Jérôme Carcopino et la mémoire perdue de M. Valerius Messalla Corvinus (cos. 31 av. J.-C.)
Texte intégral
- 1 Il fut notamment professeur à la Sorbonne, directeur de l’Ecole française de Rome (1937-1940), se (...)
- 2 Son œuvre comporte 338 travaux divers et seulement deux sont parus en 1946, cf. G. Charles-Picard(...)
- 3 Il suffit ici par exemple de mentionner Sylla ou la monarchie manquée (Paris, 1931).
1La monumentalité de l’œuvre de J. Carcopino est indéniable et présenter succinctement sa carrière serait une gageure1. L’article « Notes biographiques sur M. Valerius Messala Corvinus (64 av. J.-C. – 8 ap. J.-C.) » est paru en 1946 dans la Revue de philologie, de littérature et d’histoire ancienne et se place à un moment-clé de la vie de l’auteur, puisque J. Carcopino avait été non seulement révoqué de ses fonctions à la Libération, mais également traduit devant la Haute Cour pour sa participation au gouvernement de Vichy. Emprisonné à Fresnes, il avait ensuite obtenu sa libération provisoire en février 1945. Il dut toutefois attendre 1947 pour obtenir un non-lieu. Les années 1946-1947 furent logiquement les moins prolifiques2 et cette contribution est atypique dans l’œuvre du savant. Si J. Carcopino appréciait effectivement les biographies de grands personnages3, cet article est sa seule monographie d’un personnage réputé secondaire.
- 4 Appien, Guerres civiles V, 12, 113.
2De prime abord M. Valerius Messalla Corvinus (cos. 31 av. J.-C.) est beaucoup moins connu que ses contemporains, tels Agrippa, Mécène et a fortiori Octavien-Auguste. Pourtant il fait partie de la prestigieuse gens Valeria, une des gentes maiores. Selon une opinion communément admise, ces lignées patriciennes sont les plus anciennes et certaines prétendent même descendre des premiers sénateurs de Rome. Au-delà du prestige et du capital symbolique de la lignée des Valerii, le parcours de Mesalla Corvinus est singulier, car il s’inscrit dans une période d’intenses mutations entre la fin de la République et l’émergence du Principat. Messalla a successivement embrassé toutes les convictions politiques de son temps. À la mort de César, il avait à peine vingt ans. Disciple de Cicéron et ami de Brutus, ses convictions républicaines en firent un proscrit4. Après la bataille de Philippes, en 42 av. J.-C., Messalla rallia Antoine. En 36 av. J.-C., lieutenant d’Antoine, il fut « prêté » à Octavien pour vaincre Sextus Pompée selon les clauses des accords de Tarente. En 31 av. J.-C., il est consul et s’engage auprès d’Octavien dans la bataille navale d’Actium. Enfin son attitude est plus ambiguë à l’égard du Principat, abdiquant la préfecture urbaine en 26 av. J.-C. après seulement six jours d’exercice, mais acceptant le titre de curateur des eaux et honorant Auguste du titre de Pater patriae en 2 av. J.-C. Fin lettré, écrivain à ses heures, il est également connu pour avoir animé un cercle littéraire de la même ampleur que celui de Mécène.
- 5 La notice de la Realencyclopädie n’était pas encore parue (R. Hanslik, 1955, s. v. "Valerius" n° (...)
- 6 Les plus importantes sont celles de L. Wiese De M. Val. Messallae Corvini uita et studiis doctrin (...)
- 7 J. Hammer (Prolegomena to an edition of the Panegyricus Messalae. The military and political Care (...)
- 8 Dès 1919 paraissait Virgile et les origines d’Ostie. Le Catalepton souvent attribué à Virgile fit (...)
- 9 Velleius Paterculus, Histoire romaine II, 71, 1.
