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Dossier thématique
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Mobilité thérapeutique ultramarine La Réunion-Hexagone dans le cadre de traitements de haute technicité : récits d’expérience

Therapeutic overseas mobility between La Réunion and mainland France in the context of highly technical treatments: lived experience narratives
Loreley Franchina et Aline Sarradon-Eck

Résumés

À La Réunion, comme dans d’autres territoires ultramarins, les personnes qui nécessitent un traitement de haute technicité sont transférées dans des services hospitaliers hyperspécialisés de l’Hexagone. Cette mobilité thérapeutique ultramarine s’effectue à l’intérieur d’une frontière politique nationale et elle est financée par l’État français. Néanmoins, elle conduit les patient·e·s à traverser des frontières géographiques et socio-culturelles qui les éloignent de leur milieu familial, social et culturel. Cet article propose une « description dense » de plusieurs conséquences de la mobilité thérapeutique ultramarine par le récit de l’« expérience vécue » de patient·e·s. qui ont subi une allogreffe de cellules souches hématopoïétiques. Cette expérience est façonnée par les questions financières implicites à la délocalisation des soins, par les problèmes logistiques et administratifs non prévisibles ou non pensés par l’institution, par les compétences en mobilité requises, par la souffrance et le dépaysement provoqués par l’éloignement. La parentalité se révèle être un des enjeux majeurs dans le vécu du transfert sanitaire.

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Notes de l’auteur

Nous souhaitons remercier tou·te·s les patient·e·s, les aidant·e·s et les professionnel·le·s de santé qui ont pris part à cette étude. En particulier, nous remercions Marie-Noëlle Laurent, infirmière coordinatrice de greffe, pour sa précieuse collaboration ainsi que toute l’équipe du service hémato-oncologie coordonné par le docteur Patricia Zunic.

L’étude sur laquelle se base cet article a été financée par l’Institut national du cancer (INCa), dans le cadre des « Projets libre de recherche en sciences humaines et sociales, épidémiologie et santé publique » 2019 (SHSESP-19-174). Elle a reçu un avis favorable de l’Institutional Review Board de l’Inserm (IRB00003888, numéros d’avis 19-631). Pour la protection des personnes et des données, toutes les informations concernant les interlocuteur·rice·s ont été anonymisées. Tou·te·s les patient·e·s/soignant·e·s ayant participé ont donné leur consentement après avoir reçu des informations orales et écrites sur l’étude.

Texte intégral

Introduction

  • 1 Dans les contextes institutionnels, les termes « Hexagone » et « France hexagonale » sont aujourd’h (...)

1À La Réunion, comme dans d’autres territoires ultramarins, les personnes qui nécessitent un traitement de haute technicité sont transférées dans des services hospitaliers hyperspécialisés de l’Hexagone1. Cette délocalisation des soins conduit à l’éloignement du malade de son milieu familial, social et culturel. La séparation peut durer plusieurs mois, en fonction du type de traitement administré et des réactions, voire des complications, qu’il engendre. Nous avons qualifié ce type de transfert de mobilité thérapeutique ultramarine. Ce concept reprend la notion de « mobilité thérapeutique » (Kaspar et al., 2019 ; Sakoyan, 2012 ; Servy, 2022) qui est de plus en plus utilisée par les sciences sociales dans l’analyse des déplacements pour raison de santé. Préciser que la mobilité thérapeutique est « ultramarine » vise à souligner le fait qu’elle s’effectue à l’intérieur d’une frontière politique nationale et qu’elle est financée par l’État, toutefois elle amène les personnes à franchir des frontières qui ne sont pas uniquement géographiques, mais aussi sociales et culturelles.

  • 2 L’engagisme désigne une forme de migration de travail qui s’est développée en relation à l’abolitio (...)
  • 3 En matière de fiscalité par exemple pour La Réunion (taxe « octroi de mer »).

2En effet, pour rappel, La Réunion est située dans le sud-ouest de l’océan Indien, à plus de 9 000 kilomètres de l’Hexagone. Les sources historiques relatent que l’île était un territoire non habité jusqu’à son peuplement, lequel a commencé avec la colonisation française au XVIIe siècle. Outre les colons, les habitants sont arrivés sur l’île, de gré ou de force, principalement – mais pas exclusivement – de Madagascar, du Mozambique, de Chine, d’Inde. Les dynamiques du peuplement, avec les unions mixtes, ont amorcé depuis le départ un processus qui a vu l’émergence d’une société, d’une langue et d’une culture créoles (Pourchez, 2014). L’histoire de l’île est marquée par différentes phases, notamment des périodes d’esclavage et d’engagisme2 pour créer et ensuite alimenter une « société de plantation » hiérarchisée orientée vers la production de canne à sucre. Un important tournant a eu lieu à partir de la départementalisation proclamée en 1946. Le changement de statut – de colonie à département – a marqué la fin progressive de la société de plantation. Des dynamiques nouvelles se sont mises en place avec l’arrivée massive de cadres et de fonctionnaires de l’Hexagone qui ont apporté un mode de vie occidental et instauré un contrôle du monde administratif, éducatif et sanitaire (Benoist, 1983). Ainsi, la mutation de la société réunionnaise postcoloniale s’est basée sur une dualité : l’univers créole réunionnais, qui touche à l’intime, au privé, au familial et qui, en matière de santé, est souvent caractérisé par un pluralisme médical et des savoirs thérapeutiques locaux (Andoche, 1988, 1990 ; Beaulieu, 2003 ; Benoist, 1993, 2001 ; Desprès, 2011 ; Pourchez, 2000, 2002, 2005) ; et l’hégémonie des institutions françaises (Médéa, 2009), qui est représentée par une immigration hexagonale souvent ignorante de la culture locale (Benoist, 1983, 1993 ; Pourchez, 2002) et qui modèle l’espace public incluant le système de santé biomédical. La plupart des médecins spécialisés de l’île sont nés en France hexagonale et les relations entre médecins et patients sont encore empreintes de différentes formes de paternalisme (Desprès, 2011). L’accès à un monde occidental, globalisé et industriel, ne s’est pas fait en rupture mais en continuité avec le passé qui a structuré l’île (Benoist, 1983). La société réunionnaise est ainsi marquée par l’acculturation, la créolisation et des réinventions culturelles (Ghasarian, 2002). Au niveau administratif, après la départementalisation, La Réunion a acquis le statut de région en 1982, puis celui de département-région d’outre-mer (DROM) lors de la révision constitutionnelle de 2003. Ce statut implique que l’ensemble des lois et règlements souverains adopté dans la République française s’applique sur l’île, à l’exception de quelques dérogations particulières relatives au droit français d’outre-mer3 (Diémert, 2005). Malgré les profondes mutations socioéconomiques induites par la départementalisation, la société réunionnaise reste marquée par la persistance d’inégalités sociales qui se retrouvent à la fois dans son rapport à l’Hexagone – par les forts écarts qui subsistent en terme d’indicateurs de vulnérabilité – et à l’intérieur de la société réunionnaise – du fait que les groupes précarisés sont issus de milieux historiquement dominés (Roinsard, 2014).

  • 4 Sur le plan national, il existe le Registre France greffe de moelle, géré par l’Agence de la bioméd (...)

