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Actualité

Deux sépultures d’enfants du Haut-Empire

Two children's tombs from the Early Roman Empire
Dos sepulturas de niños del Alto Imperio
Martin Pithon
p. 70-71

Entrées d’index

Mots-clés :

sépulture, enfant

Index géographique :

Pays de la Loire, Maine-et-Loire, Angers

Index chronologique :

Antiquité, Haut-Empire romain
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Texte intégral

Site
Place Marengo
Angers
Maine-et-Loire

Date
Juin 2008-avril 2009

Surface fouillée
600 m²

Équipe
Anthropologie
Élodie Cabot

Étude du petit mobilier
Xavier Dubillot

Étude du mobilier en fer
Christophe Loiseau

1Deux inhumations de jeunes enfants ont été trouvées dans un secteur situé sur les marges sud-ouest de l’agglomération antique [ill. 1] lors des fouilles liées à la construction du tramway : elles sont associées aux phases où l’habitat urbain s’est étendu sur des terrains nivelés (fin du ier s. et iie s.), initialement occupés par une activité de petite extraction (début du ier s.), puis voués à l’enfouissement des rebuts de la consommation urbaine (courant du ier s.). Autour des inhumations, le paysage urbain – correspondant à celui de la périphérie – est constitué d’une rue sans bas-côté ni trottoir qui sépare deux îlots comprenant chacun un bâtiment en dur entouré d’un espace libre de construction (jardin ?), et un puits [ill. 2]. Le premier bâtiment, qui comporte plusieurs pièces desservies par un couloir, peut sans doute être assimilé à une domus. Le seul angle qui subsiste du deuxième n’autorise pas d’interprétation particulière sur sa fonction et sa nature. Les deux inhumations – fouillées dans l’environnement immédiat de ce bâtiment non identifié – présentent des caractéristiques très opposées.

1. Iuliomagus (Angers) ier-iiie s / 2. Place Marengo, les vestiges de la phase IVb.

1. Iuliomagus (Angers) ier-iiie s / 2. Place Marengo, les vestiges de la phase IVb.

1: DAO M. Pithon, Inrap
2: DAO E. Rubington, Inrap

2L’inhumation 1094 correspond à une fosse creusée le long d’un mur et dans laquelle a été déposé un coffre de bois où le corps d’un enfant défunt repose, accompagné d’un dépôt d’objets. On peut donc vraiment parler d’une tombe. À l’inverse, l’inhumation 1115 n’est constituée que du squelette d’un enfant placé dans un creusement sommaire recoupant une fosse-dépotoir plus ancienne. Il n’existe donc ici aucune matérialisation d’un rite pour accompagner la mise en terre.

3L’âge du décès de l’individu de la tombe 1094 est estimé à environ 6 mois (+/- 3 mois) d’après les seuls restes de fragments du crâne et de la mandibule, analysés par Élodie Cabot (Pithon et al., 2012, p. 101). En revanche, la position du corps dans la tombe n’est pas restituable. Au mieux, la localisation des os au sud du coffre permet d’envisager une orientation sud-nord du dépôt. Le deuxième squelette, relativement mieux conservé, indique un âge de décès très tôt après l’accouchement, voire pendant (Pithon et al., 2012, p. 101). Le corps déposé sur son côté gauche est recroquevillé en position fœtale, la tête à l’ouest. À défaut d’éléments de datation précis, la sépulture 1115 est, par sa position stratigraphique, à situer entre la fin du ier s. et le iiie s.

4L’architecture de la tombe 1094 était constituée – outre le creusement de la fosse même – d’un coffre dont le bois n’a laissé aucune trace, mais dont l’aspect peut être restitué à partir des éléments de fer qui en assuraient l’assemblage et la fermeture (serrure), détaillés par Christophe Loiseau (Pithon et al., 2012, p. 231-232). À l’intérieur, se trouvaient – près de la tête du sujet – des perles en verre, en ambre et une clochette de bronze sans doute initialement réunies sur un fil dont la matière n’a pas été conservée (voir article de Xavier Dubillot, in Pithon et al., 2012, p. 210-213). À proximité de l’endroit où devait se trouver le bassin, étaient déposés deux sesterces d’Antonin le Pieux qui fournissent de fait un terminus post quem à la sépulture autour du milieu du iie s. [ill. 3].

3. Mobilier de la sépulture 1094.

3. Mobilier de la sépulture 1094.

DAO X. Dubillot, C. Loiseau, Inrap

5Ces deux sépultures sont, pour le Haut-Empire, sans équivalent à Angers, et encore rares dans les Pays de la Loire (Monteil, 2004, p. 107). Par leurs différences, elles posent des questions qui sont autant d’échos aux conclusions des synthèses publiées récemment au sujet de l’inhumation des jeunes enfants durant l’Antiquité (Baills-Talbi, Blanchard, 2006 ; Blaizot, 2009 ; Bel, 2012). Ces études, qui portent sur des corpus plus importants, mettent en avant une grande diversité des pratiques funéraires.

