Navigation – Plan du site

AccueilNuméros2Villes et dynamiques urbaines en ...1. Croissances, politiques et pro...Développement et fragmentation d’...

Villes et dynamiques urbaines en péninsule Arabique
1. Croissances, politiques et projets

Développement et fragmentation d’une ville moyenne en cours de mondialisation : le cas de Salalah (Oman)

Development and Fragmentation of a Globalizing Secondary City: The Case of Salalah (Oman)
Steffen Wippel

Résumés

L’étude de la reconfiguration économique et spatiale actuelle de la ville de Salalah, dans le Sud du Sultanat d’Oman, invite à porter l’attention sur la problématique des « villes secondaires » arabes dans le Golfe, trop négligées ces dernières années au profit des grandes villes. Salalah n’est apparue sur la carte économique mondiale qu’après la construction de son port à conteneurs vers la fin des années 1990, port qui est en passe d’être complété par d’autres projets industriels, touristiques, infrastructurels et urbains majeurs. L’article tente de comprendre dans quelle mesure Salalah peut être conçue aujourd’hui comme une ville « en cours de mondialisation » et comment elle développe des qualités perçues comme caractéristiques des villes « postmodernes » et portuaires contemporaines. L’analyse porte enfin sur la fragmentation de l’actuelle agglomération urbaine, qui résulte de l’établissement de projets à accès limité et économiquement intégrés aux circuits mondiaux plus que locaux.

Haut de page

Texte intégral

  • 1 Voir Scharfenort, 2009 ; Dumortier et Lavergne, 2002.
  • 2 Pour une vue d’ensemble, voir Bromber et al., 2013.
  • 3 L’article résulte d’un projet de recherche mené actuellement au Zentrum Moderner Orient (ZMO) à Ber (...)
  • 4 L’usage courant a été retenu.

1Depuis quelques années, le développement des métropoles « post‑pétrolières » du Golfe, notion faisant référence aux villes multifonctionnelles, polycentriques et esthétisées basées sur les projets de diversification économique1, attire de plus en plus l’attention des chercheurs en sciences sociales2. La montée et le rayonnement de Dubaï se trouvent au centre de l’intérêt de la recherche. Jusqu’à aujourd’hui, peu de publications ont élargi leurs perspectives à la question des transformations des villes secondaires de la péninsule Arabique. À contre‑courant, cet article3 entend analyser le développement économique et la reconfiguration spatiale de la ville sud‑omanaise de Salalah (Ṣalāla4) qui, depuis la fin des années 1990, s’est transformée en fonction de divers projets économiques majeurs. L’hypothèse de départ est que la vague contemporaine de mondialisation et les politiques économiques actuelles qui s’y soumettent sont en train de rapprocher la ville de certains modèles urbains discutés dans la littérature scientifique. Il s’agit ainsi de tenter de comprendre dans quelle mesure Salalah, agglomération de plus en plus fragmentée, peut être conçue aujourd’hui comme une ville « en cours de mondialisation », et si elle développe les caractéristiques d’une « post‑métropole » et celles d’une ville portuaire contemporaine.

2Dans une première partie, Salalah sera replacée dans le débat conceptuel sur les villes contemporaines, la mondialisation de l’urbain et la fragmentation territoriale, ainsi que sur le post‑modernisme et les « ports nodaux » (hub ports). Puis, la présentation de la situation géographique et historique de Salalah montrera que cette ville fut longtemps intégrée dans des circuits mondiaux avant de tomber dans l’oubli dans un passé plus récent. Le développement urbain de l’agglomération depuis les années 1970 eut lieu avec, pour toile de fond, une politique nationale de diversification et de rééquilibrage économiques, avant de voir les activités portuaires et industrielles se développer à partir de la fin des années 1990. Deux autres parties présenteront l’essor touristique de Salalah et de ses alentours, ainsi que l’expansion de l’infrastructure de transport terrestre et aérien en cours, afin d’interroger les conséquences spatiales et la fragilité de ces évolutions.

Approches de la ville moyenne contemporaine en cours de mondialisation et de fragmentation

  • 5 La définition suit Giddens, 1990, p. 64 et, avec référence au monde musulman, Fürtig, 2001, p. 17.
  • 6 Castells, 1998.
  • 7 Comme Sassen, 2003.

3« Mondialisation », terme polysémique et contesté, peut être conçu, dans un sens large, comme l’émergence d’interrelations et interdépendances de plus en plus étroites et rapides entre des structures et évènements locaux et lointains. Il se rapporte à un processus qui s’est renforcé depuis la fin du xxe siècle et tend à englober la planète entière5. On attribue à ce phénomène des faits importants très divers, et notamment l’amplification rapide des échanges humains, matériels et idéels. Parmi les conséquences, les analystes repèrent tout particulièrement les reconfigurations des espaces sociétaux : tandis que les uns mettent l’accent sur l’établissement de la « société en réseaux » et de l’affirmation de l’« espace des flux »6, d’autres soulignent les reterritorialisations et les réorganisations des échelles de la vie politique, économique et sociale en cours7. La mondialisation n’est donc pas sans répercussions sur le rôle et la morphologie des villes. Elle contribue à la diffusion de certains modèles urbains et pousse les villes à une insertion mondiale accrue avec toutes les conséquences qui en découlent, telles que la segmentation et la fragmentation spatiales, sociales et fonctionnelles. L’intensification du commerce et du transport, tout d’abord maritimes, renvoie au rôle important des villes et des ports comme plaques tournantes, et met en évidence la transformation de leur rapport réciproque. Outre les ports, d’autres infrastructures matérielles forment une base essentielle pour le développement de ces flux.

  • 8 Parmi les œuvres de référence, voir Friedman, 1986 ; Sassen, 2001 ; les travaux du réseau de recher (...)
  • 9 Voir aussi Krätke, 2004.
  • 10 Voir aussi Varsanyi, 2000.

4La revitalisation générale de la recherche urbaine depuis les années 1990 s’est effectuée avec, en arrière‑plan, le débat émergent sur la mondialisation, et les réflexions se sont orientées largement vers le rôle joué dans ce processus par les « villes mondiales » ou « globales »8. Celles‑ci disposent d’une position stratégique et privilégiée dans le réseau urbain transnational d’où elles commandent l’organisation des activités économiques sur l’ensemble de la planète ; souvent, elles sont plus étroitement liées aux autres centres mondiaux qu’à leurs environnements immédiats. De telles villes mondiales concentrent particulièrement les activités hautement spécialisées comme les finances, les assurances ou l’immobilier, mais elles affichent aussi leur importance au niveau mondial dans les domaines tels que les industries productrices, les réseaux de transport, la politique, le tourisme ou la culture9. L’une des conséquences de leur forte intégration dans l’économie mondiale sont les changements considérables de l’apparence physique des villes, comme l’établissement de nouveaux quartiers résidentiels et administratifs ou la dissémination des équipements de loisirs et de consommation10. Dans le même temps, ces processus de restructuration provoquent des disparités sociales et spatiales croissantes.

  • 11 Pour ces classements et leurs critères voir aussi www.lboro.ac.uk/gawc (17/07/2012) ; www.foreignpo (...)
  • 12 Voir Taylor, 2004 ; www.lboro.ac.uk/gawc (17/07/2012). Même dans ces palmarès très amples du réseau (...)
  • 13 Voir aussi Sassen, 2001, p. 347‑348.
  • 14 Voir par ex. Krätke, 2004 ; Marcuse et van Kempen, 2000 ; Stren, 2001.

5Le débat s’est longtemps concentré sur la triade de tête (Londres, New York, Tokyo), et la recherche a longtemps ignoré le rôle des villes du Sud, qui ne figurent que rarement dans les classements établis par des institutions diverses selon leurs critères respectifs11. Ainsi, parmi les villes arabes, ces classements n’attribuent régulièrement d’importance qu’au Caire et — depuis la dernière décennie — à Dubaï. Cela ne vaut pas seulement pour les listes positionnelles qui prédominent, mais aussi pour certaines analyses relationnelles des connectivités interurbaines et des « arrière‑mondes » (hinterworlds) spécifiques qui démontrent l’intégration mondiale des grandes villes12. Souvent, ces villes ne remplissent que des fonctions sélectives dans certains secteurs‑clés et sont intégrées dans des circuits très spécifiques, révélant des rayons d’influence très divers13. Finalement, on ne trouve aujourd’hui plus que des « villes en cours de mondialisation » et y contribuant elles‑mêmes, même si les intensités varient considérablement14.

  • 15 Pour les « secondary cities », notion reprise dans des publications en français, voir entre autres (...)
  • 16 Dans le double sens, par rapport aux plans national et mondial.

