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Les milliaires africains et l’histoire impériale au milieu du iiie siècle de notre ère

Michel Christol
p. 119-130

Résumés

Le réexamen de la documentation épigraphique provenant de Numidie doit confirmer, comme l’envisageait H.-G. Pflaum en 1966, l’élévation au rang de César de Gallien, fils de Valérien, qui s’était fait acclamer par les troupes. L’événement résulterait d’une initiative du Sénat à Rome, comme l’indiquent les sources latines antiques. L’examen des milliaires et de quelques autres documents provenant des cités montre la réactivité de cette province, et vraisemblablement de l’Afrique voisine, aux grands événements politiques qui, en 253, se produisirent au sommet du pouvoir.

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Texte intégral

  • 1 Christol 2002, 2003 et 2006a.
  • 2 Appréciation de l’ensemble du mouvement historique dans Christol 2006b, p.117-130 ; plus récemmen (...)
  • 3 Zon., XII, 22, 138 Dindorf, qu’il faut rapprocher de Petr. Patric. (exc. de sent., 158, 264 Boiss (...)
  • 4 Christol 1980 ; l’effort de guerre engagé en Orient dès 252 est confirmé par les découvertes épig (...)
  • 5 Comme l’indiqueraient les inscriptions concernant M. Aurelius Vitalis et M. Cornelius Octavianus  (...)

1Au cœur de la première grande crise du iiie siècle les provinces africaines connurent des périodes troublées, mais les témoignages apportant des informations doivent être relativisés. C’est du moins notre sentiment1, que ne dément pas le réexamen des documents : les fractures de l’empire, issues des désastres militaires, étaient ailleurs2. Pour simplifier, il suffit de se référer au message adressé au cœur de l’année 253 par Emilien, prince éphémère, au Sénat romain, tel que le transmit l’historien byzantin Zonaras3. Il était marqué par la nécessité de chasser les barbares de Thrace et d’aller faire la guerre aux Perses4. Les zones militaires prioritaires se trouvaient dans ces parties de l’empire, puis d’autres apparurent sur les bords du Rhin, mais point en Numidie, ni même en Maurétanie césarienne, où pourtant un rude maintien de l’ordre est parfois rappelé par les autorités provinciales de l’époque5.

  • 6 Loriot 1975, p. 670-671, à propos de Maximin le Thrace.
  • 7 Hdn 7, 7, 4-5 ; Loriot 1975, p. 697-700.
  • 8 Carthage était aussi en relations très étroites avec la capitale, comme le montrent quelques rens (...)

2Les grandes impulsions, structurant le déroulement de la vie politique, venaient d’ailleurs, principalement du cœur des provinces les plus violemment touchées. Aussi, lorsqu’il s’agissait d’assurer le succès d’un pouvoir naissant, ou de le revêtir de la plus parfaite légitimité, le mouvement s’orientait de la province vers le centre de l’empire et vers sa capitale6, tout autant que vers les autres provinces : l’exemple donné par la crise de 68-69 se reproduisait. L’étape romaine était le prélude obligé d’une réception plus large du pouvoir et de son extension au monde romain. Sur la longue durée, la place des provinces africaines est donc assez réduite dans ces épisodes qui touchaient l’ensemble de l’empire : l’aventure des Gordiens en 238 était certes née dans la province d’Africa, mais elle n’avait été qu’un feu de paille, de même que l’usurpation à peine plus tardive de Sabinianus à Carthage. En 238, c’est à Rome que l’ébranlement politique avait pris corps, puis s’était répandu, devenant plus fortement perturbateur de la vie provinciale : pour une fois le Sénat avait tenté de peser sur le destin de l’institution impériale, et d’agir un peu partout7. Par la suite, lors de la première grande crise de l’empire, ces provinces n’apportent pas de trace d’usurpation ou de sécession, à la différence des Gaules, des régions illyriennes ou de l’Orient syrien. Mais elles étaient bien reliées à la capitale, réceptives aux nouvelles, tant celles qui empruntaient les canaux officiels que celles qui franchissaient la Méditerranée d’autres manières. C’est ce que montreraient avec assez de précision des épisodes relatifs aux rapports des églises chrétiennes avec le pouvoir impérial8.

  • 9 Salama 1951a, p. 264-269.
  • 10 Christol 1990.

3Dans la documentation provinciale, par les bornes routières, qui indiquaient l’exécution d’ordres venus d’en-haut, et qui les plaçaient sous un pouvoir considéré comme légitime, on dispose de témoignages de valeur. Peu importe qu’ils donnent l’impression de montrer l’obéissance des cités ou qu’ils apparaissent comme des hommages de fidélité, en évoluant souvent de plus en plus en témoignages honorifiques, lorsqu’ils sont rédigés au datif9. Ces documents viennent en complément des hommages officiels provenant du cœur des cités. Ils enregistraient ainsi, avec un faible décalage temporel, des impulsions venues d’ailleurs ou les effets des décisions prises à distance. Ces dernières plaçaient les « autorités » provinciales et les élites civiques dans une position passive, soumises aux situations créées par d’autres, et surtout en d’autres lieux. Néanmoins ce sont des documents utiles pour découvrir comment les nouvelles se répandaient en accompagnement des mouvements politiques. L’étroitesse des rapports avec l’Italie et avec Rome ferait a priori considérer que tout ce que l’on savait d’important ou de déterminant dans les provinces africaines provenait de la capitale et y avait été avalisé par des institutions essentielles, telle que le Sénat, ultime garant de légitimité10.

  • 11 Hdn 7, 9, 1-2. Loriot 1975, p. 700-702.
  • 12 La Maurétanie césarienne apporte plusieurs témoignages de la fidélité à Pupien, Balbin et Gordien (...)

4Tout autant que l’Africa, les provinces voisines étaient concernées, car elles disposaient d’effectifs militaires non négligeables. Ils avaient été à l’œuvre en 238, lorsque des troupes de Numidie avaient mis un terme à l’aventure des Gordiens à Carthage11. Mais on peut estimer qu’il en avait été de même, dans ces événements, quand l’armée de Maurétanie césarienne et son chef, issu de l’ordre équestre, après avoir conservé leur fidélité aux princes sénatoriaux et au jeune Gordien III, avaient, comme il est vraisemblable de le penser, imposé leur volonté aux soldats de l’armée de Numidie, jouant ainsi un rôle essentiel dans le retour à l’ordre12. Néanmoins, pour la période qui nous intéressera ici, c’est la Numidie qui présente le plus d’intérêt car elle a fourni de remarquables séries de bornes routières : plus qu’en Afrique proconsulaire, ou qu’en Maurétanie césarienne, cette documentation offre des informations qu’il est raisonnable d’examiner comme des résonances ou des échos permettant de suivre quelques vicissitudes de l’histoire politique.

1. La première transition politique de l’année 253

  • 13 Christol 1980. C’est un sujet que viennent renouveler les nouveautés apportées à l’œuvre de Dexip (...)
  • 14 Voir supra n. 4. Il faut aussi tenir compte de l’apport des papyrus du Moyen-Euphrate : Feissel, (...)

5La transition de Trébonien Galle et Volusien à Émilien, qui se produisit au cœur de l’année 253, peut être ainsi bien observée. L’avènement de ce dernier, en Mésie inférieure, s’explique par l’ampleur de la crise militaire, dont le premier moment avait été l’invasion de la Mésie inférieure, de la Thrace et de la Macédoine par les Goths, dès le règne de Dèce et de ses enfants (249-251)13. Leurs successeurs, entre 251 et 253, n’étaient pas davantage parvenus à rendre toute leur sécurité aux provinces envahies et ravagées. S’était ajouté, en Syrie, le désastre subi à Barbalissos, qui avait permis au roi perse Sapor de conduire un raid militaire jusqu’à Antioche, la capitale14. L’accumulation des mauvaises nouvelles avait provoqué l’éclosion d’une nouvelle usurpation, celle d’Émilien.

  • 15 Rathbone 1986, p. 115-117, qui remplace avantageusement Bureth 1964, p. 117 ; Kienast 2004, p. 21 (...)
  • 16 Voir, à ce propos Rathbone 1986, p. 117. Sur le sujet : Christol 1975, p. 809 ; Huttner 2008, p.  (...)

6On sait que le temps d’exercice du pouvoir de ce dernier s’étend de part et d’autre du repère qu’est le changement d’année régnale en Égypte : celui-ci marquait la vie provinciale à partir du 29 août. Émilien eut ainsi une année A et une année B, de part et d’autre du 29 août 253, mais la documentation le concernant est pour l’instant concentrée dans l’année B, ce qui a fait conclure que, la prise de pouvoir ayant eu lieu au cœur de l’été, les délais de transmission ainsi que les conditions de réception des nouvelles, et peut-être même les conditions de la reconnaissance ou du ralliement des autorités, n’eurent leur plein effet dans cette province qu’au-delà de cette date, vers la fin de l’été. C’est pour cette raison que, d’une manière approchée, on place ce règne, qui se serait étendu sur trois mois environ, entre juillet-août 253 et septembre-octobre 25315. D’autre part il faut faire coïncider cette année B d’Émilien, qui fut de brève durée, avec l’année A de Valérien et de Gallien, ce qui place l’avènement officiel de ces derniers au-delà du 29 août 253, la première année régnale égyptienne étant pour eux l’année 253-25416.

