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Les espaces publics des pays germanophones, des espaces publics transnationaux ?

Pegida : émergence, sens et influence d’un mouvement identitaire (trans)national dans l’espace public allemand

Gwénola Sebaux
p. 387-399

Résumés

Cet article met en perspective le mouvement identitaire Pegida dans l’espace public à l’échelle (trans)nationale. Il retrace le contexte historique de son émergence en Allemagne en 2014 : la politique migratoire ouverte de la grande coalition, puis de sa réactivation en 2015 suite à la « Willkommenskultur » proclamée par la chancelière Angela Merkel en réponse à la crise des réfugiés. L’analyse montre comment Pegida investit et polarise l’espace public au sens le plus large de cette notion. Dans une société à la fois post-migratoire et d’immigration renforcée, que révèle Pegida des ambivalences allemandes ? Telle est la question cardinale. Au prisme de « Pegida », l’analyse met en évidence une société fragmentée, partagée entre générosité et anxiété.

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Texte intégral

  • 1  L’opinion publique est ici entendue dans son sens courant : l’opinion de la majorité de la populat (...)
  • 2  La notion d’espace public telle qu’entendue dans le présent article sera définie un peu plus loin.

1À l’automne 2014, l’espace public allemand voit surgir le mouvement contestataire Pegida, qui remet brutalement à l’agenda médiatique et politique la question (toujours sous-jacente) de l’immigration. Ancré dans le Land de Saxe en Allemagne orientale, Pegida est d’abord un phénomène local. On aurait tort pourtant d’estampiller rapidement « ex-RDA » ce mouvement populaire (voire populiste), qui déstabilise inopinément l’ordre que croyaient établi l’opinion publique1 et les élites allemandes. Pegida affiche d’ailleurs d’emblée sa vocation transnationale par le nom choisi : les « Européens patriotiques contre l’islamisation de l’Occident » (Patriotische Europäer gegen die Islamisierung des Abendlandes). Le choix du nom signale la volonté d’inscrire cette contestation ouvertement identitaire dans le cadre européen ; l’ambition est de dépasser le cadre national pour générer une dynamique protestataire résolument transnationale. L’objet même de la contestation : l’immigration est par excellence (par nature) un objet transnational. Ce n’est donc pas la seule Allemagne qu’il faut défendre contre l’immigration et ses effets délétères, ce n’est pas seulement l’Europe, mais l’Occident tout entier. Or, à la faveur d’une extrême médiatisation, Pegida, phénomène relativement local à l’origine, est en passe de devenir une véritable « marque », utilisable ailleurs en Europe. En Allemagne, son surgissement dans l’espace public a provoqué d’abord la sidération, puis la consternation, parce qu’il inflige le début d’un démenti au diagnostic rassurant d’une Allemagne « arrivée à l’Ouest » (H. A. Winkler). Pegida est ainsi à l’origine de la construction d’un problème public clé : alors même qu’on l’avait supposée éphémère, cette mouvance identitaire a durablement envahi l’espace public2, où elle suscite polémiques et intenses polarisations sociétales et politiques.

2Cette contribution tentera de remettre en perspective le contexte sociopolitique et géopolitique de l’émergence de Pegida. Nous nous proposons à cette fin d’examiner les postures politiques et médiatiques, d’analyser les argumentaires et leur impact sur l’opinion publique, afin de discerner et d’éclairer les enjeux du débat migratoire, entre souveraineté nationale et européanisation (supranationalisme). Un faisceau de questions sous-tendra notre analyse : Pegida doit-il être considéré comme un bouleversement historique ? Assiste-t-on, à l’automne 2014, à la gestation d’un mouvement d’ampleur nationale ? Quid de son impact transnational, alors même que l’immigration et son corollaire, la recomposition des identités nationales, affectent certes au premier chef l’Allemagne (désormais premier pays d’immigration en Europe), mais aussi l’ensemble des États de l’Union européenne ?

Espace public : essai de définition typologique

  • 3  Hommage international aux victimes des trois attentats terroristes survenus à Paris en novembre 20 (...)

3La notion d’« espace public » est floue et demande à être explicitée préalablement pour la bonne intelligibilité de ce qui va suivre. Le concept est en effet polysémique. C’est selon nous avant tout un lieu, souvent celui de la rue et des places centrales des villes – celles que peuvent investir commodément et visiblement les foules, à des fins pacifiques ou belliqueuses. Ce peut donc être un lieu de rassemblement festif (de type Fêtes de la Musique), ou commémoratif – c’est alors un espace d’expression nationale, voire internationale (à l’image de la grande marche républicaine « Nous sommes Charlie » en réaction aux attentats djihadistes, à Paris le 11 janvier 20153). Mais c’est aussi et peut-être principalement le théâtre où se joue l’Histoire, autrement dit un espace événementiel historique en direct (à l’instar de la Pariser Platz lors de la chute du Mur de Berlin à l’automne 1989). Strié, balisé de points de repères urbanistiques et architecturaux qui fonctionnent comme autant de symboles emblématiques (ou balises identitaires), l’espace public est donc en quelque sorte le cœur, éminemment visuel, de la vie publique. Par la puissance du vecteur médiatique, cet espace d’expression citoyenne s’offre de surcroît au regard national et international : il s’imprime ainsi durablement dans la mémoire collective et devient le symbole d’événements nationaux exceptionnels, à l’instar des mouvements protestataires souvent sanglants (dans l’histoire ancienne : place de la Bastille en 1789 à Paris, ou Stephansplatz, centre de l’insurrection viennoise d’octobre 1848 ; dans l’histoire récente : place Tian’Anmen, cœur des manifestations de Pékin au printemps 1989, ou place Taksim à Istanbul, centre des revendications démocratiques en Turquie en mai 2013).