3Le propos de J. Carcopino s’appuie comme toujours sur une grande érudition et une parfaite connaissance des sources antiques, surtout littéraires. En outre, il put compter sur la notice de la Prosopographia imperii romani (PIR1 V 90)5, sur de grandes monographies du XIXe s.6 et sur l’ouvrage de J. Hammer, alors dernière étude d’envergure7. J. Carcopino fut attiré par la « notoriété littéraire » du personnage qu’il avait dû rencontrer à de maintes reprises dans ses études virgiliennes8 et plus largement dans ses travaux sur les poètes d’époque augustéenne qui dédièrent de nombreux vers au patricien. La mémoire perdue de Messalla est d’emblée signalée, en pointant le paradoxe entre sa renommée antique et la perte des écrits du patricien (p. 96). Sa formation et ses relations avec Cicéron le prédisposaient aussi à la rhétorique et à des domaines éclectiques : éloquence, poésie élégiaque et érotique, littérature antiquaire, histoire, grammaire, sans oublier la rédaction de Mémoires. En outre Les Secrets de la correspondance de Cicéron parurent en 1947 ; nul doute que les travaux préparatoires lui permirent encore de rencontrer ce disciple de Cicéron qualifié de fulgentissimus iuuenis9.
- 10 J. Carcopino a consacré de nombreux articles à des points chronologiques controversés, notamment (...)
- 11 Cet emploi magnifia le rôle pourtant mineur du patricien durant la guerre de Sicile : « Ces détai (...)
4Les Modernes se sont pourtant globalement désintéressés de cette figure patricienne, à l’exception de l’homme de lettres. À contre-courant J. Carcopino étudie ici l’homme et son parcours, en se penchant sur les problèmes d’établissement de la carrière du patricien dont il livre une chronologie commode en fin d’article (p. 117)10. Il passe rapidement sur les événements faisant l’unanimité dans la communauté savante (p. 97-98), comme l’exercice du consulat en 31 av. J.- C. ou la célébration d’un triomphe en 27 av. J.-C. Effectivement, plusieurs problèmes accaparent ici l’attention, comme le changement d’allégeance (p. 99-108), l’expédition contre les Salasses, la guerre illyrienne (p. 108-113) et l’utilisation des écrits de Messalla par les autres auteurs, comme le livre V des Guerres civiles d’Appien inspiré des Histoires de Messalla11.
- 12 J. Hammer, Prolegomena, p. 24-27. Cette thèse est notamment reprise par H. Zehnacker (1983, p. 62 (...)
- 13 Comme semblerait l’attester un passage d’Horace (Sat. I, 10, 28) faisant allusion à l’activité ju (...)
- 14 Pour A. E. Glauning Die Anhängerschaft des Antonius und des Octavian, Leipzig, 1936, p. 16, la dé (...)
- 15 Cette thèse est reprise ultérieurement par l’auteur, arguant que l’octroi de l’augurat ne peut pa (...)
- 16 Concernant les attitudes à l’égard d’Auguste et les changements d’allégeance, voir notamment : J. (...)
- 17 Plutarque, Vie de Brutus LIII, 3 : « J’ai toujours été, César, du parti le meilleur et le plus ju (...)