6Les « villes secondaires » (secondary cities)15, ou plutôt des « villes régionales » et/ou « moyennes »16, en particulier de l’hémisphère méridional, sont largement négligées, et les pays du Golfe ne font pas exception. Pourtant, ces villes représentent ici comme ailleurs une composante importante de l’urbanisation galopante. Elles constituent des éléments essentiels dans les politiques de déconcentration. Elles contribuent à alléger les pressions sociales et infrastructurelles sur les métropoles et à réduire les inégalités régionales. Elles attirent de plus en plus les migrants ruraux, mais aussi des investisseurs internationaux. Ainsi, ces centres créent des réseaux qui dépassent largement leur arrière‑pays immédiat et jouent un rôle de plus en plus important dans le déploiement des processus de mondialisation.

  • 17 Voir Taylor, 2004, p. 198 et Friedmann, 1986 respectivement.
  • 18 Voir Scholz, 2002, et 2004, p. 221‑258.
  • 19 Voir aussi, de manière similaire, Soja, 1993 et 1995.

7Le débat sur les villes mondiales en a provoqué un autre, axé quant à lui sur les rapports centre/périphérie. Plusieurs auteurs ont souligné la nécessité de reconsidérer l’idée d’un centre cohérent au niveau global qui serait opposé à une large zone périphérique : d’une part, si les villes mondiales représentent le centre, celui‑ci constitue plutôt un archipel dispersé de lieux disjoints ; d’autre part, le mélange de processus nodaux et périphériques est particulièrement visible dans les mégapoles des pays en développement17. Ainsi, Scholz renvoie au « développement fragmenté » en tant qu’effet restructurant et hétérogénéisant de la mondialisation : il se reproduit à des niveaux spatiaux divers, notamment au niveau urbain18. Selon lui, les « villes mondiales actrices » sont celles qui contribuent activement aux processus globaux. Des « villes mondiales exposées » ou « mondialisées » leur sont intimement liées, mais hiérarchiquement subordonnées. Elles concentrent les services standards et les productions délocalisées, mais aussi des industries de tourisme et de loisirs. Cependant, on observe de manière caractéristique que seuls certains « fragments » urbains — en particulier les cœurs opérationnels ou les zones franches — sont mondialement intégrés. Ils sont entourés des quartiers résidentiels de haut standing, mais de mieux en mieux protégés. Ceux‑ci sont suivis de zones industrielles étendues, d’un habitat déclassé, et, fréquemment, de zones de non‑droit qui reflètent la nouvelle périphérie mondiale de privation et de misère, déconnectée et exclue19.

  • 20 Voir Soja, 1993 et 1995.
  • 21 Soja, 2000.
  • 22 Voir aussi Stren, 2001 ; Weizman, 2007.
  • 23 Pour ces derniers aspects, voir Wippel, 2013. En raison du format requis, le présent article se con (...)

8Ce débat s’est aussi mêlé à celui portant sur le développement urbain postmoderne. Soja part de plusieurs restructurations qui, au cours des dernières décennies, ont conduit à l’émergence de la « post‑métropole »20. Ainsi, l’expansion de la production post‑fordiste est allée de pair avec la montée des secteurs des finances, des assurances et de l’immobilier. L’établissement des technopoles et des zones industrielles extra‑muros ainsi que l’émergence des « exopoles », configurations urbaines excentriques, kaléidoscopiques et discontinues, contribuent à la restructuration de la morphologie urbaine. En même temps, ces villes disposent des « hinterlands » mondiaux. Une hétérogénéisation sociale et culturelle extrême et une très forte différenciation économique et ethnique accentuent la polarisation socio‑spatiale. Ces « villes fractales »21 connaissent une privatisation aiguë de l’espace et sa fortification par des services de surveillance et des clôtures, ainsi que la multiplication des centres de commerce et de loisirs indoor22. Tout ceci a contribué à un changement radical de la représentation générale de ce que doit être une ville : Soja met en avant le rôle de la simulation ainsi que la transformation de la ville en parc à thèmes. Parallèlement, les acteurs responsables du développement et du marketing urbains ressentent de plus en plus le besoin de commercialiser leur ville afin d’atteindre une visibilité mondiale23.

  • 24 Pour les interactions port/ville cf. Ducruet, 2005a et 2005b ; Notteboom et Rodrigue, 2005 ; Kokot, (...)
  • 25 Voir plus spécifiquement Hoyle, 2000.

9Enfin, historiquement, dans les villes portuaires, les ports intra‑urbains ont constitué le principe organisateur central et ont été fortement intégrés dans l’économie et la société locales24. Depuis longtemps, ces villes étaient des nœuds marqués dans les réseaux internationaux des échanges et de la migration. Jusqu’au début du xxe siècle, villes et ports se sont généralement agrandis simultanément sous l’influence d’une industrialisation croissante et de l’intensification du commerce. Les villes portuaires, traditionnellement lieux de contacts entre gens d’origines diverses, étaient perçues comme des sources de modernité et de cosmopolitisme ; en même temps, les influences indésirables provenant des ports provoquaient des conflits sociaux et des efforts de contrôle étatique. Les besoins en surfaces de plus en plus étendues occasionnèrent une séparation fonctionnelle et spatiale croissante du port et de la ville. Les premiers ports en eau profonde furent construits à l’extérieur, mais toujours relativement près des centres villes. Puis, l’essor du commerce conteneurisé provoqua à partir des années 1960 le déplacement des activités portuaires vers des sites périphériques. Plus récemment, on transforma les anciennes zones portuaires en fronts de mer urbains, souvent au détriment des résidents établis25.

  • 26 Voir en particulier Lee et al., 2008.

10Contrairement à ces expériences occidentales, les ports coloniaux, particulièrement en Asie orientale, évoluèrent en hubs mondiaux suite à l’établissement de mégaterminaux extérieurs à la ville26. Cependant, la conservation des anciens ports de marchandises permit souvent un développement conjoint et continu des métropoles et des installations portuaires. Ainsi, plusieurs villes asiatiques réussirent à gagner des positions centrales à la fois dans les systèmes de transport et les réseaux urbains mondiaux, tandis que les villes mondiales occidentales acquirent souvent leur statut indépendamment de l’émergence des grands nœuds de transport maritime.

Situation géographique et historique de Salalah : entre intégration et isolement

  • 27 Formellement, la wilāya (province) de Salalah est considérée comme « centre du gouvernorat » (cf. O (...)
  • 28 Pour cette partie historique, voir Peterson, 2004 ; Janzen et Scholz, 1979 ; Janzen, 1980 ; Morris, (...)

11Avec environ 200 000 habitants, Salalah est la deuxième ville d’Oman et la « capitale » du Dhofar27, la région méridionale du sultanat que de vastes étendues désertiques séparent du reste du pays (fig. 4)28. Elle se distingue aussi par ses conditions naturelles, sa population et son histoire, tandis qu’elle partage beaucoup de caractéristiques topographiques et ethnolinguistiques avec les régions voisines du Yémen. La ville contemporaine occupe la plus grande partie d’une plaine longue d’environ 50 km, large de 15 km et entourée de chaînes montagneuses (fig. 1). Leurs flancs orientés vers la mer sont les seules parties de la péninsule Arabique à être touchées par le kharīf, la mousson d’été. Ce climat permet une agriculture intensive : ainsi, une bande de plantations tropicales sépare toujours les villages côtiers de l’actuel centre‑ville situé à l’intérieur.

  • 29 Voir Seland, 2008.

12Déjà dans l’antiquité, la région du Dhofar a été l’un des producteurs majeurs d’encens. Une importante voie commerciale passait par les ports de la côte où l’on embarquait la précieuse marchandise vers d’autres ports sud‑arabiques, avant de l’expédier vers les régions du nord de la péninsule Arabique. À cette époque, Moscha, situé à 40 km à l’est de l’actuelle Salalah, constituait un port majeur d’exportation bien intégré dans les circuits commerciaux de l’océan Indien et de la mer Rouge29. Autour du xiiie siècle, la ville portuaire de Ẓafār, aujourd’hui connue sous le nom d’al‑Balīd, était un autre carrefour commercial. Dans l’histoire plus récente, la commercialisation par caravanes dominait aux xviie et xviiie siècles, tandis qu’elle se réorienta vers la route maritime au début du xixe siècle, d’abord vers Djedda, puis vers l’Inde.

  • 30 Voir Janzen et Scholz, 1979, p. 515‑516 ; Janzen, 1980, p. 50‑53.
  • 31 Pour plus d’informations, voir aussi Barrault, 1999 ; The Ministry of Information and Tourism, 1974 (...)

13La dynastie omanaise actuelle, les Āl Bū Sa‘īd, annexa la région pour la première fois en 1829, mais ce n’est qu’en 1879 que la tribu la plus importante de Salalah reconnut sa suzeraineté. Vers la fin du xixe siècle, le commerce d’encens fournissait la majeure partie des revenus douaniers de l’État30. Jusque dans les années 1960, à Salalah, les activités portuaires s’effectuèrent près du palais royal, là où les navires étaient contraints de mouiller au large. Seul Raysūt, situé à quelques 15 km à l’ouest, disposait d’un petit port naturel31. Cependant, pendant toute la saison de la mousson, Salalah était complètement coupée du commerce maritime.

  • 32 Pour ce conflit, voir aussi al Hamdani, 2010 ; Janzen, 1980 ; Valeri, 2007.
  • 33 Pour ses réformes, voir également Townsend, 1977, p. 104‑109.

