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L’Hyperréalisme de Nicholson Baker, ou comment se refamiliariser avec le quotidien

Arnaud Schmitt

Résumés

Cet article se propose d’étudier la dynamique inhérente à deux romans de Nicholson Baker – The Mezzanine et A Box of Matches – et la façon dont celle-ci repose sur une dialectique populaire/savant, et plus exactement thématique populaire/récit savant. Après avoir défini la culture savante avant tout comme une culture de communauté, comme cela a été fait par le philosophe Hilary Putnam à travers son concept de « division linguistique du travail » (« linguistic division of labor »), nous tentons de démontrer qu’être savant en littérature n’est pas lié à ce que l’on dit, mais à la façon dont on le dit. En d’autres termes, il peut exister des récits savants dont la thématique est essentiellement populaire. La littérature proposée par Nicholson Baker obéit justement à cette logique : à travers des chronotopes réduits, mais denses, ses romans nous refamiliarisent avec l’infra-ordinaire, l’ultra-populaire, les gestes répétitifs et souvent mécaniques du quotidien, par le biais de récits pourtant sophistiqués –« savants » puisque nécessitant une très bonne culture littéraire – se caractérisant par des écarts formels typiquement post-modernes (notes pléthoriques, logique itérative poussée à l’extrême).

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Texte intégral

  • 1  « No matter how much a writer wishes to play with conventions, however, he or she can do so only i (...)
  • 2  « Discursive communities » (Hutcheon, 1994, 92), « Interpretive communities » (Fish, 1980, 97).

1Dans son ouvrage consacré à la théorie de la réception, Before Reading, Narrative Conventions and the Politics of Interpretation, Peter J. Rabinowitz fait remarquer que si un auteur souhaite détourner des conventions culturelles ou artistiques, il présuppose forcément qu’elles soient connues, sinon de l’intégralité, en tout cas d’une partie de son lectorat1. Il n’existe aucune manière de s’en assurer empiriquement, à moins de rencontrer et d’interroger un nombre significatif de ses lecteurs, mais le fait d’appartenir à une communauté discursive2 nous rend apte à évaluer ce que les membres du groupe auquel nous appartenons semblent savoir ou ignorer. Rabinowitz poursuit son raisonnement ainsi :

This may help explain why so-called serious avant-garde authors so frequently turn to formulate popular fiction as a skeleton on which to hang their own works. In sum, whether a writer is twisting the rules or using them straightforwardly, he or she must work on the assumption that the reader has command over them to begin with, and regardless of the text, the reader reading without knowledge of the rules presupposed by the author is unlikely to uncover the intended meaning. (Rabinowitz, 58)

  • 3  Fish, 1973,151.
  • 4  « Inviolable constraints » (Margolis, 82).

2Il est en effet courant pour la fiction, et ce à quoi Rabinowitz fait référence ici est la fiction postmoderne, de s’installer dans des genres populaires afin d’en détourner les codes et les structures. Quelques exemples : The New York Trilogy de Paul Auster (le polar), Ragtime ou Billy Bathgate de E.L. Doctorow (le livre, ou le film de gangster), Letters de John Barth (le roman épistolaire), The French Lieutenant’s Woman de John Fowles (le roman victorien) ou, plus récemment, Lunar Park de Bret Easton Ellis (l’autofiction, genre qui est déjà un détournement de l’autobiographie, Ellis propose donc un détournement de détournement – les conventions pré-requises ici se multiplient). Ces auteurs se servent moins du genre en soi que des attentes qu’il suscite. Or, un genre se définit essentiellement par la position de réception qu’il instaure ; là réside pour Stanley Fish sa caractéristique principale (« a prediction of the shape of a response »3). Ce point de vue est dans la lignée pragmatiste d’une partie de la théorie littéraire américaine, notamment celle qui s’intéresse à la réception des œuvres, qui, de Fish à Culler en passant par Cohn ou Hillis Miller, veut qu’un texte ne puisse être défini de manière essentialiste, en dehors de l’évènement de la lecture. Dans le cadre de la problématique qui nous intéresse ici, il n’y a pas de textes savants ou populaires, seulement des lectures savantes ou populaires. Nous ne rentrerons pas plus en avant dans le débat essentialisme / contextualisation (débat qui consiste à se demander si le texte existe en dehors du contexte de sa lecture, et présente des attributs inaltérables4) ; néanmoins, nous serons forcément amenés à nous y référer, puisque se poser la question du statut de la fiction d’un auteur tel que Nicholson Baker à l’aune de la dichotomie culture savante / culture populaire nous oblige à répondre à une question basique : quid du populaire et du savant dans The Mezzanine et A Box of Matches, les deux textes de Baker que nous nous proposons d’étudier ?

Le savant et le populaire, une histoire de communautés

  • 5  « Stock responses » (Rabinowitz, 39).
  • 6  « The background » (Searle, 128).

