéphanie Morel, Didier Lamotte, Frédéric Devevey, Thomas Le Saint-Quinio, Johan Lecornué, Cécile Blondeau, Johanny Lamant, Karine Raynaud, Dominique Baudais, Emeline Deneuve.
4 Construite sous MS Access et adaptée à partir du noyau des SGBDR (Système de gestion de base de données relationnelle) utilisés en Bourgogne, avec des modifications adaptées à la nomenclature des opérations du gazoduc.
Haut de pagePour citer cet article
Référence papier
Pierre Serafini, Stéphane Alix et Guillaume Hebert, « La mise en place du SIG sur les diagnostics du projet gazier « Val-de-Saône » », Archéopages, Hors-série 4 | 2016, 79-81.
Référence électronique
Pierre Serafini, Stéphane Alix et Guillaume Hebert, « La mise en place du SIG sur les diagnostics du projet gazier « Val-de-Saône » », Archéopages [En ligne], Hors-série 4 | 2016, mis en ligne le 28 juillet 2022, consulté le 17 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/archeopages/7705 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/archeopages.7705
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