5La datation de l’allégeance à Octavien est loin de faire consensus. J. Carcopino remet d’abord en cause la datation haute proposée par J. Hammer, selon ce dernier Messalla se serait détaché de l’entourage d’Antoine dès la fin des années 4012 ou peu avant 3813. Le patricien se serait donc rapidement rendu compte que le projet politique d’Antoine n’aurait pas été la restauration de la République. D’autres hypothèses placent le ralliement juste avant la guerre de Sicile en 3614, ce que réfute l’auteur : « Octave, tout en traînant Messala après lui, avait voulu l’éloigner de toute fonction militante et véritablement active » (p. 103). Il ajoute même qu’Octavien avait peu confiance en lui. Ensuite c’est grâce à une approche comparatiste que J. Carcopino opta pour le ralliement à Octavien en 33. Il met alors en parallèle le parcours de Messalla et celui de L. Sempronius Atratinus (cos. 34 av. J.-C.). Lors de la paix de Brindes, Atratinus devint augure, à l’âge de trente-trois ans et cette promotion constituait une première étape en vue du consulat, qui fut envisagé dès la paix de Pouzzoles de 39 et devint effectif cinq années plus tard. Messalla géra quant à lui le consulat à l’âge de trente-trois ans. En étudiant la carrière d’Atratinus, J. Carcopino a cru pouvoir dégager une règle « de l’année d’intervalle » qui s’appliquerait aussi à la carrière de Messalla. La désignation en qualité d’augure précéderait alors d’une année celle au consulat. Par conséquent le patricien serait devenu augure en 33 av. J.-C. Cette hypothèse fondée sur un parallélisme de carrière paraît bien fragile15. Quoi qu’il en soit, le changement d’allégeance est lourd de sens16. Au-delà des visions d’un « Talleyrand antique », l’idée du service de la res publica transparaît17. Le choix du meilleur parti et du camp le plus juste induit une réflexion sur la conception même de la res publica. Octavien représentait alors au mieux le respect de cette dernière.
- 18 Les Salasses de Strabon disposent de gisements aurifères (IV, 6, 7), alors que les Salasses d’App (...)
- 19 Cf. W. Schmitthenner, « Octavians militärische Unternehmungen in den Jahren 35-33 v. Chr. », Hist (...)
- 20 A. Momigliano, « Panegyricus Messallae and Panegyricus Vespasiani », JRS 40 (1950), p. 40. Cette (...)
- 21 P. Grimal « Le roman de Délie et le premier livre des Elégies de Tibulle », REA 60 (1958), p. 134 (...)
6Après la question de l’allégeance, c’est celle de la lutte contre les Salasses qui est au cœur des analyses : « Celle-ci, il est vrai, n’a pas été comprise par les modernes biographes de Messala, lesquels n’ont su la localiser, ni sur la carte, ni sur le calendrier » (p. 108). Contrairement à une opinion communément admise, l’historien ne les identifie pas aux Salasses du val d’Aoste et opte pour une bipartition de ce peuple : les Salasses gaulois et ceux d’Illyrie. Les Salasses d’Appien seraient ainsi différents de ceux mentionnés par Strabon18. J. Carcopino forge donc une nouvelle hypothèse, selon laquelle Messalla aurait eu affaire aux deux tribus (p. 109). L’historiographie est majoritairement hostile à ce raisonnement19 ; selon A. Momigliano, J. Carcopino a inutilement compliqué le problème20. Cette hypothèse est néanmoins soutenue par des disciples de J. Carcopino, comme P. Grimal21.
- 22 Cette hypothèse est aussi suivie par Syme, The Augustan, p. 204.
- 23 Cette erreur chronologique fut très largement suivie, notamment par J. Prieur, « L’histoire », 19 (...)
- 24 Dion Cassius, Histoire romaine LIII, 25, 1.
7La datation de l’expédition est un autre sujet de discorde. À la fin des années 30 av. J.-C., les Salasses multiplièrent les pillages et les actes d’insoumission. Cependant l’attention d’Octavien est alors accaparée par les préparatifs guerriers contre Cléopâtre et Antoine. L’envoi de Messalla aurait été dans cette perspective postérieur à la bataille d’Alexandrie en 30 (p. 112) et au proconsulat de Syrie. Ainsi l’expédition contre les Salasses peut-elle être située à partir de 29, peut-être lors de son proconsulat en Gaule de 28-2722 (donc pas en 3423 av. J.-C., en appendice à la guerre d’Illyrie). Les Salasses furent ensuite définitivement matés par Terentius Varro en 26 ou 2524.
- 25 Panégyrique de Messalla, 107-110. J. Hammer Prolegomena, p. 35-40 croit en la participation de Me (...)
- 26 Appien, Les guerres d’Illyrie XX.
