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3. Technologies à grande échelle

Application systématique des SIG en archéologie préventive sur les travaux d’aménagement linéaires

Systematic application of GIS in preventive archaeology on linear development works
Aplicación sistemática de los SIG en arqueología preventiva: el ejemplo de las obras de ordenación lineales
Anne Moreau
p. 78-79

Résumés

Depuis 2011, l’Inrap a entrepris de généraliser l’utilisation des Systèmes d’information géographique sur les opérations de diagnostics et de fouille. Dans cette optique, des expériences d’application systématique de SIG à l’échelle d’un tracé ont été réalisées à l’occasion d’aménagements linéaires. Depuis longtemps mis en œuvre pour leurs fonctions d’analyse, les SIG sont aussi de remarquables outils pour la gestion des opérations et le stockage des données. Ils facilitent également la production rapide et harmonisée des figures du rapport ainsi que la réalisation de catalogues de données communs à plusieurs opérations, si la structuration des données est pensée en amont. Toutefois, la composante organisationnelle et humaine des SIG apparaît comme l’élément majeur de la mutation en cours. La question de la mutualisation des données de la recherche, corollaire de la démocratisation des SIG à l’échelle de l’opération, apparaît comme le moyen de fédérer les archéologues autour de leurs données. C’est donc bien la dimension fédératrice des SIG que l’Inrap est en train de découvrir et qui donne tout son intérêt au déploiement en cours. L’exemple des diagnostics du projet gazier « Val-de-Saône », qui ont bénéficié de SIG, illustre ces différents éléments.

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Texte intégral

1La mise en œuvre de Systèmes d’information géographique (SIG) pour l’étude des territoires anciens ou actuels est une pratique désormais courante : dès lors que la problématique posée fait intervenir l’espace, le recours au SIG relève de l’évidence. En archéologie, en France, les SIG sont utilisés depuis les années 1990, mais leur généralisation à l’échelle de l’opération archéologique est récente. À l’Inrap, cette généralisation fait l’objet depuis 2011 d’un déploiement à l’échelle nationale qui vise à systématiser l’utilisation des SIG sur les opérations de diagnostic et de fouille (Rodier, Ciezar, Moreau, 2011). Souvent dotés de moyens propres et d’équipes de terrain dédiées, les projets linéaires sont l’occasion de tester des méthodes, des techniques et des processus nouveaux : à l’Inrap, les tracés d’envergure font généralement l’objet d’une coordination scientifique et technique qui conduit à la mise en place de processus d’organisation du travail réfléchis, anticipés et reproduits tout au long du tracé afin de répondre aux exigences du planning de l’aménagement et de délai de rendu des rapports minimaux services de l’état. C’est ainsi que des projets d’aménagement linéaires récents ont fourni le cadre à des expériences d’application systématique des SIG.

Les définitions du SIG

2Il existe une multitude de définitions des SIG, comme il existe une multitude d’acronymes pour désigner les différents dispositifs mis en œuvre dans le domaine de la géomatique. En général, deux définitions différentes mais complémentaires des SIG sont proposées : la première met l’accent sur l’aspect technique des SIG en tant qu’outils informatiques, de gestion, d’interrogation, d’analyse, de modélisation et de restitution de l’information. Ces fonctionnalités sont résumées par les cinq « A » (abstraire, acquérir, archiver, analyser, afficher) qui rythment le processus de conception et de mise en œuvre d’un SIG (Denègre, Salgé, 1996). La seconde définition favorise une perception plus conceptuelle du SIG insistant davantage sur sa finalité : le SIG est défini comme « un ensemble de structures, des méthodes, des outils et des données constitués pour rendre compte de phénomènes localisés dans un espace spécifique et faciliter les décisions à prendre dans cet espace » (Joliveau, 1996).