14Le Sultan Sa‘īd, qui régnait depuis 1932, passa une grande partie de la seconde guerre mondiale au palais de Salalah et s’y retira de manière permanente en 1958. Dans la région qu’il considérait comme son fief personnel, il exerçait l’oppression ouverte. À partir de 1965, la misère encouragea beaucoup d’habitants de cette région à la révolte armée32. Au début de l’année 1970, seule la plaine de Salalah resta sous le contrôle précaire des forces sultaniennes. Afin d’empêcher les habitants des montagnes d’entrer pour se ravitailler, le sultan fit boucler entièrement la ville à l’aide de plusieurs clôtures de barbelés. Notamment en raison de la situation qui régnait au Dhofar, Qābūs, le fils de Sa‘īd, destitua son père en 1970. Un programme de développement vigoureux se concentra sur l’établissement d’un réseau de centres de prestations sociales et administratives33. Le premier plan quinquennal national (1971–1975) avait prévu au moins un quart de ses fonds pour le Dhofar. Ces efforts socio‑économiques ainsi que le renforcement des campagnes militaires permirent finalement de défaire l’insurrection en 1975.

Le développement urbain et économique depuis les années 1970

  • 34 Pour le développement après 1970, voir notamment Wegmann, 1986 ; Scholz, 1977 ; Janzen, 1980 ; Janz (...)
  • 35 Pour les divers plans subséquents, voir MoH, 1998.

15À Salalah, qui ne comptait que quelques milliers d’habitants au début des années 1970, l’État commença par déplacer la clôture barbelée érigée pendant la guerre civile vers l’extérieur pour laisser plus de place à l’extension de la ville (voir fig. 1)34. En 1971, l’élargissement du port de Raysūt figurait parmi les premiers projets abordés. Une première zone d’ateliers industriels fut mise à disposition en 1974. L’expansion de nouvelles zones résidentielles, commerciales et industrielles put bientôt être poursuivie au‑delà de l’ancienne clôture35. La construction du nouveau port accessible par tous les temps fut achevée en 1980, ce qui lui donna un potentiel de chargement d’un million de tonnes.

Fig. 1 : Plan de l’agglomération de Salalah.

Fig. 1 : Plan de l’agglomération de Salalah.

Cartographie : Steffen Wippel, 2013 ; basée sur MoH, 1998 ; cartes touristiques de Salalah, 2009 et 2010 ; données collectées au cours des recherches sur le terrain.

  • 36 Voir MoNE, 2008 ; Lavergne, 2002 ; Pikulski, 2006.

16De façon générale, Oman ne connut un développement économique notable qu’après le début de l’exploitation du pétrole en 1967. Longtemps, les efforts se concentrèrent sur la capitale. Cependant, l’attention portée au Dhofar diminua nettement après la fin de la guerre civile si bien qu’aucun réel développement industriel n’eut lieu. Enfin, en 1995, le gouvernement adopta la « Vision Oman 2020 » pour réduire la dépendance pétrolière et pour entamer la diversification de l’économie nationale et son intégration à l’économie mondiale36. Les plans quinquennaux qui suivirent se concentrèrent, entre autres, sur le développement du secteur touristique et de l’infrastructure des transports. Les efforts fournis pour garantir une croissance plus équilibrée dans l’ensemble du sultanat ont aussi engendré un regain d’intérêt pour le développement de Salalah et de ses environs. Ces mesures aboutirent finalement à la construction d’un port maritime important ainsi qu’à la promotion du développement industriel et touristique. Toutes ces installations à vocation internationale ont été complétées par des projets relatifs à l’urbanisme (centres commerciaux, gated communities etc.) et aux infrastructures (routes, aéroport, chemin de fer).

17Sous l’impact des efforts actuels de développement, la physionomie de Salalah s’est considérablement transformée. Depuis les années 1970, on a assisté à une forte urbanisation de la plaine autour des anciens lotissements dispersés. Le nouveau port de Raysūt, situé à l’extérieur de la ville, représentait déjà une séparation fonctionnelle et spatiale. Entre temps, l’établissement des complexes industriels et touristiques en dehors du périmètre immédiat de la ville a contribué encore davantage à sa restructuration et à sa fragmentation. Le port y est devenu un principe organisateur plus important. On retrouve donc toujours un certain développement urbain arrimé à celui du port ; d’autres projets font partie de cette réorientation de la ville vers la mer.

18Depuis la fin des années 1990, Salalah connaît aussi une tendance à la claustration et à une privatisation croissante des espaces urbains. À côté des biens royaux et militaires étendus, parsemés dans l’agglomération, de nouveaux sites clôturés et surveillés ont d’abord encerclé la ville ; ils ont occupé quelques plages populaires, et empêchent des bergers d’accéder à leurs pâturages saisonniers du littoral. Très récemment, ces terrains ont commencé à envahir la ville elle‑même. Grâce à la prospérité relative du pays, ces développements ne s’accompagnent visiblement pas — sauf pour les lotissements historiques délaissés en centre‑ville — du développement de larges quartiers non réglementaires. Cependant, l’aménagement du littoral proche du centre‑ville touchera considérablement la population habitant sur place.

  • 37 Selon MoNE, 2011, tab. 2‑8.
  • 38 Pour les manifestations qui à leur apogée ont rassemblé au moins 10 000 participants à Salalah, voi (...)
  • 39 À ce sujet, voir Valeri, 2007.

19En parallèle, on observe à Salalah une hétérogénéité socio‑ethnique croissante. Traditionnellement déjà, la ville a connu un certain brassage des populations, mais aujourd’hui, la ville compte un grand nombre de travailleurs et d’experts expatriés, de même qu’elle attire beaucoup d’Omanais du Nord. En 2010, le pourcentage des étrangers a atteint 38 %, ce qui positionne Salalah nettement au‑dessus de la moyenne nationale (29 %)37. Cette présence accrue d’étrangers n’a pas encore provoqué de conflits ouverts. Mais l’insatisfaction liée aux perspectives socio‑économiques qui touche tout le pays s’est manifestée en 2011 à travers les protestations qui furent parmi les plus importantes que connut le sultanat38. Ce soubresaut protestataire s’est surtout fondé sur le sentiment persistant des habitants d’avoir été longtemps négligés par la métropole, et sur la grande distance socioculturelle entre Dhofaris et « Omanais »39. La tendance d’une partie de la population omanaise à imputer sous‑emploi et hausse des prix à la présence, notamment des Indiens, a certainement accompagné, également, ce profond mécontentement.

Établissement d’un port mondial et développement industriel à travers la zone franche

20L’intégration mondiale de Salalah se fait en particulier à travers son nouveau port à conteneurs qui établit des relations avec d’autres grands hubs mondiaux, en plus de quelques industries productrices, majoritairement orientées vers l’extérieur. Établis à la périphérie des zones d’habitat ancien de la ville, ces espaces industrialo‑portuaires, pour la plupart strictement surveillés et soumis à une juridiction spéciale, ont initié la fragmentation spatiale et fonctionnelle actuelle de l’agglomération, ainsi que sa forte extension vers l’Ouest.

21En 1996, la « Vision 2020 » entendait refaire du sultanat, ancien pouvoir maritime, un centre international de commerce. Outre Maṭraḥ, de nouveaux ports furent inaugurés à Ṣuḥār en 2004 et à Duqm en 2012. Mais le port à conteneurs de Salalah, qui avait ouvert ses portes fin 1998 sur le site de Raysūt, fut le premier projet de grande envergure40. Aux deux appontements en eau profonde initiaux, quatre autres furent ajoutés au cours des dix années suivantes ; la profondeur maximale de 18 mètres fait de Salalah l’un des rares ports capables d’accueillir les plus grands porte‑conteneurs du monde. En 2012, le trafic du port atteignit 3,7 millions EVP (équivalent vingt pieds). La construction en cours d’un second terminal augmentera la capacité à 7,5 millions, et à un horizon plus lointain encore, l’autorité du port prévoit l’élargissement à 15–20 millions EVP. Parallèlement, elle élargit aussi le port de marchandises. Depuis 2010 en particulier, le fret connaît un succès remarquable si bien que son volume approche les 7,2 millions de tonnes. L’extension du port, déjà en cours en 2013, devrait porter sa capacité à 20 millions de tonnes de fret. Un embarcadère séparé permettant d’accueillir le nombre croissant de bateaux de croisière est également en construction.

Fig. 2 : Chargement annuel de marchandises dans le port de Salalah.

Fig. 2 : Chargement annuel de marchandises dans le port de Salalah.

Sources : MoNE, 2011, tab. 12[‑1] ; www.salalahport.com/statistics.aspx (09/10/2012) ; Oman Daily Observer, 28/01/2013.