4Pour notre propos, l’espace public est d’abord un lieu, un espace d’expression et de manifestation de l’opinion citoyenne. C’est en Allemagne le terrain où se rencontrent et s’affrontent les militants anti-islam, les inquiets de l’immigration, et les tenants d’une société ouverte à l’immigration, à la « culture de bienvenue » (Willkommenskultur). L’espace public englobe donc la sphère publique, c’est-à-dire l’espace urbain et le marquage de cet espace (dont on verra l’importance plus loin). Mais il s’étend bien au-delà de la rue et des places, puisqu’il se prolonge dans la sphère médiatique : dès lors en effet qu’il y a publication (publicité), il y a co-construction de l’espace public comme lieu de communication et de débats ou d’affrontements théoriques. Cette aire des médias et de l’édition se prolonge en outre désormais dans la sphère numérique, via le Web. Au total ces trois dimensions : urbanistique, médiatique et numérique sont trois facettes de l’espace public qui fonctionnent comme autant de caisses de résonance de l’opinion citoyenne. L’effet amplificateur et démultiplicateur est particulièrement manifeste avec les réseaux sociaux, nouvel avatar de l’agora, qui en grec signifie justement assemblée des citoyens, puis place publique. En témoigne le cybermilitantisme, nouvelle forme de résistance civile à l’œuvre aussi bien dans les démocraties occidentales que dans les États autoritaires. À la rue, espace collectif traditionnel, est venu s’ajouter l’Internet, introduisant de nouvelles spatialités transnationales et un changement d’échelle inédit dans cette ampleur, du national à l’international.

5En somme, quelle qu’en soit la forme (manifestations populaires, tribunes d’intellectuels, tweets de cybercitoyens), l’espace public ainsi défini dans son sens le plus large est donc un espace d’expression, d’adhésion ou de subversion. En ce sens, c’est une aire de régulation démocratique. C’est le lieu (réel ou virtuel, consensuel ou dissensuel) où éclôt, se cherche, se forge et s’affirme l’opinion publique en interaction avec le discours politique et médiatique. Ces interactions sont conflictuelles lorsqu’elles émanent d’opinions contraires ou expriment des ressentis contradictoires. L’espace public est alors le lieu où se donnent à voir et à entendre des individus ou des groupes (foules) mus par l’affect. Engendrant naturellement le mimétisme, c’est un lieu propice aux tropismes – forces obscures aux effets potentiellement délétères pour toute nation démocratique. D’où l’inquiétude en Allemagne face au surgissement de Pegida, qui signale un tropisme anti-immigration à rebours d’un discours politique et intellectuel d’ouverture à l’Autre – lui-même largement fondé sur l’expérience historique nationale : la Willkommenskultur apparue au début du xxie siècle dans le débat public (politique, médiatique, économique, scientifique) se veut l’antithèse de la Volkskultur nazie propagée dans les décennies 1930 et 40 du xxe siècle.

Du lien délétère entre géopolitique globale et politique d’asile nationale

  • 4  Perspectives des migrations internationales 2015, OCDE, 2015, p. 13.
  • 5  Selon le chiffre annoncé à la mi-août 2015 par le ministre de l’Intérieur, Thomas de Maizière, <ht (...)

62014 est l’année qui a vu naître Pegida en Allemagne. Cette apparition soudaine dans l’espace public (tel que précédemment défini) d’un mouvement résolument identitaire n’est pas un hasard. Elle est en corrélation directe avec une constellation géopolitique complexe, caractérisée par un enchaînement ultrarapide de déstabilisations politico-religieuses, économiques et sociodémographiques au plan mondial, notamment au Proche et Moyen Orient (émergence de l’État islamique, guerre civile en Syrie). Elle s’explique en particulier par la première conséquence de ces déstabilisations : l’envolée incontrôlée (en tout cas ressentie comme telle) des flux migratoires en Europe, et plus spécifiquement en Allemagne, « terre promise » des nouveaux migrants. De fait, pour la première fois depuis 2007, les flux de migrations permanentes vers les pays de l’OCDE en général ont fortement augmenté en 2014 (4,3 millions d’entrées dans la zone OCDE), l’Allemagne constituant la deuxième destination après les États-Unis, en nombre de migrants accueillis4. 2015 s’annonce d’ores et déjà, avec 800 000 nouveaux demandeurs d’asile estimés, comme « une année record » pour l’Allemagne, qui consolide ainsi avec un volontarisme affiché, sa position de premier pays d’asile en Europe, devant la Suède et l’Italie5. Elle devance donc nettement la France, longtemps l’un des trois principaux pays de destination, et désormais seulement sixième. Or c’est précisément ce volontarisme politique fort et particulièrement consensuel qui a généré en octobre 2014 l’émergence de Pegida.