  • 17 Déjà Bersanetti 1948, p. 258-260.
  • 18 Sur les témoignages numismatiques, voir à présent Hostein, Mairat 2016, 3, 11-12, 41-49 et dans l (...)
  • 19 Dans cette partie de l’empire s’est ajoutée une autre inscription, par rapport à l’inventaire de (...)
  • 20 PIR2 C 1502, cf. A 330 ; Huttner 2008, p. 217-218.

7Les documents épigraphiques permettent aussi de circonscrire les régions dans lesquelles le pouvoir d’Émilien s’établit fermement à son début17 : la Dacie, où l’atelier monétaire frappa aussi des espèces à son effigie, la Mésie supérieure, où l’atelier de Viminacium fit de même18, la Dalmatie enfin, tout ceci indiquant, comme on l’a depuis longtemps relevé, que l’Illyricum aurait été la région qui initialement aurait assuré l’ancrage de son pouvoir. Par la suite, il s’imposa en Italie et il s’établit à Rome. En même temps, en tenant compte que la Syrie avait été malmenée et s’était pour une part livrée à d’autres, les provinces hellénophones19, l’Orient jusqu’à l’Égypte l’avaient rejoint, avec un faible décalage temporel. Lorsque furent définitivement éliminés Trébonien Galle et Volusien, l’atelier monétaire central frappa à son tour des monnaies pour le nouveau prince et pour son épouse Cornelia Supera20.

  • 21 Sur cette abondante documentation déjà Meloni 1966, p. 217-222, ainsi que Thomasson 1984-2009, 10 (...)
  • 22 Ce témoignage indirect se trouve sur un hommage public provenant de Volubilis : CIL, VIII, 21829 (...)
  • 23 AE 2016, 1915, s’ajoutant à l’interprétation donnée par Salama de CIL, VIII, 21989 : Salama 1987, (...)

8À la suite de la légitimation acquise à Rome, qui était l’étape finale de l’élévation au pouvoir impérial, deux provinces d’Occident apparaissent nettement, dans la documentation épigraphique, alors que d’autres n’apparaissent pas, laissant peut-être entendre que déjà, par fidélité à Trébonien Galle et à Volusien, un nouveau pouvoir s’était élevé, et qu’il faisait obstacle à l’extension de la domination d’Émilien sur l’ensemble de l’empire. On opposera donc la situation qui est connue dans les provinces ibériques, dans les provinces gallo-germaniques, en Bretagne et dans les plus occidentales des provinces danubiennes, où aucun témoignage de ralliement n’est connu, à celle que l’on peut présumer exister en Maurétanie Tingitane, et que l’on peut décrire avec plus de précision en Sardaigne et en Numidie, deux provinces dans lesquelles les témoignages se sont accumulés. En Sardaigne, plusieurs bornes milliaires attestent l’activité du gouverneur équestre M. Calpurnius Caelianus, qui succédait à M. Antonius Septimius Heraclitus21. Dans les provinces africaines, le cas de la Maurétanie Tingitane, qui peut signifier que la césarienne voisine serait aussi dans la même situation, se déduit d’un hommage public provenant de Volubilis, sur lequel le nom des prédécesseurs d’Émilien a été martelé22. Il en va de même en Proconsulaire, où des martelages sont attestés23, sans qu’ils soient toutefois généralisés. Mais en Numidie, les témoignages sont plus nombreux et surtout plus explicites. En effet on doit relever qu’aux bornes milliaires d’Émilien s’ajoutent quelques témoignages plus complexes provenant des cités de la partie septentrionale de la province : ils font accéder plus directement à l’univers politique des cités.

  • 24 Voir aussi les observations de P. Salama (1951a, p. 232 n. 42).

9En effet, en nombre presque comparable à celui qui se trouve en Sardaigne, plusieurs bornes milliaires portent le nom du nouvel empereur. L’une d’entre elles indique même, ce qui pourrait éclairer l’importance des documents routiers pour la connaissance de cette période, milliaria orbis [sui] restituit. Il s’agit d’un milliaire mis au jour à proximité de Zarai, sur la route reliant Zarai à Lamasba24. Il est rédigé au nominatif : CIL, VIII, 22473 [Schmidt, Cagnat, Dessau 1904, d’après Gsell 1893, p. 158, no 142] : Imp(erator) Caes(ar) / Aemilius Aemilian/us pius fe(lix) / Aug(ustus) ponti/fex max(imus) p(ater) p(atriae) / mil(iaria) orbis / [sui] restit(uit). La restitution du possessif [sui] à la dernière ligne conservée est très vraisemblable.

  • 25 Voir aussi Salama 1951a, p. 232.
  • 26 On se référera à la carte établie par P. Salama (1951b).
  • 27 CIL, VIII, 2615 (ILS 1194) ; Thomasson 1996, p. 189-190 ; Christol 2002, 2003, et 2006a.

10Un autre milliaire provient du lieu dénommé El Bir, sur la route reliant Lamasba à Ngaous25 (au même endroit qu’un milliaire de Caracalla, CIL, VIII, 22500) : IRA, 4338 [Renier d’après une copie du capitaine Payen] = CIL, VIII, 10402 [Wilmanns en 1881, d’après une copie meilleure mais incomplète de ce savant] = 22508 [Schmidt, Cagnat, Dessau en 1904, d’après une copie intégrale donnée par St. Gsell (1893, p. 114, no 65)] : Imp(erator) Caes(ar) / M(arcus) Aem/ilius Ae/milianus pius fe/lix Aug(ustus). Ces deux milliaires sont situés à l’ouest de Lambèse, près de la frontière commune entre Numidie et Maurétanie césarienne, au sud-est des Hautes-Plaines de la Sitifienne26. C’est peut-être dans ce secteur de confins qu’aurait pu intervenir le gouverneur de Numidie C(aius) Macrinius Decianus, selon l’interprétation donnée aux indications contenues dans l’inscription qui énumère, à Lambèse, la réussite de ses activités27. Il faut aussi relever que ce milliaire d’Émilien n’est pas trop éloigné du lieu de provenance d’un milliaire de Trébonien Galle et Volusien (CIL, VIII, 10405, complété par Gsell pour donner CIL, VIII, 22515), ainsi que de l’emplacement du milliaire de Valérien et de Gallien Caesar que l’on évoquera ci-dessous (CIL, VIII, 10141 = 22517).

11Un troisième milliaire, plus récemment connu, mais rédigé au datif, provient du lieu-dit Ourlal, proche du camp de Gemellae, qui se trouvait alors à l’extrémité sud-occidentale du dispositif militaire de la province, celui de Dimmidi ayant été évacué une quinzaine d’années plus tôt. Il marque le premier mille d’une route qui se dirigeait de l’agglomération liée au camp militaire vers Thouda/Thabudeos, plus à l’est. Ici, au sud de l’Aurès, la région est un peu plus éloignée de Lambèse, le siège du gouverneur ; elle est marquée profondément par la présence militaire : Baradez 1953, p. 151-153 (d’où AE, 1954, 129) : Imp(eratori) M(arco) Em/ilio Emilian/o invic(to) pio Fe/l(ici) Aug(usto) m(i)l(ia) p(assuum) / I.

  • 28 Ballu 1911, p. 114, no 14 (sans identification des noms martelés), d’où AE 1911, 104 (Cagnat : av (...)
  • 29 Salama 1951a, p. 230-232, no 9. Elle ne figure pas dans l’édition récente par X. Dupuis des ILAlg(...)

12Il faut ajouter à cette série provenant de Numidie méridionale une quatrième colonne, mais très originale, qui provient de Cuicul, dans la partie la plus urbanisée de la province, au nord-ouest. Elle est connue de longue date, puisque la première publication fut celle de A. Ballu en 1911, et qu’elle figura dans le recueil de Hermann Dessau28. P. Salama l’a revue et republiée avec une photo dans un article fondateur paru en 195129. Ce savant a souligné tout ce qui faisait la particularité de la longue série de bornes mises au jour dans la ville qui constituait le chef-lieu de la colonie ou bien dans son environnement le plus proche : AE 1911, 104 = ILS 9498 = Salama 1951a, p. 230-232, no 9 : Imp(eratori) Caes(ari) / [[M(arco) Aemilio / Aemiliano / inuicto pio]] / felici Aug(usto), pontifici / maximo, trib(unicia) pot(estate), / patri patriae, cons(uli), procons(uli) / [[et Corneliae Superae Aug(ustae), / coniugi]] eius resp(ublica) / col(oniae) Cuiculitanor(um) / deuota numini / maiestatique / eorum uias torren/tibus exhaustas / restituit.