22Avec un effectif de 2300 personnes, le port compte parmi les plus importants employeurs de la région. Il a rapidement gagné en importance aux niveaux régional et mondial. Depuis 2003, il oscillait entre le 40e et le 30e rang mondial des ports à conteneurs41 ; dans l’océan Indien occidental, il est le 5e port. Par rapport à la concurrence des nombreux projets portuaires voisins, Salalah profite de la relative stabilité du pays, de l’efficacité du transbordement et de sa situation privilégiée, près de la plus importante route commerciale du monde, ce qui épargne aux navires un détour à travers le détroit d’Ormuz dans le Golfe.

  • 42 Voir par ex. Frémont, 2007 ; Lavergne, 2002, p. 141.
  • 43 Voir Heymann, 2011.

23Le port a conclu des accords avec les plus grands armateurs mondiaux de porte‑conteneurs42. Le plus important en est Mærsk Line, le plus grand opérateur de lignes à conteneurs du monde. La combinaison des connexions longue distance de point en point avec des services pendulaires pour la distribution régionale font de Salalah un de ces hubs logistiques immenses qui ne sont plus guère liés avec leur arrière‑pays. Ainsi, seulement 2 % des conteneurs qui y passent franchissent en moyenne les limites terrestres de son port, ce qui lui donne le taux de transbordement le plus élevé du monde43. On compte une trentaine de liaisons hebdomadaires uniquement avec l’Asie et l’Europe ; des services de navette relient Salalah à d’autres ports autour de l’océan Indien occidental, le Golfe et la mer Rouge. Parmi les hubs du réseau mondial de Mærsk, Salalah occupe le 5e rang, et sa société affiliée, APM Terminals, détient la plus importante part du capital (30 %) de l’opérateur portuaire.

  • 44 Voir www.peie.om (17/07/2012) ; Barrault, 1999, p. 54‑55.
  • 45 Voir aussi Pikulski, 2006, p. 227‑228.

24Le développement portuaire à Salalah est complété par des efforts de déploiement industriel. En 1992 fut inaugurée la zone industrielle de Raysūt44. L’expansion du port tout proche semble avoir aussi permis d’en stimuler l’activité. Ses industries couvrent un large éventail de l’agroalimentaire et des produits médicaux, depuis les matériaux de construction jusqu’à la commercialisation. Parmi les usines, la Raysut Cement Company, par exemple, est le premier producteur de ciment en Oman comme aux Émirats arabes unis. Elle contrôle des succursales et joint‑ventures à Ṣuḥār, en Inde, au Yémen et à Ra’s al‑Khayma45.

  • 46 Voir aussi www.sfzco.com (17/07/2012) ; MoH, 1998.
  • 47 Voir Wippel, 2010.

25Cependant le projet majeur est la Salalah Free Zone (SFZ) qui, comme le port, se veut une porte d’accès au marché de plus de 1,6 milliards de consommateurs dans les économies émergentes autour de l’océan Indien46. La première phase de cette zone franche fut complétée en 2008. Elle propose ses avantages financiers et juridiques, tout d’abord, aux entreprises multinationales qui produisent pour les marchés régionaux et mondiaux et qui doivent profiter des divers accords de libre‑échange dont Oman fait partie47. Parmi elles, un des plus grands producteurs régionaux et mondiaux du polytéréphtalate d’éthylène (PET) utilisé pour l’emballage des produits de consommation, l’entreprise américaine Octal Petrochemicals, a, entre 2010 et 2012, doublé sa capacité. En outre, Oman Oil a investi dans la Salalah Methanol Company. Parmi les autres clients internationaux de la SFZ, on compte un sous‑traitant important des industries automobiles en systèmes de freinage, un fabricant de bateaux de patrouille et de luxe, un site de traitement de soude caustique (un produit chimique important utilisé par une grande gamme d’industries) et un producteur pétrochimique. Actuellement, l’opérateur est en train de développer la deuxième phase de la zone franche devant totaliser 1900 ha. Tandis que la direction de la SFZ estime avoir créé 2200 nouveaux emplois avec la première phase, les prévisions officielles attendues pour la deuxième phase s’élèvent à 8000 postes directs supplémentaires et jusqu’à 30 000 emplois indirects.

Promotion du tourisme et projets urbains

26Le tourisme, autre secteur susceptible de renforcer la « mondialisation » de Salalah, précède les activités portuaires et productrices, mais tarde à se développer au‑delà de son rayonnement régional. Les installations plus récentes, à l’accès restreint ou qui sont même physiquement clôturées, contribuent aussi à la fragmentation de l’agglomération et à son extension, notamment vers l’Est. Cependant, de nouveaux aménagements urbains, très souvent multifonctionnels, sont en train de reconfigurer également l’intérieur de la ville.

27Depuis longtemps, Salalah était connue pour son climat agréable, notamment en plein été quand le reste de la péninsule souffre d’une chaleur impitoyable. Pour cette raison, au début des années 1980 déjà, un tourisme très limité vit le jour dans le Dhofar. Pourtant, comparé à son voisin dubaïote, Oman s’est ouvert relativement tard au tourisme international. La « Vision 2020 » nationale est la première à avoir proposé des politiques visant à encourager le développement d’un secteur touristique « de qualité ». Pour atteindre ses objectifs, le gouvernement omanais a commencé à prévoir une série de projets majeurs dans le cadre du plan quinquennal 2006–2010. La plupart des investissements étaient destinés aux « Integrated Tourism Complexes » (ITC) qui incluent plusieurs hôtels et des appartements touristiques, mais aussi des ensembles résidentiels et centres commerciaux ; aux investisseurs étrangers, ils offrent la propriété foncière à 100 % et le droit de séjour à leurs familles.

  • 48 Voir MoNE, 2011, tab. 21‑8.
  • 49 La différence entre les deux séries de données s’explique par le fait que les statistiques touristi (...)

28En 2010, le Dhofar disposait de 30 hôtels, dont 27 dans la plaine de Salalah. Le nombre de chambres s’élevait à 1759, dont 37 % dans les quatre hôtels de 4 et 5 étoiles48. Le nombre de clients accueillis dans les hôtels du gouvernorat passa de 56 000 en 1994 à 180 000 en 2010, faisant de la région la deuxième destination touristique du pays. Tandis que la part des Omanais et des citoyens d’autres pays du Golfe a diminué, celle des Européens s’élève à presque la moitié (contre un quart au niveau national). Mais ces chiffres ne prennent que partiellement en compte la deuxième saison touristique (en fait, la haute saison) que Salalah connaît grâce à la mousson. Tandis que le nombre de visiteurs pendant la mousson tournait autour de 40 000 au milieu des années 1990, il est passé en 2008 à 450 00049. À peu près deux tiers de ces visiteurs sont des Omanais, suivis par les Arabes du Golfe qui en constituent l’autre tiers. Le festival annuel du kharīf est l’évènement culturel qui attire le plus grand nombre de visiteurs de tout le pays.

Fig. 3 : Nombre annuel de touristes au Dhofar.

Fig. 3 : Nombre annuel de touristes au Dhofar.

Sources : Ministry of Housing, 1998, p. 15‑2 ; www.omantourism.gov.om (13/07/2012) ; Business Today, Juillet 2006 ; Muscat Daily, 06/10/2012. Chiffres selon disponibilité. Pour la différence ostensible entre les deux séries de données depuis 2004, voir note 49.

  • 50 Pour l’architecture éclectique de ces projets qui contribue à l’image de marque de la ville, cf. Wi (...)
  • 51 Les « boutiques‑hôtels » sont des hôtels de luxe de taille moyenne, qui se sont répandus depuis les (...)

29Le premier hôtel 5 étoiles à Salalah ouvrit ses portes vers la fin des années 1970, le second en 1999. Depuis la deuxième moitié des années 2000, plusieurs projets de villages‑vacances ont vu le jour avec pour objectif de tripler la capacité hôtelière. À l’est de la ville, Salalah Beach est dirigé, en 2012–2013, par une joint‑venture avec la société égyptienne Orascom, déjà très présente dans ce type de projets50. Sur une vingtaine de km², le projet prévoit de construire cinq hôtels 5 étoiles de 1200 chambres, deux « boutiques‑hôtels »51 et 1150 villas de luxe, ainsi qu’une marina et deux terrains de golf. Tandis que la première phase est en train de s’achever (2013), la finalisation complète du projet sera probablement étalée sur une quinzaine d’années en raison de la stagnation de la demande. Encore plus à l’est, une joint‑venture omano‑qatarie développe Mirbat Beach. Le premier hôtel balnéaire y a ouvert ses portes en 2010. L’opérateur prévoit un deuxième hôtel 5 étoiles, 1600 unités résidentielles et, entre autres, un hôpital privé et une école avec internat. À l’ouest de Salalah, des projets incluent un site touristique écologique, une station balnéaire et, plus près de la ville, un autre grand ITC luxueux qui s’étendra sur un plateau surplombant la plage.