3Avant de nous intéresser plus précisément à ces deux romans, quelques considérations théoriques méritent d’être faites afin de poursuivre la réflexion amorcée ci-dessus sur le couple réception / convention. Nous avons donc indiqué qu’un genre amène le lecteur à se placer en position (psychologique) de recevoir un certain type de texte et, en ce qui concerne les textes postmodernes cités plus haut, de voir cette attente contrariée. Plus précisément, et selon le degré d’informations paratextuelles glanées au sujet du texte, deux catégories de lecteurs se dégagent : ceux qui savent que leurs attentes vont être déçues, et ceux qui l’ignorent. Bien sûr, à l’intérieur de ces deux groupes, nous trouvons des degrés divers d’attentes et de surprises. Il existe toujours aussi ce lecteur qui ne sait rien et qui n’attend rien, celui qui saisit un texte au hasard (sans même consulter, donc, les informations données par le prière d’insérer). Utopie ? Sûrement puisque ce lecteur « innocent » a forcément des attentes, des réactions pré-définies5, un passé culturel6, mais ce vécu ne sera mis en branle que lorsque la lecture du texte aura commencé, et non avant, comme cela est le cas la plupart du temps du fait de la couverture médiatique dont bénéficie éventuellement un livre. Dans tous les cas, ce que nous pourrions définir de manière générale comme une pratique postmoderne consiste à invoquer des genres tout en refusant au lecteur (pas tout à fait idéal, celui à qui on aime donner une petite leçon, sur le ton de la plaisanterie) la satisfaction des attentes suscitées : « Such novels attempt to create alternative linguistic structures or fictions which merely imply the old forms by encouraging the reader to draw on his or her knowledge of traditional literary conventions when struggling to construct a meaning for the new text » (Waugh, 4). La raison de cette tension est simple, elle provient d’un mélange des registres culturels, d’une inclusion dans la fiction de la dialectique culture d’élite / culture populaire (en anglais, high brow / low brow). Linda Hutcheon fait justement remarquer qu’une des constantes du postmodernisme est de mélanger ces deux registres (Hutcheon, 1988, 44) afin de créer une tension, et donc un dynamisme, du fait de la porosité des frontières culturelles et discursives. Les textes typiquement postmodernes cités plus haut contribuent à un climat de confusion générique et à la création d’un paradigme nouveau, celui de l’indécision. Ces généralités sur le postmodernisme, admises par grand nombre de ses théoriciens - McHale, Hutcheon, Lyotard, Jameson, Rorty, Eco, reprennent tous l’idée d’une confusion des genres – nous intéressent tout particulièrement ici pour deux raisons : Baker est un auteur postmoderne (ceci sera développé plus tard) et la dichotomie savant / populaire devient forcément dans ce climat idéologique une dialectique : non plus une simple opposition, mais un dialogue au sein d’une même œuvre entre des références et des pratiques jusque-là maintenues à l’écart. Le lecteur en est ainsi forcément l’animateur, puisque c’est à travers ses propres références que cette dialectique s’anime. Les remarques liminaires faites au sujet du genre sont tout aussi applicables à la thématique culture savante / culture populaire. Ces deux zones culturelles ne sont dissociables dans un texte littéraire que lorsque le lecteur parvient justement à les identifier. Elles ne sont perceptibles que par rapport au vécu (« background ») du récepteur et à ce qu’il s’attend à trouver dans le texte.

  • 7  “We all belong to many overlapping (and sometimes conflicting) communities” (Hutcheon, 1994, 92).
  • 8  Putnam, 24.

4Si nous souhaitons aller plus loin dans notre raisonnement, il est important de définir brièvement ce que nous entendons par savant et populaire. Finalement, la différence entre les deux relève plus du quantitatif que du qualitatif. En général, ce que nous définissons comme savant est accessible à une minorité, le populaire à une majorité. On peut si on le souhaite associer à cette distinction une connotation socioculturelle, mais il serait plus juste de se limiter à l’idée de communauté discursive. Nous appartenons tous simultanément à plusieurs communautés7, mais celles-ci sont plus ou moins développées ; et plus elles sont restreintes, plus elles peuvent être perçues comme savantes. Ce n’est pas une règle irréfutable, car nous pouvons trouver certaines communautés (religieuses, par exemple) dont la capacité inclusive va en décroissant, du fait d’une inadéquation idéologique grandissante avec la société qui les accueille. Mais il est vrai que toute culture savante a pour dénominateur commun le fait de n’être maîtrisable que par un nombre limité de personnes. Lorsque ce genre de groupe s’élargit du fait d’une plus grande compréhension de son discours par d’autres groupes, il prend sa place dans la culture populaire, celle du plus grand nombre. La référence au discours est essentielle : le philosophe américain Hilary Putnam, à travers son concept de « division linguistique du travail » (« linguistic division of labor »8), a bien montré que, dans notre rapport au réel, au référentiel, nous ne maîtrisons que très peu d’éléments et nous faisons confiance aux « experts » pour des définitions pointues : « They can always rely on experts to do this for them. Even in the case of so important a metal as gold, the average person is highly unreliable (in distinguishing gold from brass, etc.) and knows that he is unreliable » (Putnam, 22). La culture savante est la culture des experts, mais personne ne peut arriver à tout connaître. La plupart du temps, nous appartenons à une seule communauté d’experts, mais à plusieurs autres communautés moins restrictives. Si ces « niches savantes » sont exclusives, cela est dû en grande partie à notre gestion du savoir : nous demandons à certaines personnes compétentes en une matière de se charger d’un pan scientifique bien spécifique, et lorsqu’elles semblent parvenues à des conclusions cohérentes d’un point de vue pragmatique (présentant un intérêt pour le plus grand nombre), nous – en tant que majorité – leur renouvelons notre confiance sans forcément comprendre la nature de leur découverte.