  • 30 PIR2 C 1502 ; Kienast 2004, p. 212-213.
  • 31 CIL, V, 530 = IIt. X, 4, 26.

13L’intérêt de ce document est très large, car il y a plus qu’une simple borne routière. En effet, la colonie de Cuicul se mettait en avant, comme elle le faisait de longue date et, selon les canons des hommages rendus aux empereurs, elle se déclarait, comme cela se produisait depuis le principat de Philippe (244-249), deuota numini maiestatique eius ou eorum. D’ailleurs notre document introduit une variante dans cette série remarquable de témoignages, puisqu’à la respublica Cuiculitanorum il substitue comme initiateur de l’hommage la respublica coloniae Cuiculitanorum. Le tout apparaît comme un milliaire-dédicace, témoignage de loyalisme politique, ce que renforce la présence aux côtés du prince de son épouse, Cornelia Supera30. Le texte se rapproche ainsi de l’hommage rendu aux mêmes personnes par l’ordo de la cité de Tergeste dans le nord de l’Italie31. Dans la province de Numidie, depuis longtemps les cités, impliquées dans la réalisation des travaux routiers par l’autorité administrative, avaient parfois fait des bornes milliaires des témoignages de loyalisme à l’ensemble de la domus diuina, comme déjà sous Caracalla et Sévère Alexandre dans d’autres provinces de l’empire romain.

  • 32 Les travaux qui sont rappelés le sont aussi sur deux milliaires des mêmes empereurs Trébonien Gal (...)
  • 33 ILAlg. II, 2, 3596 : Ex indulgentia prouidentiaq(ue) diuina dd(ominorum) nn(ostrorum) Impp(erator (...)

14A ces témoignages directs on ajoutera, comme à Volubilis, un témoignage indirect, celui qu’apporte, sur une inscription de Tiddis, le martelage des noms des empereurs vaincus et éliminés par Émilien. Il ne s’agit pas, à notre avis, du martelage des noms de Dèce et d’Etruscus, remplacés par ceux de Trébonien Galle et de Volusien, mais du martelage des noms de ces derniers32 qui, une fois qu’Émilien fut à son tour écarté du pouvoir – c’est-à-dire presque immédiatement –, revinrent à leur place initiale, comme pouvaient le souhaiter les habitants de ce castellum de la Confédération cirtéenne qui avaient bénéficié de leur bienfait33 : ainsi la Confédération cirtéenne et le nord de la Numidie réagissaient assez rapidement aux épisodes qui s’achevaient par la reconnaissance d’une légitimité au cœur de l’empire, et à ses transformations.

2. La seconde transition politique de l’année 253 : une simultanéité de traces documentaires

  • 34 CIL, VIII, 2482, cf. p. 1716 (= 17976); Kienast 2004, p. 214. Voir aussi, infra notes 42 et 54.

15Mais l’épigraphie de la Numidie apporte aussi des témoignages sur l’infortune d’Émilien, très rapidement supplanté par Valérien. Et dans ce cas, aussi, la place de la province apparaît même de manière très originale. Celle-ci apporte le premier témoignage bien daté, relatif au nouveau règne. Il s’agit d’une inscription, datée du 22 octobre 253, indiquant que Valérien et Gallien étaient associés au pouvoir avec le titre d’Augusti34 : l’inscription se trouve sur un autel du camp de Gemellae, dédié à la Victoria Aug(usta), comme si l’on annonçait aux légionnaires un moment essentiel ou fondateur du nouveau règne.

16C’est à Cuicul – c’est-à-dire dans la partie septentrionale de la province – que l’on trouve le martelage qui a affecté les noms d’Émilien et de Cornelia Supera dans le texte de l’inscription qui, quelques semaines auparavant, les mettait en valeur. C’est une initiative qui apparaît en d’autres lieux de l’empire, mais qui ne semble pas généralisée. Si à Cuicul le martelage n’a pas totalement fait disparaître les noms impériaux, car des traces subsistent suffisamment, il est toutefois bien marqué sur la colonne milliaire, comme le montre la photo de P. Salama dans son article : cette damnatio memoriae fut mise en œuvre avec assez d’application. Peu après l’élévation de la borne milliaire, où s’exprimait le ralliement à ce nouveau prince, s’est produit l’effacement de son nom lorsqu’un nouveau pouvoir s’imposa. Les mêmes qui avaient honoré Émilien et Cornelia Supera ont suivi les décisions de leurs successeurs. Ils se sont empressés de corriger ce qui devenait désormais un ralliement passager : la cité a réagi avec promptitude aux vicissitudes de l’histoire impériale. Hommage et repentir se sont ainsi suivis à bref intervalle et la rasura a été imposée à un texte fraîchement installé en lieu public, ce qui fait du milliaire-dédicace d’Émilien un document qui, en quelque sorte, appartiendrait aussi quelque peu au règne suivant. Le témoignage est tout aussi important que la réaction des Tidditains rétablissant les noms de Trébonien Galle et Volusien, ce qui montre la forte sensibilité de la province et de ses cités aux événements romains, la damnatio memoriae se fixant par un sénatus-consulte, c’est-à-dire par une décision prise à Rome quand le Sénat établissait une nouvelle légitimité, et se diffusant par les canaux officiels. À ce moment-là elle avait eu des effets sur plusieurs cités. Mais la Numidie révèle déjà la réception tout aussi remarquable des informations sur l’établissement d’un autre pouvoir, celui de Valérien et de Gallien.

17Les documents provenant de cette province apportent même davantage. Des inscriptions font savoir, en particulier, que Gallien aurait reçu le titre et le rang de César, à l’instar de ce qu’indiquent plusieurs sources littéraires antiques de langue latine. Ces dernières précisent de plus, que cette particularité institutionnelle résulterait de la volonté du Sénat à Rome. Il faudrait en conclure que, pour ce prince, l’élévation à l’Augustat ne se serait produite que dans un second temps.

18Aurelius Victor souligne que l’avènement de Valérien et de Gallien, pris dans son ensemble, se produisit à la fois au nord des Alpes et à Rome (Caes., 32, 1) : At milites qui contracti undique apud Raetias ob instans bellum morabantur, Licinio Valeriano imperium deferunt. Qui, quanquam genere satis claro, tamen uti mos etiam tum erat, militiam sequebatur. Eius filium Gallienum senatus creat, statimque Tiberis adulta aestate diluuii facie inundauit. La source de Victor sur le Césarat de Gallien se dégage d’un rapprochement avec d’autres sources historiques de l’Antiquité tardive. Il s’agit d’abord d’Eutrope (9, 7) : Hinc Valerianus, in Raetia et Norico agens, ab exercitu imperator et mox Augustus est factus. Gallienus quoque Romae a senatu Caesar est appellatus. Puis s’ajoute Orose (hist. VII, 22) : Anno ab Vrbe condita millesimo decimo duo imperatores uicesimo septimo post Augustum loco creati sunt : Valerianus in Raetia ab exercitu Augustus appellatus, Romae autem a senatu Gallienus Caesar creatus. On remonte ainsi, comme source d’information, à la Kaisergeschichte, une source non attestée directement mais dont l’existence a été envisagée depuis longtemps et finalement admise.

  • 35 Pflaum 1966 (= 1978, 229-236) ; Zaccaria 1976. On peut ajouter par exemple A. Lippold, dans son c (...)
  • 36 Kienast 2004, p. 218. Peu d’attention a été portée à ce détail d’histoire politique et institutio (...)
  • 37 Peachin 1988; 1990, p. 39.
  • 38 Goltz, Hartmann 2008, 227; Geiger 2013, p. 82-83.

19Cette information sur la désignation de Gallien comme Caesar est une donnée qui, longtemps passée sous silence, ou parfois contestée, a été remise en évidence par deux articles de H.-G. Pflaum et de C. Zaccaria35. Leur point de vue, qui aboutissait à une sorte de réhabilitation, par l’épigraphie, de l’information donnée par les trois auteurs susnommés, a été repris : on le trouve, maintenu – d’une manière brève mais explicite – dans les diverses éditions du livre devenu classique de D. Kienast36. Toutefois cette tentative a fait l’objet d’une mise en doute – et même d’une mise en critique – de la part de M. Peachin37, qui tendait à revenir, sur ce sujet, à une position de rejet comparable à celle qu’avait exprimée Wilmanns en 1881. Les travaux plus récents, de Goltz et Hartmann, puis de Geiger, se concentrent sur l’interprétation qu’il convient de donner à cet épisode sur le plan politique, et leurs auteurs concordent pour en atténuer la portée, en réduisant peut-être le périmètre de la réflexion : tous estiment peu vraisemblable qu’une telle décision du Sénat romain se soit exprimée antérieurement à la victoire décisive de Valérien, et d’autre part, ajoutent-ils, ce ne fut que pour peu de temps qu’une telle situation institutionnelle aurait existé38. Cette restriction chronologique paraît correspondre à la réalité. Mais elle n’impose pas d’occulter l’intérêt de toutes les données provenant de ces passages convergents et de la traduction des informations qui s’exprima dans la documentation épigraphique.