8La soumission des Salasses doit en fait être replacée dans le contexte plus large de pacification et d’organisation de l’Occident romain. D’ailleurs Messalla a-t-il participé à la campagne d’Octavien en Illyrie en 35-33 av. J.-C. ? Le Panégyrique de Messalla est la seule source mentionnant la participation à cette campagne25. J. Carcopino (p. 112-113) revient sur ce poème et note le silence d’Appien lorsqu’il cite les généraux accompagnant Octavien en Illyrie26. Ensuite un paradoxe émerge. Si Messalla était sous les ordres du triumvir, le panégyriste n’aurait pas pu autant le célébrer. En outre, si cette campagne était si brillante, elle contraste alors fortement avec celle menée ultérieurement contre les Salasses. J. Carcopino pense donc que Messalla ne participa pas au conflit illyrien et qu’après la guerre de Sicile, il rejoignit Antoine à Alexandrie (p. 113).
- 27 C’est notamment le cas de son disciple P. Grimal Tibulle : livre I, Paris, 1967, p. 4 qui ne cach (...)
- 28 Syme, The Augustan, p. 204 (note 29).
- 29 Syme, The Augustan, p. 207 : « Such is the thesis expounded in an erudite disquisition, which ma (...)
9Par ses prises de position indéniables et quelquefois contestables, cet article a suscité à la fois admiration27 et contestation, nourrissant jusqu’à maintenant de multiples études et critiques. R. Syme a résumé cette attitude ambivalente : « The article, questionable in other assertions, was styled 'brilliant' by A. Momigliano »28. Même si l’auteur britannique constate la grande érudition de J. Carcopino, celle-ci aurait été au service de thèses contestables. En outre, c’est justement cette érudition qui aurait pu tromper les plus naïfs selon R. Syme29.
- 30 A. E. Gordon, Potitus Valerius Messalla, consul suffect 29 B. C., Berkeley-Los Angeles, 1954.
- 31 R. Syme, « Potitus Valerius Messalla Consul Suffect 29 B. C. », JRS 45 (1955), p. 157- 158.
- 32 R. Syme, History in Ovid, Oxford, 1978, p. 120.
10Cependant l’impact de cet article de Messalla Corvinus fut en fait limité. Ainsi dans les années 1950, R. Syme publiait-il le compte-rendu de l’ouvrage d’A. E. Gordon consacré à Potitus Messalla30, probable cousin de Messalla Corvinus. En analysant le regain de fortune des Valerii Messallae après une éclipse d’un siècle dans l’exercice du consulat (161-61 av. J.-C.), l’érudit anglais mentionne le parcours de Corvinus sans faire allusion à l’article de J. Carcopino, alors qu’il a fait part d’hypothèses issues de l’Histoire romaine et du Sylla31. Plus tard R. Syme cite brièvement l’article de J. Carcopino dans History in Ovid à propos de la question controversée du changement d’allégeance de Messalla Corvinus32. Il met alors en avant la vulnérabilité des hypothèses de l’érudit français.
- 33 A. Valvo, « M. Valerio Messalla Corvino negli studi più recenti », in W. Haase (dir.), ANRW, II, (...)
- 34 A. Valvo, « M. Valerio Messalla Corvino », p. 1664 (note 9).
- 35 A. Valvo, « M. Valerio Messalla Corvino », p. 1669 : « Si deve a J. Carcopino una precisa, e per (...)
11L’œuvre monumentale intitulée Aufstieg und Niedergang der römischen Welt (ANRW) a également consacré une étude à M. Valerius Messalla Corvinus (cos. 31 av. J.-C.)33. A. Valvo commence par rappeler le renouveau historiographique considérable entre 1925 et 1955. Toutefois il cite seulement l’ouvrage de J. Hammer et la notice de R. Hanslik dans la RE. L’article de J. Carcopino est alors rejeté plus loin dans une note de bas de page concernant les Mémoires du patricien34. La contribution de l’érudit français semble ainsi marginalisée dans un premier temps avant d’être citée à la fin de la présentation de l’historiographie contemporaine. L’établissement d’une chronologie systématique pour la vie de Messalla est particulièrement apprécié35 et l’article est ensuite abondamment cité.