  • 9  Rabinowitz, 10.

5Pour ce qui est de la littérature, l’approche communautaire est encore plus évidente. Chaque type de lectorat présente une pratique littéraire singulière et un type de consommation qui lui est propre. Rabinowitz établit d’ailleurs un lien direct entre la façon dont nous lisons et ce que nous lisons (« what you read and how you read »9), nos pratiques littéraires déterminant nos choix de textes, et non l’inverse. Bien sûr, nous pouvons être confrontés à des textes qui nous surprennent ; deux attitudes s’offrent alors à nous : « you can keep the text and change the strategy, or you can keep the strategy and toss out the text » (Rabinowitz, 211). Heureusement, les frontières entre les communautés sont parfois perméables et, au gré d’un accident culturel, nous pouvons intégrer de nouvelles habitudes, qui nous dirigeront alors vers de nouveaux textes.

Le savant et le populaire en littérature, une histoire de récit

  • 10  Cohn, 126.

6Bien que, tout comme un texte scientifique, un texte littéraire soit défini par la communauté qui le reçoit, la dialectique savant / populaire ne se limite pas au contenu. En effet, pour un texte scientifique, le langage et les référents adoptés excluent a priori une grande partie des lecteurs potentiels qui ne maîtrisent pas ce « jeu linguistique », pour reprendre l’expression de Wittgenstein. La littérature, du fait de son modèle communicationnel indirect – ce que Dorrit Cohn a parfaitement défini à travers son concept de « disjunctive model »10 - dû en grande partie à la présence d’un narrateur, double son discours, ou plutôt le dote d’une ombre subjective qui, à tout moment, fragilise ses apparences mimétiques. Être savant en littérature n’est pas affaire de dire, mais façon de dire. En d’autres termes, c’est le récit, l’indispensable structure narrative, qui facilite ou complexifie la lecture. En effet, la littérature, contrairement à la pratique scientifique, n’a pas de langage qui lui est propre. Ce point a été relevé par nombre de théoriciens, notamment Patricia Waugh dans son ouvrage Metafiction : « There is no one privileged ‘language of fiction’. There are the languages of the memoirs, journals, diaries, histories, conversational registers, legal records, journalism, documentary » (Waugh, 5). La littérature est une pratique qui vampirise les autres formes de discours. C’est ainsi que David Lodge définit le réalisme: « the representation of experience in a manner which approximates closely to description of similar experience in non-literary texts of the same culture » (Lodge, 25).

7Néanmoins la littérature savante, réservée donc à un lectorat réduit, souvent universitaire, ne saurait se définir uniquement par un emprunt à un discours savant, ce serait une vision simpliste des choses. Prenons deux exemples se situant presque aux extrêmes opposés du spectre littéraire : Le Nom de la Rose d’Umberto Eco et Ulysses de James Joyce, le premier est un succès international, le second une référence dans le monde des études littéraires. Wolfgang Iser, dans The Act of Reading, A Theory of Aesthetic Response a très bien analysé ce que le texte de Joyce pouvait présenter de déroutant du point de vue de la réception. Cela ne se situe pas au niveau linguistique donc, bien au contraire, puisque l’ambition de Ulysses est justement de puiser largement dans le vernaculaire, de dévergonder la littérature. Mais le récit est distendu, voire même totalement lâche du fait d’une absence de perspective claire, d’un mélange volontaire des régies narratives :

The repertoire of this novel is not only derived from a great number of different systems, but is also presented in such density that the reader finds himself constantly disoriented. The problem lies not so much in the unfamiliarity of the elements, for these in themselves are not difficult to identify, but in the intermingling and the sheer mass, which cause the repertoire itself to become increasingly amorphous. (Iser, 84)

8Selon Eco, la vie ressemble sûrement bien plus à Ulysses qu’à un roman d’aventures du type Les Trois Mousquetaires (Eco in Iser 125), mais il est inutile de préciser lequel de ces deux romans appartient à un genre populaire. Pourtant, comme le souligne Eco, nous devrions être plus habitués au contenu mimétique du roman de Joyce qu’à celui du texte de Dumas. Cette méprise vient du fait que nous avons trop longtemps confondu littérature et réalité, à cause de la notion insidieuse de réalisme. Et pourtant la seule réalité d’une œuvre de fiction est l’évènement de la lecture – ce qui n’empêche pas que dans le sillage d’un roman soient entraînées connotations et dénotations.

