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Varia

La mode en RDA, une mode française ?

Histoire d’un transfert culturel inachevé, 1960-1990
Jonas Kachelhoffer
p. 227-245

Résumés

Comment la mode française était-elle vue et rapportée en RDA de 1960 à 1990 ? Des délégations est-allemandes étaient envoyées plusieurs fois par an à Paris pour « s’informer » sur l’état actuel de la mode internationale. La plupart des voyageurs étaient des membres de l’Institut de la mode de RDA, initialement fondé pour créer une mode socialiste qui soit propre au pays. Ces membres rédigeaient avec assiduité de longs rapports sur la mode observée à Paris et qui devait théoriquement être adaptée de manière critique en RDA. L’analyse des rapports prouve néanmoins que la mode française était critiquée de façon modérée et que cette critique diminuait progressivement. D’autre part on ne retenait de cette mode que les aspects intemporels, équilibrés et permanents. Ce regard spécifique des professionnels de la mode est-allemands témoigne de leur besoin de s’adapter aux différentes sphères dans lesquelles ils évoluaient : le monde artistique de la mode, celui industriel des producteurs, et celui bureaucratique de l’État. Leur position transversale qui les poussait à un constant ajustement minimisait, voire sclérosait leurs initiatives, et donc le transfert de la mode française en RDA.

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Texte intégral

  • 1  Ute Scheffler, Chic im Osten : Mode in der DDR, Leipzig, BuchVerlag für die Frau, 2010, p. 36 ; Th (...)
  • 2  Ministerium für Staatssicherheit (MfS) AGMS Nr. 14129/76, Noa (Leutnant), Vorschlag zur Werbung, V (...)
  • 3  Voir ses rapports et les directives correspondantes dans Bundesarchiv Berlin-Lichterfelde (BArch) (...)
  • 4  BArch DG400/1416 ; BArch DG400/1430 ; BArch DG400/1259 ; BArch DG400/1260 ; BArch DG400/1270 ; BAr (...)
  • 5  « MATTHIAS LEUPOLD – SZENISCHE PHOTOGRAPHIEN 1983-1995 – PHOTO EDITION BERLIN 2018 », mis en ligne (...)
  • 6  Les numéros des années 1960, 1969, 1972, 1974, 1978, 1982, et 1990 ont été dépouillés à la Diensts (...)
  • 7  Djurdja Bartlett, Fashion East. The Spectre that Haunted Socialism, Cambridge (MA)/Londres, The MI (...)
  • 8  BArch DG400/2347, Lucia Knöchel, Reisebericht zum Besuch des X. Festival de la Mode, Paris/ Frankr (...)
  • 9  Une étude complémentaire a été réalisée sur des rapports de la Stasi (Ministerium für Staatssicher (...)

1Une mode propre à la RDA et socialiste est une ambition que le régime a cherché à atteindre dès le début de la République est-allemande. L’Institut de la mode de RDA (Modeinstitut der DDR) appelé d’abord Institut pour la culture de l’habillement (Institut für Bekleidungskultur) a été créé en 1952 à cet effet1. Cependant, les emprunts et l’inspiration trouvée à Paris furent de plus en plus évidents et de moins en moins cachés au fil du temps. Effectivement, il est attesté dès le début des années 1960 que des délégations est-allemandes étaient envoyées plusieurs fois par an à Paris pour y observer des défilés de haute-couture, des salons de prêt-à-porter, des boutiques et de grands événements de la mode. C’est le cas de Karl Beyer, socialiste convaincu2, qui voyageait régulièrement à Paris pour observer les nouveautés textiles3. C’est également le cas de Willfriede Leupold, « créatrice de mode » et « collaboratrice scientifique » selon ses titres officiels, envoyée régulièrement à Paris pour regarder les défilés de haute couture et de prêt-à-porter d’Yves Saint Laurent, Christian Dior ou de Pierre Cardin4. Fervente socialiste5, elle travaillait en tant que responsable au sein du département Modeforschung de l’Institut de la mode de RDA, littéralement « recherche sur la mode », qui équivaut à la « haute couture ». Initialement, cette mode était conçue pour les congrès et les magazines, notamment Sibylle6, premier magazine de mode de RDA publié par l’Institut à partir de 1956. En d’autres mots, il s’agissait de la mode qui représentait le pays aux yeux du monde7. Pour y parvenir, les dirigeants autorisaient ses créateurs à observer ce qu’il se faisait de mieux à l’époque : la haute couture française. Bien que la mode émerge alors en Italie de façon fulgurante avec les investissements américains, une conjoncture économique favorable, un engouement général pour les produits italiens, et aux États-Unis avec de nouvelles stars du prêt-à-porter à l’image de Ralph Lauren, un grand pouvoir d’attraction artistique et des femmes très influentes dans le milieu, ce n’est qu’à l’extrême fin du xxe siècle que Milan et New York s’affranchirent du vieil héritage français de la mode. Paris a maintenu son monopole sur la mode jusqu’en 1990. De 1960 à 1990, c’est donc dans cette ville que se déroule, se définit et rayonne la mode dans « une atmosphère de créativité et d’innovation qu’on retrouve exclusivement et uniquement à Paris […] toute l’année sans interruption », pour reprendre les termes de Lucia Knöchel, créatrice de mode de l’Institut est-allemand, en 19898. Avec cet argument et d’incessantes justifications industrielles visant notamment l’amélioration de la qualité des produits et de la productivité de l’industrie textile, les créateurs de mode est-allemands étaient autorisés à fréquenter leurs confrères en pays capitaliste, bien sûr sous la surveillance de l’État qu’ils représentaient9.

2Ces créateurs de mode socialistes rédigeaient de longs rapports suite à leurs « voyages d’information » (Informationsreisen) où était expliquée la raison du voyage avec un aperçu général et un compte-rendu détaillant les tendances, styles, couleurs, matériaux, coupes, silhouettes, dessins et motifs observés. Le rapport se terminait par une conclusion (Schlußfolgerung), un plan d’action (Maßnahmeplan) et s’accompagnait généralement de diaporamas. Dans un système bureaucratique très hiérarchisé, ces rapports répondaient à des directives émanant des institutions de mode auxquels étaient rattachés les délégués envoyés à Paris, principalement l’Institut de la mode, et parfois des « entreprises propriétés du peuple » (Volkseigener Betrieb, VEB).

  • 10  Marc de Ferrière Le Vayer, « Des métiers d’art à l’industrie du luxe en France ou la victoire du m (...)
  • 11  Christophe Kleßmann, Arbeiter im Arbeiterstaat DDR. Deutsche Traditionen, sowjetisches Modell, wes (...)
  • 12  Judd Stitziel, Fashioning Socialism : Clothing, Politics and Consumer Culture in East Germany, New (...)