3Dans deux articles précédents (Franchina et al., 2022 ; Sarradon-Eck et al., 2024), nous avons analysé les conséquences de la mobilité thérapeutique ultramarine sur le vécu de la maladie et des traitements de personnes vivant sur l’île de La Réunion et souffrant d’une hémopathie maligne au pronostic défavorable, pour laquelle une allogreffe de cellules souches hématopoïétiques était la seule approche curative disponible. Cette allogreffe, pratiquée exclusivement dans l’Hexagone jusqu’en décembre 2021, consiste à détruire les cellules de la moelle osseuse du malade pour les remplacer par les cellules saines d’un donneur compatible – généralement un membre de la famille, ou à défaut un volontaire inscrit dans les registres internationaux4. Avant la transplantation, les malades subissent un traitement de « conditionnement » comprenant une chimiothérapie, avec ou sans radiothérapie ou une immunothérapie, afin de détruire toutes les cellules défectueuses de leur moelle osseuse et d’empêcher le rejet du greffon. L’allogreffe est clairement associée à un risque important de complications potentiellement mortelles, telles que la réaction aiguë ou chronique du greffon contre l’hôte (graft-versus-host disease, GvHD). Bien que ce traitement offre une opportunité de guérison, il est associé à des taux élevés de mortalité et de morbidité et à un risque d’échec de la greffe. En outre, la qualité de vie des malades se détériore considérablement au cours de l’allogreffe (El-Jawahri et al., 2015) ou pendant la période de post-greffe (Niederbacher et al., 2012), surtout chez les personnes qui développent une GvHD (Pidala et al., 2009). Mais même sans cette complication, l’allogreffe est une épreuve douloureuse : douleurs, fatigue très intense, inflammation importante de la muqueuse buccale et pharyngée qui empêche de se nourrir ou même de parler, surinfections, etc. De plus, pendant le traitement, les malades sont isolés en secteur protégé afin de prévenir le risque d’infection pendant une durée de quatre à six semaines. Cet isolement protecteur strict et prolongé a de nombreux effets négatifs sur les malades (Lee et al., 2011) en raison de la solitude, du manque de liberté et de la détresse psychologique qu’il implique (Biagioli et al., 2016). Après la greffe, lorsque l’état de santé des malades leur permet de sortir de l’isolement protecteur et de l’hôpital, il·elle·s doivent rester sous surveillance médicale étroite pendant une période de dix semaines, dite, dans le milieu médical, « des cent jours ». À la sortie d’hospitalisation, le suivi médical se poursuit en hôpital de jour, deux fois par semaine au début, pour évaluer l’évolution de la greffe et surveiller la survenue d’éventuelles complications (Davous, 2016). En l’absence de complications, le retour à une vie normale est très progressif et peut prendre plusieurs mois.

4Si les patient·e·s de l’Hexagone peuvent rentrer chez e·ux·lles pendant la période des « cent jours », celles et ceux de La Réunion doivent rester à proximité du centre de transplantation. Pendant cette période, il·elle·s sont hébergé·e·s par des membres de leur famille ou des ami·e·s vivant à proximité du centre de greffe, ou se rendent dans un centre d’hébergement ou dans un centre de soins de suite et de réadaptation. Qui en a les moyens peut louer un logement plus confortable à ses propres frais. Pour les malades arrivant de Mayotte et suivi·e·s à La Réunion, le transfert sanitaire est double. En effet, les personnes ne pouvant pas être soignées à Mayotte font face à un premier transfert pour être traitées à La Réunion puis à un second dans l’Hexagone afin de bénéficier de soins d’une allogreffe. La Réunion devient leur lieu de vie provisoire avant la greffe, et après leur retour de l’Hexagone pendant plusieurs mois en raison d’un suivi médical étroit. L’éloignement est particulièrement prolongé pour ceux et celles qui subissent ce double transfert sanitaire.

  • 5 Les traitements médicaux sont entièrement pris en charge par la Caisse générale de sécurité sociale (...)
  • 6 Comprise ici comme une description et une analyse qui recherchent des significations incorporées da (...)
  • 7 Au sens d’une combinaison de données (ici observations, récits des malades et leurs aidant·e·s) rel (...)
  • 8 Tous les prénoms cités dans le texte sont des pseudonymes.

5L’allogreffe est donc une réelle épreuve physique et psychologique pour toutes les personnes allogreffées. S’y ajoute, pour les ultramarin·e·s, l’épreuve de la délocalisation des soins et celle de devoir vivre pendant plusieurs mois loin de leur foyer, de leur famille et de leur environnement familial, social et culturel. Les Réunionnais·es, et notamment les jeunes, auraient un attachement sentimental fort à leur île et auraient une appréhension particulière à quitter le territoire (Labache, 2008). La mobilité thérapeutique est vécue comme une « double peine » par plusieurs des personnes interviewées dans le cadre de notre enquête, ce qui nous a amenées à nous interroger sur un droit à l’« immobilité thérapeutique » pour venir atténuer des inégalités sociales et territoriales de santé (Franchina et al., 2022). En effet, bien que la plupart des malades ultramarin·e·s reconnaissent avoir eu la chance de pouvoir bénéficier de ce traitement hyperspécialisé pouvant sauver leur vie dans l’Hexagone et que son coût ne leur incombe pas5 – contrairement à de nombreux·ses patient·e·s engagé·e·s dans des mobilités thérapeutiques transnationales (Roberts & Scheper-Hughes, 2011 ; Connell, 2015 ; Bochaton, 2015 ; Kaspar, 2019 ; Kangas, 2002) –, la mobilité thérapeutique subie peut avoir un impact délétère, à la fois psychologique et social. Nous avons décrit les conséquences négatives, psychologiques et financières, de l’éloignement, pour les malades et leurs familles, en raison des politiques de centralisation des soins analysées comme complexes dans le champ du cancer (Huguet, 2020). Nous avons montré que cette centralisation, qui a pour objectif de garantir la qualité des soins, peut accroître les disparités et contribue à perpétuer les inégalités territoriales de santé (Franchina et al., 2022). Nous avons également analysé l’influence de la distance géographique et de la séparation, avec la famille et le milieu social qu’elle implique, dans la décision du malade d’accepter ou non l’indication de traitement émise par les médecins (Sarradon-Eck et al., 2024). En nous basant sur les résultats exposés dans ces précédents articles et sur les matériaux recueillis au cours de notre étude, nous proposons une « description dense »6 (Geertz, 1998) des conséquences de la mobilité thérapeutique ultramarine par le récit de l’« expérience vécue » (Kleinman, 1988) de cette épreuve. Afin de comprendre au mieux la complexité propre à chaque situation, nous avons choisi de présenter ici trois « cas de terrain »7 (Olivier de Sardan, 2008). Le choix de ces trois situations tient, d’une part, à l’épaisseur de l’expérience incarnée dans les récits de ces trois personnes. D’autre part, chacun de ces récits permet de révéler les contraintes exogènes imposées par la délocalisation des soins qui façonnent l’expérience de la maladie et de son traitement, et de rendre visibles les conséquences de la mobilité thérapeutique ultramarine sur les malades et sur leurs proches qui ne sont pas suffisamment considérées, voire qui s’avèrent impensées, par les institutions médicales et administratives. Ainsi, le récit d’Adèle8 permet d’aborder l’enjeu que constitue le refus de soin qui peut découler du refus de l’éloignement, ainsi que le poids de l’entourage en contexte réunionnais sur l’acceptation d’une délocalisation. Celui de Sylvain décrit certaines des difficultés financières que connaissent les personnes lors de leur transfert sanitaire et met en lumière les compétences en mobilité nécessaires pour traverser l’épreuve de la délocalisation des soins. Enfin, celui de Maria-Olivia illustre la reconfiguration des rôles sociaux, et notamment des rôles parentaux, par l’épreuve de la maladie et de la mobilité subie. Ces enjeux n’éludent pas les autres questions transversales à tous les récits recueillis, telles que les conséquences financières du transfert sanitaire, les problèmes logistiques et administratifs, la souffrance et le dépaysement engendrés par l’éloignement, qui sont également évoquées dans ces trois récits et que nous avons analysées en profondeur dans nos deux précédents articles.

L’enquête

  • 9 « Regards croisés des SHS sur le recours à l’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques chez l (...)
  • 10 Dans cette étude, est considéré comme proche aidant un membre de l’entourage du malade (famille, co (...)
  • 11 La première auteure a réalisé les observations et les entretiens. Dans les récits, c’est à elle que (...)