9En conclusion de cette partie, nous pourrions dire que le texte littéraire n’est donc jamais savant de par son contenu (à moins bien évidemment de singer un texte scientifique, mais il serait alors savant par procuration, en copiant un texte originellement savant), mais du fait de son récit, sachant que l’essence du roman réside dans l’acte narratif. Pour affiner notre analyse, nous pourrions dire qu’il existe des récits savants (Ulysses) qui demandent une grande connaissance des rouages narratifs et narratologiques (modernistes, ici) afin de localiser les sources d’énonciation, préalable incontournable à l’attribution d’un sens à du contenu mimétique. Le cas contraire nous situe dans une pratique populaire.

Nicholson Baker et l’hyperréalisme

10Le cas Baker nous entraîne dans une ère postmoderne prompte à puiser dans les deux pratiques. Lorsque je parle du cas Baker, je parle plus précisément de ses textes hyperréalistes, et plus particulièrement The Mezzanine (1986) et A Box of Matches (2003). Stanley Cavell note le caractère extrêmement ennuyeux de notre quotidien : « If a person were shown a film of an ordinary whole day in his life, he would go mad » (Cavell in Iser, 119). C’est un peu le projet de Baker dans ces deux livres, excepté pour deux raisons qui rendent le projet fascinant. Afin justement de ne pas nous rendre fous d’ennui, Baker choisit des chronotopes réduits, mais denses (l’espace-temps nécessaire pour passer d’un étage à un autre en utilisant un escalator, ou les trente trois réveils très matinaux d’un narrateur et les actions routinières qui s’ensuivent – à savoir allumer un feu de cheminée dans le silence d’un foyer encore endormi). Et il ne confond pas non plus hyperréalisme et minimalisme (erreur classique de penser que le silence – utopique – de la forme peut nous rapprocher du réel) ; bien au contraire, il tente dans ces deux textes de témoigner de l’activité foisonnante de notre vie psychique, et plus particulièrement du couple séminal cognition / mémoire. Baker se propose de visiter les oubliettes de notre cerveau, ce que le narrateur de The Mezzanine nomme élégamment « the undocumented daily texture of our lives » (41), phrase programmatique puisque les narrateurs des deux romans nous relatent justement leur tentative de documenter ces aspects de notre quotidien qui passent par profits et pertes du fait de notre relation forcément partielle et mécanique à ce qui constitue notre réel. Dans The Mezzanine, le réel du monde contemporain, bureaucratique, est plus particulièrement caractérisé par la présence pléthorique, envahissante, inévitable, de biens de consommation. Frederic Jameson, dans son livre Postmodernism or, The Cultural Logic of Late Capitalism qualifie le pop art tel qu’il est pratiqué par Andy Warhol de « commodification », terminologie qu’il explique en partie ainsi : « The first and most evident is the emergence of a new kind of flatness or depthlessness, a new kind of superficiality in the most literal sense, perhaps the supreme formal feature of all the postmodernist to which we will have occasion to return in a number of other contexts » (9). La thèse de Jameson selon laquelle, grossièrement, le postmodernisme, en tant que courant artistique, a pour double maléfique la forme la plus récente du capitalisme, trouve un écho retentissant dans cette façon que le pop art a eu de représenter des biens de consommation sans recul apparent. Cette analyse peut bien évidemment être contestée, puisqu’elle fait abstraction à la fois d’un pan important de la pratique artistique, à savoir la réception (une image basique, par exemple, peut entraîner une réception complexe et stimulante car elle est déjà insérée dans le vécu du récepteur, mais en étant défamiliarisée par le contexte artistique), mais aussi de l’histoire de l’art américain qui n’a eu de cesse justement d’intégrer des signifiants populaires dans ses œuvres. Mais ce qui importe ici est le parallèle avec les deux textes de Baker puisque la première lecture révèle cette volonté marquée de se colleter avec la dimension commerciale de notre quotidien. Pas de boîte de soupe iconique ici, mais de plus ou moins longues digressions (lorsqu’un texte n’est composé que de cela, peut-on encore employer ce terme ?) sur les lacets, les agrafeuses, les serviettes en papier (The Mezzanine), ou encore les allumettes et les machines à café (A Box of Matches). Bien que A Box of Matches soit plus temporel et immatériel que The Mezzanine (il traite surtout du temps comme bien de consommation), il fonctionne lui aussi selon une culture du gros plan, pour utiliser une référence au langage cinématographique, et plus exactement du gros plan prolongé. À la différence du pop art, pas de relation mythique, mais bien pratique ; l’hyperréalisme de Baker s’apparente plus à l’infra-ordinaire de Pérec. Dans ces deux textes, le rapport aux choses est pragmatique, donc en soi très américain, circonscrit à l’utilisation que nous faisons des objets, à la façon dont ils influent sur notre routine journalière et la façonnent. L’objet n’est pas rendu abstrait de par une transfiguration artistique. Il est réinséré ici avec force dans notre quotidien car il n’a pas forcément bénéficié jusque-là dans la littérature de l’attention que nous pouvons lui accorder dans notre fonctionnement habituel.