7Pour preuve de la corrélation directe entre politique d’asile et protestation identitaire « pegidiste », il suffit de considérer l’actualité de l’automne 2015 : un an après sa création, Pegida réapparaît dans l’espace public, après une éclipse de quelques mois, alors même que la coalition chrétienne- et sociale-démocrate d’Angela Merkel vient de réaffirmer son engagement dans une politique d’asile inédite en Allemagne. Inédite d’abord par son ampleur, elle l’est également en termes de rhétorique politique. La chancelière allemande ne sous-estime nullement l’opposition grandissante à la « culture de bienvenue » qu’elle professe avec insistance depuis son arrivée au pouvoir en 2005. Consciente du « défi historique » de la crise des réfugiés culminant en 2015, elle réaffirme pourtant son « intime conviction que cette tâche est surmontable ». Soumise aux questions insistantes d’Anne Will, le 7 octobre sur la première chaîne ARD, c’est à l’ensemble de la population allemande que répond avec fermeté Angela Merkel : « Nous allons réussir. L’Allemagne est un pays fort »6. Or, le 5 octobre, Pegida est réapparu à Dresde, mobilisant entre 7 000 et 9 000 manifestants devant la Frauenkirche – alors même que le mouvement semblait n’avoir été qu’un feu de paille. On y entend Götz Kubitschek, à la tête de la Nouvelle Droite, réclamer une loi d’urgence sur l’asile et proclamer le refus absolu de l’établissement d’un État allemand « pluriethnique »7. Le même jour à Leipzig, Legida (version locale de Pegida) rassemble quelque 700 personnes. Le président des Verts, Cem Özdemir, orateur de la contre-manifestation déployée dans la première ville saxonne, est molesté et traité de « sale Turc » ou « cochon de migrant ». La confrontation se poursuit sur les réseaux sociaux : « Leipzig est contre le parti pédophile des junkies » tweete le NPD (#legida), qui se félicite que la ville ait « montré à Cem Özdemir qu’il n’est pas le bienvenu ». Sous le mot-dièse Nolegida, l’intéressé rétorque promptement : « Vous pouvez faire ce que vous voulez. Je reviendrai »8.

8Ce que révèlent ces derniers avatars « pegidistes », c’est une fragmentation manifeste de la société allemande. Elle se donne à voir dans la sphère publique, sur les places ou dans les parcs de quelques villes phares. Elle envahit aussi l’espace numérique, via les réseaux sociaux ou les blogs. De surcroît, cette fragmentation de l’espace public revêt plusieurs formes d’expression, qui se traduisent par autant de fractures potentiellement délétères pour l’Allemagne. Ces fractures sont, de manière typologique, au nombre de trois : 1) démoscopiques, 2) sociétales et 3) politiques.

1. Fractures démoscopiques

  • 9  Bertelsmann Stiftung (éd.), Willkommenskultur in Deutschland : Entwicklungen und Herausforderungen(...)
  • 10  Thomas Petersen, « Die Furcht vor dem Morgenland im Abendland », <http://www.ifd-allensbach.de/upl (...)
  • 11  Discours de Christian Wulff à l’occasion du 20e anniversaire de la réunification, le 3 octobre 201 (...)

9Les sondages d’opinion reflètent très bien l’ambivalence du rapport à la question migratoire en Allemagne. À première vue, ils apparaissent même nettement contradictoires : tantôt ils attestent d’une « culture de bienvenue » de plus en plus intériorisée et pratiquée, tantôt au contraire ils mettent en lumière une défiance de plus en plus accentuée à l’égard de l’immigration. Mais à y regarder de plus près, cet antagonisme démoscopique n’en est pas un, il traduit plutôt une réflexion différenciée, qui tend à s’affiner à la lumière du débat public sur la délicate question de l’islam. En voici deux exemples : selon une étude de la Fondation Bertelsmann publiée en mars 2015, la perception de « l’étranger » est en train d’évoluer : 97 % des Allemands voient les immigrés comme de nouveaux citoyens (Neubürger) désireux de contribuer à un « vivre ensemble » harmonieux. Quatre Allemands sur cinq souhaitent même que les étrangers « transmettent plus de leur propre culture »9. Or, une étude de l’Institut Allensbach publiée en octobre 2015 infirme en partie les déclaratifs précédents. Thomas Petersen en résume les résultats dans une analyse au titre évocateur : « La peur de l’Orient en Occident » – un intitulé intéressant car, nous semble-t-il, à double sens : il évoque certes d’abord les craintes que suscite « l’Orient » (notamment islamiste) dans nos sociétés occidentales. Mais il faut y lire aussi l’angoisse née d’un constat, celui d’un Occident d’ores et déjà très (trop) « orientalisé », autrement dit la perception, très largement partagée, d’un envahissement de « l’Orient » dans l’espace occidental10. Cette étude apporte un vigoureux démenti à l’affirmation en 2010 du président allemand Christian Wulff, de l’islam comme « faisant partie de l’Allemagne »11 – un credo pourtant réaffirmé par Angela Merkel au lendemain des attentats islamistes en France, en janvier 2015. Neuf mois plus tard, deux tiers des Allemands ne se retrouvent pas (ou plus) dans ce credo politique volontariste. Plus encore, ce sentiment est intergénérationnel, et il est indépendant des affinités politiques : il domine, même chez les sympathisants des Verts. Faut-il voir là, avec Thomas Petersen, le directeur de la Fondation Bertelsmann, la preuve d’une défiance culturelle très ancienne, ancrée dans la mémoire collective après des siècles de conflits entre l’Orient et l’Occident ? Sans pouvoir approfondir ici l’histoire des mentalités, on retiendra les trois principales conclusions de l’étude Bertelsmann :

  • des doutes profonds (de la part des Allemands « natifs ») quant au succès de l’intégration ;

  • pas de xénophobie agressive, mais la conscience d’un fossé culturel entre l’Orient et l’Occident entraînant un fort sentiment d’étrangeté (potentiellement menaçante) ;

  • un refus de l’islam plus accentué en Allemagne orientale (76 % contre 60 %).

10Ce dernier constat vient conforter d’autres études qui tendent à montrer une véritable fracture entre l’Ouest et l’Est du pays, face à la problématique migratoire. Cela peut surprendre, au regard des réalités statistiques : la population immigrée est en effet bien moindre dans les nouveaux Länder que dans les anciens. On peut l’interpréter comme l’indice d’une maturité plus avancée à l’Ouest, en vertu d’un débat politique et public plus ancien sur la question migratoire. Toutefois, au-delà des différences Est-Ouest historiques, la tendance générale n’en est pas moins au scepticisme grandissant. Les inquiétudes traversent et divisent désormais toute la société civile. On peut recenser trois points de cristallisation :

  • la problématique scolaire ;

  • la charge induite pour l’État social ;

  • le potentiel de conflits sociétaux.