- 36 Par exemple la notice consacrée à Messalla Corvinus par A. La Penna, La letteratura latina del pr (...)
- 37 Par exemple M. Heil et K. Wachtel renvoient à Syme The Augustan p. 202-204 pour le Panégyrique de (...)
12Etudier la réception de l’article de J. Carcopino consiste aussi à traiter les silences. Les études, y compris récentes, consacrées au patricien omettent souvent le texte de l’érudit français. C’est le cas de nombreuses notices biographiques36. Toutefois le manque le plus étonnant est sans nul doute la notice consacrée à M. Valerius Messalla Corvinus parue dans la nouvelle version de la Prosopographia imperii romani (PIR2 V 143) qui ne cite pas la contribution de J. Carcopino, y compris pour la nature de la participation aux guerres de Sicile et d’Illyrie37.
13Quoi qu’il en soit, cet article demeure une référence pour toutes les personnes intéressées par la prosopographie, par cette période charnière entre la fin de la République et l’émergence du Principat et par l’adaptation de l’ancienne nobilitas à la nouvelle donne politique. En effet l’itinéraire de Messalla Corvinus est singulier. Ancien proscrit, partisan d’Antoine avant de rallier le camp octavien, il symbolise les hésitations des nobles qui cherchent avant tout à se maintenir dans les sphères du pouvoir.
Notes
1 Il fut notamment professeur à la Sorbonne, directeur de l’Ecole française de Rome (1937-1940), secrétaire d’État à l’Education nationale du maréchal Pétain (1941-1942) et membre de l’Académie française.
2 Son œuvre comporte 338 travaux divers et seulement deux sont parus en 1946, cf. G. Charles-Picard, J. Heurgon et W. Seston (dir.), Mélanges d’archéologie, d’épigraphie et d’histoire offerts à J. Carcopino, Paris, 1966, p. 1-23.
3 Il suffit ici par exemple de mentionner Sylla ou la monarchie manquée (Paris, 1931).
4 Appien, Guerres civiles V, 12, 113.
5 La notice de la Realencyclopädie n’était pas encore parue (R. Hanslik, 1955, s. v. "Valerius" n° 261, RE, VIII A1, 1955, col. 131-157.
6 Les plus importantes sont celles de L. Wiese De M. Val. Messallae Corvini uita et studiis doctrinae, Berlin, 1829, M. J. Valeton M. Valerius Messala Corvinus, Groningen, 1874, L. Fontaine De Valerio Messala Corvino, Paris, 1878 et H. Schulz De M. Valerii Messallae aetate, Stettin, 1886.
7 J. Hammer (Prolegomena to an edition of the Panegyricus Messalae. The military and political Career of M. Valerius Messala Corvinus, New York, 1925). L’ouvrage est très largement cité par J. Carcopino.
8 Dès 1919 paraissait Virgile et les origines d’Ostie. Le Catalepton souvent attribué à Virgile fit aussi l’objet de plusieurs études, notamment : « Vergiliana - I. À propos du Catalepton », RPh 46 (1922), p. 156-184 et « Encore le Catalepton : réponse à M. E. Galletier », RPh 53 (1927), p. 84-89. Messalla y est souvent présenté comme un inspirateur des vers virgiliens.
9 Velleius Paterculus, Histoire romaine II, 71, 1.
10 J. Carcopino a consacré de nombreux articles à des points chronologiques controversés, notamment : « La date de la mort de Caius Gracchus », BSNAF (1930), p. 112-113 et « Sur la date de la naissance de César », CRAI 77-3 (1933), p. 377-378.
11 Cet emploi magnifia le rôle pourtant mineur du patricien durant la guerre de Sicile : « Ces détails propres à grandir notre homme, l’importance donnée au sauvetage d’Octave en péril, et l’insistance avec laquelle Appien a fait un sort aux moindres allées et venues de Messala » (p. 100).