11Nous pouvons alors nous poser la question suivante : le bien de consommation chez Baker est-il défamiliarisé ou bien refamiliarisé ? Au-delà de la remarque de Jameson sur le pop art, la défamiliarisation est pour le formaliste russe Viktor Shklovsky l’intention première de l’art. Cette définition peut très bien s’appliquer au récit du quotidien que fait l’auteur américain en braquant son objectif narratif sur ce qui est normalement laissé pour compte thématiquement dans une littérature plus « sérieuse ». Jusqu’à l’ère postmoderne, peu de romans ont consacré des pages entières à l’utilisation des sanitaires. En attirant notre attention sur des serviettes en papier, Baker nous rend-il visible une réalité à laquelle nous n’attachons aucune importance (mais que nous utilisons), ou bien essaie-t-il de nous la faire voir différemment ? Quelles que soient nos hypothèses concernant la stratégie narrative de Baker, il est de toute façon question de voir différemment (puisque re-voir est forcément voir autrement). Mais en ce qui concerne la problématique à laquelle nous nous intéressons ici, établir une distinction est important. La stratégie de Warhol est donc de se servir de l’impact du populaire (synonyme ici de consommation de masse – accessible au plus grand nombre) pour créer une réflexion artistique (objet savant, pièce de musée) qui s’incarnera en un objet hybride (objet savant massivement diffusé par le biais de la reproduction et d’une base référentielle accessible à un nombre massif de récepteurs – une bouteille de Coca-Cola par exemple). Mais pour Baker, pas question a priori de sortir l’objet de son contexte. Il ne s’agit pas d’une logique d’extraction mais de réinsertion, réinsérer le lecteur dans l’ultra-quotidien, celui des gestes mécaniques. Ainsi, en réponse à la question posée ci-dessus, The Mezzanine et A Box of Matches me semblent participer d’une volonté de se refamiliariser avec le quotidien, de se le réapproprier dans ce qu’il a de plus trivial, de plus fonctionnel, de plus populaire. Distinction importante car Baker a bien pour matière thématique la culture populaire, l’environnement commercial dans lequel nous agissons tous les jours.

  • 11 A Box Of Matches, 15.

12Comme nous avons eu l’occasion de le mentionner brièvement, A Box of Matches s’inscrit lui aussi dans cette thématique en insistant plus sur la commercialisation du temps que celle de notre environnement, professionnel par exemple. George Lakoff et Mark Johnson ont vu dans la métaphore « Time is Money » une des métaphores structurelles maîtresses qui déterminent notre façon de vivre et de penser (Lakoff & Johnson, 14). Le narrateur de A Box of Matches se propose justement, non pas d’y échapper, mais de tenter de faire un petit pas de côté, de créer un espace-temps bien à lui, l’aube. A nouveau, l’idée directrice ici est de nous refamiliariser avec un temps qui nous appartient, mais que nous ne revendiquons plus parce que notre attention est dirigée ailleurs. Si le narrateur de The Mezzanine évolue au cœur du monde de l’entreprise, mais entre deux étages, celui de A Box of Matches se propose d’interrompre le fil du temps commercial l’espace de trente-trois aubes : « Good morning, it’s 4 :52 a.m, and I’m very glad to be conscious when nobody else is conscious » (16). Se refamiliariser avec le réel équivaut à se le réapproprier, réaffirmer une présence cognitive là où on avait abandonné le terrain. L’aube ne rentre que très peu dans les considérations du temps commercial. Le narrateur décide pourtant de modifier son champ d’expériences pour y inclure ce qui n’y figurait plus. Si le temps est objectivé, le narrateur de A Box of Matches s’inscrit dans une démarche similaire à celle adoptée par le narrateur de The Mezzanine, à savoir recentrer sa perception, et réaccorder son attention à l’ultra-familier devenu furtivement étrange(r). Le « good morning » qui ponctue les amorces des trente trois chapitres de A Box of Matches a son importance perlocutionnaire, nous y reviendrons, mais il symbolise aussi la réouverture d’une conscience en sommeil. Et un nouvel espace-temps ouvre un nouvel espace de pensée qui échappe, dans la mesure du possible, aux pensées diurnes (« daytime thoughts »11), qui s’insinuent pourtant régulièrement dans cette liberté idéative nouvellement acquise :

At time, when I sit here, a long series of daytime thoughts will pass through me – thoughts connected with work or, say, with town politics. That’s all right – let those thoughts pass through you. You hear them coming, like a freight train with the whistle and the dinging ; they take several minutes to go by, and then they’re gone. (15)

13Cette citation, au travers de l’image ferroviaire qui est développée, pointe du doigt la différence majeure entre les deux projets narratifs proposés par Baker : si The Mezzanine souhaite explorer une strate du réel qui est en évidence sous notre nez, mais que nous jugeons trop triviale pour y consacrer une partie de notre conscience, A Box of Matches témoigne de la part de son narrateur d’un acte de volition plus radical (il ne s’agit plus de faire attention, il faut aussi se lever très tôt, modifier son quotidien), et ceci pas pour créer une nouvelle tranche de réel, mais pour redonner vie à une strate de réel abandonnée. Cependant, les deux textes ont comme dénominateur commun le désir mentionné plus haut de se refamiliariser avec le réel, dans son acceptation fonctionnelle, terre-à-terre, populaire car faisant part d’expériences accessibles au plus grand nombre.