30À l’intérieur de la ville, d’autres projets sont davantage axés sur la consommation, les loisirs et le logement, tout en s’adressant eux aussi à une clientèle touristique. Ainsi, le complexe commercial et touristique Salalah World devrait ouvrir ses portes au cours de l’année 2013 près du centre‑ville. Cet investissement koweïtien sera le premier « vrai » shopping mall de Salalah. Il renfermera des cinémas, un parc thématique et des appartements hôteliers et viendra compléter d’autres centres commerciaux et un hôtel adjacents. En 2012, une autre entreprise koweïtienne a achevé la phase initiale de la première gated community, destinée à la vente exclusive aux acquéreurs des pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG). Intégrée dans la zone franche, une zone résidentielle haut de gamme sera construite à destination de la main‑d’œuvre internationale. D’autres projets prévus incluent deux complexes hôteliers littoraux de luxe et un projet de tourisme médical international intégré. Finalement, près de l’ancien palais, le quartier d’al‑Ḥaffa sera réaménagé le long de la nouvelle corniche construite en direction du site archéologique d’al‑Balīd. Depuis quelques années déjà, les autorités envisagent le transfert de la population et le remplacement des bâtiments existants par un nouveau front de mer orienté vers le tourisme.

L’expansion d’une infrastructure de transport d’envergure transnationale

31L’établissement d’une infrastructure de transport performante constitue le soubassement matériel de la mondialisation en cours de Salalah. La connectivité croissante de la ville aux centres mondiaux et régionaux se fait essentiellement à travers son port et le trafic maritime. D’autres liaisons de transport ont aussi été développées depuis les années 1970. Depuis la fin des années 2000, l’État omanais s’efforce d’étendre le réseau existant pour encore mieux desservir les secteurs étudiés auparavant, pour l’adapter aux nouvelles formes logistiques (transports mer‑air, mer‑terre) et pour intégrer davantage la ville, notamment aux plans national et régional.

  • 52 Voir The Ministry of Information and Tourism, 1974 ; Scholz, 1977 ; Janzen, 1980, p. 174 ; Valeri, (...)
  • 53 Voir MoNE, 2011, tab. 12‑1.

32Après la prise de pouvoir par le Sultan Qābūs, l’établissement d’un réseau routier reliant les villes et régions du pays fut au centre des mesures de développement52. En 1970, il n’existait dans tout le sultanat qu’une dizaine de kilomètres de route goudronnée, entre Mascate et Maṭraḥ, tandis qu’en 2010 le réseau national s’élevait à 28 903 km53. Au Dhofar, ces efforts se concentrèrent d’abord sur le réseau urbain et l’axe littoral entre Raysūt et Ṭāqa. En 1975, la route pour Thumrayt ouvrit le premier accès macadamisé vers l’intérieur de la région, et depuis 1982, il conduit vers la capitale. Aujourd’hui, deux grands axes construits par l’État omanais continuent aussi vers l’intérieur du Yémen. En 2013, la route vers l’Est, qui doit être raccordée à celle qui longe la côte en direction du Nord, est toujours en chantier. L’État fait élargir à deux voies les routes qui mènent à Nizwā et à Mirbāṭ. Parallèlement, de grands programmes visant à améliorer le réseau intra‑urbain et régional ont été annoncés en 2010 et 2011, incluant le prolongement de la rocade urbaine et la construction de plusieurs échangeurs sur l’artère principale qui traverse la ville.

  • 54 Voir www.escwa.un.org/translinkages (08/06/2011).
  • 55 En 2012, les autorités parlent d’intégrer le tronçon Duqm–Salalah dans les premières phases du proj (...)
  • 56 Un autre projet présenté en 2008, celui du « Pont des Cornes » qui relierait la péninsule Arabique (...)

33En fin de compte, tous ces projets entendent relier le port de Salalah à son hinterland terrestre, et permettre ainsi le transport multimodal de biens. Dans une perspective régionale, le Sud omanais devra être intégré dans les réseaux trans‑arabes proposés par des organismes régionaux54. Ainsi, selon ces plans, de grandes routes relieront Salalah à l’Iraq et à la Syrie. Une ligne de chemin de fer sera construite prochainement de la frontière des E.A.U. à Mascate et Duqm ; elle devra être ultérieurement prolongée jusqu’à Salalah55 et éventuellement jusqu’au Yémen. En même temps, cette liaison devrait faire partie d’une future ligne envisagée par les pays du CCG, et qui longera le Golfe. En outre, Oman a signé des conventions pour établir des corridors de transit de la mer Baltique et de l’Asie centrale jusqu’à la mer d’Oman56.

Fig. 4 : Carte infrastructurelle et administrative d’Oman.

Fig. 4 : Carte infrastructurelle et administrative d’Oman.

Cartographie : Steffen Wippel, 2013 ; basée sur cartes touristiques d’Oman, 2007 et 2010 ; renseignements collectés au cours de la recherche. Tracés approximatifs de frontières et de routes.

  • 57 Voir www.omanairports.com (16/07/2012).
  • 58 Un vol hebdomadaire à plusieurs arrêts (al‑Ghayḍa–al‑Mukallā–Aden) pour le Yémen a été annulé en 20 (...)

34La modernisation de l’aéroport de Salalah est un autre grand projet relatif aux infrastructures57. Initialement aérodrome militaire, il fut reconverti en 1977 en aéroport civil desservi par les vols de Mascate. Depuis 2003, Salalah est une destination pour des vols internationaux. À la mi‑2012, il affichait 43 départs hebdomadaires réguliers, dont deux vols respectifs pour Dubaï, Sharja et l’Inde méridionale, à côté de trois vols d’été vers Riyad et, depuis 2005, de vols charter saisonniers en provenance de la Suède58. Si le nombre de voyageurs du second aéroport national a justement franchi les 600 000 en 2012, il a toutefois triplé depuis 2004.

Fig. 5 : Trafic annuel à l’aéroport de Salalah.

Fig. 5 : Trafic annuel à l’aéroport de Salalah.

Sources : OAMC, s.d., p. 108‑110 ; www.omanairports.com/salalah_trafficstatistics.asp (08/02/2013).

  • 59 Déjà, autour de l’année 2000, une première tentative de privatisation et de modernisation de l’aéro (...)

35Parallèlement à d’autres aéroports omanais, celui de Salalah est engagé, depuis 2010–2011, dans des travaux d’élargissement visant à accueillir le nombre croissant de passagers attendus en raison de l’expansion économique et touristique de la région. Le nouveau terminal augmentera sa capacité à un million de passagers en 2014, date officielle retenue pour son ouverture ; selon les sources officielles, il est prévu que des phases subséquentes permettent de passer de deux à six millions annuellement59. Le futur terminal de fret pourra recevoir 100 000 tonnes par an, contre seulement 1300 tonnes traitées en 2012. Conformément aux intentions de proposer du transbordement combiné mer‑air en direction de l’Europe, l’opérateur du port a signé un accord avec Oman Air en 2011.

Conclusion 

36En décentrant le regard de l’expérience prééminente de Dubaï sur la péninsule Arabique, l’étude de Salalah révèle la trajectoire spécifique d’une « ville secondaire ». En résumé, on peut constater que cette ville sud‑omanaise est en train de développer certaines caractéristiques observées par de nombreux chercheurs dans d’autres villes contemporaines sujettes aux effets de la mondialisation. Même s’il ne s’agit pas de considérer Salalah comme entièrement « mondialisée » ou « fragmentée », il est rare de trouver des parties de la ville qui ne soient pas atteintes par les circuits transnationaux, et sa fragmentation déjà amorcée se verra probablement accentuée par les projets en attente de réalisation.

37Depuis l’antiquité, la région de Salalah avait été impliquée dans des réseaux économiques mondiaux. Aujourd’hui, la ville est de nouveau bien associée aux flux inter‑ et transnationaux qui ont été renforcés au cours de la vague de mondialisation des dernières décennies. Cette insertion varie selon les secteurs et montre souvent des spécialisations régionales, comme le tourisme d’été pour les pays du Golfe, les services de cabotage pour l’Inde et l’Afrique, ou encore l’immigration pour l’Asie du Sud. C’est en particulier le port à conteneurs qui a favorisé l’intégration aux systèmes économique et urbano‑portuaires mondiaux. En tant que ville‑carrefour, Salalah est étroitement connectée à d’autres hubs qui figurent sur la liste des plus grands ports à conteneurs mondiaux, mais elle est aussi liée à plusieurs villes mondiales de premier rang. En conformité avec les secteurs présents, la ville développe donc son arrière‑monde géographique très spécifique et dispersé, plutôt en forme réticulée ou d’archipel que d’hinterlands contigus. Sa transformation en point de transit et de destination implique de multiples acteurs inter‑ et multinationaux. Le port et la zone franche en particulier, en tant que fragments urbains mondialement intégrés, contribuent peu à l’économie et à la communauté locales. La main‑d’œuvre, largement étrangère, renforce encore davantage la mondialisation de Salalah. Les sièges administratifs et les représentations officielles des entreprises présentes sont plutôt situés dans la capitale omanaise, voire à l’étranger. Comme le montrent les divers projets de développement économique, leur orientation vers l’extérieur va de pair avec leur ségrégation spatiale — souvent marquée par des contrôles d’accès ou des barrières physiques à l’entrée — contribuant ainsi à accentuer la fragmentation de l’agglomération.