12 J. Hammer, Prolegomena, p. 24-27. Cette thèse est notamment reprise par H. Zehnacker (1983, p. 62) dans son édition CUF du tome 33 de Pline l’Ancien. Selon l’auteur, le séjour alexandrin, après l’entrevue de Tarse, aurait profondément choqué Messalla. Le mois de septembre 40 aurait marqué son retour à Rome et son ralliement à la cause octavienne. Plus récemment P. Tansey « Messalla Corvinus and the Bellum Siculum », Latomus 66 (2007), p. 888) accrédite aussi l’hypothèse d’une adhésion antonienne très courte (41-40 av. J.-C.).
13 Comme semblerait l’attester un passage d’Horace (Sat. I, 10, 28) faisant allusion à l’activité judiciaire de Messalla. Deux objections peuvent être formulées. D’abord ceci est entièrement dissociable du changement d’allégeance, puisque la date de 36, voire peu après, est préférable pour la rédaction des Satires. En outre, un ralliement peu avant 38 est peu crédible, car aucun enjeu contemporain ne peut expliquer ce revirement.
14 Pour A. E. Glauning Die Anhängerschaft des Antonius und des Octavian, Leipzig, 1936, p. 16, la débauche inacceptable d’Antoine aurait été l’élément déclencheur de l’allégeance à Octavien. La date de 36 est encore maintenant largement présente dans une historiographie dominée par R. Syme The Augustan Aristocracy, Oxford, 1986, p. 202.
15 Cette thèse est reprise ultérieurement par l’auteur, arguant que l’octroi de l’augurat ne peut pas avoir lieu avant les derniers mois de 34, mais il ne remet pas en avant l’argument du parallélisme entre les deux carrières (Carcopino, Les secrets, p. 345).
16 Concernant les attitudes à l’égard d’Auguste et les changements d’allégeance, voir notamment : J. L. Butrica, « Messalla and the Principate », in C. Deroux (dir.), Studies in Latin Literature and Roman History, VII, Bruxelles, 1994, p. 279-296.
17 Plutarque, Vie de Brutus LIII, 3 : « J’ai toujours été, César, du parti le meilleur et le plus juste ».
18 Les Salasses de Strabon disposent de gisements aurifères (IV, 6, 7), alors que les Salasses d’Appien ont des gisements de sel (Le livre illyrien XVII). À partir de ce constat, J. Carcopino croit en la bipartition de ce peuple.
19 Cf. W. Schmitthenner, « Octavians militärische Unternehmungen in den Jahren 35-33 v. Chr. », Historia 7 (1958), p. 234-236. R. Syme juge même cette distinction aberrante (The Augustan, p. 204).
20 A. Momigliano, « Panegyricus Messallae and Panegyricus Vespasiani », JRS 40 (1950), p. 40. Cette complication est due à sa théorie sur la non-intervention de Messalla dans les opérations en Pannonie en 35-34. La théorie repose sur le fait qu’il était alors en Orient avec Antoine. D’ailleurs l’examen d’un passage de Pline l’Ancien attesterait la caducité des allégations de J. Carcopino. Pline mentionne l’inscription du trophée de la Turbie (III, 136-137) où tous les peuples alpins soumis par Auguste sont énumérés. Parmi eux figurent les Salasses. Cela n’aurait pas de sens si les Salasses avaient été un peuple illyrien.
21 P. Grimal « Le roman de Délie et le premier livre des Elégies de Tibulle », REA 60 (1958), p. 134 et « Les conséquences d’un cursus : Tibulle, Properce et Messalla », dans Rome : la littérature et l’histoire, Rome, 1986, p. 773) s’appuie clairement sur les travaux de J. Carcopino. J. Prieur « L’histoire des régions alpestres. Alpes Maritimes, Cottiennes, Graies et Pennines sous le Haut-empire romain Ier-IIIe s. ap. J.-C. », in W. Haase (dir.), ANRW, II, 5, 2, Berlin et New York, 1976, p. 637 maintient également cette bipartition.
