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Comptes rendus

Antonio Duplá-Ansuategui et Jonatan Pérez Mostazo (éds.), Recepciones de la antigüedad vascona y aquitana. De la historografia a las redes sociales (siglos xv-xxi)

Alain Ballabriga
p. 333-335
Référence(s) :

Antonio DuplÁ-Ansuategui et Jonatan Pérez Mostazo (éds.), Recepciones de la antigüedad vascona y aquitana. De la historografia a las redes sociales (siglos xv-xxi), Vitoria-Gasteiz, Universidad del Pais Vasco/Euskal Herriko Unibersitatea, 2022, 242 p. / ISBN 9788413194950, 20€

Texte intégral

1Après une introduction (p. 9-17), où les éditeurs rappellent la nécessité de retrouver l’esprit critique de Miguel de Unamuno, écrivain espagnol d’origine basque, qui, à la fin du xixe siècle, s’opposa aux mythes relatifs à l’origine des Basques, cultivés par le nationalisme basque de Sabino Arana, un prologue, sorte de deuxième introduction, de Fernando Wulff Alonso (p. 19-26), résume quelques-uns des arguments contre l’essentialisme historique des nationalistes, qui seront repris ensuite dans d’autres contributions de cet ouvrage, auxquelles je me limiterai, car certaines portent sur des curiosités nous éloignant du cœur de la question, à savoir les rapports entre Basques, Aquitains et Ibères.

2L’article de Jonatan Pérez Mostazo, l’un des deux éditeurs (p. 27-50) porte sur les études produites de ce côté des Pyrénées. La plus remarquable est celle d’Arnaud Oihénart (1592-1667), érudit soulétin, intitulée Notitia utriusque Vasconiae, tum ibericae, tum aquitanicae (1638), accessible en ligne (google-livre), dans un latin également accessible, et qui table sur une émigration basque depuis l’Espagne au moment des invasions germaniques, en s’appuyant sur Grégoire de Tour, cité au même titre que toutes les anciennes sources gréco-latines. Cela permet d’expliquer le nom de Duché de Vasconie donné à l’Aquitaine dans le Haut Moyen Âge et d’où dérive le terme de Gascogne.

3Comme témoignage de son latin et de son esprit critique, on peut citer cette phrase de la Notitia (livre II, chap. 10, p. 212-213) : Praecipue autem in originibus seu rebus antiquis Regnorum ac Rerumpublicarum recensendis huic mentiendi affectui indulsisse scriptores notum est ac pervulgatum « Il est bien connu et reconnu que les écrivains ont tendance à mentir lorsqu’ils recherchent les origines des anciens royaumes et États », remarque toujours aussi pertinente et d’actualité.

4De son côté, Pierre de Marca (1594-1662), connu et estimé d’Oihénart, dans son Histoire de Béarn (1640), consultable en ligne (Gallica), estime qu’il n’y eut pas de conquête de l’Aquitaine par les Vascons. Les deux théories sont toujours soutenues de nos jours.

5Une autre théorie historiquement très importante et durable est celle de l’ascendance ibère des Basques, due à Wilhelm von Humboldt (1767-1835), idée reprise par les historiens français (Augustin et Amédée Thierry, Jules Michelet) et s’appuyant sur les passages de César et Strabon différenciant les Aquitains des Gaulois pour les rapprocher des Ibères.

6L’article se termine sur le livre de Jean-François Bladé (Lectoure 1827-Paris 1900), folkloriste gersois surtout connu par ses collectes des traditions orales de la Gascogne, mais auteur par ailleurs d’un gros ouvrage érudit intitulé Études sur l’origine des Basques (1869), consultable en ligne (google-book), qui marque un retour à l’analyse critique des sources gréco-latines et tardo-antiques à la façon d’Oihénart et reprend la thèse de l’établissement des Vascons, ancêtres des Basques, au nord des Pyrénées comme conséquence des invasions des Vandales et des Wisigoths en Espagne.