  • 60 Cependant, il ne faut pas oublier l’effet Ramadan qui, depuis 2009, coïncide avec la saison tourist (...)
  • 61 Le nouvel hôtel à Mirbāṭ, par exemple, a connu en 2010–2011 un taux d’occupation d’environ 15 % et (...)
  • 62 Ainsi la Jebel Ali Free Zone Authority a abandonné l’entrée dans la gestion de la SFZ à laquelle el (...)

38Bien que Salalah ait réussi à se hisser à une position importante dans le réseau international du commerce maritime, elle ne figure à ce jour dans aucun des palmarès établis de villes mondiales. Sa situation est celle d’une « ville exposée » qui participe à la mondialisation, surtout dans le champ économique, qui y contribue et tente d’en tirer profit, sans toutefois vraiment influencer son cours ni constituer un lieu de commandement. Mais l’excessive dépendance à la conjoncture mondiale montre la précarité de son modèle extroverti de développement. Ceci est illustré par la baisse intermittente du tourisme et, quoique retardée, par celle du trafic de conteneurs, intervenues toutes deux, surtout, à la suite des crises économiques actuelles, mais aussi en raison d’autres évènements mondiaux comme la pandémie H1N1 en 2009–201060. Même si la crise économique n’a pas causé l’abandon total des projets, elle a cependant provoqué l’ajournement de certains d’entre eux, ainsi qu’elle a entravé le succès de certains autres61. La crise a particulièrement troublé l’engagement des entreprises émiraties, qui se sont retirées ou repositionnées62. En outre, Oman a commencé à réorienter encore plus ses ITCs — en fait des exopoles qui confinent aux villes —, les faisant passer de la spéculation immobilière internationale à la vente destinée au public national.

  • 63 Temporairement, les troubles ont aussi eu des répercussions négatives indirectes pour Salalah Beach (...)
  • 64 Pour le « Printemps omanais » voir Valeri, 2011 ; al Hashimi, 2011 ; Worrall, 2012.
  • 65 Pour la dissolution du ministère voir aussi par ex. Times of Oman, 8 mars 2011 ; Muscat Daily, 9 ma (...)
  • 66 Pour les difficiles relations entre Oman et les E.A.U., voir. Al‑Sayegh, 2002, et Oman Daily Observ (...)
  • 67 Déjà, le démantèlement du ministère de l’Économie a entravé l’avancement du projet de la ligne nati (...)

39Quant aux révoltes qui ont secoué le monde arabe en 2011, certains interlocuteurs affirment qu’elles auraient d’abord été plutôt profitables au tourisme occidental en Oman par un effet de détournement, mais qu’un effet négatif se serait fait sentir lors de la saison d’hiver suivante63. Dans l’ensemble, les effets à moyen‑terme du « printemps arabe » sont difficiles à évaluer64. Au sultanat, les manifestations et les mesures qu’elles ont entrainées ont tout d’abord été de portée socio‑économique. Sur le plan politique, le nouveau plan quinquennal (2011–2015) semble être largement rendu obsolète par les événements survenus en 2011, ainsi que par le démantèlement du Ministère de l’Économie Nationale65. À Salalah, la colère engendrée par des expropriations en faveur du projet Salalah Beach semble avoir joué un certain rôle pendant les manifestations. Mais, si divers nouveaux projets d’envergure locale et nationale ont été confirmés et engagés au cours de l’année suivante, l’instabilité économique, mais aussi les difficultés diplomatiques entre les E.A.U. et Oman par exemple66, ont retardé quelques‑unes des ambitions transfrontalières (comme la ligne ferroviaire du Golfe)67. Ainsi, on peut se demander dans quelle mesure les objectifs et les prévisions trop optimistes annoncés dans les médias en termes de finalisation de projets et de croissance de fret, d’emplois ou de passagers, correspondent à la réalité.

Haut de page

Bibliographie

al Hamdani I. B. S., Winning Hearts and Minds: Development as an Anti‑insurgency Weapon, The Dhofar War, Muscat, Establishment for Press, Publication & Advertising, 2010.

al Hashimi S. S., The Omani Spring: Towards the Break of a new Dawn, Arab Reform Initiative, Arab Reform Brief No. 52, s.l., 2011 (www.arab‑reform.net/IMG/pdf/Omanenglish.pdf ; 28/11/2011).

Al‑Sayigh F., “The UAE and Oman: Opportunities and Challenges in the Twenty‑First Century”, Middle East Policy, Vol. 9, No. 3, 2002, p. 124‑137.

Aniah E. J., “The Role of Secondary Cities in Regional Economic Development in Nigeria”, Journal of Environmental Sciences, Vol. 4, No. 2, 2001, p. 112‑119.

Barrault M., Regards Dhofar, Vesoul, Michel Hetier, 1999.

Beaverstock J. V., Smith R. G., Taylor P. J., “World City Network: A New Metageography?”, in Fyfe N. R., Kenny J. T. (eds.), The Urban Geography Reader, London/New York, Routledge, 2005, p. 63‑73.

Bromber K., Krawietz B., Steiner Chr. et al., “The Arab Gulf: Urban Development in the Making”, in Bromber K., Krawietz B., Steiner Chr. et al. (eds.), Under Construction: Logics of Urbanism in the Gulf Region, Farnham, Ashgate, 2013 (à paraître).

Castells M., La société en réseaux: l'ère de l’information, t. 1, Fayard, Paris, 1998.

De Boeck F., Cassiman A., Van Wolputte S., “Recentering the City: An Anthropology of Secondary Cities in Africa”, in Bakker K. A. (ed.), African Perspectives 2009. The African City: (Re)sourced, Pretoria, University of Pretoria, Department of Architecture, 2010, p. 33‑41.

Ducruet C., Dynamiques scalaires et temporelles des villes‑ports : typologie mondiale de 330 trajectoires urbano‑portuaires, 1990–2000, Communication, Septièmes Rencontres de Théo Quant, Nouvelles approches en géographie théorique et quantitative, Besançon, 2005a (halshs.archives‑ouvertes.fr/docs/00/45/94/79/PDF/C‑Ducruet‑TQ.pdf ; 04/05/2011).

Ducruet C., “Approche comparée du développement des villes‑ports à l’échelle mondiale : problèmes conceptuels et méthodologiques”, Cahiers Scientifiques du Transport, No. 48, 2005b, p. 59‑79.

Dumortier B., Lavergne M., “Doubaï : ville du pétrole ou projet métropolitain post‑pétrolier”, Annales de Géographie, Vol. 111, No. 623, 2002, p. 41‑59.

EUEuropean Union, SGPTD, Second Tier Cities in Territorial Development in Europe: Performance, Policies and Prospects, (Draft) Final Report, Liverpool, The ESPON 2013 Programme & European Institute of Urban Affairs, John Moores University, 28 février 2012.

Frémont A., “Global Maritime Networks, The Case of Maersk”, Journal of Transport Geography, Vol. 15, 2007, p. 431‑442.

Friedmann J., “The World City Hypothesis”, Development and Change, Vol. 17, No. 1, 1986, p. 69‑83.

Fürtig H., “Muslime in der Globalisierung: Wahrnehmungen und Reaktionen (Einführung)”, in Fürtig H. (Hg.), Islamische Welt und Globalisierung: Aneignung, Abgrenzung, Gegenentwürfe, Ergon, Würzburg, 2001, p. 17‑50.

Giddens A., The Consequences of Modernity, Polity Press, Cambridge, 1990.

Heymann E., Container Shipping: Successful Turnaround, Frankfurt am Main, Deutsche Bank Research, 28 mars 2011 (www.dbresearch.de/PROD/DBR_INTERNET_DE‑PROD/PROD0000000000271589.pdf ; 25/05/2011).

Hoyle B., “Global and Local Change on the Port‑City Waterfront”, Geographical Review, Vol. 90, No. 3, 2000, p. 395‑417.

Institute for Urban Strategies, The Mori Memorial Foundation, Global Power City Index 2009, Tokyo, 2009 (www.mori‑m‑foundation.or.jp/english/research/project/6/pdf/GPCI2009_English.pdf ; 26/05/2010).

Janzen J., Die Nomaden Dhofars/Sultanat Oman: Traditionelle Lebensformen im Wandel, Bamberg, Selbstverlag, Fach Geographie an der Universität Bamberg, 1980.

Janzen J., Scholz F., “Die Weihrauchwirtschaft Dhofārs (Sultanat Oman)”, in Haimayer P., Meusburger P., Penz H. (Hrsg.), Fragen geographischer Forschung, Festschrift des Instituts für Geographie zum 60. Geburtstag von Alfred Leidlmair, Innsbruck, Selbstverlag des Instituts für Geographie der Universität Innsbruck, 1979, p. 501‑541.

Kokot W., “Port Cities as Areas of Transition: Comparative Ethnographic Research”, in Kokot W., Gandelsman‑Trier M., Wildner K. et al. (eds.), Port Cities as Areas of Transition: Ethnographic Perspectives, Transcript, Bielefeld, 2008, p. 7‑23.

