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Comptes rendus

Philippe Le Doze (dir.) Le costume de prince : vivre et se conduire en souverain dans la Rome antique d’Auguste à Constantin

Ludovic Thérond-Debat
p. 333-335
Référence(s) :

Philippe Le Doze (dir.) Le costume de prince : vivre et se conduire en souverain dans la Rome antique d’Auguste à Constantin, Rome, Publications de l’École Française de Rome, 2021, 596 p. / ISBN 9782728314959, 35 €

Texte intégral

1Le volume se propose, nous dit Philippe Le Doze dans une introduction très complète, de « comprendre comment, de l’avènement d’Auguste au principat de Constantin, a progressivement été élaboré un archétype du prince, une forme de “costume” qu’il fallait revêtir afin de paraître légitime et de mériter, souverain graal, de figurer parmi les “bons princes” ». Cette approche diachronique large, couvrant toute la période du principat à proprement parler, fait à la fois la cohérence de l’ouvrage et son ambition. Il explique également son caractère imposant : vingt-deux contributions, en plus de l’introduction de Philippe Le Doze et de la conclusion rédigée par Jean-Michel Roddaz. Un index général, ainsi que les résumés des articles orienteront avec efficacité le lecteur à la recherche d’un élément précis. Par ailleurs, rédigées en français, en italien ou en anglais, les contributions du volume sont rassemblées en trois unités thématiques, couvrant chacune l’intégralité de la période.

2La première grande partie de l’ouvrage, intitulée « La fonction de prince » interroge tout d’abord la place occupée par le souverain dans l’environnement plus large de la res publica : le rôle du prince se construit en effet, au fil du temps, en parallèle, en continuité ou en rupture avec des usages politiques plus anciens. Ces usages politiques peuvent être ceux de la communication politique du prince, comme dans le premier article de ce chapitre, « Actium : battle, campaign, turning point » écrit par Carston Hjort Lange, qui revient sur le rôle joué par la bataille d’Actium dans l’historiographie et la communication augustéennes, entre apparition d’une nouvelle charge politique et utilisation de motifs de célébration politico-militaires déjà connus. Plusieurs autres contributions explorent avec succès la question de l’image que le prince donne de lui-même et de sa place dans la cité, qu’il s’agisse du problème de la création de nouvelles facettes à cette image (Olivier Hekster) ou de l’appui nécessaire de cette image à des monuments (Matteo Cadario). Ces mutations de la place du prince, dans ce régime en perpétuel renouvellement, sont également abordées du point de vue de la première succession impériale (Gregory Rowe), de l’onomastique impériale (Stéphane Benoist) et des cas d’impostures impériales (Pierre Cosme). Nous devons citer à part l’article de Philippe Le Doze (« Le prince et le senatus populusque Romanus sous le Haut-Empire ») qui aborde de front la problématique de cette première partie dans son ensemble et jette un éclairage intéressant sur le rôle des élections sous le principat. Enfin, la période tardive n’est pas oubliée : dans « Constantin, un dominus très libéral », Vincent Puech interroge la place des rites païens encore présents à Rome, et parfois associés à la charge impériale chez l’empereur chrétien.

3La deuxième partie de l’ouvrage, intitulée « La personne du prince », se concentre sur les qualités individuelles du prince et leur développement. Plusieurs contributions abordent de front l’étude de qualités associées au prince lui-même, qu’il s’agisse de son âge, dans l’étude d’Agnès Molinier Arbo sur l’empereur πρεσβύτης chez Hérodien ou de son rapport à la culture et aux lettres, évoluant au fil du temps (Giuseppe Zucchini, dans une contribution couvrant toute la période). La façon dont ces qualités sont cultivées ou non sont également couvertes, dans un chapitre consacré aux « professeurs des dieux » écrit par Anne Gangloff, qui souligne également l’importance politique du choix des précepteurs et la complexité de leur relation à la famille régnante. Deux chapitres sont consacrés à l’importance des vêtements du prince, avec deux études de cas : l’une menée par Laurent Anglade et Thierry Éloi sur les transgressions vestimentaires de Caligula, et l’autre élucidant le rapport entre Caracalla et le manteau qui lui a valu ce sobriquet, écrite par Christophe Badel. Enfin, dans le dernier chapitre de cette partie, Sarah Rey s’intéresse à ce que nous apprennent sur le prince l’apparence et les gestes de ses mains, dans une tentative de « chironomie » impériale, à partir princi­palement des sources littéraires.

4La troisième et dernière partie de l’ouvrage, enfin, s’intitule « La relation au prince » et interroge l’évolution des rapports du souverain avec les citoyens de son empire, son niveau d’accessibilité et sa capacité à interagir avec eux. Une contribution (« César hors de sa litière : le prince parmi les citoyens » de Pascal Montlahuc) étudie très directement la nécessité pour le souverain de paraître accessible au peuple romain dans son ensemble, même si cette accessibilité était dans les faits limitée. Frédéric Hurlet, dans une étude similaire couvrant une large période, parle de la nécessité pour le prince d’être mobile et de voir l’Empire. Plusieurs autres chapitres se concentrent sur les relations parfois complexes du prince à des groupes sociaux particuliers : les classes populaires (Steven Rutledge), l’armée (Yann Le Bohec) ou, dans le dernier chapitre, les élites des provinces grecques (Henri Fernoux). Nathalie Barrandon, dans la même optique, mais avec une approche différente, propose une lecture très fine de Tacite et de sa représentation des rapports entre Tibère et le Sénat. Deux chapitres ont un rapport plus lointain en apparence avec le titre de la partie (Francesca Rohr Vio étudiant la place des femmes de la famille impériale dans la politique d’Auguste, et Sylvain Forichon qui s’intéresse au comportement du prince lors des spectacles), mais cela ne doit pas éclipser leur rigueur et leur qualité.

5Cet ouvrage constitue donc une lecture instructive, qui réussit, grâce à la variété de ses contributions et à la précision de ses annexes, à se rendre utile à la fois en tant qu’outil ponctuel et en tant qu’ensemble couvrant une large période. L’introduction et la conclusion soulignent enfin avec efficacité la cohérence du projet, qui renouvelle avec brio le thème déjà fort abordé des bons et des mauvais souverains.

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Pour citer cet article

Référence papier

Ludovic Thérond-Debat, « Philippe Le Doze (dir.) Le costume de prince : vivre et se conduire en souverain dans la Rome antique d’Auguste à Constantin »Anabases, 36 | 2022, 333-335.

Référence électronique

Ludovic Thérond-Debat, « Philippe Le Doze (dir.) Le costume de prince : vivre et se conduire en souverain dans la Rome antique d’Auguste à Constantin »Anabases [En ligne], 36 | 2022, mis en ligne le 02 novembre 2022, consulté le 09 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/anabases/15109 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/anabases.15109

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