6Les analyses présentées sont issues d’une enquête qualitative, volet anthropologique d’une étude pluridisciplinaire9 qui visait à croiser les regards en sciences humaines et sociales au sujet du recours à l’allogreffe à La Réunion. L’objectif principal du volet qualitatif de ce projet était de documenter et d’analyser les conséquences de l’éloignement géographique, à la fois sur les personnes candidates à une allogreffe et sur leurs proches aidants10. Entre février 2020 et janvier 2021, des observations ont été réalisées11 au centre hospitalier universitaire Sud de La Réunion (CHU-S) lors des « jeudis de suivi », jour où les patient·e·s ayant bénéficié d’une allogreffe ont des rendez-vous programmés de contrôle médical après leur retour sur l’île. Dans cette file active de patient·e·s, les participant·e·s ont été recruté·e·s en collaboration avec l’infirmière chargée de coordonner le processus de transfert et de suivi des patient·e·s transplanté·e·s (ICG). Les entretiens devaient être menés en personne, au domicile des patient·e·s ou dans une chambre d’hôpital, selon le choix de la personne interviewée. Cependant, la situation sanitaire liée au covid-19 survenu peu après le début de l’enquête, a nécessité de conduire quelques entretiens par téléphone et par appel vidéo. Cela a eu un impact sur la recherche car les entretiens téléphoniques ne donnent pas à l’enquêteur toutes les informations périphériques, pourtant très riches sur le langage corporel, les gestes, les expressions et le cadre de vie de la personne. De plus, certain·e·s interlocuteur·rice·s n’ont pas souhaité aborder au téléphone des sujets jugés délicats. Les entretiens ont été réalisés avec 22 personnes allogreffées (6 en distanciel), dont deux avaient subi une seconde greffe après une rechute. Parmi elles, 17 étaient Réunionnaises (nées ou ayant grandi à La Réunion, se reconnaissant dans la culture créole), 3 étaient originaires de l’Hexagone installées, depuis longtemps ou depuis peu, à La Réunion, et 2 personnes étaient en transfert de Mayotte. À part ces deux dernières, les personnes résidaient dans différents lieux de l’île, parfois à plus de 100 kilomètres du CHU-S, et avaient des profils socioéconomiques très divers. La distinction opérée entre les personnes originaires de La Réunion et celles originaires de l’Hexagone repose sur le présupposé que, d’une part, la socialisation de ces dernières les rend moins perméables aux spécificités socioculturelles de La Réunion et, d’autre part, que l’expérience du transfert sanitaire peut être différemment vécue. De plus, 23 proches aidant·e·s, désigné·e·s par les patient·e·s, ont été interviewé·e·s (8 en distanciel), dont 13 avaient accompagné le·la patient·e lors du transfert. Bien que toutes les personnes allogreffées proposées par l’ICG aient accepté volontiers de participer à l’enquête, le taux d’acceptation des proches aidants a été plus faible en raison soit d’un manque de disponibilité pour des raisons professionnelles ou de santé, soit d’un refus des personnes qui ne souhaitaient pas évoquer à nouveau leur expérience. De plus, parmi les 22 patient·e·s, six d’entre e·ux·lles n’ont pas mis l’enquêtrice en contact avec un proche aidant, pour diverses raisons, notamment un fort sentiment d’autonomie pour un patient, de sorte que le proche aidant n’était même pas mentionné. Certain·e·s patient·e·s ont cependant donné le nom de plusieurs contacts (les 23 entretiens de proches aidants concernent 16 patient·e·s).

7La majorité des entretiens ont été réalisés en français, avec quelques passages en créole. La première auteure a pris soin de traduire en français les extraits en créole lors de la transcription et d’expliquer certains termes spécifiquement créoles qui auraient pu perdre leur sens dans la traduction. L’analyse des entretiens a été conduite avec une approche inductive et itérative basée sur la méthode de codage de la théorie ancrée (Charmaz, 2014) permettant de faire émerger des catégories thématiques qui ont organisé le corpus d’entretiens.

8De plus, à des fins de triangulation des données, neuf professionnel·le·s de santé de l’hôpital Necker – hôpital parisien partenaire du CHU-S en matière d’allogreffe – ont été interviewé·e·s (en distanciel) ainsi qu’un médecin du CHU Nord de La Réunion. D’autres entretiens formels et informels ont été réalisés avec le personnel du service d’onco-hématologie du CHU-S.

Adèle : une acceptation de mobilité sous influence

  • 12 Entretien avec Adèle et sa mère, réalisé au domicile d’Adèle, La Réunion, 4 mars 2020.
  • 13 L’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques est permise grâce à un donneur. Il peut s’agir d’ (...)
  • 14 C’est une réalité lorsque les personnes greffées changent de groupe sanguin après la greffe et acqu (...)

9Adèle a 25 ans au moment de l’entretien12. De petite taille, menue, elle pourrait passer pour une adolescente au premier regard tant son sourire laisse transparaître quelque chose d’enfantin. Une impression qu’elle me confirme à travers ses propres paroles. Par l’allogreffe, Adèle s’est sentie redevenir enfant : elle dit avoir une peau en coton, les cheveux et les poils d’un bébé, des réactions et des goûts d’enfant, et a développé une passion pour les peluches. Elle explique ce retour en enfance par le fait que la greffe a été réalisée à partir du sang du cordon ombilical de deux nouveaux-nés13. Il est en effet fréquent que les personnes ayant subi une allogreffe pensent acquérir14 certaines caractéristiques physiques ou psycho-comportementales du donneur avec le processus de chimérisme (remplacement des cellules hématopoïétiques du receveur par celles du donneur). La jeune femme a été atteinte d’une première hémopathie maligne à l’âge de 4 ans, et a vécu un premier transfert sanitaire dans l’Hexagone pour y être traitée. À 19 ans, en 2014, une nouvelle leucémie se déclare. Alors que l’indication d’une allogreffe est posée par les médecins, elle exprime son souhait de ne pas partir dans l’Hexagone. Finalement, elle réagit bien au traitement par chimiothérapie administré à La Réunion et les médecins sont d’accord pour mettre une réserve sur l’indication de l’allogreffe. Or, en 2018, Adèle récidive, elle a alors 23 ans. L’allogreffe : « C’était la seule solution », lui expliquent les médecins qu’elle considère comme des membres de sa famille, ayant été suivie dans le service d’onco-hématologie depuis sa petite enfance. Elle ne veut pas subir une nouvelle chimiothérapie et surtout elle ne veut pas quitter l’île pour la procédure d’allogreffe : « Dans ma tête, c’était non ! » Elle décide finalement d’accepter mais uniquement pour sa famille : « J’ai fait la greffe pour ma mère et pour ma sœur, mais pas pour moi. » Le jour du départ, elle « fait une crise » et change d’avis. Un hémato-oncologue la rassure et parvient à la convaincre de partir à Paris, de parler sur place avec les médecins greffeurs et de prendre le temps de réfléchir. Personne, lui dit-il, ne l’obligera à faire la greffe. Rassurée par le médecin, Adèle quitte La Réunion, avec son compagnon. Une fois arrivée à Paris et après avoir échangé avec l’équipe médicale, Adèle exprime à nouveau son refus : « Je n’étais toujours pas pour. J’avais décidé de revenir à La Réunion. » « Mais ma mère m’a appelée », raconte Adèle en riant et jetant un regard complice à sa mère qui est assise à côté d’elle, « elle a insisté ». Elle lui dit : « Je respecte ton choix. Mais je ne cautionne pas ta décision. » Sa petite sœur est aussi en larmes et ne veut pas que sa grande sœur abandonne le projet de greffe. Sa mère lui propose alors : « Si je viens pour la greffe ou avant la greffe, qu’est-ce que tu fais ? Est-ce que ça pourrait changer ta décision ? » C’est ainsi que la mère d’Adèle l’a immédiatement rejointe à Paris, accompagnée par sa fille mineure. Ses moyens financiers ne lui permettant pas de couvrir l’achat de deux billets d’avion et d’un hébergement, elle doit contracter dans l’urgence un emprunt bancaire. La mère et la sœur d’Adèle restent un mois auprès d’elle mais sont obligées de rentrer sur l’île, notamment pour ne pas interrompre la scolarité de la sœur cadette. Adèle a des complications suite à la greffe et doit rester dans l’Hexagone pendant neuf mois, accompagnée par son conjoint.