3Ces rapports représentent la principale source du transfert de la mode de la France vers la RDA dans les années 1960 à 1990. Une analyse plus fine de ces textes montre comment la mode française était filtrée et permet de voir que les médiateurs du transfert de la mode se calquaient sur les préoccupations du régime et du SED (Sozialistische Einheit Deutschlands). Effectivement, le système de la mode en RDA n’évoluait pas de la même façon que celui en France. La mode française des années 1960 se démocratisait et connaissait alors une industrialisation forte et croissante jusqu’en 1990, avec un foisonnement d’idées nouvelles issues de nombreuses maisons de couture prospères, dont le nom, l’identité, la marque jouaient un rôle croissant dans un Paris au centre du monde dans ce domaine10. En revanche, la mode est-allemande était très liée à l’État et la politique. Pour l’élève modèle et vitrine du bloc soviétique qu’était la RDA11, celle-ci servait évidemment de terrain d’affrontement sur lequel le socialisme devait vaincre le capitalisme. L’institution en charge était l’Institut de la mode de RDA qui dictait, en théorie, la mode du pays et donnait les directions à l’industrie. Mais en réalité, son rayonnement était limité : les modèles issus de cet institut étaient uniquement destinés à représenter le pays et touchait à peine sa population. De plus, la vraie « mode socialiste » sortant de l’industrie planifiée et étatique ne ressemblait en rien aux injonctions de l’Institut et la population se vêtit durant toute la période de façon peu variée avec des créations de confection anonymes12. Le contraste des deux systèmes est évident et Paris, considéré comme l’étoile polaire de la mode par le monde et la RDA elle-même, pouvait avoir un effet écrasant sur la République socialiste qui aspirait à plaquer son système sur celui, capitaliste, de la mode française.

  • 13  Larissa Zakharova, « L’Union soviétique et la mode française : histoire des contacts et des transf (...)
  • 14  Ce sujet n’a été mentionné jusqu’à présent que par les chercheurs du domaine, comme Judd Stitziel, (...)

4Il s’agit donc de discerner, dans ces abondants écrits typiques de la RDA, les logiques sous-jacentes des créateurs de mode est-allemands, pris entre plusieurs mondes – leur monde artistique, celui industriel des producteurs, et celui bureaucratique de l’État – et face à un État omniprésent, réticent au changement et incapable de suivre le rythme de l’industrie française. Les délégués envoyés à Paris se réalisent dans deux dimensions, dont ils maîtrisent, pour chacune, le langage : culturel et industriel, artistique et bureaucratique, occidental et socialiste13. Comment appréhendaient-ils donc la mode française14 ?

1. Le filtre socialiste

5Socialisme oblige, les délégués rédigèrent leurs rapports sur la mode française selon un filtre socialiste. Mais celui-ci apparaît comme superficiel. Il n’est en fait jamais réellement question de créer une véritable culture de l’habillement ou une mode socialiste. Seules des valeurs promues par le socialisme sont relevées dans la mode française et transmises dans les rapports, par pure forme et par obligation face à une bureaucratie refusant catégoriquement d’autres normes que les siennes. De plus, la critique de la mode française s’estompe progressivement au fil du temps et l’aspiration à suivre les tendances capitalistes devient de plus en plus évidente.

A. Les filtres « culture » et « modernité » : une pure formalité socialiste ?

  • 15  BArch DG400/1707, Auswertung der Entwicklung der Mode im kapitalistischen Ausland, speziell der Ha (...)

6Malgré la puissance idéologique attribuée à la culture de l’habillement (Bekleidungskultur), notamment durant la construction du socialisme dans les années 1950, les rapports et les directives concernant le voyage d’information ne la mentionnent presque jamais. Il en est de même pour la « mode socialiste » ou pour une quelconque référence à la figure ou personnalité socialiste. Dans le corpus étudié, on ne compte en réalité qu’une seule référence à la Bekleidungskultur. Elle se trouve dans une évaluation du développement de la mode dans les pays capitalistes, spécialement de la haute-couture en France pour la saison automne-hiver 1968/69, rédigée en octobre 1968, à laquelle contribuèrent les pays socialistes15. Cependant, quelques caractéristiques du socialisme se retrouvent bien dans le « calibrage » de la mode française vue par les professionnels de la mode de RDA. Autrement dit, certains éléments observés et rapportés de la mode française correspondent aux valeurs promues par le socialisme.

  • 16  Ibid., p. 8 : « eine überaus kultivierte und überfeinerte Mode ». Le mot « überfeinert » n’a pas d (...)
  • 17  Ibid., p. 13 : « Die Couturiers, vor allem die jüngeren unter ihnen, haben sich von den alten Trad (...)
  • 18  BArch DG400/1243, Willfriede Leupold, Reisebericht Teil II über den Besuch der Haute-Couture-Schau (...)
  • 19  BArch DG400/2347, Elke Giese, Reisebericht zum Besuch des Internationalen Herrenmodesalon SEHM, Pa (...)

7C’est le cas de l’aspect « cultivé » de la mode. Professionnelle de la mode de RDA, Annemarie Kny décrit dans un rapport de février 1969 la maison Yves Saint Laurent comme présentant une « mode particulièrement cultivée et sur-raffinée »16. Elle conclut sur le fait que « les couturiers, notamment les plus jeunes d’entre eux, se sont détachés des anciennes traditions de la haute-couture. Le développement se poursuit de plus en plus vers une confection de modèles cultivée »17. De même, Willfriede Leupold note à propos des maisons de haute-couture visitées en janvier 1980 qu’elles « montraient des collections très différentes, individuelles, qui comportaient aussi bien une mode cultivée, portable sans exagérations, que des expériences nouvelles de formes inhabituelles »18. Enfin, Elke Giese qui a voyagé en février 1989 pour le Salon européen de l’habillement masculin (SEHM), alors créatrice de mode en chef de l’Institut, qualifie la manière de s’habiller d’extrême raffinement et note que, de manière générale, la mode masculine ouest-européenne est d’un niveau « esthétiquement très développé ». Elle affirme que les professionnels de la RDA sont étrangers à cette « mode cultivée » car ils manquent de « toute expérience ou image culturelle »19.

  • 20  BArch DG400/1707, Information über die internationale Entwicklung der Damenoberbekleidung, 02/1969 (...)
  • 21  BArch DG400/1707, Auswertung der Entwicklung der Mode im kapitalistischen Ausland (note 15), p. 8  (...)

8Les observations de l’aspect « cultivé » dans la mode s’accompagnent de celles sur la « modernité » de l’habillement. En effet, le socialisme recherchait la modernité. Le domaine de la mode ne faisait pas exception. Le document qui informait sur le développement international du vêtement féminin en 1969 expliquait que la collaboration des différents pays socialistes devait notamment servir à la « création d’un habillement moderne et actuel pour nos concitoyens ». Les résultats du congrès sur la mode étaient considérés comme essentiels « pour l’établissement d’un style vestimentaire moderne » pour les pays socialistes20. Le rapport sur le développement de la mode capitaliste en 1968-1969 conclut que le rôle des professionnels de la mode était d’apporter à la population « à travers un habillement actuel et répondant aux besoins de la majorité du peuple, un style vestimentaire actuel et moderne »21.

  • 22  BArch DG400/1259, Elisabeth Reinke, Reisebericht über den Besuch der « Semaine de la maroquinerie (...)
  • 23  Nadège Ragaru, Antonella Capelle-Pogacean (dir.), Vie quotidienne et pouvoir sous le communisme. C (...)
  • 24  D. Bartlett, Fashion East (note 7), p. 220-221.

9La fibre synthétique était l’une des premières formes de cette modernité pour la RDA. En 1977, les délégués notent toujours encore l’utilisation du synthétique, comme par exemple la créatrice de l’Institut Elisabeth Reinke après sa visite de la Semaine de la maroquinerie et des articles de voyage à Paris en juin 197722. Le synthétique était un signe commun de modernité partagé par toute l’Europe dans les années 1960. La nouvelle culture de consommation socialiste instaurée par la RDA était dominée par une survalorisation de la technologie, présentée comme un instrument d’émancipation23. Tandis qu’en Europe occidentale et en France, le synthétique passa de mode, le discours officiel de la RDA ne changea pas de position dans les années 1970 et 1980 : la science et la technologie furent préférées à la création et au changement. La modernité, par l’émancipation scientifique, continuait de trouver son expression dans les fibres chimiques24. Le progrès socialiste est donc fortement lié au synthétique, qui est une fibre non naturelle, artificiellement créée pour le besoin de l’homme.