3. La reconstruction du dossier des milliaires africains

20Les bornes routières que l’on peut rattacher à cette seconde transition politique présentent des traits d’originalité, dont il importe de dégager les caractéristiques et l’intérêt. Pour le moment, cette documentation provient de la seule province de Numidie. Des témoignages sur le Césarat de Gallien y avaient été signalés depuis longtemps. Par la suite les données se sont renforcées. Faire l’inventaire des découvertes c’est déjà, comme on va le voir, reconstruire quelque peu la découverte du sujet à traiter, puisque, comme l’avait déjà relevé Pflaum, avait été provoquée, inconsciemment peut-être, mais efficacement, la mise en sourdine de l’apport de cette documentation à la compréhension de l’histoire politique.

  • 39 Sur le même tronçon de voie on notera CIL, VIII, 10126 : Imp(eratori) Caesa[ri] / P(ublio) Licini (...)

21Ce fut d’abord par un milliaire mis au jour au lieu-dit Mrâkib Talha, sur une route conduisant de Theueste à Cirta, correspondant à l’antique cité de Macomades, que le sujet fut posé39 : CIL, VIII, 10132 [Wilmanns en 1881, d’après Dewulf, RSAC 11, 1867, p. 214, no 8] : P(ublio) Licinio Gal/lieno nobili/ssimo Caes(ari) / Aug(usto).

  • 40 Voir supra n. 34. Pour la variabilité des compétences de ces jeunes princes, selon les moments, n (...)
  • 41 Le premier exemple qui pourrait éclairer cette pratique se trouve dans une inscription de Lambèse (...)
  • 42 C’est pour cette raison que le témoignage provenant de Gemellae (CIL, VIII, 2482, cf. p. 1716 (= (...)
  • 43 Les exemples de cette forme de citation d’un Caesar proviennent, pour Geta en 201, des inscriptio (...)
  • 44 Les indications sont réduites, mais classées, dans le Droit public de Mommsen (qui parut en 1871) (...)
  • 45 Pflaum 1966 (= 1978, p. 229-236) ; ce savant, p. 176-177 (= 1978, p. 230-231) fait observer que W (...)

22On sait à présent combien il y eut tendance à majorer la présentation des jeunes associés au pouvoir, à qui était promise la succession impériale, en ajoutant au titre de Caesar ou de nobilissimus Caesar, le titre d’Augustus. C’est un fait notable de l’histoire institutionnelle du iiie siècle, analysé en particulier par Pflaum40, dont les observations remontent jusqu’aux premières années de l’époque sévérienne41 : c’est alors que l’on trouvait trace de formulations qui, au pluriel, atténuaient dans les apparences la distance institutionnelle qui existait entre des personnes du collège impérial42, et donnaient même l’impression de l’effacer. Il faut d’ailleurs, sur cette question, distinguer entre deux formes d’expression que l’on rapproche habituellement. L’une correspond à l’usage, ici constaté, de la confusion qui permet de réunir sous le nom d’Auguste tous les membres d’un collège impérial, même s’il est hiérarchisé : c’est ce que l’on découvre dans la formulation des titres des représentants du pouvoir, notamment les autorités provinciales, gouverneurs de provinces qui n’hésitent pas à se dire légats de plusieurs Augustes alors que tel n’est pas le cas, procurateurs qui se disent liés de même à autant d’empereurs qu’il y a de personnes dans le collège impérial. L’autre concerne l’usage, tout aussi fréquent, de l’adjonction du titre Augustus dans la citation d’un jeune prince appelé Caesar ou nobilissimus Caesar43. Mais du temps de Wilmanns ce sujet, qui appartient autant à l’expression du droit public qu’à la description d’une situation d’histoire politique, était loin d’être bien nourri de réflexions ou clairement exposé44. Aussi ce savant (ad CIL, VIII, 10132) écrivait-il – ce que Pflaum met en évidence : « quod adserit Victor (Caes. 32, 3) Gallienum non statim Augustum factum esse, sed primum Caesarem, hoc titulo stabilitur, modo recte exceptus sit ». Après avoir envisagé les conséquences de l’établissement du texte, Wilmanns jetait à la fin de ses observations une suspicion sur le document, alors même qu’il avait clairement posé le problème à résoudre45. Le texte, comparé à d’autres documents officiels, s’échelonnant tout au long du iiie siècle, montrait toutefois qu’il faut comprendre que le titre d’Auguste avait été inscrit comme ajout élogieux, mais que l’indication précédente (nobilissimus Caesar) établissait avec certitude le statut subordonné de Gallien dans le collège impérial.

  • 46 CIL, VIII, 10141 = 22215. La version de la base Clauss-Slaby (consultée le 3/3/2018, puis le 6/1/ (...)

23Un second texte l’accompagnait, provenant, comme le premier cité, de la voie Theueste-Cirta (à Mrâkib Talha, c’est-à-dire à Macomades, à proximité de milliaires de Carus et les siens, puis de Numérien ; déposée au bordj d’Oum el Bouaghi, d’après Gsell), mais il reçut dans le CIL, VIII deux éditions, d’abord par Wilmanns (en 1881), puis par Schmidt, Cagnat et Dessau (en 1904)46. Dans un premier temps, on avait édité ainsi le document (CIL, VIII, 10141 [Wilmanns en 1881, d’après Poulle, RSAC 19, 1878, p. 350]) : Imp(eratori) Caes(ari) Licinio Valeriano P(io) F(elici) Aug(usto) et Licinio Gal(l)ieno nobilissimo Aug(usto) ; tel qu’il était donné il n’entrait donc pas dans le sujet à traiter. Mais par la suite un texte un peu différent fut établi et put le remplacer (CIL, VIII, 22215 [Schmidt, Cagnat et Dessau en 1904]) à la suite d’une révision de Gsell, BCTH, 1896, p. 204, no 142] : Imp(eratori) Caes(ari) Licinio Valeriano P(io) F(elici) Aug(usto) et P(ublio) Licinio Gallienio (sic : Gsell) nobilissimo Caes(ari).

24Avec cette révision il entrait pleinement dans le sujet. La sagacité de Gsell avait apporté une meilleure édition. Mais ce savant n’ajoutait rien sur le problème que faisait apparaître sa lecture par rapport au jugement exprimé par Wilmanns quelques années plus tôt : inattention, souci de publier dans des délais rapides de nouveaux documents (il n’y avait pas de renvoi à la première édition, et donc pas d’inventaire des divergences ou des progrès). C’est ainsi que, lorsque Schmidt, Cagnat et Dessau en 1904 firent entrer à nouveau le texte dans le volume VIII du CIL, s’ils ajoutèrent un commentaire, ce fut, non sur le sens à donner à ce qu’ils considéraient comme la meilleure lecture, mais sur la possibilité ou non de l’identification de ce texte avec le texte plus ancien qui provenait du même lieu. Après avoir noté soigneusement les divergences de lecture, ils concluaient : « nec tamen diversam crediderim cum exempla in distributione versuum 3-4 consentiant ». L’intérêt porté au document concernait le problème premier que se pose l’épigraphiste, celui de la place du document découvert dans un recueil : s’agit-il d’une nouvelle inscription ou simplement d’une nouvelle lecture ? Doit-on se prémunir de la création d’un doublon ? Il ne s’agissait pas de se déterminer sur le sens à donner à ce qui avait été écrit, c’est-à-dire au contenu du texte : le problème posé par la chute du commentaire de Wilmanns demeurait, alors qu’on aurait pu avancer que le texte n’était pas isolé.

25Dans ce cas, c’est l’usage du qualificatif nobilissimus qui donne toute sa valeur au titre de Caesar, car il redouble, peut-on dire, l’évidence. Ce document est donc important dans l’horizon de la preuve à apporter aux sceptiques. Mais il y a, de plus, dans le texte de cette borne routière, l’assemblage de la présentation de Valérien et de celle de Gallien : le texte donne à voir, sans la moindre ambiguïté, la distance qui s’établit, pendant quelque temps, entre la position du père et celle du fils, car en même temps il montrait que le Césarat de Gallien accompagnait dans le temps l’Augustat de Valérien.

  • 47 CIL, VIII, 22517.
  • 48 Manni 1947a, p. 131, n. 1.
  • 49 Zaccaria 1976, p. 347, n. 14.
  • 50 On relèvera que C. Zaccaria, au terme de son étude se demande comment interpréter les premières i (...)

