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AccueilNuméros49Éditorial [Vêtements]

Texte intégral

1On le sait, Homo sapiens est une espèce migrante. À partir de l’Afrique, il a gagné tous les continents et a prospéré dans presque toutes les régions du monde. C’est le seul être vivant à avoir accompli une telle odyssée et couvert d’habits spécifiques, après avoir mis le pied sur la lune, il s’apprête maintenant à explorer et occuper d’autres planètes…

2Trois facteurs principaux ont poussé les humains à se déplacer : la recherche de ressources vivrières, la croissance démographique des populations initiales, et des contraintes climatiques. Selon ces critères, tout ou partie d’une population s’est déplacée pour s’approprier un nouveau biotope ; l’exploiter et, le cas échéant, essaimer vers d’autres horizons. À la différence des animaux, qui par leurs migrations saisonnières ou leur recherche de territoires vierges doivent impérativement tenir compte du climat quand ils ne sont pas guidés par lui, l’humain a pu s’adapter à presque toutes les températures et il a su s’abriter de toutes les intempéries. Si certaines accoutumances sont d’ordre biologique et ne sont perceptibles que sur le long terme, voire sur le très long terme, d’autres, plus culturelles, révèlent d’aptitudes proprement humaines comme la construction des habitations temporaires ou durables ou la confection de vêtement.

3De fait, habits et accoutrements ne peuvent être considérés comme des objets archéologiques secondaires, ou de futiles accessoires de mode. Le vêtement est, avant tout, la démonstration la plus probante des capacités d’adaptation des humains et donc un important indicateur de la variété des cultures sur la planète et, parfois, du statut des individus ou de leur posture morale (uniforme, soutane…).

4Il n’en demeure pas moins que la conservation des habits répond à des modalités précises qui ne sont que rarement acquises sur des sites préhistoriques, antiques ou médiévaux. Dans la plupart des cas, seule la recherche d’indices et de traces indirectes permet de mettre en œuvre une archéologie du vêtement de peau ou de fourrure, de laine ou de fibres végétales.

5Si poinçons et aiguilles comptent parmi les plus anciens outils préhistoriques et peuvent être mis en relation avec l’assemblage de pièce de peaux animales, il faut attendre la Protohistoire pour reconnaitre des témoignages d’une activité textile associée à une sélection d’animaux en fonction de la qualité de leur poil ou de leur laine. Les restes de tissus ou de vêtements en cuir, les représentations figurées et la lecture des textes anciens permettent de documenter plus précisément les périodes antiques et postérieures.

6C’est le plus souvent dans des cercueils en plomb que des vêtements sont reconnus et directement associés à leur dernier propriétaire. Pour la période moderne, on a tous en tête le cas de Louise de Quengo, une noble bretonne du XVIIe siècle dont la dépouille habillée en religieuse a été retrouvée en 2014 lors des fouilles archéologiques conduites dans le couvent des Jacobins de Rennes. Pour la période médiévale, l’étude de ces cercueils découverts à la croisée du transept de Notre-Dame de Paris a révélé des fragments de tissu. Pour la période antique, c’est dans celui de Saint-Pierre de l’Estrier à Autun qu’était déposée une pièce fabriquée à l’aide de fils constitués d’une âme en matière textile autour de laquelle s’enroulent des lamelles en or [cf. illustration ci-contre] qui est probablement l’une des plus grandes pièces antiques retrouvées à ce jour.

7Ces quelques exemples pointent tout l’intérêt d’une approche pluridisciplinaire des structures funéraires les mieux conservées, et celle de la nécessité d’anticiper les mesures de stabilisation et de conservation des textiles, qui seules nous permettront de tirer le fil d’une histoire du textile qui reste encore à écrire.

Vue de détail d’un élément de tapisserie en fils d'or associé au défunt de la tombe 47 de la nécropole de Saint-Pierre-l'Estrier à Autun (IIIe au Ve siècles) en Saône-et-Loire.

Vue de détail d’un élément de tapisserie en fils d'or associé au défunt de la tombe 47 de la nécropole de Saint-Pierre-l'Estrier à Autun (IIIe au Ve siècles) en Saône-et-Loire.

RO : Carole Fossurier, Inrap ; analyse textile en cours : Fabienne Médard, Anatex ; conservation-restauration : Raphaëlle Chevallier, RCCR.

Loïc Vidal/CNRS-UHA-IS2M ; Fabienne Médard/Anatex.

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Table des illustrations

Titre Vue de détail d’un élément de tapisserie en fils d'or associé au défunt de la tombe 47 de la nécropole de Saint-Pierre-l'Estrier à Autun (IIIe au Ve siècles) en Saône-et-Loire.
Légende RO : Carole Fossurier, Inrap ; analyse textile en cours : Fabienne Médard, Anatex ; conservation-restauration : Raphaëlle Chevallier, RCCR.
Crédits Loïc Vidal/CNRS-UHA-IS2M ; Fabienne Médard/Anatex.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/archeopages/docannexe/image/15513/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 2,6M
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Pour citer cet article

Référence papier

Dominique Garcia, « Éditorial [Vêtements] »Archéopages, 49 | 2023, 2-3.

Référence électronique

Dominique Garcia, « Éditorial [Vêtements] »Archéopages [En ligne], 49 | 2023, mis en ligne le 19 décembre 2023, consulté le 18 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/archeopages/15513 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/archeopages.15513

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Auteur

Dominique Garcia

Président directeur de l’Inrap

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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