Thématique populaire, récit savant

  • 12  « Although many critics argue argue that in literature everything is significant, we know from exp (...)

14Il ne fait alors aucun doute que la thématique, le fondement mimétique des deux romans de Nicholson Baker correspond à du prosaïque, surtout lorsque celui-ci est défini en opposition au sophistiqué. Que peut-il y avoir de savant dans des textes dont les narrateurs digressent sur l’usage que nous faisons des serviettes en papier ou sur la meilleure façon d’allumer un feu ? Et pourtant, il y a forcément un côté savant et sophistiqué dans une œuvre amplement étudiée à l’université, analysée dans les pages les plus sérieuses du monde littéraire et dont l’auteur, figure sérieuse s’il en est, représente officiellement le postmodernisme. Nicholson Baker n’est pas un auteur populaire comme Stephen King, qui ne s’intéresse pourtant pas à nos habitudes hygiéniques, mais dont les pratiques génériques ne proposent pas d’écart par rapport à l’attente qu’elles suscitent. King est passé maître dans la pratique d’un genre populaire, le roman horrifique, et les codes narratifs qu’il pratique sont lisibles par un grand nombre de lecteurs, ce qui est aussi le cas, par exemple, d’un auteur tel que Michael Crichton, même si les références scientifiques de certains de ses ouvrages ne sont cependant maîtrisées que par une communauté réduite. Pas besoin de tout comprendre dans un récit, tant que nous comprenons son déroulement. De toute façon, comme le fait remarquer Rabinowitz, il est impossible pour le lecteur de prêter attention à l’intégralité d’un texte, nous nous contentons de butiner, de sélectionner12. Lorsqu’un passage se fait trop savant pour nous, et si une compréhension partielle ne remet pas en cause la satisfaction prise à la lecture du roman, nous prenons notre mal en patience et reprenons le train à plein régime un peu plus loin. Pour Baker, il n’est pas nécessaire de quitter le train, le trajet est de plus assez court, et rien dans son déroulement ne semble pouvoir créer des difficultés pour le lecteur. Les romans de Baker, pour filer la métaphore, ferroviaire, ressemblent plus au trajet quotidien qui nous mène à notre lieu de travail, qu’à un départ en vacances dans un train à grande vitesse. Trajet populaire mais pourtant mode de transport savant ? Comment est-ce possible ?

  • 13  Seymour Chatman parle de « story time » et « discourse time » (Chatman in Mitchell, 119), Christia (...)

15Tout simplement parce que la littérature, du fait de sa nature hybride, disjointe pour évoquer à nouveau la terminologie initiée par Dorrit Cohn, est toujours autre que son contexte référentiel. Si cela n’était pas le cas, nous ne serions plus dans le domaine de la fiction mais dans celui de l’autobiographie ou de ce que les Américains appellent de manière très englobante « nonfiction ». Les deux sources énonciatives (l’une réelle, l’autre feinte) qui caractérisent la fiction donnent lieu à deux temps du récit. Les terminologies diffèrent selon les théoriciens, mais elle s’articulent toutes plus ou moins autour de la distinction discours / histoire de Benveniste13. Ces deux temps parallèles permettent donc au récit de ne pas être condamné à rester dans le sillage de la machine référentielle. Il ne s’agit pas de réintroduire subrepticement la dichotomie forme/fond, bien au contraire, puisque les deux temps du récit s’inscrivent dans une même dynamique unitaire, et, de plus, le mode d’énonciation façonne inexorablement la matière thématique. Cependant, une fois ceci rappelé, le discours fictionnel reste intrinsèquement double, voire fuyant. Comme nous l’avons vu avec Joyce et Eco, le récit savant peut se complaire dans le vernaculaire et le récit le plus classique se livrer à de savantes références. Rien de plus normal pour un mode de communication disjoint.

16Nous avons ainsi mis en avant la façon dont les deux romans de Baker se proposent d’aborder la quotidienneté ; l’écart produit par Baker, qui fait de lui un auteur sérieux et reconnu, provient du mode opératoire narratif qu’il met en œuvre pour énoncer cette même quotidienneté. Les narrateurs de The Mezzanine et A Box of Matches sont des narrateurs déclarés et subjectivisés qui décident de relater des gestes de tous les jours. Les deux récits démontrent sur un mode forcément homodiégétique la volonté de Baker de rentrer dans l’hyperréalité par le biais de deux singulières personnalités. Ces deux narrateurs ne sont pas juste homodiégétiques, ils sont présentés comme des autobiographes amateurs : pas simple je narrant, mais je écrivant puisque le narrateur de The Mezzanine présente son travail comme un « memoir » (37) et fait régulièrement référence au travail d’écriture nécessaire à la production du texte que nous, lecteurs, sommes en train de lire ; c’est aussi le cas du narrateur de A Box of Matches qui, au-delà de ses trente-trois « good morning », nous parle de la discipline à laquelle il s’est astreinte, discipline d’écriture et il se dépeint clairement en train de taper à la machine (18). Bien plus que des récits à la première personne, Baker nous propose, non pas deux romans autobiographiques, mais bien des autobiographies fictives.