26Une fois ce commentaire effectué, et le fait institutionnel constaté et admis, il n’y a peut-être plus de raison suffisante pour écarter du dossier – ou pour introduire un doute sur l’intérêt qu’elle apporterait au sujet – une troisième inscription, elle aussi une borne milliaire47. E. Manni n’avait pas hésité à la prendre en considération48. C. Zaccaria avait signalé le choix de son prédécesseur mais il préférait l’écarter comme insuffisamment probante, ce qui semble d’une prudence excessive49. Ce milliaire provient de la voie Lamasba-Ngaous (à Hr Guellil, avec un milliaire très incomplet de Trébonien Galle et de Volusien (CIL, VIII, 10405), complété pour sa partie supérieure par St. Gsell (1893, p. 118, no 73, d’où CIL, VIII, 22515). Le texte se présente de la sorte (CIL, VIII, 22517 [Schmidt, Cagnat, Dessau en 1904, d’après Gsell 1893, p. 121, no 78] : dd(ominis) nn(ostris) impp(eratoribus) P(ublio) Licinio Valeriano Aug(usto) et P(ublio) Licinio Gallieno Caes(ari) Aug(usto) m(illia) p(assuum) [-]. On doit envisager que, par l’emploi d’une formulation au pluriel, l’attraction qu’exerce la présentation du prince majeur a marqué la présentation du prince mineur, dans ce collège impérial hiérarchisé, et a eu pour effet d’atténuer la distance existante50. Et, faut-il ajouter, l’attribution aux deux princes du titre d’imperator enlève quasiment à cette collégialité toute notation d’inégalité ou de hiérarchie, pouvant en conséquence faire penser que le mot Caesar, qui introduit la seule différence de statut, proviendrait d’une maladresse de rédaction.

  • 51 CIL, VIII, 22226 ; 10122 et p. 2122 ; 10300 ; AE 1954, 130 ; ILAlg. II, 3, 7836 ; II, 2, 4542 ; C (...)

27Certes l’évidence du statut de Gallien n’est pas renforcée par les mots comme dans les cas précédents, mais on peut, en se référant à l’étude qui fut réalisée par H.-G. Pflaum et poursuivie par C. Zaccaria, considérer qu’il était normal qu’un César reçoive assez souvent, comme par excès d’adulation, le titre d’Auguste. Il faut surtout retenir qu’une objection possible est levée par la relecture que fit Gsell du milliaire précédemment cité : sur celui-ci étaient aussi inscrits les noms de Valérien et de Gallien, mais la dissymétrie de situation institutionnelle était toutefois signalée plus fermement. Cette manière de présenter le collège impérial, telle qu’elle s’exprime dans le texte du dernier des documents cités, montre comment on établissait, au milieu du iiie s., sur une borne routière la distinction entre le premier prince cité et le second. Ainsi, à notre avis on doit plus rapprocher ce document du précédent que de tous ceux qui, par la suite, présenteront Valérien et Gallien sur un pied de complète égalité, qu’il s’agisse de bornes milliaires ou d’inscriptions honorifiques dans les cités51.

  • 52 Pflaum 1966 (1978, p. 229-236), d’où AE 1967, 584.

28Enfin, en ajoutant un nouveau document, provenant d’Oum el Bouaghi, localité qui, au sud de la Confédération cirtéenne et sur la même voie de Theueste à Cirta, était celle proche des découvertes des premiers milliaires ici examinés, H.-G. Pflaum a pu reprendre l’ensemble du dossier et en tirer toutes les conséquences52 : P(ublio) Licinio / Gallieno / nobilissi/mo Caes(ari) Aug(usto).

  • 53 Il vaut la peine de relever comment Pflaum met en évidence la chaîne des omissions qui traverse l (...)

29Le texte qui est ainsi venu s’ajouter plus récemment est tout à fait comparable à celui que Dewulf avait copié, c’est-à-dire le premier document épigraphique connu, qui suscita la réaction de Wilmanns – celle-ci, reprise de proche en proche – figeant par la suite l’interprétation que l’on peut considérer comme négative53. Le réexamen du dossier, tel qu’on l’a présenté ici, conduit à retenir, en définitive, que le Césarat de Gallien est un fait institutionnel avéré, et qu’il n’y a pas lieu d’en récuser l’évidence. Il convient d’ajouter qu’il fut nécessairement diffusé par les canaux de l’information officielle. Aussi s’insère-t-il dans la reconstruction de l’histoire institutionnelle du nouveau principat.

4. L’histoire institutionnelle du nouveau principat

30On suivra les conclusions de Pflaum, reprises et complétées par C. Zaccaria, que n’ébranlent pas les objections soulevées par M. Peachin : si le témoignage des historiens latins pourrait dépendre d’une source unique, la Kaisergeschichte d’Enmann (EKG), ce n’est pas une raison suffisante pour en minorer l’apport et récuser en contrecoup la valeur des témoignages épigraphiques provenant de la province de Numidie. Si ces derniers pouvaient dépendre d’une inspiration unique, provenant, selon toute vraisemblance, du gouverneur de la province, ils revêtent alors un caractère officiel, dont il convient de mettre au jour les soubassements institutionnels : l’information circulant du cœur de l’empire vers les provinces, l’existence de lieux où se créait une information publique. On n’échappe pas, en effet, au constat qu’il fallait pour le gouverneur de la province, ou pour une autorité présente sur les lieux, un acte public annonçant ce qui s’était produit à Rome et pourquoi il fallait considérer comme légitime le pouvoir du jeune homme tel qu’il était donné. Cette information avait alors circulé de l’autorité provinciale jusqu’aux divers lieux où l’on érigeait les bornes milliaires.

  • 54 Voir n. 34. De toute façon, l’inscription CIL, VIII, 2482, cf. p. 1716 (= 17976) est antérieure a (...)
  • 55 Pour la position adoptée par Zaccaria voir supra n. 50 : elle conduirait à élargir davantage la p (...)

31Mais, faut-il ajouter tout de suite, ce fut sans aucun doute une situation éphémère, impliquant vraisemblablement la reconnaissance préalable du pouvoir de Valérien. L’inscription de Gemellae qui rend hommage à la Victoria Aug(usta), le 22 octobre 253, faisait état d’une nouvelle situation institutionnelle54, Valérien et Gallien étant alors, ensemble, dotés du rang d’Auguste, puisqu’ils étaient liés fermement par le formulaire : Vic(toriae) Aug(ustae) pro sal(ute) dd(ominorum) nn(ostrorum) Valeriani et Gallieni [Augg(ustorum)] etc., selon la restitution la plus vraisemblable. Valérien avait alors pleinement associé à son pouvoir son fils Gallien, et, peut-on penser, les distinctions qui existaient dans les inscriptions de la première période du nouveau pouvoir n’avaient plus lieu d’être rappelées55.

⁎ ⁎ ⁎

32On est en conséquence placé devant une alternative : soit considérer que, comme cela se produisit avant ou après cette période, Valérien aurait associé à son pouvoir son fils Gallien comme nobilissimus Caesar, mais pour une période assez courte, rehaussant avant même la fin de l’année sa position et l’établissant à ses côtés avec les pouvoirs de l’Augustat, soit envisager une situation un peu plus originale, au cours de laquelle le Sénat, de sa propre initiative, aurait défini les pouvoirs de Gallien, Valérien tenant compte de cette situation pendant un temps assez court avant de la modifier. On observera que cette position n’est pas exclue par Zaccaria dans sa conclusion.

  • 56 Den Boer 1972, p. 75-76 ; voir aussi les commentaires de P. Dufraigne (1975, p. 155-169).
  • 57 Vict., Caes., 33, 33-34, cf. 37, 5-6 (dans la narration du règne de Probus) ; De Blois 1978, p. 7 (...)

33La première partie de l’alternative se conforme aux modalités les plus constantes de l’association d’un enfant comme collègue par un prince plus âgé, à l’exception du cas de Gordien III en 238. La seconde partie de l’alternative oblige, au sein des témoignages littéraires, de mettre en valeur celui d’Aurelius Victor. Dépendant de l’EKG, il a peut-être éprouvé le besoin d’accentuer dans sa narration les interprétations qui, de longue date, s’étaient exprimées dans l’aristocratie sénatoriale56, quitte à surévaluer des signes ou des indications impliquant le Sénat et les sénateurs. Sans aucun doute la matière qui est livrée à la postérité est colorée d’une manière qui doit éveiller le soupçon d’une surévaluation de la situation politique décrite, d’autant qu’à cet instant de la narration de l’histoire impériale, il est vrai, Victor parsème son récit de notations ou d’interprétations très orientées. Il donnerait en particulier à la description des débuts du règne un éclairage partial pour mieux argumenter sur la portée négative qu’il attribuerait in fine à l’action de Gallien, notamment lorsqu’il relate les épisodes consécutifs à l’annonce, à Rome, de l’élimination de ce prince, en 268. C’est là, en indiquant que les sénateurs lui reprochaient une hostilité qui l’aurait conduit à les dépouiller de l’essentiel de leur influence dans la conduite des troupes, il livre les clés interprétatives de l’état d’esprit dans lequel il présente la période du règne de Gallien57. Mais en même temps on doit relever que, d’une manière générale, les événements qui se déroulent dans la ville de Rome suscitent son attention et que ce qui touche à l’évolution institutionnelle du principat l’intéresse : ces orientations idéologiques, qui s’expriment régulièrement dans s⁎a narration de l’histoire impériale, ont aussi le mérite de ne pas affadir celle qu’il propose à ce moment précis. On peut donc estimer, comme l’envisageaient Pflaum et Zaccaria, que dans le contexte qui lui est donné l’originalité de son observation demeurerait pertinente, une fois qu’on a débarrassé son texte de tous les excès idéologiques.