Krätke S., “Berlin: Stadt im Globalisierungsprozess”, Geographische Rundschau, Vol. 56, No. 4, 2004, p. 20‑25.

Lavergne M., « L’économie omanaise, de la rente pétrolière à la mondialisation », in Lavergne M., Dumortier B. (coords.), L’Oman contemporain : État, territoire, identité, Paris, Karthala, 2002, p. 115‑148.

Lee S.‑W., Song D.‑W., Ducruet C., “A Tale of Asia’s World Ports: The Spatial Evolution in Global Hub Port Cities”, Geoforum, Vol. 39, No. 1, 2008, p. 372‑385.

Marcuse P., van Kempen R. (eds.), Globalizing Cities: A New Spatial Order?, London, Cambridge, Blackwell, 2000.

MoH – Ministry of Housing, Directorate General of Housing, Dhofar Province, Sultanate of Oman, Revision of Salalah Structure Plan (1995–2015), Phase 5, Final Structure Plan, Vol. 1: Executive Summary, Muscat, National Engineering Office, 1998.

MoNEMinistry of National Economy, Sultanate of Oman, Long‑Term Development Strategy (1996–2000): Vision for Oman’s Economy (Oman 2020), [Muscat], 2008.

MoNEMinistry of National Economy, Sultanate of Oman, Statistical Yearbook 2011, Issue 39, [Muscat], 2011.

Morris M., “Dhofar: What Made it Different?”, in Pridham B. R. (ed.), Oman: Economic, Social and Strategic Developments, London, Sydney, Wolfeboro NH, Croom Helm, 1987, p. 51‑78.

Notteboom T., Rodrigue J.‑P., “Port Regionalization: Towards a New Phase in Port Development”, Maritime Policy and Management, Vol. 32, No. 3, 2005, p. 297‑313.

OAMC – Oman Airports Management Company, Airports of Oman 2010: Past Present and Prosperous Future, s.d., s.l.

Peterson J. E., “Oman’s Diverse Society: Southern Oman”, Middle East Journal, Vol. 58, No. 2, 2004, p. 254‑269.

Pikulski A., “Oman’s Economic Development”, in Kapiszewski A., Al‑Salimi A., Pikulski A. (eds.), Modern Oman: Studies on Politics, Economy, Environment and Culture of the Sultanate, Kraków, Muscat, Księgarnia Akademicka, 2006, p. 185‑244.

Rondinelli D. A., “Dynamics of Growth of Secondary Cities in Developing Countries”, Geographical Review, Vol. 73, No. 1, 1983, p. 42‑57.

Sassen S., The Global City: New York, London, Tokyo, Princeton, London, Princeton University Press, ²2001.

Sassen S., “Globalization or Denationalization?”, Review of International Political Economy, Vol. 10, No. 1, 2003, p. 1‑22.

Scharfenort N., Urbane Visionen am Arabischen Golf: Die “Post‑Oil‑Cities” Abu Dhabi, Dubai und Sharjah, Frankfurt am Main, Campus, 2009.

Scholz F., “Sultanat Oman: Ein Entwicklungsland im Südosten der Arabischen Halbinsel: Beschreibung der Entwicklung vor und nach 1970 und Versuch einer Analyse der Hintergründe und Perspektiven”, Die Erde, Vol. 108, 1977, p. 23‑74.

Scholz F.,“Die Theorie der ‘fragmentierenden Entwicklung’”, Geographische Rundschau, Vol. 54, No. 10, 2002, p. 6‑11.

Scholz F., Geographische Entwicklungsforschung: Methoden und Theorien, Berlin, Stuttgart, Gebrüder Borntraeger, 2004.

Seland E. H., “The Indian Ships at Moscha and the Indo‑Arabian Trading Circuit”, Proceedings of the Seminar for Arabian Studies, Vol. 38, 2008, p. 283‑288.

Soja E. W., “Los Angeles, eine nach außen gekehrte Stadt: Die Entwicklung der postmodernen Metropole in den USA”, in Kreibich V., Krella B., von Petz U. et al. (Hg.), Rom–Madrid–Athen: Die neue Rolle der städtischen Peripherie, Dortmund, Institut für Raumplanung, 1993, p. 213‑228.

Soja E. W.,“Postmoderne Urbanisierung: Die sechs Restrukturierungen von Los Angeles”, in Fuchs G., Molthmann B., Prigge W. (eds.), Mythos Metropole, Frankfurt am Main, Suhrkamp, 1995, p. 143‑164.

Soja E. W., Postmetropolis: Critical Studies of Cities and Regions, Oxford, Malden, Blackwell, 2000.

Stren R., “Local Governance and Social Diversity in the Developing World: New Challenges for Globalizing City‑Regions”, in Scott A. J. (ed.), Global City‑Regions: Trends, Theory, Policy, Oxford, New York, Oxford University Press, 2001, p. 193‑213.

Taylor P. J., World City Network: A global Urban Analysis, London, New York, Routledge, 2004.

The Ministry of Information and Tourism, Sultanate of Oman, Southern Region – Dhofar, s.l., 1974.

Townsend J., Oman: The Making of the Modern State, London, Croom Helm, 1977.

Valeri M., Le sultanat d’Oman : une révolution en trompe‑l’œil, Paris, Karthala, 2007.

Valeri M., The Qaboos‑State under the Test of the ‘Omani Spring’: Are the Regime’s Answers Up to Expectations? Centre d'études et de recherches internationales, [Paris], 2011 (www.ceri‑sciences‑po.org/archive/2011/septembre/dossier/art_mv.pdf ; 19/07/2012).

Varsanyi M. W.,“Global Cities from the Round up: A Response to Peter Taylor”, Political Geography, Vol. 19, 2000, p. 33‑38.

Wegmann R., “Entwicklungsplanung für Salalah”, Trialog, Vol. 7 (Juin), 1986, p. 36‑39.

Weizman E., “On Extraterritoriality”, in Agamben G., Ali T., Bauman Z. et al., Arxipèlag d’excepcions: Sobiranies de l’extraterritorialitat, Barcelona, Centre de Cultura Contemporània de Barcelona, 2007, p. 13‑20.

Wippel S., Between the Arab World and the Indian Ocean: Dimensions of Oman’s Economic Regionalisation, Working paper series No. 8, Leipzig, Graduate Centre Humanities and Social Sciences of the Research Academy Leipzig, 2010.

Wippel S., “Port and Tourism Development in Oman: Between Economic Diversification and Global Branding”, in Bromber K., Krawietz K., Steiner Chr. et al. (eds.), Under Construction: Logics of Urbanism in the Gulf Region, Farnham, Ashgate, 2013 (à paraître).

Worrall J., “Oman: The ‘Forgotten’ Corner of the Arab Spring”, Middle East Policy, Vol. 19, No. 3, 2012, p. 98‑115.

Journaux cités 

Business Today ; Muscat Daily ; Oman Daily Observer; Times of Oman.

Haut de page

Notes

1 Voir Scharfenort, 2009 ; Dumortier et Lavergne, 2002.

2 Pour une vue d’ensemble, voir Bromber et al., 2013.

3 L’article résulte d’un projet de recherche mené actuellement au Zentrum Moderner Orient (ZMO) à Berlin financé par les fonds du Ministère Fédéral de l’Éducation et de la Recherche allemande (code de référence 01UG0713). La responsabilité du contenu incombe à l’auteur.

4 L’usage courant a été retenu.

5 La définition suit Giddens, 1990, p. 64 et, avec référence au monde musulman, Fürtig, 2001, p. 17.

6 Castells, 1998.

7 Comme Sassen, 2003.

8 Parmi les œuvres de référence, voir Friedman, 1986 ; Sassen, 2001 ; les travaux du réseau de recherche Globalization and World Cities (GaWC), par ex. Taylor, 2004 ; Beaverstock et al., 2005.

9 Voir aussi Krätke, 2004.

10 Voir aussi Varsanyi, 2000.

11 Pour ces classements et leurs critères voir aussi www.lboro.ac.uk/gawc (17/07/2012) ; www.foreignpolicy.com/articles/2008/10/15/the_2008_global_cities_index (22/11/2008) ; Institute for Urban Strategies, 2009.

12 Voir Taylor, 2004 ; www.lboro.ac.uk/gawc (17/07/2012). Même dans ces palmarès très amples du réseau GaWC qui mesure l’intégration de ces villes dans le réseau urbain mondial, d’autres villes du Golfe ne se retrouvent que dans les catégories inférieures ; dans le même classement, en Oman, seule la capitale se voit attribuer le statut le plus bas de cité mondiale, et ce, seulement depuis peu.

13 Voir aussi Sassen, 2001, p. 347‑348.

14 Voir par ex. Krätke, 2004 ; Marcuse et van Kempen, 2000 ; Stren, 2001.

15 Pour les « secondary cities », notion reprise dans des publications en français, voir entre autres Rondinelli, 1983 ; Aniah, 2001 ; De Boeck et al., 2010 ; EU, 2012. La négligence relative dont elles font l’objet n’exclut pas un certain regain d’intérêt pour ce type de villes, comme c’est le cas en France au sein des universités de Clermont‑Ferrand (laboratoire CERAMAC) ou Tours (CITERES).

