Egidia Occhipinti, The Hellenica Oxyrhynchia and Historiography: New Research Perspectives
Egidia Occhipinti, The Hellenica Oxyrhynchia and Historiography: New Research Perspectives, Leyde et Boston, Brill, 2016, 306 p., 129 € /
ISBN 9789004325715.
Texte intégral
1L’ouvrage présente une étude historiographique des Hellenica Oxyrhynchia qui s’efforce de définir la relation entre ce texte écrit comme une continuation de Thucydide et traçant l’histoire de la Grèce à la fin du ve s. et au début du ive s. av. n. è., les autres œuvres à caractère historiographique de l’époque classique, et, plus à la marge, la rhétorique et le corpus hippocratique. L’étude historiographique passe également par une confrontation entre les HO et l’œuvre de Diodore de Sicile.
2Le chapitre introductif présente le texte, ses éditions et ses sources, trois papyri des deux premiers s. ap. n. è., et fait le point sur les questions qu’il soulève : sa date de composition (E. Occhipinti proposera au cours de son étude la fin des années 350 ou peu après, 346 au plus tard) ; son auteur ; sa méthode et ses buts ; le lien avec les Helléniques de Xénophon, ainsi qu’avec Théopompe et Éphore. Les outils de l’intertextualité et de la narratologie appliqués à l’historiographie permettront ici de reprendre ces débats à nouveaux frais et de considérer les HO en tant que production littéraire, inspirée notamment de l’épopée.
3Le livre est ensuite divisé en deux parties. Dans la première, l’auteure se livre à une analyse serrée des HO en relation avec les sources qui rapportent les mêmes faits. Le chap. 2 explore les caractéristiques de la narration proposée dans l’œuvre : il s’agit d’une narration continue qui traite séparément de trois fronts contemporains, mêlant l’annalistique et le synchronique, et qui en cela associe des caractéristiques à la fois de Thucydide et d’Hérodote et est comparable à la manière de Théopompe en particulier. Dans le chap. 3, EO examine les raisons pour lesquelles, selon le narrateur des HO, plusieurs cités grecques du continent furent amenées à s’opposer à Sparte lors de la guerre de Corinthe, et les motivations spartiates pour mener une entreprise militaire en Asie mineure. Le point de comparaison privilégié est ici les Helléniques. EO en déduit que le matériau utilisé dans les HO était principalement Xénophon, auquel le narrateur répondit cependant en ajoutant des informations perses. Les deux textes partagent notamment la même topique autour de Cyrus, mais s’écartent sur d’autres points, comme les raisons pour lesquelles l’expédition d’Agésilaos s’interrompit. Le chap. 4 propose une nouvelle lecture de la relation entre les HO, les Hell. et l’œuvre de Diodore de Sicile : il s’agit notamment de voir comment ce dernier concilie l’histoire du ive. s., le vocabulaire grec et les modes et idéologie de l’historiographie romaine, en examinant notamment les liens entre ses livres XIV et XV et les HO. Contre l’idée commune que Diodore aurait connu les HO et les Hell. à travers Éphore, EO défend une lecture directe en s’appuyant sur des exemples précis. Pour elle, Diodore ne se limite cependant pas à répéter les HO mais les condense, voire les simplifie, dans un sens moralisant et didactique qui ignore parfois la complexité réelle des événements et situations politiques décrits.
4La seconde partie du livre rassemble cinq chapitres thématiques. Le chap. 5 étudie le traitement par les HO du thème de la polypragmosynè athénienne : le terme désigne un activisme exagéré qui permet de comprendre la politique étrangère d’Athènes et ses motivations profondes, en particulier dans le déclenchement de la guerre de Corinthe. Alors que Thucydide qualifiait par ce terme Athènes comme ensemble homogène, le narrateur des HO l’applique lui plus précisément aux démocrates, dans une peinture qui n’est pas toujours cohérente : c’est que les HO appliquent à l’époque décrite les caractéristiques de la seconde ligue athénienne, plus tardive. Au chap. 6, EO étudie la perception que montrent les HO et les Hell. de l’hégémonie en Grèce : si Thucydide insistait sur la prépondérance de l’hégémonie maritime, les historiographes ici envisagés s’intéressent davantage à l’hégémonie continentale, ce qui explique notamment les développements sur la constitution béotienne dans les HO ou sur certains événements se déroulant sur le continent. Le chap. 7 poursuit l’étude du thème de l’hégémonie en mettant en regard les HO, Xénophon et Diodore. L’auteure montre comment les trois textes reprennent, chacun à sa façon, des paradigmes construits depuis le ve s. et qui, s’ils ne sont plus adaptés à la situation postérieure, gardent cependant une efficacité rhétorique, comme en témoigne d’ailleurs leur confrontation avec la production oratoire du ive s. Une opposition duelle figée et simplifiée se cristallise en effet, en particulier chez Diodore, pour décrire les affaires extérieures (Athènes vs Sparte, mer vs continent) avec son correspondant pour les dissensions internes (polloi-dèmos vs oligoi). Au chap. 8, l’auteure étudie la manière dont les HO reprennent le langage politique utilisé par Thucydide et en particulier sa théorie de la causalité, avec les thèmes liés : responsabilité individuelle et collective ; causes manifestes, réelles, alléguées ; thème de la stasis. Y est lié le « moralisme » que l’auteure décèle dans les HO et qu’elle aborde dans son neuvième et dernier chapitre : d’après son analyse, le moralisme du texte a pour première fonction d’améliorer notre compréhension des événements, avant même d’enseigner une conduite éthique et de transmettre en cela un héritage pour les futures générations de dirigeants (ce que font plutôt Xénophon, Théopompe et Éphore), ou de dégager des principes psychologiques généraux.
5L’ouvrage comporte quatre appendices (une discussion sur le papyrus de Théramène ; un prolongement au chap. 7 sur le lien entre historiens et orateurs au ive s. ; un prolongement au chap. 4 sur les rapports entre Diodore et l’historiographie romaine ; des traductions d’extraits), une bibliographie, un index des noms et un index thématique.
Pour citer cet article
Référence papier
Anne de Cremoux, « Egidia Occhipinti, The Hellenica Oxyrhynchia and Historiography: New Research Perspectives », Anabases, 30 | 2019, 249-251.
Référence électronique
Anne de Cremoux, « Egidia Occhipinti, The Hellenica Oxyrhynchia and Historiography: New Research Perspectives », Anabases [En ligne], 30 | 2019, mis en ligne le 21 octobre 2019, consulté le 18 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/anabases/10244 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/anabases.10244
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