Les dimensions techniques des SIG

3De manière générale, l’optimisation du processus et l’augmentation de la qualité de la documentation produite au sens large (données et productions cartographiques) sont les retombées attendues du recours systématique aux SIG dans le cadre des opérations d’archéologie préventive. Il ne nous a pas semblé nécessaire de revenir, dans cet article, sur l’intérêt d’utiliser les SIG pour l’exploitation et l’analyse des données, fonctions premières, évidentes, dont la littérature fait largement état. On rappellera simplement que l’interrogation des données spatiales selon un critère descriptif choisi relève déjà de l’analyse spatiale et qu’il n’est nul besoin de mettre en œuvre une méthode d’interpolation pour parler d’analyse. Cela étant, il est vrai que les données collectées à l’échelle d’une opération ne se prêtent pas toujours à une analyse spatiale qui va au-delà de la simple localisation des structures sur un plan. Dans ce cas, si le SIG n’est pas mis en œuvre pour ses fonctions d’analyse, il intervient comme outil de gestion et de stockage des données. L’utilisation systématique des SIG pour la gestion des opérations, à plus forte raison dans le cadre d’un linéaire qui implique un va-et-vient entre l’échelle de l’opération/du tronçon et celle du tracé dans sa globalité, est un atout majeur. Constitué au fur et à mesure du terrain, le SIG permet de gérer la progression du chantier (type de relevé effectué à un moment T, détection des doublons, etc.) ; il offre à l’archéologue la possibilité d’obtenir un plan actualisé en temps réel si les données ont été numérisées au plus tôt dans le processus. À l’échelle de l’ensemble du tracé, le SIG permet également de gérer des opérations réalisées conjointement en des lieux différents. L’automatisation de la cartographie est une autre fonction des SIG largement mise en œuvre, notamment sur les diagnostics du gazoduc (cf. contributions de P. Serafini, R. Rougier et R. Durost dans ce volume), puisque le SIG peut faciliter la production rapide et harmonisée des figures du rapport. Enfin, l’un des potentiels de la systématisation des SIG en archéologie préventive réside dans les perspectives offertes par la collecte harmonisée des données : si toutes les équipes respectent une structure de données commune a minima, l’élaboration d’un catalogue de données à l’échelle d’un tracé, voire du territoire national, devient possible.

Les dimensions humaine et organisationnelle des SIG

4Savoir si la mise en place d’un SIG, à l’échelle d’une ou plusieurs opérations archéologiques, a répondu aux objectifs fixés relève de la gageure pour deux raisons principales. La première tient au fait que les effets de l’intégration d’un outil comme le SIG dans une organisation ne sont jamais immédiats et que le processus d’appropriation par les utilisateurs peut être long. La seconde est liée au fait que le SIG transforme le fonctionnement des organisations et les modes de travail des individus (Roche, Caron, 2004 ; Costa, 2009) : il « modifie le fonctionnement d’un groupe tout autant qu’il doit s’adapter et évoluer de manière permanente au fonctionnement du groupe » (Costa, 2009, p. 751).

5Ainsi, le bénéfice réel de l’introduction des SIG à l’Inrap ne se trouve pas tant dans l’optimisation du processus et la qualité des données produites que dans le développement d’un sentiment d’appartenance à « des réseaux d’utilisateurs dans le but de développer une culture commune structurée autour d’un territoire d’étude donné » (Pornon, 2007 cité par Costa, 2009, p. 751). Cette dimension, éprouvée à l’échelle d’une opération ou d’une coordination, peut être transposée, à l’échelle de l’Institut dans son ensemble, autour de la question du partage des données archéologiques avec, d’une part, les aménageurs dans le cadre d’une opération d’archéologie préventive et, d’autre part, les archéologues de tous horizons. La question de la mutualisation des données de la recherche, en l’occurrence, des données spatiales, suite logique à la démocratisation des SIG en archéologie préventive, apparaît comme le moyen de fédérer les archéologues autour d’un bien commun que sont les données archéologiques.

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Bibliographie

Costa L., 2009, Impact des approches géomatiques dans les organisations de l’archéologie, thèse d’archéologie, Université Paris X Ouest Nanterre, 4 vol., dactyl., 1145 p.

Denègre J., Salgé F., 1996, Les systèmes d’information géographique, Paris, Presses universitaires de France, « Que Sais-je ? », 127 p.

Joliveau T., 1996, « Gérer l’environnement avec des S.I.G. Mais qu’est-ce qu'un S.I.G. ? », Revue de géographie de Lyon, vol. 71 (2/96), p. 101-110. https://www.persee.fr/doc/geoca_0035-113x_1996_num_71_2_4333.

Pornon H., 2007, « Bilan et perspective de 20 années de géomatique », Géomatique Expert, n° 57, juin-juillet 2007, p. 36-46. http://www.geomag.fr/sites/default/files/58_66.pdf.

Roche S., Caron C. (dir.), 2004, Aspects organisationnels des SIG, Traités IGAT, Série géomatique, Paris, Lavoisier, Hermès, 312 p.

Rodier X., Ciezar P., Moreau A., 2011, « SIG et archéologie préventive, le choix de l’Inrap : un outil d’aide à la recherche à l’échelle de la fouille », in Rodier X. (dir.), Information spatiale et archéologie, Paris, éditions Errance, Collection « Archéologiques », p. 31-33.

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Pour citer cet article

Référence papier

Anne Moreau, « Application systématique des SIG en archéologie préventive sur les travaux d’aménagement linéaires »Archéopages, Hors-série 4 | 2016, 78-79.

Référence électronique

Anne Moreau, « Application systématique des SIG en archéologie préventive sur les travaux d’aménagement linéaires »Archéopages [En ligne], Hors-série 4 | 2016, mis en ligne le 28 juillet 2022, consulté le 17 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/archeopages/7652 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/archeopages.7652

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Auteur

Anne Moreau

Inrap, UMR 7324 « CITERES-LAT »

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Droits d’auteur

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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