  • 25  J. Stitziel, Fashioning Socialism (note 12), p. 46-47.

10Toutefois, les problèmes économiques croissants de la RDA et ses besoins d’exportation invitent à nuancer cette raison idéologique et officielle. À cause du manque de flexibilité industrielle et de ses investissements peu diversifiés, la RDA ne pouvait plus s’engager dans une autre voie que le développement de l’industrie des fibres chimiques. De 1969 à 1980, la part de ces dernières dans la production textile totale est passée de 36 % à 90 %25. Jusqu’à la fin, la RDA persiste donc à observer la modernité dans la mode du synthétique en France, où cette fibre n’est plus utilisée depuis les années 1970.

11Les créateurs est-allemands observent donc la mode française à travers un filtre socialiste. En outre, ils semblent le faire davantage par devoir envers leur régime que par conviction. Leur désengagement implicite se reflète dans leurs rapports, de moins en moins critiques au fil des décennies.

B. Une critique de la mode de plus en plus assourdie

  • 26  BArch DG400/1707, Auswertung der Entwicklung der Mode im kapitalistischen Ausland (note 15), p. 1  (...)
  • 27  Ibid. p. 1 : « Daneben ist es auch notwendig, die Entwicklung der Mode in den Ländern des NSW lauf (...)

12Tous membres du SED, les professionnels de la mode de RDA sont tenus d’adopter une attitude critique, qui se traduit par la recherche d’une « adaptation critique » de la mode occidentale de Paris. Selon un rapport d’octobre 1968, cette mode provient en fait de l’un des « États industriels hautement développés du NSW [Nichtsozialistisches Wirtschaftsgebiet, territoire économique non socialiste] avec un marché manipulé » qui « sert à obtenir un profit industriel maximal dans un système impérialiste »26. Selon cette vision des choses, la mode ne peut trouver la même place au sein de la République est-allemande marxiste-léniniste. Si les professionnels de la mode du pays considèrent le fait de « suivre constamment le développement de la mode des pays du NSW » comme une nécessité, le transfert suppose « de l’exploiter de façon critique »27.

  • 28  BArch DG400/1707, Information über die internationale Entwicklung der Damenoberbekleidung (note 20 (...)
  • 29  BArch DG400/1707, Auswertung der Entwicklung der Mode im kapitalistischen Ausland (note 15), p. 5  (...)
  • 30  T. Kupfermann, Das große DDR-Modebuch (note 1), p. 28.

13Dans le même esprit, on retrouve des critiques acerbes de la mode française. Le rejet du snobisme et de l’excès de raffinement est constant. La phrase « la recherche d’une expression dans l’élégance classique sportive a mené […] en partie à un raffinement excessif qui se reflète dans les proportions, dans le coloris morbide, et dans le jeu entre modèle et porteuse du vêtement, qui était mené jusqu’au […] snobisme » se retrouve dans plusieurs rapports28. Les professionnels de la mode expliquent que « l’exclusivité surjouée n’a pas d’importance pour la création de la mode » en RDA29. Le snobisme et l’excès de raffinement sont contraires aux valeurs prolétaires du pays des ouvriers et des paysans. L’expression « couleurs morbides » revient fréquemment aussi et sert peut-être à contraster avec les couleurs du socialisme, qui étaient claires et gaies, car théoriquement « le socialisme est lumineux et joyeux » et condamne les couleurs sombres et fades30.

  • 31  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 5.
  • 32  D. Bartlett, Fashion East (note 7), p. 8.
  • 33  Ibid., p. 223.
  • 34  Ibid., p. 172 : « We just cannot keep up with running behind », citation extraite de Walter Ulbric (...)

14Cependant, cette phrase critique va à l’encontre d’autres observations comme, par exemple en février 196931, celles de la description générale des couleurs vues dans les collections, dont le coloris dominant est clair, doux, pastel avec des tons forts et luisants. Ce constat nous laisse douter de la pertinence, mais surtout de la sincérité de la « critique », d’autant plus que cette tournure de phrase est retrouvée à l’identique, comme écrite automatiquement, dans plusieurs rapports. Elle est sans doute une forme d’égard par rapport à l’anxiété ontologique dont souffraient les autorités centrales face à la fluidité du temps et du fait de leur peur pathologique du changement32. Cette peur se reflète dans la bureaucratie très développée du pays qui sévit aussi dans les milieux de la mode. Cette dernière a justement le pouvoir de ralentir les choses, ce qui la met en porte-à-faux dans un domaine comme la mode qui capte le temps présent et change, par définition, très rapidement. Ennemie du changement, la bureaucratie empêche la RDA d’être à la mode33. Dès 1959, Walter Ulbricht s’exclame qu’il est inconcevable de « se maintenir derrière [l’Ouest] en courant »34. La RDA accumule de plus en plus de retard et se retrouve prisonnière du temps à cause de sa peur du changement.

  • 35  BArch DG400/1243, Willfriede Leupold, Reisebericht Teil II über den Besuch der Haute-Couture Schau (...)
  • 36  D. Bartlett, Fashion East (note 7), p. 213.

15Les critiques de la mode française persistent au fil du temps, mais deviennent rares, jusqu’à ne plus exister. En 1980 par exemple, Willfriede Leupold écarte les vêtements festifs vus lors de sa visite des défilés de haute-couture, car de telles conceptions « costumières n’ont aucun intérêt pour la RDA »35. Sans faire davantage de critiques, elle passe rapidement aux vêtements quotidiens qui correspondent plus, selon elle, aux besoins du pays. La rareté des critiques coïncide avec un encouragement au changement dans le domaine de la mode. Si le socialisme stable des années 1960 cache en fait une peur du changement et de la fluidité du temps, le déclin du socialisme des années 1970 et 1980 amène le pays à se ressaisir, dans les limites permises par la bureaucratie bien sûr36.

  • 37  Ragaru/Capelle-Pogacean (dir.), Vie quotidienne et pouvoir sous le communisme (note 23), p. 29.
  • 38  BArch DG400/2347, Institutsdirektor Pr. Dr. sc. Hartmann, Reisebericht (in 3 Teilen) zum Besuch de (...)
  • 39  Günter Höhne, Das große Lexikon : DDR-Design, Cologne, Komet, 2008, p. 18.
  • 40  BArch DG400/2347, L. Knöchel, Reisebericht zum Besuch (note 8), p. 2.

