1. Plan d’ensemble présentant l’enceinte et les deux tumuli de l’âge du Bronze ancien de Lannion. En détail : l’entrée orientale de l’enceinte. 2. Coupe du fossé principal de l’enceinte.
Inrap
- 1 Responsable Inrap de la fouille : Julien Avinain.
1L’un des bâtiments du site de « La Grande Fosse » à Épiais-lès-Louvres (Val-d’Oise)1, appartient à la période gallo-romaine tardive (iiie-ive siècle). Des résidus carpologiques et des analyses de sol ont permis de lui supposer une fonction d’étable. Certaines observations archéozoologiques peuvent être mises en parallèle dans le but d’appuyer ces données.
2Les fosses attenantes au bâtiment 3, interprété comme une étable, ont livré des cortèges adventices riches et diversifiés, carbonisés aussi bien que minéralisés. La fossilisation des restes semble avoir eu peu de conséquences sur la composition taxinomique des ensembles. La minéralisation désigne un phénomène de remplacement des éléments organiques par une précipitation de sels minéraux et s’observe dans des milieux fortement chargés en phosphates, comme des fumiers ou des excréments. Ce mode de préservation est caractéristique des latrines. Or, dans le cas présent, dominent fortement les taxons des champs cultivés et des prairies, à l’exception de toute semence domestique ou plante alimentaire, ce qui amène à supposer qu’il s’agit de résidus de litières ou de fumiers. Il est peu probable que la minéralisation d’une telle diversité d’espèces des champs et des prairies ait pu s’opérer dans des circonstances indépendantes, en dehors d’un milieu riche en déjections. Ils renvoient donc à l’ingestion de fourrages ou de plantes directement prélevées dans des espaces pâturés par des animaux d’élevage.
3La flore des parcelles céréalières compte plus de 20 espèces. Les espèces de prairies et pâturages sont encore plus diversifiées avec le scirpe des marais, les fétuques, lierres terrestres, poacées diverses, pâturins, fléole, boucage, brunelle commune, menthes, patiences, stellaire, trèfles divers, vesces et gesses. La composition des cortèges floristiques, s’il s’agit effectivement de fumier de grand bétail, évoque le pâturage en prairies et dans des zones de friches ou de jachères proches des champs. La diversité des adventices des cultures suggère aussi la possibilité que des sous-produits de nettoyage des grains ou des stocks non traités aient été donnés en complément alimentaire au bétail.
4L’importance de l’élevage sur le site suggère une gestion pour recueillir facilement le fumier, afin d’améliorer ou de maintenir la fertilité des parcelles cultivées. La prédominance du blé tendre, espèce céréalière la plus exigeante du point de vue agronomique, a certainement justifié de telles pratiques. Plusieurs espèces de graminées sont caractéristiques des sols siliceux et pourraient être indicatrices de sols plus pauvres exploités en prairies. La présence d’espèces nitrophiles (mouron rouge, ballote, renouée liseron, bardanes, patience crépue, lierre terrestre, véroniques, orties) montrent un possible amendement des champs (Jauzein, 1995). Une mise en stabulation du bétail ou son parcage au sein de corrals pouvait faciliter le rassemblement du fumier, même si les bâtiments testés n’ont pas tous révélé des concentrations de phosphates évocatrices de telles pratiques. L’hypothèse a cependant été retenue pour le bâtiment 3.
5L’apport de l’archéozoologie dans l’identification des bâtiments d’élevage demeure limité à de rares cas : présence importante de dents de lait sur un sol conservé, ensemble anatomique entier d’animaux périnataux ou juvéniles retrouvé à proximité. Sur le site d’Épiais- lès-Louvres « La Grande fosse », les fosses attenantes au bâtiment 3 ont livré du matériel osseux animal, mais il s’agit de déchets alimentaires (traces de découpe) qui n’aident pas à identifier la fonction du bâtiment 3. Les indications d’élevage sont donc à chercher à l’échelle du site global. L’étude archéozoologique effectuée pour cette période a montré une dominance de la triade domestique bœuf, porc, capriné, sans majorité écrasante de l’une des espèces. Les restes osseux sont surtout liés à la consommation, ce qui tend à démontrer que les carcasses n’étaient pas traitées sur le site. Les animaux n’auraient pas été produits in situ en sorte que les habitants auraient été des consommateurs plutôt que des producteurs des animaux de cette triade.
6Cependant, la part très importante des équidés dépasse largement la moyenne des sites ruraux (Lepetz, 1996). Les restes ne présentent pas de traces de découpes liées à une consommation. Ce fort taux a donc été rapproché d’une activité d’élevage sur le site. La présence de deux squelettes entiers de chevaux mâles, dans une fosse éloignée du bâtiment 3, conforte ce raisonnement. La datation de cette structure (période gallo-romaine tardive) demeure incertaine. Les individus découverts étant particulièrement grands et robustes, on peut envisager, dans le cas où il s’agirait bien d’animaux gallo-romains, un élevage de chevaux de qualité. Une population de dimension plus modeste ayant été mise en évidence, il pourrait hypothétiquement s’agir d’animaux importés pour améliorer la population équine indigène.
7Ainsi, si les données archéozoologiques n’ont pas permis d’apporter de nouvelles preuves quant à l’identification du bâtiment 3, elles ont cependant mis en évidence la présence d’un important élevage équin sur le site. Il est donc envisageable que le bâtiment 3 ait pu servir pour leur parcage.