  • 12  « Fast jeder zweite sieht sich durch Muslime wie ein Fremder im eigenen Land », <https://www.berte (...)

11L’enquête questionnait en outre la perception ou non de l’islam comme une menace pour le monde occidental. Les résultats montrent clairement que la menace est ressentie, partout en Allemagne, comme très réelle. Au regard de la probabilité, jugée forte, de la perte des « valeurs » occidentales, la lutte contre l’extrémisme islamiste est, par exemple, majoritairement considérée insuffisante12.

2. Fractures sociétales

  • 13  BMI (éd.), Verfassungsschutzbericht 2014, p. 35sq.
  • 14  Ibid., p. 53.

12La profonde dichotomie qui affecte de plus en plus visiblement l’espace public ne se borne pas aux déclaratifs des sondages d’opinion. Elle se traduit en actes concrets, diamétralement opposés dans leur philosophie et leur finalité. Surgissent ainsi, d’un côté un incroyable élan soudain de solidarité collective (inédit dans cette ampleur), de l’autre une montée très significative des agressions à caractère xénophobe dans plusieurs villes allemandes. D’abord, les actions individuelles et collectives en faveur de l’accueil des réfugiés sont allées crescendo au fil des mois. Elles reflètent même si fidèlement le discours d’Angela Merkel, médiatiquement proclamée « chancelière sans frontières », qu’on ne saurait dire si l’impulsion première vient d’en haut ou d’en bas – de la première femme politique d’Allemagne ou du peuple allemand. Sans doute la parole politique et l’action populaire s’auto-encouragent-elles mutuellement. Toujours est-il que la combinaison des deux crée une synergie politico-sociétale assez rare pour être soulignée. Face à de tels effets synergétiques positifs, la montée du NON à l’immigration, à la rhétorique de bienvenue, ou à l’ouverture des frontières n’en est que plus frappante. Selon l’Office fédéral de protection de la constitution, l’année 2014 constitue, avec 512 actes de violence répertoriés, une année record en termes de « criminalité politiquement motivée » (depuis l’introduction de cette définition en 2001). Or, plus de 50 % des actes d’extrémisme de droite ainsi répertoriés ont un caractère xénophobe (le nombre d’attentats contre des centres d’hébergement pour demandeurs d’asile a plus que triplé par rapport à 2013)13. Les observateurs diagnostiquent dans ce courant xénophobe ambiant, avant tout, une peur de « l’aliénation ethnoculturelle », particulièrement accentuée à l’Est : « L’agitation anti-asile a été en 2014 un point central de tout le spectre d’extrême droite. Les manifestations anti-asile se sont concentrées dans certaines régions, surtout au centre et à l’est de l’Allemagne. À l’ouest et au sud, on a surtout recensé de vastes campagnes de tracts [anti-asile] »14.

3. Fractures politiques

13Sans pouvoir détailler ici l’analyse, on soulignera simplement que les fractures s’opèrent, dans le champ politique, à deux niveaux. La première fragmentation concerne le spectre politique, avec notamment l’apparition et l’ascension fulgurante d’une nouvelle formation politique : l’Alternative pour l’Allemagne (Alternative für Deutschland – AfD). L’AfD a fait son entrée au Bundestag aux législatives de 2013, moins d’un an après sa création (mars 2013) et a investi dans la foulée, en 2014, le Landtag de Thuringe. Cette émergence a coïncidé avec l’évincement inattendu du parti libéral-démocrate, lui-même historiquement favorable à l’ouverture migratoire – certes plutôt sur le modèle canadien.

  • 15  Voir Das Parlament, 41/42, 05.10.2015, p. 1-6.

14La seconde fragmentation est plus inquiétante encore, puisqu’elle est d’ordre interne, s’opérant non seulement entre les partis frères CDU et CSU (Horst Seehofer est notoirement opposé à l’ouverture migratoire), mais au sein même de la CDU, où les voix s’élèvent de plus en plus nombreuses pour critiquer plus ou moins âprement la politique migratoire de sa chancelière15.

Qu’y a-t-il derrière Pegida ?

  • 16  L’appellatif est un écho (l’analogie sonore n’est pas fortuite) au mouvement HoGeSa (Hooligans geg (...)
  • 17  Source : http://www.i-finger.de/pegida-positionspapier.pdf (03.09.2015).

15Le mouvement « contre l’islamisation de l’Allemagne » (et de l’Europe) est né début octobre à Dresde16. Pegida e.V. s’est constitué en association à but non lucratif le 19 décembre 2014. Son comité de direction compte dix membres, avec initialement à sa tête Lutz Bachmann. Le document fondateur du mouvement s’inscrit astucieusement dans une rhétorique positive : 14 des 19 points énoncés s’énoncent en termes positifs (le POUR y apparaît en toutes lettres, sur le mode exclamatif), le négatif s’y dessine surtout en creux. Pegida se déclare notamment POUR17 :

  • l’accueil des réfugiés de guerre et les victimes de persécutions politiques ou religieuses ;

  • l’énoncé dans la constitution – en sus du (seul) droit d’asile existant – d’un droit et d’un devoir d’intégration ;

  • l’hébergement décentralisé des réfugiés (selon la définition du point 1) ;

  • une clé de répartition européenne (sur le modèle allemand dit de Königstein) ;

  • le renforcement des moyens policiers ;

  • l’utilisation exhaustive des lois touchant à l’asile et aux expulsions ;

  • une immigration sur le modèle de la Suisse, l’Australie, le Canada ou l’Afrique du Sud ;

  • le maintien et la protection de « notre » culture d’imprégnation judéo-chrétienne.