16En effet, la disparition progressive de toute critique fait place à une imitation de plus en plus évidente du système capitaliste et à l’abandon progressif d’alternatives. Dès le début des années 1970, les problèmes économiques croissants mènent à un blocage politique et social37. Ainsi, en 1989, le Pr. Dr. sc. Hartmann explique dans son rapport de la visite de l’IFM (Institut français de la mode) et de l’entreprise Fred Carlin à Paris que le succès de l’industrie légère de RDA dépendra de plusieurs facteurs dont une « collection innovante, complexe, en constante expansion, avec beaucoup de nouveautés dans les couleurs, les silhouettes et, surtout, dans l’utilisation des tissus tout comme la réalisation minutieuse de détails et d’accessoires de grande qualité, censés susciter le désir d’acheter »38. À la fin des années 1980, la devise « ne pas éveiller de besoins ! » (Keine Bedürfnisse wecken) a donc franchement été troquée contre une logique de marketing. Cette devise avait pourtant été imposée aux médias du pays par le Parti dans les années 1970 et 1980 pour faire face, entre autres, aux difficultés de matériaux, de production, de commerce39. Mais selon les professionnels de la mode de RDA, le capitalisme et ses logiques de marché proposent un meilleur modèle, et ils ne cachent plus cette opinion. De même, Lucia Knöchel analyse positivement les stratégies de marché lors de sa visite du Xe Festival de la mode. Elle explique que celui-ci se base sur une diversité des thèmes de la mode40. Ainsi, les professionnels de la mode qui voyagent à Paris notent sur un ton de plus en plus libre les problèmes du système de la mode est-allemand. Cela les amène à considérer des aspects de la mode française qui n’existent pas en RDA et qui sont contraires aux valeurs et à l’évolution du pays, notamment l’individualité de la création.

C. Une incohérence idéologique : la défense de l’individualité de la création

  • 41  BArch DG400/1417, Karl-Ernst Schubert, Teil II zum Reisebericht über den Besuch des Internationale (...)
  • 42  M. de Ferrière Le Vayer, « Des métiers d’art à l’industrie du luxe » (note 10), p. 165 et 175-176.
  • 43  François Baudot, La mode du siècle, Paris, Éd. Assouline, 2006, p. 170-173, 234-238 et 276-280.

17En 1968 déjà, Karl-Ernst Schubert note avec étonnement que malgré la similitude des matières employées, les créateurs ayant exposé leurs collections au Salon du prêt-à-porter féminin cherchent à afficher leur signature personnelle. Il critique ensuite l’uniformité de la mode en RDA et conseille aux entreprises du pays de développer une « signature individuelle d’entreprise dans la conception de leurs collections ». Il les invite également à se faire une vision claire des besoins de leurs cercles de clientèle41. Il remarque l’évolution, entamée dans les années 1960, de la mode artisanale française, représentée par la haute-couture, vers une mode de plus en plus griffée, représentée par le prêt-à-porter42. Cette mode affirme son existence par une identité. Le vêtement est désormais un produit qualifié qui porte un nom. Les premiers à se servir de ce concept sont les stylistes qui apparaissent dans les années 1960, relayés par les créateurs des maisons fondées après la Seconde Guerre mondiale comme Christian Dior ou Hubert de Givenchy43. Le prêt-à-porter qu’ils créent se dirige de plus en plus vers un prêt-à-porter industriel, destiné à une consommation de masse, malgré le caractère exclusif de leurs créations. Le nom assure le succès de ces maisons en plein développement.

  • 44  BArch DG400/2347, L. Knöchel, Reisebericht zum Besuch (note 8), p. 17.
  • 45  Ibid., p. 18 : « Die kreativen Potenzen der Gestalter sind zu fördern, persönliche Handschriften z (...)
  • 46  J. Stitziel, Fashioning Socialism (note 12), p. 45-46.
  • 47  Ibid., p. 44-45.
  • 48  Ibid., p. 94-96 ; pour le détail voir p. 94-118.

18Ce phénomène de marque ne cesse de prendre de l’ampleur dans les années 1970 et 1980 et les délégués est-allemands l’observent souvent lors de leurs voyages à Paris. Lucia Knöchel explique en 1989 dans ses conclusions que très peu de marques existent en RDA et souhaite une évolution dans cette direction pour avoir une meilleure place au sein de la concurrence européenne44. Sa conclusion finale insiste sur la nécessité d’un développement d’identités créatives : « le potentiel créatif des créateurs est à promouvoir, les signatures personnelles à imposer. Par analogie avec les collections progressives des jeunes créateurs parisiens et stylistes établis, des collections de designers empreintes d’individualité sont à expérimenter »45. Le manque de poids sur la scène internationale et l’insatisfaction des citoyens du marché intérieur pourraient expliquer cette aspiration des créateurs est-allemands. Effectivement, la RDA avait la réputation à l’étranger d’être un producteur et un exportateur de marchandises de basse qualité à prix très abordable (Billigwarenland)46. La situation du marché intérieure était encore pire, étant donné que les meilleurs produits de mode fabriqués en RDA étaient prioritairement destinés à l’exportation, ou alors aux expositions, aux magazines, et aux boutiques haut-de-gamme Exquisit à caractère exclusif47. Le consommateur moyen est-allemand se retrouvait avec les productions basiques et uniformes de RDA, peu attrayantes pour la majorité de la population. Le peu d’appétence pour des vêtements produits sans discontinuité et en grande quantité provoqua un problème de surplus gigantesque de marchandises que personne ne voulait acheter. Elles étaient appelées Ladenhüter, littéralement « gardiens de magasins », du fait qu’elles ne quittaient jamais la surface de vente ou le stock des magasins48. L’instauration de marques et de noms en RDA apparaît pour les professionnels de la mode comme une solution à ces problèmes : le client est-allemand devrait théoriquement être attiré par une marchandise griffée, qu’il achèterait et porterait avec plaisir ; les exportations seraient également de meilleure qualité, ce qui rehausserait l’image du pays sur la scène internationale. Dans le contexte de Guerre froide et de bloc de l’Est, il était particulièrement important pour la RDA de soigner son image. Après tout, elle représentait la vitrine du socialisme.

  • 49  BArch DG400/1243, Direktive zur Informationsreise nach Paris vom 18.10.-22.10.1980 zum Besuch des (...)
  • 50  BArch DG400/2347, L. Knöchel, Reisebericht zum Besuch (note 8), p. 5 : « Die Mode wie ein Spiel, e (...)
  • 51  J. Stitziel, Fashioning Socialism (note 12), p. 42-43.

19Les délégués est-allemands ont pour directive d’observer le travail des jeunes créateurs, ce qui suppose que les sphères dirigeantes ont connaissance du caractère indésirable des vêtements produits en RDA. Tout comme celle du voyage d’octobre 198049 par exemple, la directive pour la visite du Xe Festival de la Mode en 1989 ordonne d’observer les stylistes français. Cela est surprenant à plusieurs égards. La mode de ces jeunes créateurs, comme la décrit Lucia Knöchel en 1989, peut être avant-gardiste, originale, expérimentale, car ils considèrent « la mode comme un jeu, une passion, une fête, une mode qui est amusante »50, tandis que les autorités est-allemandes sont plutôt les gardiennes du bon goût et d’un habillement classique et traditionnel. De plus, cela va à contre-courant des évolutions de l’industrie socialiste. Effectivement, les dirigeants du pays souhaitent à l’origine un accroissement des grandes industries, de plus en plus centralisées, pour une standardisation des vêtements produits en série51. Une mode uniformisée en résulte, ce qui correspond à l’idéologie du régime qui met en avant le collectif, au détriment de l’individu. Ordonner de s’inspirer de la mode griffée et donc individualisée est un contre-courant non seulement économique, car la mode griffée demande des créations insolites qui diffèrent de créateur en créateur, mais également idéologique car cela va à l’encontre de l’esprit collectif et égalitaire revendiqué par le socialisme.

