Tout comme l’a longtemps été la relation conflictuelle franco-allemande, les relations entre Juifs et Arabes dans le contexte de la partition de la Palestine sont un processus de longue durée, dense, controversé et violent. Cette dernière est d’ailleurs régulièrement réactivée, produisant, de génération en génération, des communautés émotionnelles marquées par cette violence. Le psychologue israélien Dan Bar-On, né en 1938 à Haïfa dans une famille originaire de Hambourg (la famille Bruno) et décédé en 2008, voyait dans le double silence, celui relatif à la Shoah et celui de la guerre de 1947-1948, l’une des clefs d’explication des dérives militaristes de la nation israélienne. En 1985, il se rendit en RFA pour parler aux enfants de nazis, puis il s’investit dans les efforts de compréhension mutuelle dans le conflit israélo-palestinien. Ses derniers travaux, financés par la Fondation Körber de Hambourg, dont l’objectif est l’« entente [Verständigung] entre les peuples », étaient cons...
Verständigung ? Penser la réconciliation israélo-arabe à partir d’une position yekke (juive allemande) en Israël
Résumés
Tout comme le conflit franco-allemand, le partage de la Palestine est un processus s’inscrivant dans la longue durée, dense et controversé. Dans ce contexte difficile, l’art de faire la paix s’avère particulièrement complexe. Nous proposons de décaler le regard sur cette question en nous intéressant à la perspective juive allemande. En effet, les Juifs allemands (et plus généralement les Juifs d’Europe centrale) fuyant le nazisme et ayant trouvé refuge en Palestine mandataire dans les années 1930 portaient en eux l’expérience douloureuse du nationalisme exacerbé, de la discrimination antisémite, de la persécution et de la migration forcée. Si l’émigration juive allemande en Palestine mandataire a suscité un regain d’intérêt depuis plus de vingt ans, tous les aspects de celle-ci n’ont pas reçu la même attention et peu de recherches ont été menées afin d’inscrire cette migration dans son contexte proche-oriental. Or les Juifs allemands (ou yekkes) sont arrivés en Eretz Israël avec des représentations, des affiliations et des socialisations politiques héritées de la bourgeoisie juive libérale allemande. En Palestine mandataire et au sein de la jeune nation israélienne en état d’alerte et de conflit quasi-permanent, les yekkes ont été les porteurs d’une voix alternative dans la manière d’envisager les relations avec les populations arabes. On retrouve ainsi nombre de yekkes dans les organisations promouvant l’entente (Verständigung), la paix voire la réconciliation. Si les relations israélo-arabes au xxe siècle incarnent un conflit paraissant indépassable, nous souhaitons montrer que des acteurs ont, dans l’adversité, continûment essayé de cultiver un art (minoritaire) de faire la paix au Proche-Orient. Le présent article cherche à la fois à retracer les origines intellectuelles de ce discours sur la paix et l’entente et à donner un aperçu des configurations sociales ayant conduit à l’émergence d’un tel discours à partir de la toute fin des années 1920.
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Ce document sera publié en ligne en texte intégral en décembre 2025.
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Pour citer cet article
Référence papier
Patrick Farges et Sonia Goldblum, « Verständigung ? Penser la réconciliation israélo-arabe à partir d’une position yekke (juive allemande) en Israël », Revue d’Allemagne et des pays de langue allemande, 56-2 | 2024, 433-446.
Référence électronique
Patrick Farges et Sonia Goldblum, « Verständigung ? Penser la réconciliation israélo-arabe à partir d’une position yekke (juive allemande) en Israël », Revue d’Allemagne et des pays de langue allemande [En ligne], 56-2 | 2024, mis en ligne le 04 décembre 2025, consulté le 10 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/allemagne/4150 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/13150
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