7Après deux articles d’un moindre intérêt, on retrouve une contribution beaucoup plus pertinente sous la plume de Javier Larequi Fontaneda (p. 97-116) qui énumère les critiques que l’on peut (et doit) porter contre les mythes essentialistes des auteurs nationalistes. Un premier mythe est celui de la résistance des Vascons aux Romains. En réalité l’archéologie oriente vers une romanisation assez poussée bien qu’elle n’ait pas fait disparaître le vascon comme elle le fit pour les autres langues paléo-hispaniques. Un deuxième mythe est celui de la présence immémoriale des Vascons dans l’actuel Pays Basque espagnol (Guipuzcoa, Alava, Vizcaya) alors que l’onomastique montre que les Vascons dans l’Antiquité peuplaient la Navarre et l’Aquitaine. Un troisième mythe affirme l’unité ethnique des Vascons, qui pourrait être un effet de l’administration romaine d’un territoire caractérisé par sa diversité.

8L’article suivant de Jordi Cortadella Moral (p. 117-133) porte essentiellement sur l’école archéologique de Barcelone et la figure importante de Père Bosch Gimpera (1891-1974), qui, entre autres théories, affirma le caractère ibérique des Aquitains superposés à des indigènes antérieurs ethniquement proches des Basques. Les Ibères présents en Languedoc-Roussillon auraient été repoussés en Espagne par les Volques Tectosages, un peuple celte.

9L’auteur évoque ensuite le livre du français Achille Luchaire (1846-1908), Les origines linguistiques de l’Aquitaine, Paris, 1877, qui aurait dû plutôt figurer dans l’article relatif à la production nord-pyrénéenne. C’est une œuvre pionnière qui affirme la parenté entre l’aquitain et le basque mais aussi l’ibère. À l’époque, la linguistique des langues paléo-hispaniques est moins développée que l’anthropologie et l’archéologie. De nos jours, on tend à penser que les ressemblances entre l’ibère et le vascon-aquitain, que l’on peut constater par exemple à propos du toponyme « basque » Illiberis (Ville Nouvelle) attesté à la fois en Gascogne (Auch) et au Roussillon (Elne, Collioure), résultent d’un phénomène d’aire linguistique, de ressemblance par voisinage dans un espace plurilingue, plutôt que d’une origine commune, car le basque ne permet pas d’interpréter les inscriptions ibères. Mais ces ressemblances suffisent à expliquer le passage de Strabon (IV, 2, 1), dont la source est sans doute Poséidonios d’Apamée, qui affirme que les Aquitains ressemblent aux Ibères en particulier « quant à la langue » (kata tên glôttan).

10La contribution de Javier Andreu Pintado (p. 187-208), qui critique les théories essentialistes présentes dans les manuels scolaires du Pays Basque et de Navarre, répète en fait ce que l’on pouvait lire sous la plume de Fontaneda (p. 97-116).

11Un dernier article (Sara Casamayor Mancisidor, p. 210-225) envisage le traitement de la question basque sur les réseaux sociaux (Facebook, Instagram, Twitter …). Comme on pouvait s’y attendre, le résultat est décevant et peu instructif car, de l’avis même de l’autrice, n’importe qui peut se prononcer avec la même autorité que les spécialistes. À mon sens, comme cet ouvrage ne présente pas de vision générale et systématique, au dire même des éditeurs dans leur introduction, il aurait été préférable de donner en conclusion une synthèse des conceptions actuelles sur la toile, en tirant parti des articles de Wikipedia en espagnol et français, mais aussi en anglais (articles de qualité) et en basque (euskera), langue peu familière à la plupart des internautes.

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Pour citer cet article

Référence papier

Alain Ballabriga, « Antonio Duplá-Ansuategui et Jonatan Pérez Mostazo (éds.), Recepciones de la antigüedad vascona y aquitana. De la historografia a las redes sociales (siglos xv-xxi) »Anabases, 40 | 2024, 333-335.

Référence électronique

Alain Ballabriga, « Antonio Duplá-Ansuategui et Jonatan Pérez Mostazo (éds.), Recepciones de la antigüedad vascona y aquitana. De la historografia a las redes sociales (siglos xv-xxi) »Anabases [En ligne], 40 | 2024, mis en ligne le 01 novembre 2024, consulté le 12 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/anabases/19188 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12wa5

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