  • 52  G. Höhne, Das große Lexikon : DDR-Design (note 39), p. 18.
  • 53  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 36-37 ; BArch DG400/1707, A. Kny(...)
  • 54  BArch DG400/1416, Karl Beyer, Reisebericht Teil II über den Besuch von Firmen für textile Neuheite (...)
  • 55  BArch DG400/2347, Elke Giese, Reisebericht zum Besuch des Internationalen Herrenmodesalon SEHM (no (...)
  • 56  Comme par exemple BArch DG400/769, Erika Bläser, Dienstreisebericht zu dem Besuch der « Mode-Woche (...)

20Le paradoxe continue : l’aspiration à une mode désirable (qui passe par la griffe) va à l’encontre de la devise officielle « ne pas éveiller de besoins » des années 1970 et 198052. Cette devise devait calmer l’économie dont le coût était de plus en plus insoutenable pour le régime, mais aussi pour contenir les rêves de consommation grandissants de la classe moyenne montante du pays, formée dès l’établissement du socialisme et de plus en plus insatisfaite et déloyale. Or, ce souci de satisfaction de la classe moyenne se retrouve dans les rapports des voyages d’information. Effectivement, on trouve des observations de produits différenciés selon les groupes sociaux dans les rapports de l’ensemble de la période étudiée. Par exemple, suite à leur visite des défilés de la haute-couture et du Salon de l’habillement masculin en 1969, Lore Jörn et Annemarie Kny expliquent que la laine, plus onéreuse, est employée pour les productions haut de gamme et moyen de gamme, tandis que le synthétique est davantage utilisé pour les produits bas de gamme53. La même observation est faite par Karl Beyer deux mois plus tard54. En 1989, Elke Giese parle d’un « retour » à une « mode comme statut symbolique », par laquelle on montre « la place qu’on occupe au sein de la société »55. Cette dernière remarque est incorrecte car la mode a toujours plus ou moins évoqué un statut symbolique. Il est très probable qu’en réalité, ces produits de marque intéressaient beaucoup désormais les professionnels de la mode de RDA qui y voyaient un moyen de satisfaire la classe moyenne de leur pays qui s’émancipait progressivement du socialisme. Il est attesté que le régime soutenait discrètement les privilèges de cette classe qui lui servait d’étendard dans la compétition culturelle de la Guerre froide étendue au mode de vie. Certains professionnels de la mode de RDA prescrivent dans leur rapport l’instauration d’une Genreproduktion, terme qui n’a pas de traduction française et qui signifie peut-être « production de gamme ». Selon eux, elle serait bénéfique pour satisfaire les souhaits des consommateurs est-allemands56.

21En somme, l’individualité de la création et la production de gamme sont vues comme des solutions aux divers maux économiques décrits précédemment. Toutefois, ces observations mettent en lumière les contradictions de ces aspirations avec le système de mode est-allemand, son économie et son idéologie. Conscients de ces contradictions, les délégués envoyés à Paris filtrent la mode française, à travers le « bon goût » notamment, pour un transfert tolérable vers le système fragile et instable de la mode est-allemande.

2. Le filtre neutralisant du bon goût

22À la lecture des rapports sur la mode française, on remarque qu’elle était observée à travers le filtre du « bon goût », ce qui résulte de la distinction de plusieurs « modes ». Ainsi, on distingue la mode féminine, la mode classique, la mode fonctionnelle, autant de modes qui ne supposent pas de changements fondamentaux, étant donné qu’elles postulent toutes la valeur de l’intemporalité ou de l’équilibre. Ce filtre du bon goût est parfait pour neutraliser l’aspect éphémère de la mode française qui fait peur à la bureaucratie du pays, mais aussi pour atténuer les lacunes et légitimer les productions uniformes de l’industrie textile de la RDA.

A. La mode féminine

  • 57  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 9.
  • 58  BArch DG400/1265, Gudrun Specht, Reisebericht Teil II über die Ergebnisse nach dem Besuch der 36.  (...)
  • 59  BArch DG400/1243, W. Leupold, Reisebericht über den Besuch vom 27.1.-31.1.1980 (note 18), p. 2.

23La mode féminine représente un critère de choix idéal aux yeux des professionnels de la mode est-allemands car, effectivement, la féminité reste une valeur intemporelle au sein de la mode pour femmes. Malgré les tendances de masculinisation de certaines années, la féminité n’a jamais quitté les défilés et les collections de mode et les délégués est-allemands ne manquent pas de les noter dans leurs rapports. En février 1969, Lore Jörn et Annemarie Kny qualifient les collections de haute-couture de « damenhaft » (féminines)57. En octobre 1978, la créatrice de mode de l’Institut, Gudrun Specht, relève au Salon de prêt-à-porter féminin « une nouvelle image de référence de la femme féminine » et « un retour à la féminité, au chic et à l’élégance, que le corps et ses formes doivent mettre en avant ». Parmi deux autres styles, elle discerne un style « très féminin, fin, proche du corps, avec une taille accentuée, en partie souligné avec des couleurs et des accessoires […] mais aussi selon des variantes de l’élégance jeune ou classique »58. En janvier 1980, Willfriede Leupold mentionne la féminité comme l’une des caractéristiques majeures dans les défilés de haute-couture de janvier 1980, en parallèle au classicisme et à la sportivité59.

  • 60  D. Bartlett, Fashion East, p. 190 (note 7).

24Par définition, la féminité est tout ce qui a trait au féminin. C’est l’ensemble des caractères qui correspondent à l’image, ici surtout sociale, de la femme. La conception de la féminité est différente selon les pays et selon les époques. Dans le cas de la RDA, le régime prône paradoxalement une féminité conservatrice car elle ne remet pas en question l’ordre établi. Si cette définition semble contraire au progrès de la femme dont le pays se veut le garant, elle a néanmoins été nécessaire pour réintroduire la mode dans la société est-allemande. Après la Seconde Guerre mondiale, les femmes travaillaient avec les hommes dans un monde d’hommes où la mode n’avait pas de place. C’est seulement avec le rétablissement des valeurs de la féminité traditionnelle dans le socialisme des années 1950 que la mode a pu réapparaître60. De plus, la féminité traditionnelle est porteuse du bon goût, et ce filtre permet à l’État de contrôler l’évolution de la femme est-allemande. En effet, le socialisme est censé éduquer la femme dans le domaine de la mode. Jusqu’à la fin des années 1960, l’amatrice de mode était stigmatisée comme étant une grande consommatrice de vêtements, arbitraire, oisive et impulsive. Les dirigeants voyaient dans le goût pour les chiffons une perte de discipline, de productivité, et généralement un affaiblissement de la femme, ce qui est théoriquement hors de question en pays socialiste. Le régime a donc tenté d’apprendre à la femme de suivre Monsieur Goût (Herr Geschmack), et non les humeurs très changeantes de Madame Mode (Frau Mode) qui se faisait dicter son comportement par l’Ouest. La féminité en RDA est donc aussi une question politique. Elle est un terrain d’affrontement entre l’Ouest et l’Est.

  • 61  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 4.
  • 62  BArch DG400/1243, Direktive zur Informationsreise nach Paris vom 27.1.-31.1.1980 zur Haute Couture (...)
  • 63  Chantal Metzger (dir.), La République démocratique allemande. La vitrine du socialisme et l’envers (...)
  • 64  J. Stitziel, Fashioning Socialism (note 12), p. 59.
  • 65  Konrad Jarausch, Hannes Siegrist, Amerikanisierung und Sowjetisierung in Deutschland 1945-1970, Fr (...)

