Site
6 rue des Archives – 19 rue de la Verrerie
Paris IV^e
Date
Du 26 juin au 13 juillet 2018
Surface
70 m²

1Si la domestication des oiseaux est chose ancienne et bien connue, l’étude des céramiques dédiées à cette usage (boulins, nichoirs…) reste un domaine peu appréhendé par l’archéologie. La mise au jour récente de nichoirs en terre cuite dans un contexte du milieu du xvii^e siècle à Paris constitue en ce sens une découverte remarquable.

2L’identification de ces récipients n’a pas été aisée au vu de leur morphologie atypique, ce mobilier échappant en Île-de-France à tout classement typologique jusqu’à la découverte d’un ensemble de vases lors du diagnostic puis de la fouille d’un dépotoir parisien du milieu du xvii^e siècle, rue des Archives (voir l’étude « Identification de la céramique » de F. Renel dans Avinain 2017, p. 31 46 ; Renel à paraître). Ce type de nichoir est produit en pâte sableuse orangé à brune, avec une panse globulaire dotée d’un long col étroit d’un petit diamètre à l’ouverture, destiné à laisser rentrer les oiseaux [ill. 1]. Ce dernier est terminé par un ergot proéminent servant de perchoir. La base du vase présente une large ouverture de forme triangulaire, en « fer à cheval » ou carrée, taillée au couteau dans la pâte fraîche. À la base de la panse, une perforation circulaire permet l’accrochage du nichoir au mur.

1. Nichoir à oiseaux du milieu du XVII^e siècle provenant des fouilles de la rue des Archives.

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F. Renel/Inrap.

3Identifiés comme tels sur la base de modèles anglais et grâce à l’iconographie flamande, ces nichoirs apparaissent désormais de façon récurrente au sein des contextes franciliens de la période moderne et nous permettent de renouveler la connaissance à ce sujet. En effet, depuis cette découverte, le corpus s’est enrichi constamment. Le réexamen d’études anciennes a permis d’en identifier un certain nombre ainsi que trois lieux de production pour les xvi^e et xvii^e siècles. Ils figurent en effet dans les productions des ateliers 10 A et B de Fosses (Val-d’Oise) durant les deux premiers tiers du xvi^e siècle sous l’appellation erronée de « bouteilles » (Guadagnin 2007, p. 465, fig. 291) ou sont classés parmi les formes atypiques au sein de tessonnières du dernier tiers du xvi^e siècle dans le même site. Ils apparaissent en outre au sein d’une tessonnière à Mantes-la-Jolie (Yvelines), la présence de formes en pâte locale à Brie-Comte-Robert (Seine-et-Marne) suggérant une troisième aire de production. Au sein des contextes de consommation franciliens, ces nichoirs sont désormais présents de façon récurrente (Marly-la-Ville, Melun, Brie-Comte-Robert ou Rosny-sous-Bois). On retrouve par ailleurs cette forme dans l’iconographie française du xvii^e siècle. À la fin du xvii^e siècle, Nicolas II de Larmessin (1632-1694) représente, dans la gravure issue de ses « costumes grotesques » illustrant le métier de potier de terre, un nichoir identique à ceux découverts rue des Archives [ill. 2] (Larmessin 1974).

2. Gravure de N. de Larmessin figurant au niveau des genoux un nichoir identique à ceux découverts rue des Archives.

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Bibliothèque nationale de France.

4Du point de vue fonctionnel, cette forme, encore en usage dans certaines régions, était suspendue à la façade des habitations, le fond côté mur, pour faire des nichoirs à moineaux ou étourneaux accessibles. Plusieurs hypothèses coexistent quant à leur usage. À Londres, la littérature associée pointe leur usage pour l’élevage de petit passereaux de type moineau (Passer domesticus), la mention la plus ancienne notant un paiement, en date de mars 1527, pour une commande de « v sparrow pottys for the garden iijd. » et « to William Snethe… for sparrowe pottes iijd. » (Cooper 2004, p. 245). À Amsterdam, en revanche, la découverte d’une enseigne de taverne attribuée au xvii^e siècle et dénommée « in de sprevpot » (« au pot à étourneaux ») évoque sans équivoque la consommation d’étourneaux [ill. 3]. D’autres usages semblent exister : il s’agirait d’entretenir ces oiseaux dans des contextes domestiques en vue de se prémunir des insectes nuisibles. Un autre argument est invoqué dans le cas des exemples britanniques. Il semble que le développement des nichoirs ait été lié à la lutte contre la surpopulation de ces oiseaux : suite au Preservation of Grain Act de 1532, édicté par Henri VIII, une prime fut en effet versée par les marguilliers pour les centaines de têtes de moineau remis en vue d’empêcher leur prolifération (Cotter et al. 2000, p. 218).

3. Enseigne de taverne à Amsterdam intitulée « au pot à étourneaux  » associant un nichoir et la mention explicite de la consommation des volatiles.

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F. Renel/Inrap.