16Seuls les cinq derniers points du texte sont clairement négatifs. Pegida se déclare notamment CONTRE :

  • l’acceptation de sociétés parallèles, ou de tribunaux parallèles (tribunaux de la charia) ;

  • le radicalisme – qu’il soit religieux ou politique ;

  • les prêcheurs de haine, quelle que soit leur obédience religieuse.

17Au total, on est ici loin d’un discours extrémiste. Le document frappe plutôt par son pragmatisme. Force est même de reconnaître l’adéquation de la quasi-totalité des revendications formulées avec les « valeurs » de la société allemande (européenne / occidentale). Qui n’y adhérerait pas ? D’ailleurs le logo de Pegida est la traduction visuelle du refus de toute forme d’extrémisme, affiché par les fondateurs : on y voit un bonhomme jetant à la poubelle : la croix gammée, le drapeau du communisme, le logo antifasciste, ainsi que le drapeau de l’EI18. De fait, un sondage mené début janvier 2015 (avant les attentats terroristes survenus à Paris) par Infratest Dimap pour ARD et Die Welt révèle d’étonnantes similitudes entre les anti- et les pro-Pegida19. Certes, ils s’opposent diamétralement sur la question des réfugiés : les opposants à Pegida sont, à 43 %, pour un maintien du seuil numérique d’accueil (30 % sont même prêts à augmenter ce seuil). A contrario, la moitié des sympathisants de Pegida souhaitent une diminution du nombre de réfugiés, et seulement une infime minorité d’entre eux (8 %) seraient prêts à en laisser entrer davantage en Allemagne. Leur vision du contexte sécuritaire en Allemagne diverge également, bien qu’elle révèle un sentiment partagé d’insécurité grandissante (respectivement 42 % et 62 % se sentent moins en sécurité qu’avant). Mais surtout, une majorité d’Allemands anti-Pegida différencient désormais les réfugiés – nuançant ainsi quelque peu les déclaratifs préalables d’hospitalité. Sont considérés comme motifs recevables d’accueil : les guerres ou guerres civiles (94 %), les famines ou catastrophes naturelles (83 %), les raisons politiques ou religieuses (82 %) et l’appartenance ethnique (79 %). En revanche, plus de la moitié (55 %) refusent l’accueil pour des raisons économiques. In fine, cette déclinaison des motifs acceptables d’émigration correspond peu ou prou à celle des pro-Pegida (chiffres sensiblement similaires). Simultanément pourtant, trois Allemands sur quatre (76 %) déclarent n’avoir que peu ou pas du tout de compréhension pour les manifestations « pegidistes » de Dresde. Y aurait-il alors une certaine adéquation sur le fond, mais pas sur la forme ? Ceci donnerait raison au très controversé et sulfureux leader de Pegida, déclarant en décembre 2014 au quotidien Bild que les manifestations protestataires visent à dénoncer l’asile des réfugiés économiques « parce que personne n’ose en parler ouvertement »20.

18De fait, et c’est là toute l’habileté, Pegida se revendique d’emblée comme un mouvement jailli du cœur de la société. Les marches protestataires sont organisées « dans le respect du droit et de l’ordre ». Lutz Bachmann ne conteste pas la présence d’extrémistes ou de néonazis, mais les estime « minoritaires » et « difficiles à exclure » en l’absence avérée d’actes de violence21. En réalité, le leader « pegidiste » est bel et bien xénophobe et islamophobe, comme l’attestent ses messages racistes sur Facebook, assez rapidement divulgués par les médias. Les demandeurs d’asile y sont qualifiés de « bêtes » et de « salauds ». La photo de Bachmann grimé en Hitler, postée sur sa page Facebook et publiée ensuite dans le Bild, le contraint d’ailleurs à démissionner de la direction du mouvement, le 21 janvier 201522. Ce dévoilement du racisme patent de la figure de proue de Pegida provoquera finalement le départ de l’activiste Katrin Oertel (27 janvier) : après avoir d’abord tenté d’expliquer que le mouvement n’est pas xénophobe (Talk de Günther Jauch sur ARD, 18 janvier 2015), la porte-parole de Pegida devra bien reconnaître les dérives sectaires du mouvement et finira par se retirer, après de vives dissensions internes. Ceci met en évidence la fragilité de Pegida, qui d’ailleurs ne s’est jamais constitué en parti. Cette fragilité tient avant tout à la multiplicité des courants d’opinion que le mouvement a su drainer et fédérer, dans un contexte de crise migratoire. Elle s’explique par les motivations diverses des acteurs : les uns engagés ou activistes (certains extrémistes et/ou racistes notoires, d’autres plus mesurés, quoique dans la mouvance de la Nouvelle Droite), les autres sympathisants actifs (participants réguliers aux manifestations), d’autres encore citoyens simplement sensibles au discours anti-islam, et désireux de faire passer un message aux politiques. Aussi n’est-il guère surprenant qu’un mouvement aussi hétérogène ait durant l’été 2015 plus ou moins disparu du paysage médiatique, après avoir été, du reste, peut-être exagérément médiatisé.