25Dans ce cadre, l’indépendance des femmes est un des préceptes-phares mis en avant par le gouvernement de la RDA. Elle est considérée comme l’un des traits de caractère indéniable de la femme moderne. Ainsi, les délégués envoyés à Paris notent prioritairement les vêtements pour la femme moderne. Dans les rapports, elle prend la forme d’une femme au-delà de trente ans, d’une femme intellectuelle, d’une femme qui travaille, d’une femme émancipée. En 1969, Lore Jörn et Annemarie Kny font la critique des couturiers qui n’arrivaient pas, selon elles, à créer entièrement une mode pour un type de femme confiante en elle, intellectuelle ou émancipée, qui a besoin d’un habillement moderne et d’une élégance naturelle61. La directive ordonne pour le voyage d’information de janvier 1980 d’observer l’offre des boutiques des maisons de couture et des stylistes en ce qui concerne les tendances de la mode classique pour la femme qui travaille (berufstätige Frau)62. La berufstätige Frau est justement une création des socialistes et une réalité ancrée en RDA. Dans les années 1970, 42,5 % des actifs de l’industrie sont des femmes, ce qui représente à l’époque l’un des taux les plus élevés du monde63. L’Institut de la mode est chargé d’habiller cette femme. Elle doit être confiante, travailleuse, indépendante financièrement, à l’aise avec la technologie moderne, et modérée64. L’État lui ouvre théoriquement toutes les portes pour qu’elle aussi puisse faire carrière65.

  • 66  Ibid., p. 256-257 et 261.
  • 67  Frédéric Monneyron, La mode et ses enjeux, Paris, Klincksieck, 2005, p. 103.
  • 68  Anna Pelka, « Zum Verhältnis von Mode, Ideologie und Nachfrage in kommunistischen Diktaturen », Au (...)

26Ces caractéristiques participent à la construction du filtre qui est apposé sur la mode française par les délégués à Paris. Il leur faut critiquer la mode de l’Occident car la représentation de la femme y est très différente et se base sur le modèle américain, tandis que celle de la RDA se base sur le modèle soviétique. Effectivement, la femme en RFA, et plus ou moins dans tout l’Occident, se retire de plus en plus dans la sphère privée et domestique. La femme au foyer est très valorisée66. La femme socialiste de RDA qui travaille devait donc éviter l’américanisation. Elle devait aussi éviter la « masculinisation » qu’on retrouvait dans la mode à Paris dès les années 1960. Effectivement, au moment où la RDA passait à une féminité renforcée et conservatrice, la mode française l’avait déjà abandonnée pour remettre en question le genre. Ceci se trouve dénoncé dans certains rapports, notamment dans les descriptions des collections d’Yves Saint Laurent qui avait généralisé le port du pantalon pour la femme67. Le pantalon ne présentait pas de problèmes et avait reçu un accueil positif en RDA, contrairement à d’autres pays socialistes plus conservateurs. Mais certains éléments des collections d’Yves Saint Laurent, comme les smokings pour femme, n’étaient pas vus d’un bon œil68. La RDA était un pays conservateur en ce qui concerne la féminité, même s’il souhaitait le progrès de la femme. Les nouvelles normes établies ne devaient pas bousculer celles du genre et de l’hétérosexualité.

  • 69  BArch DG400/2347, L. Knöchel, Reisebericht zum Besuch (note 8), p. 5.
  • 70  BArch DG400/1259, Direktive zur Informationsreise nach Paris vom 21.10.-26.10.77 zum Besuch des Sa (...)

27Par ailleurs, le socialisme est-allemand et son Institut de la mode se targuaient d’être les pourvoyeurs d’une mode pour tous. L’Institut s’efforça, du moins en théorie, de concevoir une mode pour différentes femmes, différents âges et différentes morphologies. Effectivement, lors de voyages d’information à Paris, les délégués observaient plusieurs types de mode pour plusieurs types de femme. En 1989 par exemple, Lucia Knöchel dresse une liste de femmes à qui la mode du Xe Festival de la Mode pourrait s’adresser, comme par exemple le style « avant-première » pour la femme jeune et intéressée par la mode, ou le style « briefing » pour la « femme d’affaire » dynamique, sportive69. L’Institut insistait aussi particulièrement sur l’habillement de la femme forte (stärkere Frau). Si, en théorie, cela distingue la mode socialiste est-allemande de la mode française, en pratique, la mode est-allemande s’aligne indéniablement sur les idéaux de la mode française, en l’occurrence la femme fine, sans accorder une importance égale aux autres morphologies. On le constate dans les rapports et directives où les observations sur la femme forte, par exemple, se font très rares. Dans notre corpus, seulement une référence à la stärkere Frau a été trouvée : celle de la directive ordonnant le voyage d’octobre 1977, qui demande à Ingrid Krenzin, créatrice de mode en chef du VVB Konfektion (association d’entreprises propriété du peuple Confection), de faire une étude particulière sur les assortiments pour la femme forte dans les centres commerciaux parisiens70. Cette discordance entre le discours officiel et le contenu des rapports reflète une réalité de la RDA : le pays s’aligne malgré tout sur les valeurs de l’Occident. En RDA, comme en France, c’est l’image de la femme fine et jeune, et non de la femme forte et âgée, qui prédomine.

28Bien qu’il y ait une contradiction entre les idéaux du régime et la réalité qui amène à penser que la femme active et indépendante de RDA serait davantage une utopie socialiste qu’une réalité, le classicisme, l’élégance, ou même la fonctionnalité, dûment observés par les créateurs est-allemands à Paris, participent à l’établissement théorique de cette femme et permettent de l’écarter des « déviances » occidentales.

B. La mode classique

  • 71  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 4 : « Das Suchen nach einem neue (...)
  • 72  BArch DG400/1259, Willfriede Leupold, Reisebericht Teil II über den Besuch des Salons Internationa (...)
  • 73  Ibid., p. 6 : « bei Bekleidung im klassischen Stil, zeigt eine geringfügige Verkürzung ».

29La mode classique est le filtre qui impose le plus la capacité neutralisante du bon goût. Par définition, « classique » suppose conformité aux usages établis, au goût traditionnel, par opposition à ce qui est marginal ou nouveau. La mode française est présentée dans ses aspects les plus classiques dans tous les rapports de voyage d’information des années 1960 à 1990. Selon les délégués est-allemands, le classicisme s’exprime tant dans le style que dans les couleurs et les matériaux employés. Par exemple en février 1969, Lore Jörn et Annemarie Kny observent que le thème « classique » semble avoir atteint son paroxysme dans les collections de haute-couture et que « la recherche d’une élégance classique et sportive a mené à plusieurs modèles exemplaires »71. De même en octobre 1977, Willfriede Leupold remarque au Salon du prêt-à-porter féminin la présence d’un style « Gatsby » qui se caractérise par un « classicisme élégant et doux »72. À propos des silhouettes, elle note spécialement que pour « l’habillement classique », les silhouettes montrent une longueur modérément raccourcie73.

  • 74  BArch DG400/1265, Vera Schwenteck, Schlußfolgerung und Maßnahmen für den VHB Exquisit, Berlin, Mod (...)