10La jeune femme a donc accepté la greffe sous l’influence de sa famille : « Jusqu’à maintenant je le dis, c’est pour eux ! Et je répète : je regrette, franchement […] mais voilà c’est fait et c’est fait. Donc c’est un mal pour un bien. » Si elle devait revenir en arrière : « En sachant tout ce que j’ai passé, s’il fallait revenir en arrière et refaire la greffe, non. Non, je ne le referais pas. Si c’était peut-être à La Réunion, oui. Mais avec la distance et tout, non. Neuf mois sans ma mère […], non, je ne le referais pas », signifiant ainsi que l’épreuve de la séparation familiale a été au moins aussi importante que celle du traitement subi. La jeune femme est très reconnaissante de l’aide que son compagnon lui a apportée mais la communication dans le couple a été difficile durant la mobilité renforçant son sentiment de solitude : « Il avait pris une distance avec moi. Quand il venait me voir, il était sur son téléphone, on ne se parlait pratiquement pas. » Adèle voulait avoir le soutien de sa mère, elle qui est « très maman » et passe beaucoup de temps chez sa mère : « C’est maman le pilier. » C’est de la présence maternelle dont elle dit avoir eu besoin car sa mère est capable de rentrer « dans le cœur et dans la tête » d’Adèle et de trouver « les mots quand il fallait. Au moment précis ». La présence de son compagnon n’a pas suffi à combler l’éloignement familial, et notamment maternel, en raison de l’attachement très fort d’Adèle à sa mère. Au-delà d’une explication psychologisante de cet attachement, des études ont montré que les solidarités familiales restent très fortes à La Réunion (Klein, 2023) où l’espace de la vie familiale est plus resserré qu’ailleurs (Beaugendre et al., 2016) en raison de la fréquente proximité géographique des parents et de leurs enfants (en termes d’habitat), voire des cohabitations intergénérationnelles (Beaugendre et al., 2018). De plus, la forte importance accordée aux liens familiaux (affectifs et socio-économiques) en contexte réunionnais rend la séparation avec la famille plus difficile (Beaugendre et al., 2016).

  • 15 Tumeur bégnine développée à partir des méninges.

11Au moment de l’entretien, Adèle devait repartir dans l’Hexagone pour traiter un méningiome15 : « c’est comme la radiothérapie mais sur le cerveau ». Elle a refusé et quand les médecins lui ont demandé ses motivations, elle leur a répondu qu’elle avait très mal vécu le fait de devoir rester presqu’un an à Paris pour l’allogreffe : « C’était horrible ! » En outre, il lui fallait partir seule alors que pour la greffe elle avait pu être accompagnée : « Non ! J’ai refusé ! » Le cas d’Adèle illustre le poids de l’éloignement géographique et de l’isolement social engendré par le transfert sanitaire dans la décision du malade d’accepter ou de refuser le traitement préconisé par les médecins, comme l’ont souvent évoqué les personnes interviewées (Sarradon-Eck et al., 2024). Même si toutes n’ont pas envisagé d’abandonner le projet d’allogreffe, elles ont appréhendé d’être séparées pendant plusieurs mois de leur famille, et l’éloignement géographique a profondément marqué leur expérience du traitement et de l’hospitalisation en provoquant chez certaines, comme Adèle, une détresse psychologique. Ce n’est certes pas spécifique au contexte ultramarin : d’autres études conduites dans des territoires ruraux et isolés géographiquement en Australie (McGrath, 2006, 2015) soulignent combien l’éloignement géographique affecte l’expérience des traitements hématologiques spécialisés. En situation de mobilité thérapeutique transnationale, les malades sont également profondément affecté·e·s par l’isolement social et la séparation avec la famille et les proches (Pian, 2015 ; Pourette, 2023).

12En plus des conséquences psychologiques, l’histoire du parcours de soin d’Adèle met en lumière les conséquences économiques du transfert sanitaire sur les familles. La mère d’Adèle s’est endettée pour rejoindre sa fille à Paris afin de la rassurer, de la convaincre d’accepter le traitement et de lui apporter un soutien lors du processus de greffe. Cet endettement, mis en évidence dans les travaux sur les mobilités thérapeutiques transnationales (Kangas, 2002 ; Roberts & Scheper-Hughes, 2011 ; Connell, 2015 ; Bochaton, 2015 ; Kaspar, 2019), concerne également les patient·e·s ultramarin·e·s contraint·e·s de partir dans l’Hexagone pour y bénéficier de soins hyperspécialisés (Franchina et al., 2022).

13Ce récit souligne enfin l’influence des proches dans la prise de décision des malades. La validation de la proposition thérapeutique d’allogreffe ne se produit pas exclusivement dans l’espace clos de la consultation médicale et dans le temps court de l’échange entre le médecin et le malade. Bien que les conseils des médecins et leur pouvoir de persuasion (Patenaude et al., 1986 ; Jacoby et al., 1999 ; Sarradon-Eck et al., 2024) jouent un rôle important dans le choix du malade d’accepter la greffe, le processus décisionnel se déroule dans une configuration relationnelle qui inclut à la fois la famille et les équipes médicales (Forsyth et al., 2011).

Sylvain : difficultés financières et compétences en mobilité

  • 16 Entretien avec Sylvain réalisé au CHU Sud, La Réunion, 20 février 2020.

14Ce récit d’expérience16 de mobilité thérapeutique ultramarine est celui de Sylvain, mais pas uniquement. Il évoque aussi l’expérience de son père, l’accompagnant, bien que nous n’ayons pas pu échanger directement avec lui car il a refusé l’entretien, ne voulant plus parler de ce qui s’est passé. Sylvain accepte de livrer son témoignage mais quand les larmes montent et que je lui demande s’il a pu être accompagné par un·e psychologue, il me répond qu’il est fatigué de parler, qu’il a envie d’oublier, de penser au futur et de ne plus remuer les souvenirs douloureux, faisant ainsi écho à la réaction de son père à ma demande d’entretien. Pourtant, ce n’est pas ce qu’il dégage globalement lors de notre rencontre. Après l’enregistrement, je sens que Sylvain a encore envie de parler même s’il est visiblement gêné, il répond avec des phrases très courtes et il regarde le sol dans les moments de silence. Il dit que si l’allogreffe était à refaire, il abandonnerait, surtout à cause de la chimiothérapie et de ses nombreux effets secondaires. S’il fallait recommencer les traitements qu’il a reçus tout au long de sa vie, il choisirait de vivre sans rien faire, et même d’en mourir. Il est ému. Il se passe le bout des doigts sur la partie inférieure des yeux comme s’il essayait de stopper les larmes.

15Sylvain a trente ans au moment de l’entretien qui est réalisé un an et demi après la greffe. Il avait alors passé trois mois dans l’Hexagone pendant lesquels il a été accompagné par son père. Le transfert a commencé avec une difficulté administrative : le refus de la prise en charge de l’accompagnant malgré la préconisation des onco-hématologues. Sylvain et son père ont dû réitérer la démarche pour obtenir l’accord de la CGSS de La Réunion (voir note 5).

  • 17 Entretien avec Frédéric, patient allogreffé de 45 ans, à son domicile, La Réunion, 19 février 2020.

16Arrivés à Paris, Sylvain est accompagné à l’hôpital alors que son père est hébergé dans un foyer. Les transports de l’accompagnant dans la capitale ne sont pas pris en charge (voir note 5) et le père s’est retrouvé seul à devoir gérer ses déplacements en utilisant les transports en commun, ce qui peut s’avérer extrêmement complexe pour une personne qui, comme lui, est créolophone et analphabète et n’avait jamais quitté l’île auparavant. « C’était difficile pour lui », raconte sobrement Sylvain. Comme nous l’a confié un autre interlocuteur, Frédéric17, « [v]ous êtes largué sur Paris, vous êtes livré à vous-même » et se déplacer en bus et métro dans Paris est une « galère » qui demande d’être « débrouillard ». Le soutien que Sylvain a reçu de son père sur place a été d’une extrême importance car, dit-il, c’est dur « d’être loin de tout le monde ». Les soutiens qu’il a reçus par message et par téléphone n’ont pas aboli la distance géographique et n’ont pas remplacé la plus-value humaine de la présence : « C’est différent que la chaleur humaine. » Au moins, son père était là, parce que même si « on n’est pas très, très expressif […] on ressent quand même les choses ».

