- 1 Fouille menée entre le 20 Juillet 2015 et le 29 février 2016, sous la direction de Richard Fronty, (...)
1Cette contribution s’inscrit dans l’étude du développement urbain de la ville de Soissons, depuis la fondation de la cité antique d’Augusta Suessionum, jusqu’à la période actuelle (Brunel, Defente, 1987 ; Roussel, 2002). L’opération archéologique1 concerne la reprise des réseaux d’adduction d’eau potable et d’assainissement, avant le réaménagement global du boulevard Jeanne-d’Arc, qui est situé à l’emplacement des fossés et ouvrages bastionnés édifiés entre le XVIe et le début du XIXe siècle, en avant des enceintes médiévale et moderne (Roussel, 2002).
- 2 Adjudication des travaux de nivellement datée du samedi 7 janvier 1888 (Archives municipales de Soi (...)
- 3 Diagnostic réalisé en août 2014, sous la direction de Sylvain Thouvenot, Inrap.
2Ces aménagements militaires ont été nivelés entre 1893 et 18992. Sur 3000 m², le projet consiste au creusement de tranchées sous les actuels trottoirs du boulevard et sous la chaussée, d’une largeur de 0,60 m à 1,60 m environ, sur plusieurs dizaines de mètres de longueur et à une profondeur de terrassement comprise entre 1,60 et 2,40 m. Les vestiges récents apparaissent souvent de manière superficielle (0,10 à 0,20 m pour les fondations du bastion Saint-Rémy), alors qu’à l’emplacement des grands fossés défensifs, les occupations anciennes sont déjà irrémédiablement détruites, orientant ainsi les choix de l’agent prescripteur. Dès lors, cette opération prend la forme d’une surveillance et d’un accompagnement archéologique des travaux, organisés en trois secteurs distincts déterminés après diagnostic3 [ill. 1]. L’objectif scientifique de la fouille est l’analyse des fortifications de l’époque moderne (murs d’escarpe des bastions, et éventuellement murs de contrescarpe), et de tout vestige antérieur susceptible d’avoir été épargné par l’aménagement des bastions, notamment une portion d’aqueduc médiéval.
1. Superposition du plan des défenses de Soissons de 1836 sur le plan cadastral actuel.
Fond de carte : cadastre.gouv, DAO R. Fronty, Inrap
3Les contraintes techniques imposent un planning d’intervention, en plusieurs phases successives, se calant sur l’avancement du chantier. à ce jour, l’opération de fouille de soixante jours ouvrés s’est étalée sur une durée de presque huit mois. De plus, une phase intermédiaire de démontage du bâti (à l’aide d’engins hydrauliques) s’avérait nécessaire entre les phases de fouille, pour atteindre les niveaux inférieurs. Au-delà de la méthode basique d’enregistrement des données archéologiques, nous avons procédé à des prélèvements raisonnés de tous les ensembles mobiliers (céramiques, faune, métal) et des matériaux conservés représentatifs (pierre calcaire et grès, mortiers, terre cuite architecturale). La complexité de l’intervention sur le domaine public résulte de la présence de réseaux actifs enfouis (eau potable, eaux usées, fibre optique, électricité, gaz), et d’autres contraintes matérielles (poteaux téléphoniques et électriques, souches, mobilier urbain, accès privatifs). à cela, s’ajoutent les contraintes de dimensions des tranchées de pose de réseau et de profondeur des cotes du projet, qui ne permettent pas d’observer de façon convenable les vestiges conservés sous les remblais récents.
4La fouille des secteurs 1 et 3 a livré du mobilier céramique gallo-romain très fragmenté, associé à des couches de remblais apparaissant à 1,30 m de profondeur. Celui-ci ne permet pas, à lui seul, compte tenu de l’emprise, de confirmer l’occupation antique détectée en 1894 (Collet, 1903). Pour la période médiévale, deux sections d’aqueduc ont été étudiées. Le mode de construction observé semble conforme au bâti médiéval local. Bien que les éléments découverts aient été partiellement détruits et réutilisés postérieurement, l’étude en cours devrait permettre d’en confirmer l’attribution chronologique. Il pourrait s’agir de l’alimentation hydraulique de l’abbaye Saint-Jean-des-Vignes (Bonde, Maines, 1999). Concernant les périodes moderne et contemporaine, de nombreux tronçons de fortifications (murs d’escarpe, contreforts) ont été dégagés [ill. 2]. Ces portions appartiennent notamment à deux bastions, celui de Saint-Rémy et celui de la Bergerie. Leur conception et leur position s’accordent aux sources graphiques et iconographiques disponibles. L’intervention sur le secteur 2 aura lieu en 2016.
2. Vue en plan des ouvrages défensifs découverts dans un sondage du secteur 3.
Au premier plan, présence de la plateforme bordée par son mur d’escarpe occidental. Ces vestiges matérialisent le bastion de la Bergerie. Au second plan, emprise du fossé défensif remblayé, parcourue par de nombreux réseaux actifs.
R. Fronty, Inrap
- 4 Le SHD siège au Château de Vincennes. Il est le centre d’archives du ministère de la Défense et des (...)
5Les données recueillies durant la phase terrain seront confrontées à l’étude documentaire en cours. Des plans de détail des différents ouvrages militaires, dressés au XIXe siècle, sont conservés pour partie aux archives du Service historique de la Défense4. Les levées topographiques réalisées permettront d’affiner le positionnement de chaque ouvrage, en localisant des points d’ancrage importants sur le positionnement de l’ensemble du tracé des fortifications.