22 Cette hypothèse est aussi suivie par Syme, The Augustan, p. 204.
23 Cette erreur chronologique fut très largement suivie, notamment par J. Prieur, « L’histoire », 1976, p. 637 et G. Walser, Summus Poeninus. Beiträge zur Geschichte des grossen St. Bernhard-Passes in römischer Zeit, Wiesbaden, 1984. p. 15 (en 34-33 av. J.-C.).
24 Dion Cassius, Histoire romaine LIII, 25, 1.
25 Panégyrique de Messalla, 107-110. J. Hammer Prolegomena, p. 35-40 croit en la participation de Messalla, comme de nombreux historiens. C’est encore le cas de N. Biffi, « Messalla fra Antonio e Ottaviano », Orpheus 15-2 (1994), p. 468-469. La participation de Messalla à la campagne illyrienne aurait été un acte marquant, préludant au consulat et au ralliement à Octavien.
26 Appien, Les guerres d’Illyrie XX.
27 C’est notamment le cas de son disciple P. Grimal Tibulle : livre I, Paris, 1967, p. 4 qui ne cache pas son admiration notamment pour les travaux sur Messalla, la fixation de la chronologie des élégies déliennes et l’étude des relations entre Messalla et Tibulle. P. Grimal insiste souvent sur l’importance de la contribution de J. Carcopino, par exemple dans « Les conséquences d’un cursus », p. 773 : « Constatons d’abord que, malgré quelques objections de détail, qui, d’ailleurs, ne concernent guère notre problème, les grandes lignes du cursus de M. Valerius Messalla Corvinus demeurent, depuis le travail de M. Carcopino, solidement établies ».
28 Syme, The Augustan, p. 204 (note 29).
29 Syme, The Augustan, p. 207 : « Such is the thesis expounded in an erudite disquisition, which may have deceived the ingenuous ». L’auteur remet ici en cause la datation du changement d’allégeance de Messalla Corvinus et l’abandon d’Antoine.
30 A. E. Gordon, Potitus Valerius Messalla, consul suffect 29 B. C., Berkeley-Los Angeles, 1954.
31 R. Syme, « Potitus Valerius Messalla Consul Suffect 29 B. C. », JRS 45 (1955), p. 157- 158.
32 R. Syme, History in Ovid, Oxford, 1978, p. 120.
33 A. Valvo, « M. Valerio Messalla Corvino negli studi più recenti », in W. Haase (dir.), ANRW, II, 30, 3, Berlin et New York, 1983, p. 1663-1681.
34 A. Valvo, « M. Valerio Messalla Corvino », p. 1664 (note 9).
35 A. Valvo, « M. Valerio Messalla Corvino », p. 1669 : « Si deve a J. Carcopino una precisa, e per certi aspetti rivoluzionaria, sistemazione della cronologia relative alla carriera di Messalla in quel periodo ; come altre volte è accaduto, le originali soluzioni proposte dall’insigne studioso francese sono divenute il termine di riferimento di tutti i contribute successive sui medesimi problemi ».
36 Par exemple la notice consacrée à Messalla Corvinus par A. La Penna, La letteratura latina del primo periodo augusteo (42-15 a. C.), Rome, 2013.
37 Par exemple M. Heil et K. Wachtel renvoient à Syme The Augustan p. 202-204 pour le Panégyrique de Messalla qui avait pourtant été largement commenté par J. Carcopino. Or la note 29 p. 204 cite l’article de J. Carcopino. La réception est donc ici indirecte.
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Référence papier
Cyrielle Landrea, « Jérôme Carcopino et la mémoire perdue de M. Valerius Messalla Corvinus (cos. 31 av. J.-C.) », Anabases, 27 | 2018, 177-184.
Référence électronique
Cyrielle Landrea, « Jérôme Carcopino et la mémoire perdue de M. Valerius Messalla Corvinus (cos. 31 av. J.-C.) », Anabases [En ligne], 27 | 2018, mis en ligne le 01 avril 2020, consulté le 15 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/anabases/7147 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/anabases.7147
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