17À La Réunion, Sylvain habite avec ses parents dans un lieu connu pour son air frais, « mais ce n’est pas le même froid » que celui de Paris. Quand ils sont arrivés, « c’était la fin de l’automne, […] il faisait encore bon […], mais sur la fin c’était infernal », se rappelle-t-il. Ils n’avaient pas de vêtements d’hiver, et ils ont dû en acheter alors qu’ils étaient dans une situation financière extrêmement précaire : « On a pu acheter au moins une paire de gants et un pull, un strict minimum. » Les parents du jeune homme sont sans emploi et perçoivent le revenu de solidarité active. Quant à Sylvain, son contrat de travail s’était terminé quatre mois avant le début de la maladie. Il percevait des allocations d’aide au retour à l’emploi, mais il avait déjà épuisé ses économies quand il a reçu le diagnostic. Une semaine avant de quitter l’île, ces allocations ont pris fin. En effet, un demandeur d’emploi en situation de maladie reçoit les indemnités journalières versées par la CGSS de La Réunion, ce qui entraîne une suspension des versements des allocations chômage. Or, une malfaçon dans le dossier, un « chamboulement de papier et de paperasse », a bloqué la prise en charge de la CGSS de La Réunion, laissant Sylvain sans revenus « pendant deux mois et demi, après l’opération ». Sylvain et son père sont alors dans une grande précarité : « On n’avait pas exactement les moyens pour ces deux mois et demi », « sur la fin, c’était dur », « c’était très difficile, niveau financier ».

18Ils avaient reçu des dons de leur famille et des ami·e·s pour le départ, mais ceux-ci n’ont été suffisants que pour faire face à leurs dépenses lors du premier mois du transfert, lorsque Sylvain était hospitalisé. Après la greffe, Sylvain a rejoint son père dans le foyer, ils ont dû acheter leur alimentation quotidienne, ce qui a rapidement épuisé leurs ressources. C’est sa « copine » restée à La Réunion qui l’a aidé en organisant une cagnotte dont l’argent récolté a aidé Sylvain et son père à subvenir à leurs dépenses le dernier mois. Comptant sur la « solidarité réunionnaise » (Ève, 2013), il n’est pas rare que des Réunionnais·e·s. lancent des appels aux dons au travers de cagnottes en ligne ou sur les ondes locales (radio Free Dom), y compris dans le cadre d’une mobilité thérapeutique.

19Selon Sylvain, personne parmi le personnel hospitalier ne s’est rendu compte des difficultés financières que la famille a vécues. À Paris, il aurait dû être suivi par une assistance sociale : « On a des interlocuteurs, mais […] quand vous arrivez, [ils] ne sont pas là. » « La psychologue n’était pas là », précise-t-il. Il l’a rencontrée seulement deux jours avant son retour à La Réunion.

  • 18 À Paris, maintes personnes l’ont souligné, les transports conventionnels n’acceptent pas les bons d (...)
  • 19 Dénomination au moment de notre étude de ce qui est aujourd’hui France Travail.
  • 20 Les entretiens ont identifié des « restes à charge » : pour le·la patient·e : location de la télévi (...)

20Sylvain est peu loquace, pourtant sa souffrance et celle de son père dépassent les mots dans leur vécu de la mobilité thérapeutique où les embûches et les difficultés financières viennent s’ajouter à l’expérience de la maladie dans une situation d’éloignement géographique subie. Bien que la mobilité thérapeutique ultramarine, comme dans le cas de l’allogreffe, soit financée par l’État et que la prise en charge soit en principe complète pour le malade et partielle pour l’aidant·e (voir note 5), il persiste des décalages entre ce qui est prévu dans le « cahier des charges » et le déroulement effectif du transfert. Ces décalages sont provoqués parfois par des défaillances administratives et humaines, indépendamment de l’implication des institutions et des structures hospitalières. Ils sont aussi la conséquence, comme dans la situation de Sylvain, d’une réalité non pensée par les institutions et révélée par l’enquête de terrain. Plusieurs personnes interviewées ont dû effectuer des formalités administratives lourdes et contraignantes alors que la maladie les épuisait et était même, pour certaines, invalidante au moment du départ. Problèmes sur la prise en charge des accompagnant·e·s ou des enfants, dossiers bloqués, séparation du·de la malade et de l’accompagnant·e sur le vol La Réunion-Paris, oublis dans l’accueil du·de la patient·e à l’aéroport, refus de la part des taxis locaux des bons de transport18, aides sociales et psychologiques qui ne sont pas au rendez-vous, ne sont que certains des incidents auxquels nos interlocuteur·rice·s ont été confronté·e·s. Pour Sylvain, une de plus grandes défaillances administratives a été le relais retardé entre les administrations (Pôle Emploi19 et la CGSS de La Réunion) qui a laissé Sylvain et son père dans la plus grande précarité, sans moyens financiers pour acheter nourriture et vêtements chauds. Ainsi, en dépit d’une prise en charge théorique complète, les patient·e·s sont dans l’obligation de recourir à leurs ressources personnelles pour les dépenses additionnelles non pensées par les institutions20. Et dans les situations les plus difficiles, comme dans le cas de Sylvain, ils se voient dans l’obligation de faire appel aux dons ou encore de contracter un prêt bancaire, comme dans le cas de la mère d’Adèle.

21Ce n’est pas uniquement le capital économique qui façonne l’expérience de la mobilité thérapeutique ultramarine, le capital culturel et social joue également un rôle important (Franchina et al., 2022) permettant la recherche, le partage et la mobilisation d’informations sur le fonctionnement des institutions et des services. Ainsi, le père de Sylvain n’avait connu que son île natale avant le départ ; il ne sait ni lire, ni écrire ; il ne parle que le créole. Autant d’éléments qui le desservent dans une situation où les compétences en mobilité sont nécessaires pour s’adapter à un environnement urbain qui ne lui est pas familier, s’orienter et se déplacer dans une ville et utiliser et combiner les transports en commun. Le transfert sanitaire requiert une adaptation à de nouveaux espaces de soin et de vie (Kangas, 2010). Cette adaptation requiert un savoir en mobilité qui s’apparente au « savoir-migrer » décrit par Sakoyan (2012), et que Servy (2022), au sujet de patient·e·s de la Polynésie française, a défini comme un « savoir-être » et un « savoir-faire » particuliers.

Marie-Olivia : parentalité à l’épreuve

  • 21 D’après les entretiens réalisés au domicile de la famille de Marie-Olivia, avec elle-même, le frère (...)
  • 22 Le Frère Scubilion (1797-1867), acteur de la christianisation, est resté dans la mémoire collective (...)

22Marie-Olivia habite avec ses parents et sa fille dans un petit paradis naturel de montagne isolé. Au moment de l’entretien21, elle a 34 ans et sa fille a 6 ans. Pour arriver chez elle, il faut parcourir une route tout au long de laquelle les paysages sont époustouflants : remparts vertigineux, cascades spectaculaires, végétation luxuriante. C’est un monde à part, dans un microcosme où tout le monde se connaît. Rien n’échappe au père de Marie-Olivia, ancien agent communal à la retraite, sur ce qui se passe dans le village. Ici aucun grand bâtiment, sauf les écoles et l’église ! Des rideaux brodés ornent les fenêtres de la maison de plain-pied et le jardin est fleuri. Le carrelage fauve du salon, pièce où les visiteurs sont accueillis, est tellement propre et brillant qu’on pourrait s’y refléter. L’image du Frère Scubilion22 côtoie les portraits de famille accrochés aux murs. Dans ce cadre idyllique, la maladie semble lointaine, mais pas pour cette famille qui a dû faire le deuil de trois enfants dans le passé. La mère de Marie-Olivia se rappelle du jour où sa fille l’a appelée au téléphone : « Maman, assieds-toi, est-ce que tu es assise ? » Elle lui a répondu : « Oui, pourquoi ? » La mère a commencé à pleurer, avant d’entendre sa fille pleurer à son tour : « Maman, j’ai une leucémie ! »

  • 23 Forme de cancer qui touche toutes les cellules de la moëlle osseuse. Particulièrement grave, cette (...)