30Les délégués envoyés à Paris affichent l’objectif de transférer ces éléments du classicisme vers la mode est-allemande, comme le prouvent par exemple la conclusion et le plan d’action de Vera Schwenteck après sa visite du Salon de prêt-à-porter féminin en 1978. Effectivement, elle réclame pour la RDA la « poursuite du développement et la culture d’une mode classique pour les vêtements pour femmes et hommes en élaborant un contenu très mode et une qualité de produit haut de gamme »74. La logique socialiste apparaît très nettement : pour Vera Schwenteck, la mode classique peut être composée d’un « contenu très mode ». Il s’agit donc de développer une mode conforme aux usages, et non avant-gardiste ou complètement neuve comme ce peut être le cas en France.

  • 75  BArch DG400/1259, W. Leupold, Reisebericht über den Besuch vom 21.10.-28.10.1977 (note 72), p. 3-4 (...)
  • 76  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 22 : « Eine selbstverständliche, (...)
  • 77  BArch DG400/1259, E. Reinke, Reisebericht über den Besuch vom 8.6.-13.6.77 (note 22), p. 3-4.
  • 78  D. Bartlett, Fashion East (note 7), p. 201-202.
  • 79  Ibid., p. 174.
  • 80  Katja Selbmann, « 10 Jahre Deutsches Modeinstitut : 10 Jahre Dienst an der Schönheit », Sibylle, 5 (...)

31Le filtre classique s’inscrit dans le « bon goût » promu par le régime, parmi d’autres caractéristiques comme la modestie, le fait d’avoir un comportement approprié, ou l’élégance. L’élégance est associée au classicisme dans le rapport cité précédemment75, elle est une caractéristique constamment mentionnée dans les rapports. Elle est parfois associée à la « sportivité » qui est également abondamment citée dans les rapports. Pour ne citer que quelques exemples, Lore Jörn et Annemarie Kny font en février 1969 le tableau d’une mode masculine régie par une « sportivité naturelle, très élégante »76 ; Elisabeth Reinke note en 1977 la tendance éminemment sportive des sacs, dont le classicisme s’inspire de formes ou de matériaux sportifs77 ; Willfriede Leupold note en janvier 1980 des combinaisons sportives dans les modèles de la haute-couture. On remarque que les valeurs de sportivité, d’élégance, de classicisme se retrouvent souvent entremêlées dans les descriptions. Elles correspondent toutes aux valeurs progressistes du pays tout en formant un filtre parfait pour ralentir la mode et neutraliser ses changements78. De surcroît, l’aspect classique permet de justifier et légitimer l’uniformité de la mode est-allemande79. Il est érigé en caractéristique de la mode de RDA : la directrice artistique de l’Institut de la mode explique, à l’occasion des dix ans de l’institut dans le numéro Sibylle de mai 1962, qu’elle refuse les artifices et la recherche d’une originalité forcée, mais défend une mode équilibrée, pratique, moderne, belle et, bien sûr, classique80.

  • 81  D. Bartlett, Fashion East (note 7), p. 212.
  • 82  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 5-6.
  • 83  D. Bartlett, Fashion East, p. 175 (note 7).

32La mode classique peut également servir à la justification de l’incompétence des professionnels de la mode de RDA face à la mode foisonnante de Paris. Par définition, la mode classique se conforme au goût traditionnel et aux usages établis. Elle ne suppose donc aucune innovation et représente la mode la plus simple à réaliser81. Cette réticence au changement peut s’expliquer éventuellement par la confusion éprouvée par les délégués est-allemands à la vue des collections à Paris. Ils ne savaient pas forcément comment appréhender les nouvelles idées de cette mode qui change à un rythme très soutenu et la meilleure option restait de se retrancher sur les aspects traditionnels qu’ils maîtrisaient. Cette incapacité d’approcher convenablement la mode française se reflète dans le contenu des descriptions, très littérales et dénuées de toute réflexion. Les rapports font constamment de longues listes qui prouvent que les délégués se limitent parfois à de simples descriptifs de la mode observée, et sont incapables d’en déduire de réelles tendances ou de cibler des éléments importants pour leur mode en RDA. À la suite de leur visite des défilés de haute-couture à Paris en février 1969, Annemarie Kny et Lore Jörn, par exemple, distinguent au sein des collections des couleurs claires, douces, luisantes, puissantes, mates, et sombres, ce qui constitue déjà de manière générale une grande partie des possibilités. Elles détaillent ensuite dans une longue liste les « quelques couleurs importantes » selon elles,  : le gris (gris perle, gris-bleu) ; le bleu (bleu clair, bleu ciel, bleu marin, bleu cristallin, bleu ultra-marin luisant, bleu ardoise, bleu marine) ; le rose (rose poudré, beige rosé, rose magnolia, rose puissant, rose pêche, rose abricot, rose saumon) ; le jaune (jaune champagne, jaune vanille, jaune citron, jaune soleil, orange mat) ; le brun (allant du beige au kaki, orange brunâtre, brun café, brun chocolat) ; le vert (vert tilleul, vert d’eau, turquoise) ; le rouge (rouge signal, souvent en combinaison avec le noir) ; le mauve (violet, souvent en combinaison avec le beige et le noir) ; le blanc (dans toutes les nuances, en combinaison avec le noir)82. Le caractère brut et au premier degré de ces listes suppose que leurs rédactrices ne parviennent pas à rédiger des rapports véritablement exploitables. À partir de la fin des années 1970, les rapports ciblent davantage leurs descriptions, mais les citations restent parfois très arbitraires. La relative incompétence des professionnels de la mode est-allemands qui ne parviennent pas à maîtriser le flux éphémère de la mode française peut s’expliquer par la lenteur du socialisme dont ils sont issus83.

33Un vêtement fonctionnel peut alors représenter une bonne excuse pour ne pas avoir à saisir la profusion de la mode française. En effet, en théorie ce vêtement est capable à lui seul et durablement de répondre à plusieurs critères et besoins, là où les créateurs parisiens, dans toute leur diversité, peuvent, pour chacun d’entre eux, créer un vêtement dans un laps de temps très court.

C. La mode fonctionnelle

  • 84  BArch DG400/1416, K. Beyer, Reisebericht über den Besuch (note 54), p. 2 et 15.
  • 85  Ibid., p. 16.
  • 86  BArch DG400/1243, Schubert, Reisebericht Teil III über den Besuch der Haute-Couture Schauen in Par (...)
  • 87  BArch DG400/1259, W. Leupold, Reisebericht über den Besuch vom 21.10.-28.10.1977 (note 72), p. 4.

34L’observation d’une mode fonctionnelle dans la mode française s’inscrit dans la même recherche d’une mode exportable. La mode fonctionnelle se définit par plusieurs caractéristiques, comme « pratique », « utile », « simple », « durable », qui neutralisent les changements, mais surtout qui ne demandent pas à l’industrie est-allemande de produire des nouveautés à chaque saison, ou des vêtements trop complexes. Un citoyen est-allemand qui dispose d’un vêtement pratique, utile, simple, et durable n’en demandera théoriquement pas un autre pendant un certain temps. Dans cet esprit, les délégués à Paris notent surtout la durabilité et la capacité de combinaison des vêtements. En 1969 déjà, Karl Beyer remarque que l’habillement apte à la combinaison joue un rôle de premier plan, avec notamment des associations, parfois non conventionnelles, de pantalons84. Il explique ensuite que « toutes les pièces sont proposées individuellement » et que « chacun a la possibilité, selon son goût et ses besoins, de composer sa tenue de loisir »85. Karl-Ernst Schubert conclut suite à un voyage à Paris que l’habillement en RDA doit faire preuve de longévité et doit compter sur sa capacité de combinaison86. Willfriede Leupold note que la mode féminine parisienne en octobre 1977 est intéressante par son habillement de haute qualité, et de longue vie (langlebige Kleidung)87.