19Il n’en demeure pas moins que Pegida aura été le premier révélateur d’un malaise allemand dans une société à la fois post-migratoire et d’immigration renforcée. Son habileté tient aussi à la récupération d’un mouvement d’opinion historique porté par les citoyens (autoproclamés « peuple ») de l’ancienne RDA : le choix du lundi comme jour ritualisé pour les manifestations anti-islam, et la réactualisation du slogan fameux « Wir sind das Volk » sont évidemment une imposture, mais symboliquement très parlants. Pegida dénature profondément ces deux « lieux de mémoire » allemands, souvenir d’une immense aspiration populaire à s’affranchir pacifiquement de la dictature est-allemande. Or cela fonctionne ! Ces échos pacifiques (au moins initialement), à forte charge émotionnelle, qui retentissent soudainement dans l’espace public à l’automne 2014, montent d’une foule de plus en plus dense : de quelques centaines en octobre, le nombre de manifestants enfle jusqu’à atteindre les 25 000 à la mi-janvier, à Dresde. Après ce pic spectaculaire, véritable choc en Allemagne, le mouvement s’essouffle toutefois rapidement, au point que beaucoup spéculent – un peu vite – sur sa défaite prochaine23. Un an plus tard, surfant sur la « crise des réfugiés », Pegida fête son premier anniversaire, et ce qui ressemble à un retour en force24. Le 19 octobre 2015, la « manifestation du lundi » rassemble à Dresde au moins 15 000 personnes (près de 20 000, selon d’autres sources) – c’est beaucoup plus que les semaines précédentes25. Une nouvelle fois, l’espace public est scindé en deux : aux Pégidistes, de plus en plus agressifs, font face des contre-manifestants déterminés à défendre les valeurs d’accueil et de tolérance de la société allemande (Herz statt Hetze : le cœur plutôt que la peur, ou encore : aimer et non harceler26). Cette opposition frontale dangereusement exacerbée27 a ses propres modes d’expression visuelle, afin d’occuper l’espace. Le territoire urbain se voit ainsi totalement investi par les forces en présence : d’un côté une forêt ondoyante de drapeaux noir, rouge et or, ou marqués de la croix chrétienne ou d’autres symboles explicites (femmes voilées rayées d’un trait). De l’autre, un ingénieux marquage au laser devant le célèbre opéra (Semperoper), affichant dans un ballet multicolore : « Nous ne sommes pas un décor pour la xénophobie », « Nous ne sommes pas une coulisse pour l’intolérance »28. Au demeurant, pour l’heure, les contre-manifestations ont, dès l’origine, cherché à bloquer l’avancée de Pegida. Très vite, elles ont réuni autant, et même beaucoup plus de sympathisants29. Le marquage de l’espace public fait partie des stratégies déployées par les protagonistes, à Dresde, Leipzig, Chemnitz, Erfurt, mais également à Düsseldorf, Cologne, ou ailleurs à l’Ouest. Les médias, en reprenant les visuels forts de ces batailles, fonctionnent comme caisses de résonance en démultipliant pour ainsi dire ces marqueurs identitaires – car c’est bien d’identité, ou d’identifications collectives qu’il s’agit.

Pegida et sa propagation (trans)nationale

20Pegida a d’abord essaimé en Allemagne, sous le même label, dans les villes de l’Est : Leipzig (Legida), Magdebourg (Magida), mais aussi de l’Ouest : Cologne (Kogida), Kassel (Kagida), Nuremberg (Nügida). Il a pris une ampleur régionale, en s’affichant par exemple comme Thügida (Pegida en Thuringe). Tous ces mouvements en « Gida » attestent du potentiel de propagation au plan national. Du reste, le mouvement se structure en fédération nationale souverainiste « Gida » (Gida-Bundesverein), sous le mot d’ordre « Schaffen wir eine souveräne Nation ». Mais Pegida s’exporte aussi en Europe : en Norvège, en Autriche ou en Suisse, en Angleterre, en Suède ou en Espagne. Cette diffusion rapide est favorisée par les réseaux sociaux Facebook et Twitter30. Aucun toutefois n’est encore parvenu à mobiliser dans les proportions est-allemandes. En France, l’essayiste et polémiste Renaud Camus (auteur controversé des thèses du « grand remplacement » ou de la « grande déculturation »31), inspiré par le modèle allemand, a même rêvé, début 2015, à la création d’une « Internationale pégidiste ». Pour l’heure, rien de tel ne s’est encore produit. On aurait tort, pourtant, de sous-estimer les mouvements d’opinion européens dans le contexte délétère de la première grande crise migratoire du xxie siècle.

Conclusion

21La crise migratoire, transnationale par définition, est un thème très spectaculaire et très visuel, donc parfaitement transnational aussi dans son traitement médiatique. Le moindre article, la moindre information à ce sujet sur Internet s’accompagne d’un visuel éloquent, repris d’une agence de presse à l’autre et retransmis en boucle : bateaux de réfugiés, mains tendues vers les agents de Frontex, migrants secourus en urgence, visages harassés ou reconnaissants. Seule la photo d’Aylan, ce petit garçon syrien découvert noyé sur une plage du rivage turc, le 2 septembre 2015, a fait hésiter les médias, la plupart ayant choisi de ne pas la publier. « Retweetée » plusieurs milliers de fois après sa diffusion, sous le mot-dièse KiyiyaVuranInsanlik (« l’humanité naufragée », en turc), elle a pourtant choqué et bouleversé l’Europe. C’est, comme l’a formulé Le Parisien, « la photo qui fait taire le monde »32. Et elle restera la photo-symbole du dilemme de l’Europe, partagée entre l’obligation morale d’accueil et l’indécision, voire le refus de cet accueil. L’Allemagne, en première ligne des pays d’asile, n’échappe pas à cette fracture du débat public. Pegida peut n’être qu’un phénomène passager. Mais au regard de l’ampleur des mutations démographiques et culturelles, et face à la menace islamiste, les interrogations, les doutes, puis les réaffirmations identitaires « occidentales » ou « pro-occident » qui ont investi en 2014-2015 l’espace public germanophone et européen, vont rester au cœur du débat politique et sociétal durant la décade à venir. En ce sens, Pegida peut être considéré comme le premier indice fort, en Allemagne, d’une dissociation nette entre deux pôles réflexifs antagonistes : d’un côté une certaine unité de pensée médiatique et une rhétorique politique « pro-accueil », de l’autre le ressenti d’une partie non négligeable de la population, de plus en plus encline à s’inscrire à rebours de la politique migratoire résolument ouverte, prônée par les instances de l’Union européenne, et par la coalition noire-rouge pilotée par Angela Merkel et Sigmar Gabriel.

