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L’atelier de l’histoire : chantiers historiographiques
Atelier « L’Antiquité au musée » (12)

Eleutheria ! Retour à la liberté

Exposition au MuMo, Musée des moulages de l’université Lumière Lyon 2 (87 cours Gambetta, Lyon 3e), du 18 septembre 2021 au 26 mars 2022, prolongation jusqu’au 16 juillet 20221
Sophie Montel
p. 308-312

Texte intégral

1L’exposition Eleutheria ! Retour à la liberté (fig. 1) s’inscrit dans les événements culturels organisés pour la commémoration du bicentenaire de la Révolution grecque ou guerre de libération de la Grèce, qui a débuté le 25 mars 18212. C’est la première exposition temporaire du MuMo, le musée des moulages de l’université de Lyon 2, installé depuis 2019 dans les locaux d’une ancienne bonneterie dans le 3e arrondissement de Lyon. Inauguré en 1899, indissociable de la figure d’Henri Lechat3, le musée des moulages de l’université Lyon 2 était considéré au début du xxe siècle comme la plus riche de ces collections pédagogiques et scientifiques ; il disposait alors d’un espace dédié au deuxième étage du palais des facultés de droit et de lettres, aux murs colorés sur lesquels se détachaient reliefs et rondes-bosses, magnifiquement mis en lumière par une verrière zénithale qui laissait pénétrer la lumière naturelle4. Cette dernière est également abondante dans la halle qui abrite l’espace d’exposition du MuMo.

Fig. 1. Affiche de l’exposition

© MuMo

2Dans les locaux actuels, où le MuMo a déménagé après bien des vicissitudes, l’exposition temporaire occupe la moitié de la grande halle où sont présentés d’ordinaire les moulages d’art grec et romain, mais aussi médiéval et des temps modernes. Le parcours de visite permanent présente les moulages selon six thématiques : muses et arts libéraux, les grands antiques romains, le moulage et ses techniques, les images du pouvoir, les représentations du corps, une galerie médiévale ; dans cette dernière, des essais de reconstitution de polychromie, par projection sur les moulages, sont présentés sur trois pièces.

3Eleutheria ! Retour à la liberté s’intéresse aux relations entre l’art grec et la France, à travers l’histoire de la redécouverte de l’art grec, l’histoire des fouilles et l’histoire de la transmission de la culture classique à l’université et ailleurs. L’exposition met également l’accent sur les Lyonnais qui ont montré leur soutien à la Grèce ; on peut par exemple y admirer le Voyage en Grèce et dans le Levant des architectes Antoine-Marie Chenavard, Jean-Michel Dalgabio et du peintre Etienne Rey (1843-1844). Quatre sections composent un parcours qui permet au visiteur de découvrir 177 œuvres.

4Le public rencontre d’abord des moulages des Premières œuvres grecques en France (entre la fin du xviiie siècle et 1821) : la Vénus de Milo (inv. L598, atelier de moulage du Louvre) joue les stars dans l’exposition comme elle l’a fait au musée du Louvre, dès son arrivée à Paris. Mais Maurice Holleaux (ou Henri Lechat, qui lui succède ?) n’a pas omis d’acquérir d’autres pièces provenant de Milo (île des Cyclades), des fragments découverts dans les environs immédiats de la statue, afin de permettre aux étudiants de Lyon de comprendre l’œuvre et de s’essayer à des restitutions de sa présentation d’origine.

5La deuxième section est consacrée à L’Acropole d’Athènes : du pillage à la restauration (fig. 2). Aux côtés des moulages de deux caryatides de l’Érechthéion (tirages de la caryatide B - inv. L277 et C - inv. L278, atelier de l’école nationale supérieure des beaux-arts), des korai de l’Acropole et des sculptures des frontons du Parthénon (ateliers du Louvre et Brucciani), on découvre un très intéressant plan relief de 1867-1868 (avec des ajouts datés entre 1888 et 1893 ; inv. L953, atelier de moulage de Gustav Eichler à Berlin), qui témoigne de l’état du plateau après la grande fouille et la construction du musée. Les recherches sur la polychromie de la sculpture archaïque sont évoquées au travers des moulages polychromes réalisés d’après les copies d’Ingrid Kjær (la korè 674 - inv. L133 et l’éphèbe blond 689 - inv. L124) et de Willie Wuflf (korè 684 - inv. L134). En 1899, la sculptrice Kjær avait obtenu la permission de la Société archéologique grecque de procéder à une copie de la korè n° 674, découverte en 1888 ; elle a réalisé ses moulages polychromes d’après les traces visibles sur les statues en 1901-1902, sans tenir compte des restitutions aquarellées de Louis Émile Gilliéron. L’université de Lyon est la seule en France à posséder ce tirage essentiel dans l’histoire des recherches sur la polychromie de l’art antique.

Fig. 2. Entrée de la 2e partie de l’exposition consacrée à l’Acropole d’Athènes

© Cliché S. Montel

6La troisième partie s’intéresse à la redécouverte de Delphes (1892-1903). La fondation de l’École française d’Athènes, en 1846, marque le début d’une présence française renforcée, et peu à peu structurée, en Grèce, après plusieurs missions dont la célèbre expédition scientifique de Morée. L’École française d’Athènes faisait mouler, sur place à Delphes, les statues mises au jour dans le sanctuaire d’Apollon ; ces moulages firent sensation lors de l’exposition universelle de 1900 à Paris dans laquelle les copies des trouvailles de Delphes constituaient une véritable vitrine de l’archéologie française. Les musées universitaires qui en faisaient la demande pouvaient également bénéficier de ces tirages qui permettaient aux enseignants d’archéologie et d’histoire de l’art antique comme à leurs étudiants de se tenir au courant des dernières découvertes. À Lyon, on peut notamment découvrir la frise du trésor de Siphnos, des métopes du trésor des Athéniens et un surmoulage de la sphinge des Naxiens (fig. 3). Les visiteurs de l’exposition Paris-Athènes, au musée du Louvre, ont pu en découvrir d’autres.