16 Dans le double sens, par rapport aux plans national et mondial.

17 Voir Taylor, 2004, p. 198 et Friedmann, 1986 respectivement.

18 Voir Scholz, 2002, et 2004, p. 221‑258.

19 Voir aussi, de manière similaire, Soja, 1993 et 1995.

20 Voir Soja, 1993 et 1995.

21 Soja, 2000.

22 Voir aussi Stren, 2001 ; Weizman, 2007.

23 Pour ces derniers aspects, voir Wippel, 2013. En raison du format requis, le présent article se concentre sur les aspects économiques et morphologiques du développement urbain, passant largement outre ses dimensions sociales et représentatives.

24 Pour les interactions port/ville cf. Ducruet, 2005a et 2005b ; Notteboom et Rodrigue, 2005 ; Kokot, 2008.

25 Voir plus spécifiquement Hoyle, 2000.

26 Voir en particulier Lee et al., 2008.

27 Formellement, la wilāya (province) de Salalah est considérée comme « centre du gouvernorat » (cf. Oman Daily Observer, 28 octobre 2011).

28 Pour cette partie historique, voir Peterson, 2004 ; Janzen et Scholz, 1979 ; Janzen, 1980 ; Morris, 1987.

29 Voir Seland, 2008.

30 Voir Janzen et Scholz, 1979, p. 515‑516 ; Janzen, 1980, p. 50‑53.

31 Pour plus d’informations, voir aussi Barrault, 1999 ; The Ministry of Information and Tourism, 1974 ; MoH, 1998.

32 Pour ce conflit, voir aussi al Hamdani, 2010 ; Janzen, 1980 ; Valeri, 2007.

33 Pour ses réformes, voir également Townsend, 1977, p. 104‑109.

34 Pour le développement après 1970, voir notamment Wegmann, 1986 ; Scholz, 1977 ; Janzen, 1980 ; Janzen et Scholz, 1979.

35 Pour les divers plans subséquents, voir MoH, 1998.

36 Voir MoNE, 2008 ; Lavergne, 2002 ; Pikulski, 2006.

37 Selon MoNE, 2011, tab. 2‑8.

38 Pour les manifestations qui à leur apogée ont rassemblé au moins 10 000 participants à Salalah, voir Valeri, 2011 ; Worrall, 2012.

39 À ce sujet, voir Valeri, 2007.

40 Voir particulièrement www.salalahport.com (17/07/2012) pour les données de base dans cette section. Ce projet, déjà proposé pendant la guerre irako‑iranienne, n’a pas été poursuivi alors par le gouvernement.

41 Pour les chiffres comparatifs, voir les statistiques compilées sur en.wikipedia.org/wiki/List_of_world's_busiest_container_ports (06/02/2013).

42 Voir par ex. Frémont, 2007 ; Lavergne, 2002, p. 141.

43 Voir Heymann, 2011.

44 Voir www.peie.om (17/07/2012) ; Barrault, 1999, p. 54‑55.

45 Voir aussi Pikulski, 2006, p. 227‑228.

46 Voir aussi www.sfzco.com (17/07/2012) ; MoH, 1998.

47 Voir Wippel, 2010.

48 Voir MoNE, 2011, tab. 21‑8.

49 La différence entre les deux séries de données s’explique par le fait que les statistiques touristiques ne considèrent que les hôtes dans les hôtels, tandis que seulement 15 % des visiteurs en temps de kharīf y sont hébergés, la majorité d’entre eux campant ou logeant dans des appartements privés.

50 Pour l’architecture éclectique de ces projets qui contribue à l’image de marque de la ville, cf. Wippel, 2013.

51 Les « boutiques‑hôtels » sont des hôtels de luxe de taille moyenne, qui se sont répandus depuis les années 1990 et essaient d’offrir un style de design particulier et un accueil personnel en opposition à la standardisation des grandes chaînes.

52 Voir The Ministry of Information and Tourism, 1974 ; Scholz, 1977 ; Janzen, 1980, p. 174 ; Valeri, 2007, p. 129.

53 Voir MoNE, 2011, tab. 12‑1.

54 Voir www.escwa.un.org/translinkages (08/06/2011).

55 En 2012, les autorités parlent d’intégrer le tronçon Duqm–Salalah dans les premières phases du projet. D’autres, comme le chef de la direction du port, proposent déjà une liaison directe vers l’Arabie saoudite.

56 Un autre projet présenté en 2008, celui du « Pont des Cornes » qui relierait la péninsule Arabique au continent africain, a été ajourné sans nouvelle date en 2010.

57 Voir www.omanairports.com (16/07/2012).

58 Un vol hebdomadaire à plusieurs arrêts (al‑Ghayḍa–al‑Mukallā–Aden) pour le Yémen a été annulé en 2012, tandis que Qatar Airways offre quatre vols hebdomadaires depuis mai 2013.

59 Déjà, autour de l’année 2000, une première tentative de privatisation et de modernisation de l’aéroport a échoué, avant que l’État n’en ait repris le contrôle (cf. Valeri, 2007, p. 419).

60 Cependant, il ne faut pas oublier l’effet Ramadan qui, depuis 2009, coïncide avec la saison touristique estivale et qui, lui aussi, a atténué le flux touristique.

61 Le nouvel hôtel à Mirbāṭ, par exemple, a connu en 2010–2011 un taux d’occupation d’environ 15 % et des prix extrêmement bas (entretiens avec des représentants du secteur touristique à Salalah, le 28 janvier 2012).

62 Ainsi la Jebel Ali Free Zone Authority a abandonné l’entrée dans la gestion de la SFZ à laquelle elle s’était intéressée auparavant.

63 Temporairement, les troubles ont aussi eu des répercussions négatives indirectes pour Salalah Beach, car Orascom a connu des problèmes financiers suite à la chute des revenus dans sa base égyptienne (entretien avec une représentante du secteur touristique à Mascate, le 7 février 2012).

64 Pour le « Printemps omanais » voir Valeri, 2011 ; al Hashimi, 2011 ; Worrall, 2012.

65 Pour la dissolution du ministère voir aussi par ex. Times of Oman, 8 mars 2011 ; Muscat Daily, 9 mars 2011.

66 Pour les difficiles relations entre Oman et les E.A.U., voir. Al‑Sayegh, 2002, et Oman Daily Observer, 31 janvier 2011.

67 Déjà, le démantèlement du ministère de l’Économie a entravé l’avancement du projet de la ligne nationale (Oman Daily Observer, 10 octobre 2011).

Haut de page

Table des illustrations

Titre Fig. 1 : Plan de l’agglomération de Salalah.
Crédits Cartographie : Steffen Wippel, 2013 ; basée sur MoH, 1998 ; cartes touristiques de Salalah, 2009 et 2010 ; données collectées au cours des recherches sur le terrain.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/arabianhumanities/docannexe/image/2599/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 684k
Titre Fig. 2 : Chargement annuel de marchandises dans le port de Salalah.
Crédits Sources : MoNE, 2011, tab. 12[‑1] ; www.salalahport.com/statistics.aspx (09/10/2012) ; Oman Daily Observer, 28/01/2013.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/arabianhumanities/docannexe/image/2599/img-2.png
Fichier image/png, 139k
Titre Fig. 3 : Nombre annuel de touristes au Dhofar.
Crédits Sources : Ministry of Housing, 1998, p. 15‑2 ; www.omantourism.gov.om (13/07/2012) ; Business Today, Juillet 2006 ; Muscat Daily, 06/10/2012. Chiffres selon disponibilité. Pour la différence ostensible entre les deux séries de données depuis 2004, voir note 49.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/arabianhumanities/docannexe/image/2599/img-3.png
Fichier image/png, 108k
Titre Fig. 4 : Carte infrastructurelle et administrative d’Oman.
Crédits Cartographie : Steffen Wippel, 2013 ; basée sur cartes touristiques d’Oman, 2007 et 2010 ; renseignements collectés au cours de la recherche. Tracés approximatifs de frontières et de routes.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/arabianhumanities/docannexe/image/2599/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 996k
Titre Fig. 5 : Trafic annuel à l’aéroport de Salalah.
Crédits Sources : OAMC, s.d., p. 108‑110 ; www.omanairports.com/salalah_trafficstatistics.asp (08/02/2013).
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/arabianhumanities/docannexe/image/2599/img-5.png
Fichier image/png, 131k
Haut de page

Pour citer cet article

Référence électronique

Steffen Wippel, « Développement et fragmentation d’une ville moyenne en cours de mondialisation : le cas de Salalah (Oman) »Arabian Humanities [En ligne], 2 | 2013, mis en ligne le 13 novembre 2013, consulté le 15 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/arabianhumanities/2599 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/cy.2599

Haut de page

Auteur

Steffen Wippel

Zentrum Moderner Orient (ZMO), Berlin

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-SA-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-SA 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search