1Dans un paysage de falaises calcaires entrecoupées de conches et de baies sableuses à vaseuses, le village de Barzan-Plage se situe en rive droite de l’estuaire de la Gironde, sur la frange littorale de la baie de Chandorat d’orientation nord-ouest/sud-est [ill. 1].
1. Configuration géographique actuelle de la baie de Chant-Dorat à Barzan-Plage, en Charente-Maritime.
À marée basse, la zone intertidale laisse apparaître un estran vaseux (slikke), colonisé en partie haute par une végétation halophile (schorre) ennoyée par les plus hautes pleines mers de vives-eaux. Seuls des enrochements artificiels protègent des marées les zones poldérisées sur le domaine marécageux.
Cliché : Karine Georges, Inrap.
- 1 Les plus hautes mers de vives-eaux (coefficient de marée 120) atteignent la cote de 2,49 m NGF à Ri (...)
2En janvier 2010, la réalisation d’un diagnostic archéologique, à environ 50 m au nord-est du trait de côte actuel et quelques centaines de mètres au sud-ouest d’un secteur sensible de l’agglomération antique de Barzan, a mis en évidence une séquence stratigraphique incluant deux principaux corps sédimentaires [ill. 2]. À la cote de 2,25 m NGF, en fond de sondage, apparaît un faciès sablo-graveleux à débris coquilliers, galets et léger litage subhorizontal révélant le sommet d’un cordon littoral de haute mer dont l’extension et l’amplitude restent à déterminer. En recouvrement, une sédimentation homogène limono-argileuse de teinte gris foncé à brune, au sein de laquelle s’intercale une couche de sables grossiers coquilliers (laisse de tempête ?), repose en discordance et marque la présence d’un estran vaseux (haute slikke – partie inférieure de l’estran – puis schorre – niveaux les plus élevés des marais salés ?)1. Ces dépôts sommitaux, affectés par une légère évolution pédogénétique (structure polyédrique, brunification), ont été tronqués dans les années 1980 par la construction d’un complexe aquatique. Ces variations de faciès montrent donc un changement brutal des apports détritiques impliquant une modification des processus morphogéniques dans cette baie. Ces résultats préliminaires laissent entrevoir des perspectives de recherche essentielles sur les variations relatives du niveau marin au cours de l’Holocène et l’évolution paléo-environnementale de ces zones basses en vue d’une meilleure compréhension de l’implantation humaine dans ces secteurs.
2. Référentiel stratigraphique de la séquence sédimentaire fluvio-marine enregistrée sur le site archéologique du 2 rue de la Plage à Barzan-Plage.
Dessin : Karine Georges, Inrap.
- 2 Prospections électromagnétiques et électriques réalisées par ULR Valor et le Centre littoral de géo (...)
3En 2006 et 2007, des campagnes de prospections géophysiques2 ont révélé en contrebas du site antique du Fâ, sur l’actuel marais de Chandorat – d’une superficie de 25 ha –, une baie étroite qui pénètre de près d’un kilomètre à l’intérieur des terres (Mathé, 2009) [ill. 3]. L’apparition d’un fort contraste entre une zone humide profonde et les assises crétacées campaniennes sub-affleurantes (marnes, calcaires à silex) a permis de matérialiser un paléo-trait de côte antérieur au colmatage postglaciaire de cette ria, dont l’accès sur l’estuaire serait large d’environ 500 m. Cette configuration géographique et la reconnaissance ancienne de vestiges archéologiques confèrent donc à ce lieu un emplacement favorable à la présence d’un port et suscitent de nombreuses interrogations quant à son positionnement.
3. Reconstitution par prospection électromagnétique d’un paléotrait de côte délimitant une baie étroite [4] au sud de l’agglomération antique de Barzan : entrepôts [1], temple circulaire [2], thermes [3], flèche sableuse [5].
DAO : Mathé, 2009.
4À l’aide de prospections électriques, effectuées sur une zone plus restreinte de 6 ha, des indices de bâtiments ont néanmoins été mis en évidence en bordure de ce paléo-rivage. Deux d’entre eux se caractérisent par des dimensions remarquables, affichant des longueurs de près de 100 m et des largeurs comprises entre 10 et 25 m [ill. 4]. Ces édifices longitudinaux sont implantés selon un axe parallèle au trait de côte restitué. À cela s’ajoutent des bandes résistantes rectilignes et un empierrement massif de 10 m de côté. Ces observations témoignent de l’urbanisation de ce secteur sud de l’agglomération, partiellement reconnue en prospection aérienne (Dassié, 1975). Toutefois, aucune confirmation archéologique n’atteste, à l’heure actuelle, l’hypothèse d’un port relié à l’agglomération antique du Fâ.
4. Trois édifices maçonnés [6, 7, 8] à proximité de la zone portuaire ( ?) repérés par prospection électrique.
DAO : Mathé, 2009.
5L’ensemble de ces problématiques géo-archéologiques sera donc à aborder au sein du Pcr BaLiZ, qui constituera le jalon d’un cadre de recherche pluridisciplinaire portant notamment sur le contexte environnemental (sédimentologie, micropaléontologie, palynologie…) d’un secteur peu étudié, à l’exception de données clairsemées en rive droite de la Gironde sur les marais des Monards (Clavé, 2001 ; Wang et al., 1997) et de Saint-Ciers-sur-Gironde (Coquillas, 2010). Des transects nord-ouest/sud-est et amont/aval (nord-est/sud-ouest) par carottages jusqu’au toit du substratum géologique, au cœur de ce creusement préflandrien, seront indispensables à la compréhension de la mise en place de ces corps sédimentaires au sein de ce vallon périglaciaire transformé en ria lors de la dernière remontée marine, appelée transgression flandrienne, puis colmaté et ayant pu servir de zone portuaire à l’Antiquité.