Fig. 3. Surmoulage de la sphinge de Naxiens (inv. L9 et L95), installé dans la cage de l’escalier menant aux réserves du MuMo

© Cliché S. Montel

  • 5 Il s’agit de tirages au gélatino-bromure d’argent collés sur carton, donnés par le photographe à (...)
  • 6 Fouilles de Salomon Reinach et Edmond Pottier, don de l’école française d’Athènes à l’université (...)
  • 7 Collection d’empreintes de pierres gravées et de camées ; la dactyliothèque de S. Reinach compren (...)

7La quatrième section présente des témoignages de la diversité des supports d’enseignements et d’étude du xixe au xxe siècle : estampages d’inscriptions, plaques à projection et lanterne, tirages argentiques de Fred Boissonnas5, ouvrages, mais aussi des terres cuites provenant de Myrina6 et la dactyliothèque7 de Salomon Reinach. Est également présenté dans cette partie de l’exposition un tirage en plâtre monté sur panneau de contreplaqué de la frise des Panathénées du Parthénon, d’après la maquette au vingtième de John Henning, datant de 1819. Le sculpteur écossais Henning fut l’un des premiers à découvrir les marbres du Parthénon à leur arrivée à Londres, chez Lord Elgin, au début du xixe siècle, et à diffuser les reliefs de la frise des Panathénées par le biais de ces réductions.

8Pour prolonger la visite et accom­pagner l’exposition, il est possible de consulter le catalogue de l’exposition, paru en septembre 2021 : Eleutheria ! Retour à la liberté. Découvrir et trans­mettre l’Antiquité depuis la Révolution grecque de 1821. L’ouvrage est dirigé par Sarah Betite et Hélène Wurmser et publié aux Presses universitaires de Lyon et MOM Éditions. Sarah Betite est attachée de conservation du patrimoine, détachée au Musée des Moulages de l’université Lumière Lyon 2 depuis 2017 en tant que responsable scientifique et administrative. Elle poursuit également un doctorat d’histoire à l’université Lumière Lyon 2 sur les collections de moulages d’après l’antique dans l’enseignement du dessin à Lyon du xviiie au xxe siècle. Quant à Hélène Wurmser, ancienne membre de l’École française d’Athènes et agrégée de lettres classiques, elle est maître de conférences en archéologie et histoire de l’art grec à l’université Lumière Lyon 2 et responsable du bureau lyonnais de l’Institut de recherche sur l’architecture antique (IRAA – USR 3155). Dans le cadre du quinquennal 2022-2026 de l’École française d’Athènes, elle anime le programme « Patrimoines universitaires en réseaux ».

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Notes

1 Cet article a été écrit après la visite que j’ai effectuée au MuMo accompagnée de deux étudiantes du master Histoire, Civilisations, Patrimoine de l’université de Franche-Comté, Emy Faivre et Laura Perrin, qui travaillent sur les collections de moulages de Dole (Jura) et Vesoul (Haute-Saône) dans le cadre de leur mémoire de master recherche. Nous avons été accueillies le 15 mars dernier par Sarah Betite, responsable du MuMo - chargée des collections, mais aussi Anne-Laure Sounac, régisseuse des collections et des expositions, et Jillian Akharraz, doctorant et médiateur. Nous les remercions chaleureusement pour leur accueil.

2 Ainsi : Paris - Athènes. Naissance de la Grèce moderne, 1675-1919, qui s’est tenue à Paris au musée du Louvre entre le 30 septembre 2021 et le 7 février 2022 ; 1821 Before and After, Athènes, Musée Benaki, mars-novembre 2021 ; sur d’autres événements et ressources, voir https://www.efa.gr/fr/1821-2021-bicentenaire-de-la-revolution-grecque

3 https://www.inha.fr/fr/ressources/publications/publications-numeriques/dictionnaire-critique-des-historiens-de-l-art/lechat-henri.html

4 Sur la fondation du musée de moulages de l’université de Lyon, voir l’article de Soline Morinière dans le catalogue d’exposition (p. 17-32).

5 Il s’agit de tirages au gélatino-bromure d’argent collés sur carton, donnés par le photographe à l’université de Lyon entre 1903 et 1911.

6 Fouilles de Salomon Reinach et Edmond Pottier, don de l’école française d’Athènes à l’université de Lyon en 1894. En effet, une partie des figurines découvertes dans les fouilles de Myrina, rapportées à Athènes, ont été réparties entre le musée du Louvre et les universités de Bordeaux, Lille, Montpellier et Lyon.

7 Collection d’empreintes de pierres gravées et de camées ; la dactyliothèque de S. Reinach comprend 884 médaillons en plâtre (donation des ayants droit de S. Reinach, 1934).

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Pour citer cet article

Référence papier

Sophie Montel, « Eleutheria ! Retour à la liberté »Anabases, 36 | 2022, 308-312.

Référence électronique

Sophie Montel, « Eleutheria ! Retour à la liberté »Anabases [En ligne], 36 | 2022, mis en ligne le 02 novembre 2024, consulté le 15 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/anabases/15019 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/anabases.15019

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Auteur

Sophie Montel

Université de Franche-Comté (Besançon)
EA 4011 Institut des Sciences et Techniques de l’Antiquité
30-32 rue Mégevand 25000 Besançon
sophie.montel@univ-fcomte.fr

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