  • 58 Ce que ne prend pas suffisamment en compte Peachin 1988, p. 222.

34Quant aux sources épigraphiques, elles n’ont pas une finalité narrative, même si elles aident à relater une histoire institutionnelle. L’installation des bornes milliaires dépend des représentants de l’autorité publique, qui réagissent à des impulsions issues du centre de l’empire : soit directement s’ils prennent l’initiative de l’installation, soit indirectement s’ils délèguent cette responsabilité aux cités. C’est ainsi que descend dans le quotidien provincial ou municipal l’affichage de l’organisation des pouvoirs aux sommets de l’État. Les altérations de forme qui in fine se produisent ne doivent pas conduire à renoncer aux principes fondateurs58. C’est pourquoi, sur le positionnement des membres du collège impérial, les bornes milliaires livrent des indications essentielles, et il est aisé de distinguer ce qui parfois est dans leur texte élément d’éloge, abus de langage ou même ce qui, dans des milliaires-dédicaces, apporte des éléments complémentaires sur des membres de la domus diuina. Mais la trame d’énonciation contient avant tout des noms, des titres et un ordre de citation, le protocole impérial.

  • 59 Sur les réseaux qui gravitaient autour de Valérien (P. Licinius Valerianus) et de son épouse, Egn (...)
  • 60 Mais l’existence d’un milliaire pour un César n’impliquerait-elle peut-être pas celle d’un millia (...)
  • 61 Voir la bibliographie réunie à la n. 16. Dans la documentation sur cet épisode de l’histoire impé (...)

35Les données qu’apportent les milliaires en plusieurs lieux de la Numidie ne peuvent conduire, ni à minimiser ni, surtout, à nier l’existence d’une situation spécifique qui serait apparue à Rome et qu’il conviendrait d’expliquer. Sans que l’on soit obligé d’envisager que seule la victoire de Valérien, son entrée à Rome, l’achèvement des processus d’investiture, auraient pu faire apparaître le Césarat de Gallien, le Sénat ratifiant alors la volonté paternelle, l’autre solution ferait mieux comprendre la présentation qu’offre Aurelius Victor d’une situation qui, dans la seconde moitié du ive siècle, pouvait lui apparaître comme exceptionnelle. L’action du Sénat se serait produite peu avant la victoire définitive de Valérien, quand celle-ci apparaissait comme vraisemblable sinon inéluctable, mais elle signifiait qu’elle était approbation de sa légitimité. Peu importait que le principal intéressé, Valérien, soit encore loin de Rome. Il suffisait que soient présents son fils et, bien sûr, les principaux appuis qu’il pouvait avoir dans cette élite dirigeante59. Sans que l’on puisse y retrouver la hardiesse qui s’était exprimée en 238 (mais Maximin était très loin de Rome), l’acte du Sénat aurait pu passer pour une initiative audacieuse, et comme une adhésion de pleine volonté. L’année 193 avait connu, en mai et en juin, des épisodes assez comparables, également en temps de guerre civile, concernant Didius Julianus et Septime Sévère. La narration d’Aurelius Victor inviterait alors à distinguer, comme pour Septime Sévère, entre le jour de reconnaissance par le Sénat et le jour de l’entrée dans Rome, parachèvement de l’investiture au Capitole, devant les dieux de la cité. En définitive, l’élévation de ce prince, au nord des Alpes, fait apparaître une période intermédiaire, plutôt brève, durant laquelle son pouvoir fut limité dans l’espace, et surtout non reconnu comme légitime par le Sénat, incapable d’agir tant qu’Émilien n’avait pas quitté Rome. Il aurait fallu attendre un peu pour que, dans une ville dégarnie de troupes fidèles à Émilien, se produise de la part du Sénat la reconnaissance de la légitimité de Valérien, absent, auquel on aurait joint Gallien comme César. Cette élévation de Gallien était alors le complément, donné peut-être sans que l’initiative ait été sollicitée par son père, à la reconnaissance de Valérien, le principal bénéficiaire de la décision des sénateurs60. Et, chronologiquement, l’épisode aurait aussi précédé de peu la date de l’élimination d’Émilien61. Enfin, à l’initiative de son père, aurait eu lieu la promotion de Gallien au rang d’Auguste, comme en témoignerait l’inscription de Gemellae, dans laquelle ce sont les soldats eux-mêmes qui exaltent la victoire impériale, à la fin du mois d’octobre 253. La sensibilité des provinces africaines aux événements romains s’est ainsi traduite d’une manière très forte, ce qui donne à la documentation les traits d’originalité que l’on a relevés. Avec les bornes milliaires on dispose ainsi, à ce même moment de l’histoire impériale, d’échos qui répondaient avec un faible décalage temporel aux événements romains et à leur traduction dans les formes institutionnelles de la vie politique.

  • 62 Amm. XXVII, 6, 16 : in hoc tamen negotio Valentinianus morem institutum antiquitus supergressus, (...)

36Mais on n’oubliera pas que cette documentation, qui fait conclure à l’existence du Césarat de Gallien, même si ce n’est que pour une durée assez limitée, donne davantage de poids à une observation d’Ammien Marcellin (XXVII, 6, 4-16), qui faisait remarquer qu’en nommant directement Augustes à ses côtés son frère Valens en 364 et son fils Gratien en 367, Valentinien Ier agissait d’une manière qui n’avait connu qu’un seul précédent, celui de l’élévation de Lucius Verus par Marc Aurèle en 16162, outrepassant ainsi l’usage fixé de longue date (mos institutum antiquitus). Ainsi Gallien n’aurait pas été immédiatement Auguste, et sa position de César, pour un temps assez limité, serait ainsi, par une source de nature littéraire, suggérée comme vraisemblable. Quant aux sources épigraphiques, il ne paraît pas possible de les écarter : les documents routiers provenant de la province de Numidie apportent sur le sujet un témoignage qu’il est difficile de récuser. L’Afrique voisine devait se trouver dans les mêmes conditions de réceptivité.

  • 63 Loriot 1975, p. 707-710 ; sur ce titre CIL, XIV, 3902 (ILS 1186)

37Il y a lieu, de même, si l’on revient à Rome, de ne pas récuser l’intervention active du Sénat dans le jeu des événements de l’année 253, établissant une ressemblance avec le déroulement des faits de l’année 238. Mais le parallèle tourne finalement assez court, car on ne retrouve aucun des traits spécifiques de la vie institutionnelle de l’empire qui caractérisaient cet épisode majeur de l’histoire politique du iiie siècle, quand il s’étendit dans le temps, en particulier la création de la commission exécutive des uigintiuiri ex senatus consulto rei publicae curandae, décision précoce et fondatrice qui faisait apparaître l’inspiration idéologique de l’autorité et du pouvoir que souhaitaient se donner les sénateurs63. On assura à Rome une transition dans un cadre politique et institutionnel qui conservait ses traits traditionnels, comme d’ailleurs l’avait été en 238 la réaction aux événements africains qui, initialement, avaient mis en avant les Gordiens. En somme, s’il convient, avec Goltz et Hartmann, puis avec Geiger, de ne pas majorer l’ampleur et la signification de l’épisode relaté par Aurelius Victor, il est nécessaire aussi de ne pas effacer les particularités de l’événement qui est décrit. La documentation épigraphique provenant de Numidie, en apportant un écho quasi-immédiat à l’événement romain, en retira une originalité que l’on ne doit pas récuser.

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Notes

1 Christol 2002, 2003 et 2006a.

2 Appréciation de l’ensemble du mouvement historique dans Christol 2006b, p.117-130 ; plus récemment Christol et alii 2021, p. 795-846.

3 Zon., XII, 22, 138 Dindorf, qu’il faut rapprocher de Petr. Patric. (exc. de sent., 158, 264 Boissevain = FGH IV, 193, fragm. 2 Müller) ; Bersanetti 1948, p. 267-269 ; Mazzarino 1975 ; Bleckmann 1992, p. 289-291.

4 Christol 1980 ; l’effort de guerre engagé en Orient dès 252 est confirmé par les découvertes épigraphiques d’Apamée de Syrie : Balty 1987 ; Grenet 1988.

5 Comme l’indiqueraient les inscriptions concernant M. Aurelius Vitalis et M. Cornelius Octavianus : Thomasson 1996, p. 219-220, nos 45 et 46. Le cadre donné aux responsabilités du dernier nommé est remarquable car il fut désigné pour tenir un commandement exceptionnel, le faisant qualifier de dux per Africam Numidiam Mauretaniamque dans CIL, VIII, 12896 (ILS 2774) (Bisica Lucana, en Proconsulaire) ; voir aussi AE 1907, 4 : [---] Bauaribus rebellibus et in [p]riori praesidatu [e]t post in ducatu.