6Sur le lieu de sépulture des jeunes enfants, on note que les sujets de la place Marengo ont été – comme c’est souvent le cas (Blaizot, 2009, p. 69) – inhumés en dehors de la nécropole qui se trouve à moins de 100 m. La tombe 1094, associée à l’occupation du bâtiment le long duquel elle est installée, offre une illustration du cas où le sujet est inhumé au plus près des lieux d’activité et de vie (Baills-Talbi, Blanchard, 2006, p. 170). Si la sépulture 1115 lui est contemporaine, sa position à l’écart du bâtiment marque aussi une différence notable. Dans cette hypothèse, la distinction de traitement entre les deux sujets peut s’expliquer par l’âge au moment du décès, qui semble bien un critère majeur dans les pratiques funéraires (Blaizot, 2009, p. 75). La sépulture 1115 peut aussi être mise en relation soit avec la phase d’occupation précédente qui correspond à l’utilisation du lieu comme dépotoir, soit avec la séquence suivante qui marque une déprise urbaine dans ce secteur. Dans les deux cas, elle apparaît plutôt comme un rejet qui expliquerait l’absence visible de soin particulier accompagnant l’inhumation. Le décès très précoce du sujet peut avoir été là aussi déterminant.

7Le choix de l’inhumation dans un coffre de bois ainsi que du dépôt d’un collier d’amulettes et de monnaies à des fins prophylactiques rapproche la tombe 1094 des cas cités par Valérie Bel (Bel, 2012, p. 193-214), qui relève l’importance des amulettes dans les tombes des enfants décédés dans les deux premières années de vie. Ce mobilier, qui traduit sans doute l’inquiétude générée par la mortalité infantile (Bel, 2012, p. 214), marque aussi vraisemblablement, dans le cas de la sépulture 1094 et de ses perles en ambre, l’appartenance sociale du sujet.

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Bibliographie

Baills-Talbi N., Blanchard P., 2006 : « Sépultures de nouveau-nés et de nourrissons du Ier âge du Fer au haut Moyen Âge découvertes hors des contextes funéraires traditionnels sur les territoires carnute, turon et biturige cube : inventaire, synthèse et interprétation », in Ensembles funéraires gallo-romains de la Région Centre I, Tours, FÉRACF (coll. Suppl. à la Revue archéologique du centre de la France, 29), p. 157-205.

Bel V., 2012 : « Les dépôts de mobilier dans les tombes d’enfants et d’adolescents en Gaule narbonnaise au Haut-Empire », in Centre Camille-Jullian (éd.), L’enfant et la mort dans l’Antiquité. III. Le matériel associé aux tombes d’enfants, Arles, éd. Errance (coll. Bibliothèque d’archéologie méditerranéenne et africaine, 12), p. 193-216.

Blaizot F. (dir.), 2009 : « Pratiques et espaces funéraires de la Gaule durant l’Antiquité », Gallia, 66.1, p. 69-84.

Monteil M., 2004 : « Tombes et nécropoles rurales du Haut-Empire. Un état de la recherche en Pays de la Loire », Bulletin de la Société archéologique et historique de Loire-Atlantique, t. 39, p. 93-138.

Pithon M., Cabot E., Collin G., Dubillot X., Loiseau C., Mortreau M., Nauleau J.-F., Poupon F., Simon L., 2012 : Place Marengo, aux marges de la ville antique, Angers, Maine-et-Loire, Rapport final de fouille archéologique, Inrap/SRA Pays de la Loire.

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Table des illustrations

Titre 1. Iuliomagus (Angers) ier-iiie s / 2. Place Marengo, les vestiges de la phase IVb.
Crédits 1: DAO M. Pithon, Inrap2: DAO E. Rubington, Inrap
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/archeopages/docannexe/image/521/img-1.png
Fichier image/png, 108k
Titre 3. Mobilier de la sépulture 1094.
Crédits DAO X. Dubillot, C. Loiseau, Inrap
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/archeopages/docannexe/image/521/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 2,8M
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Pour citer cet article

Référence papier

Martin Pithon, « Deux sépultures d’enfants du Haut-Empire »Archéopages, 38 | 2014, 70-71.

Référence électronique

Martin Pithon, « Deux sépultures d’enfants du Haut-Empire »Archéopages [En ligne], 38 | 2013 [2014], mis en ligne le 01 juillet 2015, consulté le 19 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/archeopages/521 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/archeopages.521

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Auteur

Martin Pithon

Inrap, responsable d’opération

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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