  • 33  Frank Deker évoque pour cette raison « l’énigme Pegida » dans son étude : « AfD, Pegida, und die V (...)
  • 34  Le présent article a été rédigé en octobre 2015. Les événements survenus la nuit de la Saint Sylve (...)

22Avec Pegida se dessine un espace public fragmenté, où les repères se brouillent33. Car Pegida, à l’instar de son avatar politique l’AfD (Alternative pour l’Allemagne), rassemble des sympathisants de tous les horizons politiques – et même, s’agissant de l’AfD, davantage d’électeurs de la Gauche, du SPD et des Verts que des Unions chrétiennes démocrate et sociale (CDU, CSU) ou du parti libéral-démocrate (FPD)34.

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Notes

1  L’opinion publique est ici entendue dans son sens courant : l’opinion de la majorité de la population, ou : la majorité du corps social (encyclopédie Larousse). Il ne s’agit donc pas ici de l’artefact théorisé par Pierre Bourdieu (Questions de sociologie, Paris, Les Éditions de Minuit, 1984, p. 222-235), mais au contraire du postulat très consensuel d’une Allemagne démocratique, tel que l’a excellemment démontré Edgar Wolfrum dans son ouvrage : Die geglückte Demokratie. Geschichte der Bundesrepublik Deutschland von ihren Anfängen bis zur Gegenwart, Stuttgart, Klett-Cotta, 2006 / Munich, Pantheon Verlag, 2007.

2  La notion d’espace public telle qu’entendue dans le présent article sera définie un peu plus loin.

3  Hommage international aux victimes des trois attentats terroristes survenus à Paris en novembre 2015, auquel ont participé 47 chefs d’État et du gouvernement venus du monde entier. La marche silencieuse a réuni près de 4 millions de personnes, <http://www.leparisien.fr/societe/en-direct-marche-republicaine-la-place-de-la-republique-noire-de-monde-11-01-2015-4437327.php> (13.06.2015).

4  Perspectives des migrations internationales 2015, OCDE, 2015, p. 13.

5  Selon le chiffre annoncé à la mi-août 2015 par le ministre de l’Intérieur, Thomas de Maizière, <http://www.bundesregierung.de/Content/DE/Artikel/2015/08/2015-08-19-fluechtlinge.html> (23.05.2015). Voir <http://www.zeit.de/politik/deutschland/2015-08/fluechtlinge-zahl-de-maiziere-asyl> (19.05.2015). Depuis la rédaction initiale du présent article, le nombre net d’immigrants a encore été revu à la hausse par l’Office national des statistiques : suite à la forte augmentation des arrivées en octobre-novembre, l’Allemagne a finalement enregistré une immigration nette de 1,1 million en 2015. Les demandeurs d’asile viennent surtout de Syrie, d’Afghanistan et d’Irak. Voir <https://www.destatis.de/DE/PresseService/Presse/Pressemitteilungen/2016/03/PD16_105_12421.html> ; http://www.bamf.de/DE/Service/Top/Presse/Interviews/20151211-WirtschaftsWoche/weise-wirtschaftswoche-node.html (20.06.2016).

6  Titre de l’émission d’Anne Will (présentatrice vedette de populaires talk shows politiques) : « La chancelière face à la crise des réfugiés – Pouvons-nous vraiment réussir, Madame Merkel ? » (« Die Kanzlerin in der Flüchtlingskrise – Können wir es wirklich schaffen, Frau Merkel ? ») (07.10.2015). Angela Merkel : « Wir schaffen das ! » ; « die innere Gewissheit […] dass die Aufgabe lösbar ist », <http://daserste.ndr.de/annewill/Die-Kanzlerin-in-der-Fluechtlingskrise-Koennen-wir-es-wirklich-schaffen-Frau-Merkel-,annewill4272.html> (20.06.2016).

7  <https://feuilletonkritik.wordpress.com/2015/10/08/pegida-rede-von-goetz-kubitschek-am-5-oktober-2015-in-dresden/> (13.10.2015).

8  « Bin im Hauptbahnhof #Leipzig in #Legida-Pulk geraten. Ihr könnt machen was Ihr wollt. Ich komme wieder. » #Nolegida : <https://twitter.com/cem_oezdemir/status/651127771150684160>.

9  Bertelsmann Stiftung (éd.), Willkommenskultur in Deutschland : Entwicklungen und Herausforderungen, 2015, p. 8, <https://www.bertelsmann-stiftung.de/de/publikationen/publikation/did/willkommenskultur-in-deutschland-entwicklungen-und-herausforderungen> (07.10.2015).

10  Thomas Petersen, « Die Furcht vor dem Morgenland im Abendland », <http://www.ifd-allensbach.de/uploads/tx_reportsndocs/November12_Islam_01.pdf> (07.10.2015).

11  Discours de Christian Wulff à l’occasion du 20e anniversaire de la réunification, le 3 octobre 2010 à Brême, <http://www.bundespraesident.de/SharedDocs/Reden/DE/Christian-Wulff/Reden/2010/10/20101003_Rede.html> (14.09.2015).

12  « Fast jeder zweite sieht sich durch Muslime wie ein Fremder im eigenen Land », <https://www.bertelsmann-stiftung.de/fileadmin/files/Projekte/51_Religionsmonitor/Zusammenfassung_der_Sonderauswertung.pdf>.

13  BMI (éd.), Verfassungsschutzbericht 2014, p. 35sq.

14  Ibid., p. 53.

15  Voir Das Parlament, 41/42, 05.10.2015, p. 1-6.

16  L’appellatif est un écho (l’analogie sonore n’est pas fortuite) au mouvement HoGeSa (Hooligans gegen Salafisten), mouvement d’activistes contre le salafisme – autrement dit les guerres religieuses en Allemagne (créé en 2009 sur le Net, apparu en 2014 dans l’espace public).