6 Loriot 1975, p. 670-671, à propos de Maximin le Thrace.

7 Hdn 7, 7, 4-5 ; Loriot 1975, p. 697-700.

8 Carthage était aussi en relations très étroites avec la capitale, comme le montrent quelques renseignements que l’on peut tirer des Lettres de Cyprien qui connaît très rapidement les rumeurs de la capitale et la nature des décisions qui pourraient être prises par les autorités. C’est ce qui se serait produit à l’approche de la mi-253 quand s’était engagée, mais pour peu de temps, la persécution dite de Trébonien Galle, qui fut moins redoutable qu’attendu, car on peut envisager que la disparition de ce prince et de son fils Volusianus mit un terme à la poursuite des chrétiens : Christol 2006c, p. 464-471, surtout p. 469-470 sur l’interprétation de Cypr., epist. 59 et 60, par rapport aux événements de l’année 253. C’est ce qui se reproduisit en 258, lorsque la seconde phase de la persécution fut engagée : Cypr., epist. 80 et 81, à rapprocher des éléments chronologiques contenus par le texte qui présente les deux phases de la passion, en 257 et en 258 ; sur le contexte institutionnel Christol 1999, 346-348 ; la chronologie est peut-être aussi liée au dies imperii de Valérien.

9 Salama 1951a, p. 264-269.

10 Christol 1990.

11 Hdn 7, 9, 1-2. Loriot 1975, p. 700-702.

12 La Maurétanie césarienne apporte plusieurs témoignages de la fidélité à Pupien, Balbin et Gordien III César : CIL, VIII, 22586 ; AE 1937, 32 = 1955, 221 ; AE 1912 158 ; AE 1993, 1778 ; CIL, VIII, 10342 ; 10365 et p. 2143 (= ILS 496). Les témoignages provenant plus particulièrement de la partie orientale de la province indiqueraient que cette fidélité dut se transformer en concours actif lorsqu’il fallut s’imposer aux troupes de Capellianus et récupérer la province de Numidie avant de châtier les légionnaires de la III Augusta ; Benabou 1976, p. 207-211 ; Benseddik 1979, p. 237 sur CIL, VIII, 2716, qui met en évidence la uexillatio militum Maurorum Caesarensium Gordianorum honorant Gordien III à Lambèse.

13 Christol 1980. C’est un sujet que viennent renouveler les nouveautés apportées à l’œuvre de Dexippe.

14 Voir supra n. 4. Il faut aussi tenir compte de l’apport des papyrus du Moyen-Euphrate : Feissel, Gascou 1989 et 1995 ; Gnoli 2000, mais avec parfois des hypothèses audacieuses.

15 Rathbone 1986, p. 115-117, qui remplace avantageusement Bureth 1964, p. 117 ; Kienast 2004, p. 212-213. On pourrait même ne pas dépasser septembre 253 : voir infra n. 62.

16 Voir, à ce propos Rathbone 1986, p. 117. Sur le sujet : Christol 1975, p. 809 ; Huttner 2008, p. 216 ; Burgess 2014, p. 76-77 et 179 (qui revoit les sources et la bibliographie dans leur ensemble). Le cadre interprétatif a été bien fixé depuis Manni 1947b et Bersanetti 1948, que l’on complètera par les références de la n. 52 pour les éléments documentaires nouveaux et les nouvelles interprétations des documents déjà connus.

17 Déjà Bersanetti 1948, p. 258-260.

18 Sur les témoignages numismatiques, voir à présent Hostein, Mairat 2016, 3, 11-12, 41-49 et dans le catalogue, p. 71-72 (atelier de Dacie) ainsi que p. 67 (atelier de Viminacium).

19 Dans cette partie de l’empire s’est ajoutée une autre inscription, par rapport à l’inventaire de Bersanetti 1948 : AE 1983, 901, sur la grande voie militaire reliant le Bosphore aux Portes de Cilicie.

20 PIR2 C 1502, cf. A 330 ; Huttner 2008, p. 217-218.

21 Sur cette abondante documentation déjà Meloni 1966, p. 217-222, ainsi que Thomasson 1984-2009, 10-11, 02-36.

22 Ce témoignage indirect se trouve sur un hommage public provenant de Volubilis : CIL, VIII, 21829 = ILMar I, 75 = IAM II, 405 : Bersanetti 1948, p. 259 n. 3.

23 AE 2016, 1915, s’ajoutant à l’interprétation donnée par Salama de CIL, VIII, 21989 : Salama 1987, p. 36-40 et 115 n. 144, suivi par Z. Ben Abdallah (1986, p. 190-191, no 483). Mais faut-il minorer cette suppression des noms impériaux ? Salama avait peut-être un avis différent du nôtre pour les martelages et les regravures qui affectèrent l’inscription de Tiddis, qui sera examinée plus loin. Toutefois il convient de constater que dans ce cas le processus d’élimination de la mémoire impériale ne paraît pas avoir été systématique, car sur plusieurs inscriptions de la province d’Afrique, dans le texte desquelles apparaissent Trébonien Galle et Volusien, leurs noms n’ont pas été martelés : BCTH 1955-1956, p. 110 ; Kallala 2006, p. 1798-1800, no 2 (d’où AE 2006, 1776 ; milliaire de la voie Carthage-Theueste) ; CIL, VIII, 22128 = ILTun 1732 ; AE 2016, 1894 ; CIL, VIII, 10046. Il en va de même dans la voisine Numidie.

24 Voir aussi les observations de P. Salama (1951a, p. 232 n. 42).

25 Voir aussi Salama 1951a, p. 232.

26 On se référera à la carte établie par P. Salama (1951b).

27 CIL, VIII, 2615 (ILS 1194) ; Thomasson 1996, p. 189-190 ; Christol 2002, 2003, et 2006a.

28 Ballu 1911, p. 114, no 14 (sans identification des noms martelés), d’où AE 1911, 104 (Cagnat : avec identification des noms martelés, à partir d’une révision sur estampage), puis ILS 9498 (ouvrage achevé en 1916).

29 Salama 1951a, p. 230-232, no 9. Elle ne figure pas dans l’édition récente par X. Dupuis des ILAlg II, 2, car il s’agit d’une borne milliaire, qui trouvera à part sa publication.

30 PIR2 C 1502 ; Kienast 2004, p. 212-213.

31 CIL, V, 530 = IIt. X, 4, 26.

32 Les travaux qui sont rappelés le sont aussi sur deux milliaires des mêmes empereurs Trébonien Galle et Volusien, dans la région correspondant à la confédération cirtéenne : CIL, VIII, 10323 = 22365 ; 10830 cf. p. 2138.

33 ILAlg. II, 2, 3596 : Ex indulgentia prouidentiaq(ue) diuina dd(ominorum) nn(ostrorum) Impp(eratorum) Galli et Vollusiani (sic) Augg(ustorum), M(arcus) Cocceius Anicius Faustus Flauianus consularis et XVuir curator et patronus coloniar(um) Cirt(ensium), egestis per populum quae uicina superauerant ruderibus, caesoque ad planitiem qui nudatus extiterat monte ad salutem populi aquam excipi prouidit (les mots Galli et Vollusiani ont été inscrits dans une rasura). On indique en général que Trébonien Galle et Volusien auraient remplacé Dèce et Herennius Etruscus, point de vue de Pflaum ad ILAlg, repris par Fr. Jacques (1983, p. 205). La solution différente, qui paraît préférable, serait de considérer que le martelage initial serait une première expression du ralliement à Émilien, imposé par l’autorité, puis que la regravure revenant au texte originel serait la marque du ralliement à Valérien et à Gallien, et de l’expression renouvelée de leur reconnaissance : Christol 1986, p. 153-154.

34 CIL, VIII, 2482, cf. p. 1716 (= 17976); Kienast 2004, p. 214. Voir aussi, infra notes 42 et 54.

35 Pflaum 1966 (= 1978, 229-236) ; Zaccaria 1976. On peut ajouter par exemple A. Lippold, dans son commentaire d’Orose : Orosio, Le storie contro i pagani, II, Milan, 1976, p. 489-490.

36 Kienast 2004, p. 218. Peu d’attention a été portée à ce détail d’histoire politique et institutionnelle : Kornemann 1930, p. 102 ; une brève mention par L. De Blois (1976, p. 23).

37 Peachin 1988; 1990, p. 39.

38 Goltz, Hartmann 2008, 227; Geiger 2013, p. 82-83.

39 Sur le même tronçon de voie on notera CIL, VIII, 10126 : Imp(eratori) Caesa[ri] / P(ublio) Licinio / Valeriann(o) / Aug(usto) et P(ublio) Li/cinio Gallie/no [--- . À première vue on pourrait estimer que l’on se placerait à un moment où Gallien aurait été revêtu du titre d’Auguste. Mais on remarquera que le texte est pour l’essentiel, dans ce qu’il en reste, très voisin de celui que l’on trouve sur le milliaire de la voie Theueste-Cirta, dans le voisinage de Macomades, tel que le révisa Gsell : CIL, VIII, 10141 = 22215 (voir aussi n. 45).