23Marie-Olivia a 32 ans quand elle commence à se « sentir tout le temps fatiguée » et « à avoir des bleus ». Plusieurs mois après le début des symptômes, elle est adressée au CHU Nord où un myélogramme est réalisé, mais rien n’est découvert, à part une carence vitaminique. Les médecins « pensaient que c’était une anorexie » parce qu’elle est « toute menue ». Après plusieurs mois et un nouveau myélogramme, les médecins posent leur diagnostic : leucémie aiguë myéloblastique23. Tout alors « s’est enchaîné assez vite », et l’indication médicale d’une allogreffe a été posée. Lors de la recherche d’un donneur, dans un premier temps à l’intérieur du cercle familial, un de ses frères a été identifié comme le proche ayant la meilleure compatibilité. Or, les médecins lui ont appris peu de temps après qu’il ne pouvait pas être le donneur : comme sa sœur, il est porteur d’une anomalie chromosomique et il est lui-même à risque de déclencher cette hémopathie maligne. Il a été mis dès lors sous stricte surveillance médicale. L’inquiétude de la famille triple : une fille malade, un fils à risque, et pas de donneur, même dans les registres internationaux : « Ça a été un coup de massue ! » Alors qu’elle n’a plus beaucoup d’espoir, Marie-Olivia apprend finalement l’identification d’un donneur.

24L’allogreffe est pour Marie-Olivia perçue comme la seule solution, malgré l’éloignement qu’elle implique : « C’était soit je reste ici [à La Réunion], je continue avec la chimio, et à un moment, on va dire que c’était… enfin, c’était la mort assurée. Ou c’était d’aller là-bas [à Paris], d’essayer. Soit on a la vie, soit on a la mort. » Elle a fait le choix « qu’il fallait pour essayer de survivre », et elle n’a pas hésité parce que « quand on a une petite fille, le choix est sûr et certain » pour se donner la possibilité de voir grandir son enfant.

  • 24 « Tu sais comment ils sont. »

25L’éloignement l’effraie : elle a peur de prendre l’avion pour la première fois en sachant que, comme le médecin l’a prévenue, il y a le risque d’échec de la transplantation et de décès ; elle appréhende de ne pas comprendre les médecins, étant principalement créolophone. Cependant, la question qui l’inquiète le plus est le devenir de sa fille, alors âgée de 4 ans. C’est l’aspect le plus difficile pour elle dans la maladie, tant sur le plan logistique, car Marie-Olivia est mère célibataire, que sur le plan émotionnel : « son plus gros tracas, c’était sa fille », confirme l’un de ses frères. Malgré la difficulté à manifester des gestes d’affection à sa sœur – « on est très proche, mais les créoles ou koné koman i lé24… on n’est pas très câlin », dit-il avec un rire gêné –, il l’a encouragée « à [s]a façon » avec le reste de la famille : « Nous lui disions de ne pas s’inquiéter, [que si] elle partait en métropole, l’autre frère, ma sœur, les parents, ils allaient bien s’occuper de la petite. »

  • 25 Selon une étude de l’Observatoire de la parentalité de La Réunion (2021), la monoparentalité représ (...)

26Après l’annonce, Marie-Olivia explique à sa fille qu’elle allait être absente pendant un certain moment pour que « les médecins » puissent « tout faire pour soigner maman, pour qu’elle puisse revenir plus en forme ». Pendant les quatre mois où Marie-Oliva est restée à Paris, dont un mois accompagnée par l’un de ses frères, ce sont les grands-parents qui se sont occupés de leur petite-fille et ont rempli un rôle de parents de remplacement avec l’aide de la fratrie25.

  • 26 Les changements physiques du malade sont importants au cours du processus de greffe (perte des chev (...)

27Lors du transfert, le plus dur pour Marie-Olivia, a été d’être « séparée de la petite pendant quatre mois, la voir que par téléphone et après pareil, pas souvent elle voulait discuter au téléphone, parce que vu mon état26 elle ne voulait pas me voir non plus », « la distance […] joue beaucoup ». En revanche, à son retour à La Réunion, les retrouvailles ont été chaleureuses et la petite fille n’a cessé de manifester de l’affection à sa mère. Cependant, l’enfant ne veut plus parler de la maladie : elle veut que sa mère « aille de l’avant », dit cette dernière, mais « de la maladie ou quoi que ce soit, on n’en parle plus ». À chaque rendez-vous de contrôle, « elle a tout le temps peur […] elle a peur des résultats, elle a peur que je reste à l’hôpital, que je sois à nouveau hospitalisée ».

28Avec le départ de Marie-Olivia, ses parents « ont eu du mal [à] se retrouver tous seuls ». C’était Marie-Olivia qui les accompagnait pour leurs démarches administratives et leurs consultations chez le médecin. C’était elle qui téléphonait aux administrations et institutions pour eux en cas de besoin. Pendant le transfert, elle n’a plus pu remplir sa fonction de fille-aidante, et les rôles se sont même inversés puisque, d’une situation où Marie-Olivia consacrait du temps à ses parents, ce sont eux qui se sont occupés d’elle et de sa fille. À son retour à La Réunion, Marie-Olivia a trouvé sa mère, âgée de 71 ans, très fatiguée : « Au niveau physique, elle était vraiment fatiguée, le visage tiré tout le temps, fatiguée. Elle avait perdu beaucoup de poids et puis elle a déclenché des stress. » Ainsi, analyser l’éloignement n’implique pas uniquement le vécu de la personne qui part, mais aussi celui des personnes qui restent, qui subissent les corollaires de son absence.

  • 27 Dans le groupe des répondants de cette étude, 14 personnes sur 22 avaient des enfants mineurs.

29L’histoire de cette jeune mère met en lumière un aspect de la logique de survie, déterminante dans la décision de consentir à l’allogreffe et au transfert sanitaire, en lien avec la parenté, et qui se résume au fait d’accepter la greffe pour ne pas laisser son enfant orphelin, malgré le risque de complications graves et d’échec du traitement. La logique de survie n’est donc pas seulement à visée personnelle – pour soi-même, pour continuer à vivre, pour guérir –, mais elle repose surtout sur la possibilité de continuer à remplir pleinement son rôle parental (Sarradon-Eck et al., 2024 ; Forsyth et al., 2011). Cette raison est évoquée presque systématiquement par les candidat·e·s à l’allogreffe ayant des enfants, en particulier en bas âge27, comme ayant été déterminante dans leur décision d’accepter la transplantation et le transfert qui s’ensuivait. Outre qu’elle est un facteur prépondérant dans la validation de la proposition thérapeutique, la parentalité est l’un des enjeux majeurs dans la mobilité thérapeutique ultramarine, notamment dans le cadre de la monoparentalité. Les parents qui quittent l’île pour un transfert sanitaire ont la possibilité d’amener les enfants dans l’Hexagone. Parmi les interviewées, deux mères célibataires ont pu partir avec leurs enfants accompagnées par la grand-mère. Cette solution permet à la patiente-mère d’avoir un rapport de proximité avec l’enfant, notamment après l’hospitalisation. Or, les transferts pour les enfants coupés de leur milieu de vie durant plusieurs mois ne sont pas toujours sans conséquences, notamment sur leur scolarité (Franchina et al., 2022). Néanmoins, la condition nécessaire est celle d’avoir un accompagnant, non seulement pour le soutien aux patient·e·s mais aussi pour prendre soin des enfants. Marie-Olivia, qui n’a pas pu bénéficier d’un accompagnant durant la totalité de son transfert, n’aurait pas pu envisager d’emmener sa fille.

30Les patient·e·s-parents d’enfants mineurs qui restent à La Réunion doivent faire face à leur propre détresse émotionnelle provoquée par la séparation avec leurs enfants, mais aussi à l’inquiétude quant à l’impact de leur absence tant sur le plan du bien-être des enfants que sur les aspects pratiques et logistiques. Ces préoccupations à l’égard des perturbations familiales provoquées par l’absence prolongée du parent malade, et la souffrance que cela induit, ne sont pas spécifiques aux patient·e·s ultramarin·e·s. Elles sont communes à tous les parents malades, mais elles sont exacerbées en contexte de mobilité thérapeutique par l’éloignement géographique, comme cela a été souligné aussi par McGrath (2015) au sujet des patient·e·s habitant des zones rurales en Australie traité·e·s pour des hémopathies malignes, ou par Pian (2015) à propos des femmes étrangères soignées en France pour un cancer. Les enfants qui restent sur l’île, à l’instar de la fille de Marie-Olivia, sont confiés à la famille proche, ce qui leur permet de continuer leurs activités dans leur environnement habituel. Comme dans d’autres situations dans lesquelles les parents ne peuvent pas prendre soin de leur progéniture en raison de maladies invalidantes, les enfants sont confiés le plus souvent à l’entourage familial, et généralement aux grands-parents (Hunt, 2018).

