Justine Mac Connell, Edith Hall, Ancient Greek Myth in World Fiction since 1989
Justine Mac Connell, Edith Hall, Ancient Greek Myth in World Fiction since 1989, Londres–New York, Bloomsbury Publishing, 2016, 273 p., 90 livres / isbn 978-1-4725-7938-6
Texte intégral
1L’ouvrage résulte d’un colloque organisé en 2012 par E. Hall et K. Billotte. Les éditrices ont réuni quinze contributions portant sur des œuvres de toutes nationalités et couvrant une vingtaine d’années (de 1989 à 2009). Le projet d’ensemble est annoncé dans l’introduction : il s’agit de réfléchir aux tendances suivant lesquelles on a repris les mythes grecs dans la fiction d’après 1989 – autrement dit, la fin de la guerre froide, la chute de l’URSS, la montée d’une nouvelle ère postcoloniale et l’éclatement d’une série de conflits, comme ceux des Balkans ou de l’Irak.
2Dans cette nouvelle configuration mondiale, marquée entre autres par la globalisation culturelle, les éditrices pensent en effet que l’on peut trouver une certaine cohérence, dans la façon dont les mythes sont repris et liés au folklore d’autres époques et lieux d’une part, et dans leur exploitation pour permettre un geste critique, souvent social et politique, sur le monde décrit d’autre part. C’est cette cohérence par-delà les frontières, qui, d’après elles, permet de parler de world fiction, dans la lignée de la Weltliteratur définie d’abord par Goethe.
3Les éditrices signalent les précautions à prendre lorsqu’on utilise de telles notions et reconnaissent les critiques qu’elles peuvent susciter. Elles rappellent néanmoins l’enjeu politique et de dialogue culturel que ces questions représentent dans le monde d’aujourd’hui.
4L’introduction se termine sur une riche bibliographie sur ce sujet.
5Dans les essais qui suivent, les approches, les contours des œuvres étudiées et leurs contextes sont très disparates, si bien que la convergence annoncée en introduction n’apparaît pas toujours explicitement. En outre, les essais ne renvoient pas les uns aux autres lorsque des mises en relation seraient possibles (par exemple, les textes n° 1 et 4, qui étudient le roman brésilien, font des observations semblables sur son évolution pendant et après la dictature). Mais chacun des articles a un réel intérêt en soi et l’ouvrage dans son ensemble est une mine pour appréhender la réception du mythe grec dans la fiction récente.
6P. Rankine aborde le roman brésilien pendant la dictature militaire et après 1989, en le replaçant dans l’histoire du Brésil au xxe s., et dans une continuité de références aux mythes grecs.
7W. M. Hutchins se concentre sur un roman de l’écrivain d’origine libyenne I. Al-Koni, Les Mages (1989). Son originalité est qu’il combine le mythe et le folklore touaregs et arabes aux mythes de l’Égypte et de la Grèce anciennes.
8S. Perris étudie deux romans néozélandais de W. Ihimaera, The Matriarch (1986) et The Dream Swimmer (1997) (non traduits en français). Le premier s’inspire de l’épopée comme somme d’expériences, tandis que The Dream Swimmer reprend la trame conceptuelle de l’Orestie, en lien, à chaque fois, avec l’histoire des Maori.
9S. Frade aborde un roman brésilien publié en 1990, Videiras de Cristal, de L. A. de Assis Brasil (non traduit en français), qui porte sur l’histoire des Mucker dans le Brésil du xixe s., et sur les enjeux liés alors à la culture classique.
10L. Hardwick étudie deux exemples de « transition literature », une littérature de crise qui émerge de contextes de changements, pour y déceler la place du mythe. Il s’agit de Médée de Ch. Wolf, et de Ways of Dying (non traduit en français) de Z. Mda.
11G. Amitrano se concentre sur les références aux mythes grecs dans la littérature japonaise et, parmi plusieurs exemples, aborde l’œuvre de Murakami, en particulier Kafka sur le rivage (2002), inspiré d’Œdipe Roi.
12A. Ganz propose une étude de la série The Wire, fondée sur les déclarations de son créateur, D. Simon, à propos de son remploi de la tragédie et de l’Iliade. Cet héritage lui permet en particulier de dramatiser le conflit entre les forces de l’ordre et la culture de la drogue.
13F. Macintosh aborde un roman canadien de Th. Kishkan, A man in a Distant Field (2004, non traduit en français) et montre comment le biais de l’Odyssée, via Joyce, permet d’y présenter une réflexion sur l’histoire de l’Irlande aux xixe et xxe s.
14A. Ljunggren étudie ensuite le roman russe Minotaure.com : Le Heaume d’horreur de V. Pelevine, paru en 2005. Dans cette œuvre expérimentale écrite sous la forme d’un chat, le mythe du Minotaure permet de réfléchir à la nature de la nouvelle communauté crée par internet.
15S. Matzner aborde la manière dont B. Schlink, dans Le Retour, utilise la construction odysséenne pour mettre les relations familiales au centre de l’interrogation sur la construction de l’identité nationale allemande.
16E. Hall propose une lecture des Bienveillantes de J. Littell en montrant la manière dont l’auteur y articule une recherche documentaire poussée sur l’holocauste au remploi de deux mythes en particulier, ceux d’Oreste et de Narcisse.
17E. Spentzou montre ensuite comment, dans le roman grec Aidonopita, d’I. Zourgos, paru en 2008, la culture grecque
classique est reprise pour exposer les mythes de colonisation qui entourent la Grèce moderne, et la question actuelle de l’identité grecque.
18M. Reynolds livre une étude de deux romans australiens, Une rançon de D. Malouf (2009) et Grand homme de Ch. Hooper (2008), où l’épopée homérique est le détour par lequel les auteurs abordent la violence systémique envers les Aborigènes.
19H. Eastman montre ensuite comment le début de ce millénaire a vu naître un nouveau type d’héroïne adolescente, inspirée d’Antigone, à travers deux exemples très différents, Une Antigone à Kandahar de J. Roy-Bhattacharya, et Hunger Games de S. Collins.
20Enfin, J. Mac Connell étudie l’emploi de deux mythes dans Ce qu’on peut lire dans l’air de D. Mengestu, la Télémachie et l’Orestie, et comme ils concourent à représenter l’expérience de la migration et la quête de l’identité.
Pour citer cet article
Référence papier
Anne de Cremoux, « Justine Mac Connell, Edith Hall, Ancient Greek Myth in World Fiction since 1989 », Anabases, 27 | 2018, 233-234.
Référence électronique
Anne de Cremoux, « Justine Mac Connell, Edith Hall, Ancient Greek Myth in World Fiction since 1989 », Anabases [En ligne], 27 | 2018, mis en ligne le 01 avril 2018, consulté le 15 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/anabases/7288 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/anabases.7288
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