40 Voir supra n. 34. Pour la variabilité des compétences de ces jeunes princes, selon les moments, notamment en matière d’association à la fonction normative, Christol 1999, p. 347-348.

41 Le premier exemple qui pourrait éclairer cette pratique se trouve dans une inscription de Lambèse adressée à Caracalla (CIL, VIII, 18256 = Marcillet-Jaubert 1967, p. 76-77 = AE 1967, 567) : M(arco) Aurelio Antonino Caesari imp(eratori) destinato, imp(eratoris) L(ucii) Septimi Seueri Aug(usti) Pii propagatoris imperii filio, dedicante Q(uinto) Anicio Fausto, leg(ato) Augg(ustorum) pr(o) pr(aetore), patrono municipii d(ecreto) d(ecurionum) p(ecunia) p(ublica). Caracalla, qui avait le rang de Caesar, avait peut-être été ainsi honoré à l’occasion de son élévation au rang d’imperator destinatus : le légat qui élève l’hommage, Q. Anicius Faustus, se dénomme legatus Augg(ustorum), étendant ainsi au jeune prince l’usage du titre qui qualifie le détenteur du pouvoir le plus élevé.

42 C’est pour cette raison que le témoignage provenant de Gemellae (CIL, VIII, 2482, cf. p. 1716 (= 17976) faisant allusion aux princes régnants sous une forme plurielle, dd(omini) nn(ostri), qui incite logiquement à restituer le pluriel Augg à la ligne suivante, comme on l’indiquera infra. Mais on pourrait envisager une autre interprétation et une restitution un peu différente, comme le fait Zaccaria (n. 49), même si, pour notre part, elle ne devrait pas être retenue (voir infra). En tout cas on doit faire, à juste titre (cf. n. 54), de ce témoignage et de la date qu’il apporte un repère essentiel pour l’association de Gallien au pouvoir impérial, sans qu’il interfère dans le débat sur le Césarat. On observera plutôt qu’il conviendrait de mieux éclairer le sens du texte dans la perspective d’une meilleure compréhension des circonstances de la restauration de la légion III Augusta.

43 Les exemples de cette forme de citation d’un Caesar proviennent, pour Geta en 201, des inscriptions de Bu Njem (IRT 914-916) : Pflaum 1966, p. 178 (= 1978, p. 232). Mais il faut relever que l’épigraphie dite « juridique », perceptible dans les intitulés des constitutions impériales ou des lettres impériales, échappe à cette tendance et offre le moyen de saisir avec plus d’exactitude et de rigueur la position des divers membres d’un collège impérial : sur ce point Christol 1999, p. 338. Voir aussi les notations de C. Zaccaria (1976, p. 354-359).

44 Les indications sont réduites, mais classées, dans le Droit public de Mommsen (qui parut en 1871), sans que le problème soit examiné en détail : Mommsen 1896, V, p. 480-482.

45 Pflaum 1966 (= 1978, p. 229-236) ; ce savant, p. 176-177 (= 1978, p. 230-231) fait observer que Wilmanns avait à sa disposition des documents probants, provenant des cités africaines, appartenant à la même période : il s’agissait d’inscriptions relatives à un des jeunes fils de Gallien, élevé aussi au rang de Caesar quelques années plus tard (CIL, VIII, 2382 et 8473), qu’il avait inclus dans les Exempla Inscriptionum Latinarum).

46 CIL, VIII, 10141 = 22215. La version de la base Clauss-Slaby (consultée le 3/3/2018, puis le 6/1/2023) ne tient compte que de la première édition.

47 CIL, VIII, 22517.

48 Manni 1947a, p. 131, n. 1.

49 Zaccaria 1976, p. 347, n. 14.

50 On relèvera que C. Zaccaria, au terme de son étude se demande comment interpréter les premières inscriptions où l’usage du pluriel conduirait à effacer la distance séparant Gallien de Valérien : Zaccaria 1976, p. 360-361 sur l’inscription de Gemellae.

51 CIL, VIII, 22226 ; 10122 et p. 2122 ; 10300 ; AE 1954, 130 ; ILAlg. II, 3, 7836 ; II, 2, 4542 ; CIL, VIII, 4219 = 18499 ; 22 580 ; BCTH 1902, p. 507, 4.

52 Pflaum 1966 (1978, p. 229-236), d’où AE 1967, 584.

53 Il vaut la peine de relever comment Pflaum met en évidence la chaîne des omissions qui traverse la réflexion scientifique et qui se cache dans les pages du Corpus de Berlin, entraînant par un réflexe de confiance l’impossibilité de parvenir à la bonne interprétation.

54 Voir n. 34. De toute façon, l’inscription CIL, VIII, 2482, cf. p. 1716 (= 17976) est antérieure au 10 décembre 253. Autre document incontestable, appartenant dans ce l’on appelle aussi « l’épigraphie juridique », puisqu’il transmet le texte d’une constitution impériale, soumise à une grande rigueur de rédaction : le diplôme militaire du 7/1/254 (CIL, XVI, 155) ; il joue un rôle de terminus ante quem pour l’élévation de Gallien au rang d’Auguste. Mais les données sur les puissances tribuniciennes de Valérien et de Gallien, montrant qu’ils renouvelèrent la première d’entre elles le 10 décembre 253, font remonter jusqu’à cette date le terminus ante quem (cf. n. 15 ; voir aussi Zaccaria 1976, p. 346-347). C’est le point de vue également retenu par D. Kienast (2004), puis par M. Festy (1982). Les déductions envisagées par E. Manni (1947a et 1949b), ou par D. Armstrong (1987) compliquent l’explication d’ensemble du problème. Sur les distinctions à opérer dans l’approche des informations contenues par les diverses catégories de documents provenant du pouvoir ou inspirées par lui, Christol 1999 (et sur les anomalies que l’on relève ailleurs que dans les documents dits « d’épigraphie juridique », ibid., p. 349-357).

55 Pour la position adoptée par Zaccaria voir supra n. 50 : elle conduirait à élargir davantage la période du Césarat de Gallien. E. Manni (1949a, p. 13-14) ne reprend pas les questions relatives à l’établissement de la nouvelle dynastie, se contentant de renvoyer à l’article de 1947 (Manni 1947b).

56 Den Boer 1972, p. 75-76 ; voir aussi les commentaires de P. Dufraigne (1975, p. 155-169).

57 Vict., Caes., 33, 33-34, cf. 37, 5-6 (dans la narration du règne de Probus) ; De Blois 1978, p. 78-85.

58 Ce que ne prend pas suffisamment en compte Peachin 1988, p. 222.

59 Sur les réseaux qui gravitaient autour de Valérien (P. Licinius Valerianus) et de son épouse, Egnatia Mariniana, Chausson 1997.

60 Mais l’existence d’un milliaire pour un César n’impliquerait-elle peut-être pas celle d’un milliaire pour l’Auguste qui l’associe à son pouvoir ? Pour l’instant on n’a point trace de milliaire au seul nom de Valérien.

61 Voir la bibliographie réunie à la n. 16. Dans la documentation sur cet épisode de l’histoire impériale, résumé déjà par C. Zaccaria (1976, p. 161), il faut à présent tenir compte, au moins, de deux données nouvelles : l’apparition du « tyran » Silbannacus, à Rome (Estiot 1996 ; Huttner 2008, p. 218) et l’inscription de Martigny dont le texte a été amélioré par D. Van Berchem et Fr. Wiblé (1982 : AE 1977, 527 = 1982, 674).

62 Amm. XXVII, 6, 16 : in hoc tamen negotio Valentinianus morem institutum antiquitus supergressus, non Caesares sed Augustos germanum nuncupauit et filium, beniuole satis. Nec enim quisquam antehac adsciuit sibi pari potestate collegam, praeter principem Marcum, qui Verum, adoptiuum fratrem, absque diminutione aliqua auctoritatis imperatoriae socium fecit. Sur ce passage, Seston 1946, p. 62, utilisant l’argument pour faire admettre le Césarat de Maximien Hercule (ibid., p. 62-64), qui ne fait plus de doute ; voir aussi Festy 1982, p. 199-201 et Kienast 2004, p. 272.

63 Loriot 1975, p. 707-710 ; sur ce titre CIL, XIV, 3902 (ILS 1186)

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Pour citer cet article

Référence papier

Michel Christol, « Les milliaires africains et l’histoire impériale au milieu du iiie siècle de notre ère »Antiquités africaines, 59 | -1, 119-130.

Référence électronique

Michel Christol, « Les milliaires africains et l’histoire impériale au milieu du iiie siècle de notre ère »Antiquités africaines [En ligne], 59 | 2023, mis en ligne le 15 décembre 2023, consulté le 07 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/antafr/6284 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/antafr.6284

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Michel Christol

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