31Les grands-parents ne cherchent pas à jouer un rôle parental ou de soignant auprès de leurs petits-enfants, mais il·elle·s y sont contraint·e·s par la maladie de leur enfant (Park & Greenberg, 2007 ; Booys Henry et al., 2015). Le rôle de grands-parents gardiens requiert du temps et de l’énergie à un moment de la vie où les capacités de ces derniers à exercer efficacement un rôle parental peuvent être diminuées (Park & Greenberg, 2007), mais également de leur niveau socio-économique et d’éducation, de leur isolement, des maladies et invalidités, du temps écoulé depuis l’exercice de leur propre rôle parental (Hunt, 2018). De plus, les grands-parents fournissent un soutien dans un moment où il·elle·s sont eux-mêmes profondément atteint·e·s par la situation : la maladie de leur propre enfant.

32Les grands-mères jouent un rôle crucial dans la garde des enfants dans plusieurs pays, notamment quand leurs filles sont mères célibataires (Harper & Ruicheva, 2010). Jusqu’au début du XXIe siècle, le placement, durable ou définitif, de l’enfant chez la grand-mère maternelle était fréquent à La Réunion soit pour des raisons d’ordre pratique, soit liées à la tradition (Pourchez, 2004). Dans les situations où les grands-mères doivent prendre soin de leurs petits-enfants à la place des parents, elles peuvent prendre différents rôles (Harper & Ruicheva, 2010) dont celui de parent de remplacement, comme dans le cas de la mère de Marie-Olivia. Ce rôle est souvent joué pendant une période spécifique en raison de circonstances particulières jusqu’à ce que la grand-mère réintègre un rôle plus secondaire (Harper & Ruicheva, 2010).

33Cette parentalité par intérim dans le cadre de la maladie exige plus que des compétences parentales ordinaires (Hunt, 2018). Sans nier les aspects positifs que la grand-parentalité peut avoir dans certaines cultures où la garde des petits-enfants semble être un facteur protecteur pour la santé des grands-parents (Waterhouse & Bennett, 2024), plusieurs études ont mis en évidence la détresse psychologique élevée de ces derniers en situation de parentalité de remplacement (Park & Greenberg, 2007 ; Hunt, 2018 ; Booys Henry et al., 2015 ; Danielsbacka et al., 2022). Et les effets ne sont pas uniquement psychologiques, ils sont aussi physiques (Park & Greenberg, 2007). Souvent, les grands-parents subissent une dégradation de leur santé lorsqu’ils prennent le rôle de grands-parents gardien (Danielsbacka et al., 2022).

34Les problématiques familiales apparaissent au premier plan également concernant les patient·e·s arrivant de Mayotte, mais elles sont amplifiées. À situation égale, le transfert sanitaire se déroule en deux temps, et sur un temps beaucoup plus long. Dans le cas d’une allogreffe, sans complications particulières, si un habitant de La Réunion reste éloigné de son domicile pendant environ trois mois, celui de Mayotte le sera pour une durée d’environ un an et trois mois, pendant laquelle il est dans l’impossibilité de remplir pleinement son rôle parental, ce dont les patients de Mayotte interviewés disent avoir particulièrement souffert.

Conclusion

35Le transfert sanitaire n’est pas qu’une question de transport de malades nécessitant des soins médicaux non disponibles localement vers un établissement capable de fournir le niveau de soins requis. Avec la délocalisation des soins, des problématiques corollaires s’ajoutent à l’épreuve de la maladie et du traitement que toutes les personnes allogreffées traversent. Avec un sentiment partagé, qui a été souligné dans d’autres contextes (Kaspar et al., 2019), les patient·e·s sont conscient·e·s de leur droit à accéder à un traitement de haute technicité. Mais il·elle·s se sentent privé·e·s du droit d’être soigné·e·s dans un cadre rassurant incluant à la fois la plus-value humaine de l’entourage qui fournit un soutien matériel et moral essentiel au bien-être du malade, et un environnement géographique et culturel familier. Les trois personnes interviewées originaires de l’Hexagone ont donné un récit plus nuancé de leur expérience de mobilité. De même, quelques patient·e·s réunionnais·e·s disposant de ressources financières et d’un capital social leur permettant de vivre le transfert sanitaire plus confortablement ne gardent pas un souvenir aussi négatif de leur mobilité thérapeutique.

  • 28 D’autres thématiques, que nous avons soulevées ailleurs (Franchina et al., 2022), n’ont pas été dév (...)

36Les récits présentés ici ne sont qu’une fenêtre sur le vécu de la maladie de ces témoins : ils ne restituent que des fragments de leurs histoires et des épreuves qu’ils ont traversées. Ils sont organisés en fonction de choix que nous avons opérés afin d’illustrer, par la narration, des thématiques spécifiques, en cohérence avec le fil rouge de ce numéro, au cœur de la mobilité thérapeutique ultramarine28. À travers ces récits, nous avons souhaité replacer l’individu au centre de son expérience vécue de la maladie où émotions, pensées et processus corporels sont combinés en une seule structure vitale (Kleinman, 1988). Raconter des fragments des histoires d’Adèle, de Sylvain et de Marie-Olivia nous a permis de restituer en partie l’épaisseur des expériences vécues dans lesquelles les problèmes pratiques de la vie quotidienne occupent une place centrale et les difficultés sont parfois invisibles aux autres (Kleinman, 1988). En particulier, ils nous ont permis de montrer comment l’expérience est façonnée par la précarisation économique implicite à la délocalisation des soins, par les problèmes logistiques et administratifs non prévisibles ou non pensés par l’institution, par les compétences en mobilité requises, par la souffrance et le dépaysement provoqués par l’éloignement, en prévision duquel certaines personnes optent pour un refus de soin. La parentalité se révèle enfin être un des enjeux majeurs, non seulement dans la validation de la proposition thérapeutique mais aussi dans le vécu du transfert sanitaire. Il reste à interroger les conséquences de l’éloignement du parent-patient sur les enfants de ce dernier.

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Notes

1 Dans les contextes institutionnels, les termes « Hexagone » et « France hexagonale » sont aujourd’hui préférés à « métropole » et « France métropolitaine » pour s’affranchir de leur sens implicite lié à la période coloniale. En effet, dans la Grèce ancienne, mêtrópolis (du grec mêtêr, mère et polis, ville) était le terme attribué aux villes qui avaient fondé des colonies. Nous faisons le choix d’adopter une terminologie plus neutre dans cette publication, mais à l’heure actuelle, le changement terminologique ne s’est pas produit dans le langage courant. La plupart des interlocuteur·rice·s, dans les entretiens et donc dans les extraits choisis, utilisent le terme « métropole ».

2 L’engagisme désigne une forme de migration de travail qui s’est développée en relation à l’abolition de l’esclavage dans les « îles à sucre » pour faire face au besoin de main d’œuvre agricole et qui a perduré jusqu’à l’entre-deux-guerres dans les colonies françaises. Les travailleurs engagés, sous contrat, bénéficiaient d’un statut juridique leur garantissant la liberté (notamment le droit de propriété, le droit de transmettre leur patronyme à leurs enfants et la liberté religieuse) et de faibles rémunérations. Ils étaient recrutés directement dans leur pays de provenance. À La Réunion, les engagés provenaient majoritairement d’Inde. Malgré les méthodes de recrutement souvent brutales, et leurs conditions de vie difficiles, la plupart sont restés sur l’île à la fin de leur contrat.