17Le fait de feindre une autobiographie n’a rien d’avant-gardiste, cela se fait depuis la genèse du roman moderne (et plus particulièrement Tristram Shandy). Plus que la modalité choisie par Baker, c’est la radicalité de son récit qui surprend et qui l’identifie presque immédiatement comme objet postmoderne. Radicalité du détail pour The Mezzanine, radicalité de la discipline narrative pour A Box of Matches. Et comment le récit en témoigne-t-il ? Il propose simplement des formes narratives qui n’appartiennent habituellement pas au récit de vie à la première personne. Par exemple, la marque de fabrique de The Mezzanine, au-delà de son approche hyperréaliste, saute aux yeux dès les premières pages : les notes, et plus exactement leur utilisation massive, abusive, hors-norme ; dès les pages quatre et cinq, elles repoussent le corps du texte dans ses derniers retranchements, envahissent l’espace textuel pour occuper la plus grande partie de la page. Pour Barthes, le mot pouvait être érotique à deux conditions : « s’il est répété à outrance, ou au contraire s’il est inattendu, succulent par sa nouveauté » (Barthes, 68). En ce qui concerne les écarts formels, et les notes de Baker en font partie, la logique est similaire : l’abus, la radicalité esthétique rendent le texte jouissif. Non seulement l’auteur aborde le réel par le petit bout de la lorgnette, et non par l’optique métaphysique de la longue vue, mais il le fait aussi en utilisant un outil plutôt universitaire, un outil de glose, de digression, de surdéfinition, de surcaractérisation. L’acte sophistiqué et savant se situe justement là : doubler la thématique d’une forme tout aussi incongrue pour au final obtenir une ambitieuse réflexion sur l’expérience cognitive du quotidien. Baker montre à travers ce texte une évidence : pour échapper au déterminisme, à l’automatisme, il faut que chaque geste compte, chaque pratique soit pensée, tout acte de consommation réfléchi. Seulement à ce prix – certes d’apparence fastidieuse – pouvons-nous nous déclarer maîtres de notre environnement. Mission impossible, mais seulement en partie. L’attention permanente à la vie ne relève pas du domaine du faisable, mais nous pouvons néanmoins nous réapproprier des pans abandonnés de notre conscience, et les notes nous montrent la marche à suivre. Le narrateur rend d’ailleurs hommage (dans une note !) aux notes et à leurs utilisateurs :

They knew that the outer surface of truth is not smooth, welling and gathering from paragraph to shapely paragraph, but is encrusted with a rough protective bark of citations, quotation marks, italics, and foreign languages, a whole variorum crust of “ibid.’s” and “compare’s” and “see’s” that are the shield for the pure flow argument as it lives for a moment in one mind. (122)

18Volonté typiquement postmoderne consistant à définir le réel comme insaisissable tout en mettant tout en œuvre textuellement pour tenter d’en donner une vision réaliste - en ayant, préalablement, fait son deuil du réalisme : volonté « apotropaïque » selon le déconstructionniste américain J. Hillis Miller qu’il définit ainsi : « It is a throwing away of what is already thrown away in order to save it » (Hillis Miller, 97).

19La radicalité de A Box of Matches sert la même logique : redonner toute sa dimension à la proximité, au quotidien par le biais de la radicalité d’un récit. Plus d’abus formel et d’insertion permanente de notes, lignes de fuite offertes par le texte pour rendre hommage au chaos de notre pensée et à son désordre associatif, mais plutôt ici une constance itérative, répétition excessive de la même tâche narrative qui permet au narrateur d’échapper aux habitudes et d’ouvrir de nouvelles portes de perception, pour faire référence à Aldous Huxley qui faisait quant à lui l’éloge d’une perception retrouvée certes, mais hallucinogène. Plus que le processus énonciatif, certes singulier, c’est la situation d’énonciation (un narrateur au petit matin tapant à la machine dans la pénombre pour retranscrire ses moindres impressions) qui interpelle ; elle est pourtant, là-aussi, dans la droite lignée de la tradition postmoderne qui s’est souvent attachée à dépeindre le contexte physique de sa source énonciative, en d’autres termes à mettre en scène le corps du narrateur. Dans le cas des deux textes qui nous intéressent ici, Baker crée deux narrateurs qui tentent de regarder le réel à partir d’un autre point de vue en se pliant à une discipline narrative radicale. Paradoxalement, l’idée narrative développée par Baker peut sembler sophistiquée, mais elle est issue de la volonté de renouer avec une certaine simplicité (A Box of Matches) ou une foisonnante proximité (The Mezzanine).