17  Source : http://www.i-finger.de/pegida-positionspapier.pdf (03.09.2015).

18  Ce logo rappelle ainsi les affrontements à l’automne 2010 à Hambourg entre manifestants kurdes pro-PKK et salafistes pro-EI – qui ont à leur tour généré les premières manifestations contre la « guerre religieuse sur le sol allemand » (contexte de la guerre en Syrie, et la destruction de la ville de Kobane). Voir <http://www.rfi.fr/europe/20141009-allemagne-turquie-kurdes-manifestations-musulmans> (10.10.2015) ; <http://www.zeit.de/hamburg/politik-wirtschaft/2014-10/hamburg-kurden-proteste-tag-drei> (10.10.2015).

19  Die Welt, 09.09.2015, p. 6.

20  <http://www.bild.de/regional/dresden/demonstrationen/pegida-erfinder-im-interview-38780422.bild.html> (09.01.2015).

21  Ibid.

22  <http://www.bild.de/politik/inland/pegida/chef-lutz-bachmann-hitler-foto-und-auslaender-beleidigungen-bei-facebook-39430448.bild.html>.

23  <http://www.handelsblatt.com/politik/deutschland/dresden-und-andere-staedte-zahl-der-pegida-demonstranten-schrumpft/11546138.html> (23.03.2015) ; Jérôme Vaillant, « Pegida, un mouvement déjà défait ? », Allemagne d’aujourd’hui, n° 211, janvier-mars 2015, p. 1-6.

24  <http://www.lemonde.fr/europe/article/2015/10/19/pro-et-anti-pegida-manifestent-a-l-occasion-de-la-premiere-annee-du-mouvement-islamophobe_4792667_3214.html>.

25  <http://www.zeit.de/gesellschaft/zeitgeschehen/2015-10/pegida-dresden-gegenprotest-jahrestag> (19.10.2015).

26  <http://www.zeit.de/gesellschaft/zeitgeschehen/2015-10/pegida-dresden-gegenprotest-jahrestag>.

27  Le climat général tend à se détériorer en Allemagne à l’automne 2015. Le 17 octobre, Henriette Reker, candidate à la mairie de Cologne et élue maire le 18, très engagée dans l’aide aux réfugiés, est victime d’une attaque au couteau, perpétrée par un militant se réclamant de l’extrême droite. Voir aussi <http://www.handelsblatt.com/politik/deutschland/hetzerisches-und-aggressives-potenzial-pegida-und-co-im-visier-der-verfassungsschuetzer/12470248.html> (19.10.2015).

28  « Wir sind kein Bühnenbild für Fremdenhass ». « Wir sind keine Kulisse für Intoleranz », <https://www.facebook.com/semperoper/photos/a.224234127594014.73395.169610696389691/1218834141467336/?type=1&theater> (20.10.2015).

29  Voir par ex. Spiegel-Online, 5.12.2014, <http://www.spiegel.de/politik/deutschland/pegida-proteste-widerstand-gegen-demos-in-dresden-a-1006585.html>.

30  <http://www.lejdd.fr/International/Europe/Le-mouvement-Pegida-s-exporte-en-Suisse-Norvege-Autriche-Suede-et-Espagne-712782> (17.01.2015) ; <http://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/pegida-veut-organiser-une-manifestation-en-angleterre_1651456.html> (14.02.2015).

31  Renaud Camus, Le grand remplacement, 2011, réédité en 2015 (à compte d’auteur). Cf. aussi id., La grande déculturation, Paris, Arthème Fayard, 2008. Et id., Le Changement de peuple, 2013 (à compte d’auteur). Les essais de R. Camus ne sont pas sans évoquer le fameux Deutschland schafft sich ab de Thilo Sarrazin (Stuttgart, Deutsche Verlags-Anstalt, 2010), ou plus récemment Der neue Tugendterror. Über die Grenzen der Meinungsfreiheit, Deutsche Verlags-Anstalt, 2014.

32  <http://www.leparisien.fr/faits-divers/enfant-noye-en-turquie-l-histoire-derriere-la-photo-qui-fait-taire-le-monde-03-09-2015-5058717.php>

33  Frank Deker évoque pour cette raison « l’énigme Pegida » dans son étude : « AfD, Pegida, und die Verschiebung der parteipolitischen Mitte », Aus Politik und Zeitgeschichte, 40 (2015), p. 27-32.

34  Le présent article a été rédigé en octobre 2015. Les événements survenus la nuit de la Saint Sylvestre à Cologne le 31 décembre 2015 (agressions à caractère sexuel contre des femmes, perpétrées par de jeunes hommes immigrés/réfugiés majoritairement originaires de Syrie), inédits par leur nature et leur ampleur, ont conféré depuis au débat politique et sociétal une nouvelle intensité. Cologne marque certainement un tournant dans le traitement médiatique et politique de la question migratoire en Allemagne.

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Pour citer cet article

Référence papier

Gwénola Sebaux, « Pegida : émergence, sens et influence d’un mouvement identitaire (trans)national dans l’espace public allemand »Revue d’Allemagne et des pays de langue allemande, 48-2 | 2016, 387-399.

Référence électronique

Gwénola Sebaux, « Pegida : émergence, sens et influence d’un mouvement identitaire (trans)national dans l’espace public allemand »Revue d’Allemagne et des pays de langue allemande [En ligne], 48-2 | 2016, mis en ligne le 28 décembre 2017, consulté le 22 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/allemagne/432 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/allemagne.432

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Auteur

Gwénola Sebaux

Professeur en civilisation allemande à l’Université catholique de l’Ouest (Angers)

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