3 En matière de fiscalité par exemple pour La Réunion (taxe « octroi de mer »).

4 Sur le plan national, il existe le Registre France greffe de moelle, géré par l’Agence de la biomédecine. Il a pour objectif de pouvoir identifier un éventuel donneur compatible non apparenté pour venir en aide aux personnes nécessitant une greffe et n’ayant pas de proche compatible. L’identification se fait grâce à la comparaison des données biologiques des personnes inscrites. L’inscription se fait sur la base du volontariat et garantit l’anonymat entre le donneur et le receveur. Le registre français est relié aux autres registres qui se trouvent dans le monde et qui ont rejoint le réseau International Marrow Donor Information System. Les registres sont informatisés et mis à jour en temps réel.

5 Les traitements médicaux sont entièrement pris en charge par la Caisse générale de sécurité sociale de La Réunion (CGSS de La Réunion), de même que le transfert sanitaire qui comprend un vol aller-retour en classe économique, les trajets terrestres (du domicile du malade à l’aéroport de départ, de l’aéroport d’arrivée à l’hôpital, et tous les transferts des malades de leur logement à l’hôpital pendant la période de post-greffe), ainsi que l’hébergement en foyer ou dans un centre de réadaptation en période de post-greffe. Dans le cas de l’allogreffe, les hématologues recommandent l’accompagnement du malade par un·e aidant·e familial·e. Les frais de voyage (vols aller-retour) et d’hébergement (en foyer) de l’accompagnant sont pris en charge par la CGSS de La Réunion après accord du médecin conseil, alors que cette possibilité n’est pas systématiquement accordée aux personnes atteintes d’autres maladies nécessitant un transfert. Les transports terrestres (depuis l’aéroport, entre hôpital et foyer ou logement) et les repas restent à la charge de l’accompagnant (possibilité d’aides de la CGSS de La Réunion, et/ou du Conseil départemental, sous conditions de ressources).

6 Comprise ici comme une description et une analyse qui recherchent des significations incorporées dans le discours des informateurs afin de comprendre leur perception des événements et le sens de leurs actions.

7 Au sens d’une combinaison de données (ici observations, récits des malades et leurs aidant·e·s) relatives à un parcours individuel, renvoyant à d’autres cas et à un contexte social plus large (ici la mobilité thérapeutique et la société réunionnaise).

8 Tous les prénoms cités dans le texte sont des pseudonymes.

9 « Regards croisés des SHS sur le recours à l’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques chez les patients de l’Île de la Réunion atteints d’hémopathies malignes ». Coordonnateur : Patricia Marino, IPC, SESSTIM (AMU, Inserm, IRD). Cette recherche pluridisciplinaire impliquait des économistes de la santé, des psychologues et des biostatisticien·ne·s, avec l’appui des hématologues.

10 Dans cette étude, est considéré comme proche aidant un membre de l’entourage du malade (famille, conjoint·e, ami·e) qui accompagne le malade dans sa maladie en lui apportant un soutien moral et matériel régulier, qui prend soin de lui (INCa, 2016).

11 La première auteure a réalisé les observations et les entretiens. Dans les récits, c’est à elle que la première personne fait référence.

12 Entretien avec Adèle et sa mère, réalisé au domicile d’Adèle, La Réunion, 4 mars 2020.

13 L’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques est permise grâce à un donneur. Il peut s’agir d’une greffe de moelle osseuse, d’une greffe de cellules souches périphériques ou encore d’une greffe de sang placentaire, appelé aussi sang de cordon (Davous, 2016).

14 C’est une réalité lorsque les personnes greffées changent de groupe sanguin après la greffe et acquièrent le groupe sanguin du donneur.

15 Tumeur bégnine développée à partir des méninges.

16 Entretien avec Sylvain réalisé au CHU Sud, La Réunion, 20 février 2020.

17 Entretien avec Frédéric, patient allogreffé de 45 ans, à son domicile, La Réunion, 19 février 2020.

18 À Paris, maintes personnes l’ont souligné, les transports conventionnels n’acceptent pas les bons de transport émis par les caisses de sécurité sociale ultramarines.

19 Dénomination au moment de notre étude de ce qui est aujourd’hui France Travail.

20 Les entretiens ont identifié des « restes à charge » : pour le·la patient·e : location de la télévision (perçue comme indispensable mais chère pour celles et ceux qui sont sans revenus), repas pour celles et ceux qui ne sont pas en centre de convalescence lors de la période de post-greffe, entretien des vêtements, vêtements chauds selon la saison (une aide forfaitaire peut être demandée au Département) ; pour l’aidant·e : transports terrestres (aéroport-Paris ; entre hôpital et foyer ou logement), vêtements chauds (selon la saison), repas. S’ajoute à cela une perte de revenus liée à l’arrêt de travail du·de la patient·e et/ou de l’accompagnant·e.

21 D’après les entretiens réalisés au domicile de la famille de Marie-Olivia, avec elle-même, le frère qui l’a accompagnée, sa mère et les discussions informelles avec les membres de la famille présents. La Réunion, 18 févier 2020.

22 Le Frère Scubilion (1797-1867), acteur de la christianisation, est resté dans la mémoire collective pour avoir lutté contre l’esclavage et contre les abus dans la période pré et post-abolitionniste. Il a été béatifié en 1989. Sa tombe, comme d’autres, est devenue un lieu de culte sur lequel des fidèles se rendent pour demander des guérisons (Ève, 1985).

23 Forme de cancer qui touche toutes les cellules de la moëlle osseuse. Particulièrement grave, cette forme de leucémie nécessite la prise en charge en urgence par des équipes spécialisées.

24 « Tu sais comment ils sont. »

25 Selon une étude de l’Observatoire de la parentalité de La Réunion (2021), la monoparentalité représentait en 2018 38 % des configurations familiales à La Réunion contre 22 % dans l’Hexagone (source Insee), les enfants vivant majoritairement avec leur mère. La famille (parents, fratrie) est le premier soutien – en termes de garde de l’enfant, d’aide matérielle, de soutien moral – à la monoparentalité et les relations avec la famille sont très fortes.

26 Les changements physiques du malade sont importants au cours du processus de greffe (perte des cheveux, fonte musculaire…) et peuvent inquiéter tant les patient·e·s que l’entourage, notamment les enfants (Davous, 2016).

27 Dans le groupe des répondants de cette étude, 14 personnes sur 22 avaient des enfants mineurs.

28 D’autres thématiques, que nous avons soulevées ailleurs (Franchina et al., 2022), n’ont pas été développées dans cet article, notamment les aspects du dépaysement et de la peur vécus du fait de la distance géographique et d’un environnement socioculturel non familier. D’autres thématiques sont également très prégnantes dans les entretiens, telles que l’étiologie de la maladie du point de vue des patient·e·s, les représentations de l’allogreffe, ou encore les relations avec les médecins et les soignants sur l’île ou en contexte interculturel, le recours au système thérapeutique local (Pourchez, 2011), le rapport au religieux qui a été particulièrement investigué par d’autres auteur·rice·s dans la société réunionnaise (Andoche, 1988, 1990 ; Beaulieu, 2003 ; Benoist, 1993, 2001 ; Desprès, 2011 ; Pourchez, 2000, 2002, 2005). Ces sujets, qui rendent compte des spécificités socioculturelles de la société réunionnaise contemporaine, nous semblent moins directement révéler les enjeux sous-jacents à la délocalisation des soins.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Loreley Franchina et Aline Sarradon-Eck, « Mobilité thérapeutique ultramarine La Réunion-Hexagone dans le cadre de traitements de haute technicité : récits d’expérience »Anthropologie & Santé [En ligne], 29 | 2024, mis en ligne le 26 octobre 2024, consulté le 09 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/anthropologiesante/13807 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12s98

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Auteurs

Loreley Franchina

Aix-Marseille Université, Inserm, IRD, SESSTIM, ISSPAM, Marseille, France
loreley.franchina@univ-reunion.fr

Aline Sarradon-Eck

Aix-Marseille Université, Inserm, IRD, SESSTIM, ISSPAM, Marseille, France
Institut Paoli-Calmettes, CaLIPSo UMR1252, Marseille, France
aline.sarradon@inserm.fr

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