20En conclusion, ce qu’il y d’éminemment populaire dans la démarche entamée par Baker, et plus exactement par ses narrateurs, est l’accessibilité de leur pratique. Si l’on se souvient que, dans notre logique, populaire équivaut à une large communauté, la discipline à laquelle s’astreignent les deux narrateurs de Baker pourrait être celle de n’importe qui. En effet, plus encore que les textes qu’ils écrivent, ces narrateurs invitent à reproduire leur initiative autonarrative. Leur démarche est singulière parce qu’elle est finalement le fruit, en apparence, de deux profils socioprofessionnels, un employé de bureau et un éditeur de manuels médicaux, habituellement étrangers à l’univers littéraire. Leurs récits démontrent pourtant une grande maîtrise technique, de par leur minutie, leur amplitude et leur rigueur. Ces deux narrateurs produisent finalement ce que Josette Pacaly a appelé une « écriture du dimanche » en parlant de « la littérature personnelle » (160), mais l’écriture du dimanche proposée dans The Mezzanine et A Box of Matches est forcément de très bonne facture puisqu'elle est produite par un professionnel de la littérature, quelqu’un qui écrit aussi en semaine. Baker a le mérite, au-delà de cette accessibilité forcément feinte, de nous faire croire à la possibilité d’une telle écriture et au potentiel littéraire d’un quotidien qui pourrait par ailleurs sembler peu digne d’intérêt. Baker nous offre le songe d’une démocratie littéraire, d’une large communauté d’écrivains. C’est un beau songe.

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Bibliographie

Baker, Nicholson, The Mezzanine, New York : Vintage, 1988.

Baker, Nicholson, A Box of Matches, London : Chatto & Windus, 2003.

Cohn, Dorrit, The Distinction of Fiction, Baltimore : The Johns Hopkins University Press, 1999.

Fish, Stanley, « What is Stylistics and Why are They Saying Such Terrible Things About It ? » in Chatman Seymour (Ed.), Approaches to Poetics, New York : Columbia University Press, 1973.

Fish, Stanley, Is There a Text in This Class ? : The Authority of Interpretive Communities, Cambridge : Harvard University Press, 1980.

Genette, Gérard, Figures III, Paris : Editions du Seuil, 1972.

Hutcheon, Linda, A Poetics of Postmodernism, London : Routledge, 1988.

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Iser, Wolfgang, The Act of Reading, A Theory of Aesthetic Response, Baltimore : The Johns Hopkins University Press, 1978.

Jameson, Frederic, Postmodernism or The Cultural Logic of Late Capitalism, Durham : Duke University Press, 1991.

Johnson, Mark et Lakoff, George, Metaphors We Live by, Chicago : The University of Chicago Press, 1980.

Lodge, David, The Modes of Modern Writing, Ithaca : Cornell University Press, 1997.

Margolis, Joseph, What, After All, is a Work of Art ?, University Park, PA : The Pennsylvania State University Park, 1999.

Metz, Christian, Essais sur la Signification au Cinéma, Paris : Klincksiek, 1968.

Mitchell, W.J.T. (Ed.), On Narrative, Chicago : University of Chicago Press, 1981.

Pacaly, Josette. « D’un Nouveau Rapport à l’Œuvre Littéraire chez le Psychanalyste ? Didier Anzieu et Julia Kristeva avec Beckett et Proust » in Chiantaretto Jean-François, Écriture de Soi et Psychanalyse, Paris, L’Harmattan, 1996.

Putnam, Hilary. Representation and Reality. Cambridge, MA: MIT Press, 1988.

Rabinowitz, Peter J.. Before Reading : Narrative Conventions and the Politics of Interpretation. Columbus : Ohio State University Press, 1988.

Searle, John R.. The Construction of Social Reality. Harmondsworth : Penguin, 1996.

Waugh, Patricia. Metafiction. London : Routledge, 1984.

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Notes

1  « No matter how much a writer wishes to play with conventions, however, he or she can do so only if the readers share those conventions to begin with » (Rabinowitz, 57).

2  « Discursive communities » (Hutcheon, 1994, 92), « Interpretive communities » (Fish, 1980, 97).

3  Fish, 1973,151.

4  « Inviolable constraints » (Margolis, 82).

5  « Stock responses » (Rabinowitz, 39).

6  « The background » (Searle, 128).

7  “We all belong to many overlapping (and sometimes conflicting) communities” (Hutcheon, 1994, 92).

8  Putnam, 24.

9  Rabinowitz, 10.

10  Cohn, 126.

11 A Box Of Matches, 15.

12  « Although many critics argue argue that in literature everything is significant, we know from experience that when we read literature (...), it is impossible to keep track of, much less account for, all the details of a text » (Rabinowitz, 19).

13  Seymour Chatman parle de « story time » et « discourse time » (Chatman in Mitchell, 119), Christian Metz de “temps du signifié et temps du signifiant” (Metz, 27). Genette, quant à lui, parle de “temps de l’histoire et (pseudo-)temps du récit” (Genette, 78). Toutes ces terminologies trouvent leur origine dans la dichotomie relevée par les formalistes russes entre fabula et sujet et celle établie par Benveniste entre histoire et discours.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Arnaud Schmitt, « L’Hyperréalisme de Nicholson Baker, ou comment se refamiliariser avec le quotidien »Amerika [En ligne], 6 | 2012, mis en ligne le 15 juin 2012, consulté le 16 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/amerika/3075 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/amerika.3075

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Auteur

Arnaud Schmitt

Université Montesquieu Bordeaux IV
schmitt.arnaud@orange.fr

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Droits d’auteur

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Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-SA 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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