  • 88  J. Stitziel, Fashioning Socialism (note 12), p. 49-50.

35Les délégués est-allemands entendent par « fonctionnel » une mode « à combiner » et durable, qui doit satisfaire davantage le consommateur est-allemand. Dans le même temps, elle est censée enrayer la mode bien particulière qui s’est développée en RDA : la mode que les femmes font elles-mêmes. Beaucoup de femmes est-allemandes cousaient leurs propres vêtements et ceux de leur famille pour combler les manques, quantitatifs comme qualitatifs (mauvaise qualité matérielle et mauvaise qualité du design), de l’industrie de confection de RDA. On voit bien la présence de patrons dans chaque magazine Sibylle, qui suppose que les consommateurs devaient produire eux-mêmes ce que l’industrie ne pouvait leur fournir. Les grands modèles créés par l’Institut étaient alors à faire soi-même, à défaut de les trouver dans le commerce88. Ainsi, la citoyenne est-allemande se trouvait en mesure de se créer des vêtements au design amélioré et d’imiter plus ou moins les tendances parisiennes que l’Institut pouvait refléter. Dans ce cadre, elles n’hésitaient pas non plus à « customiser » les modèles fades et uniformes de l’industrie. Selon une étude de marché de 1971, deux tiers des produits achetés étaient retravaillés par la cliente. Les Allemandes de l’Est recyclaient également leurs vieux vêtements en les retouchant, les recoupant, pour leur donner une nouvelle allure, une nouvelle silhouette selon la mode du temps. En 1971, il est attesté que 56 % des Allemandes de RDA disposent au moins d’une robe faite à la maison, 49 % d’entre elles des jupes, et 33 % d’entre elles des chemisiers.

  • 89  Ibid., p. 148-152.

36Depuis 1959, ce phénomène était en pleine croissance, notamment parce qu’il était encouragé par le gouvernement : les femmes étaient incitées à coudre pendant leur temps libre, en tant qu’hobby. Mais une étude de 1968 révéla que 64 % de toutes les femmes cousaient une grande partie de leur garde-robe, mais seulement 4 % d’entre elles décrivaient cette activité comme un loisir. Il s’agissait donc bien d’un besoin, et non d’un divertissement. Par ailleurs, la couture et le tricot à domicile étaient surtout pratiqués par les femmes qui travaillaient et qui avaient de hauts revenus, de la classe moyenne donc, ce qui prouve que l’industrie du vêtement en RDA ne satisfaisait pas du tout leurs exigences89. Ces pratiques étaient estimées comme nuisibles par le gouvernement de RDA car elles détournaient ces femmes de la production et montraient les lacunes de son industrie.

37En conclusion, l’analyse des abondants rapports et directives des voyages d’information des délégations est-allemandes à Paris montre qu’il n’a jamais été question d’établir en RDA une réelle culture de l’habillement. Les trop rares références au concept de Bekleidungskultur, une baisse de la critique de la mode française ainsi que les aspirations, à peine voilées, à des solutions capitalistes sont toutes des preuves que la mode socialiste n’a jamais constitué un réel objectif. Les différents filtres d’observation – féminité, classicisme, fonctionnalité –, qui apparaissent très clairement à la lecture de ces écrits, prouvent que la RDA était incapable de s’aligner sur la mode française. Effectivement, ces filtres se focalisent sur l’intemporalité, l’équilibre, et neutralisaient parfaitement les aspects instables et éphémères de celle-ci. Ainsi, l’adaptation devait se faire sans aucune innovation, ni changement. L’industrie était de toute façon incapable de réaliser des modèles complexes et variés, sur un cycle aussi rapide que celui de la mode occidentale. Les matériaux et les techniques nécessaires étaient souvent indisponibles, inexistants ou trop chers. Par ailleurs, il n’y avait aucun avantage financier pour l’industriel de suivre les lignes de l’Institut, calquées sur les tendances vues à Paris. Finalement, ces filtres qui minimisent au maximum le transfert apparaissent comme un moyen de légitimer l’uniformité de la mode en RDA produite par cette industrie, et d’apaiser les angoisses de la bureaucratie du pays. La pratique du voyage d’information est alors factice.

38Néanmoins, pour effectuer ces voyages afin d’appréhender la mode française, les créateurs de RDA devaient maîtriser les différentes sphères dans lesquels ils s’inscrivaient : la sphère créative bien évidemment, mais surtout celles de l’État, de la bureaucratie, et de l’industrie qui bien souvent les ralentissaient, voire les paralysaient dans leurs travaux. Les résultats fournis par les créateurs est-allemands sont-ils un bon compromis entre ces différentes sphères ? La bureaucratie a-t-elle imposé ses vues sur leurs créations ? Jusqu’à quel point ont-ils pu créer en s’inspirant de la mode parisienne ? Une analyse du vêtement en tant qu’objet et réceptacle des emprunts à la mode vue à Paris reste à faire. Elle pourrait compléter cette étude du transfert de la mode française en RDA.

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Notes

1  Ute Scheffler, Chic im Osten : Mode in der DDR, Leipzig, BuchVerlag für die Frau, 2010, p. 36 ; Thomas Kupfermann, Das große DDR-Modebuch, Berlin, Eulenspiegel Verlag, 2010, p. 26-28 ; Volker Rodekamp (dir.), Malimo Co, Mode in der DDR. Zwischen Traum und Wirklichkeit, Bielefeld, Kerber Verlag, 2011, p. 125-128.

2  Ministerium für Staatssicherheit (MfS) AGMS Nr. 14129/76, Noa (Leutnant), Vorschlag zur Werbung, Verwaltung für Staatssicherheit, Berlin, 20.04.1970, p. 41.

3  Voir ses rapports et les directives correspondantes dans Bundesarchiv Berlin-Lichterfelde (BArch) Bestand DG400/1417 ; BArch DG400/1416 ; BArch DG400/1430 ; Ministerium für Staatssicherheit (MfS) Bestand AGMS Nr. 14129/76, Noa, Vorschlag zur Werbung (note 2), p. 41.

4  BArch DG400/1416 ; BArch DG400/1430 ; BArch DG400/1259 ; BArch DG400/1260 ; BArch DG400/1270 ; BArch DG400/769 ; BArch DG400/1244 ; BArch DG400/1243.

5  « MATTHIAS LEUPOLD – SZENISCHE PHOTOGRAPHIEN 1983-1995 – PHOTO EDITION BERLIN 2018 », mis en ligne le 25.03.2018, www.youtube.com/watch?v=4-c5I2EJu6w, consulté le 09.05.2018.

6  Les numéros des années 1960, 1969, 1972, 1974, 1978, 1982, et 1990 ont été dépouillés à la Dienststelle Bundesarchiv Lichterfelde dans le but d’apporter à cette étude une source davantage « visuelle » étant donné que la mode est aussi, par définition, un ensemble d’images, et d’essayer de mesurer l’impact des voyages d’information.

7  Djurdja Bartlett, Fashion East. The Spectre that Haunted Socialism, Cambridge (MA)/Londres, The MIT Press, 2010, p. 11 et 226.

8  BArch DG400/2347, Lucia Knöchel, Reisebericht zum Besuch des X. Festival de la Mode, Paris/ Frankreich (13.10.-17.10.1989), Modeinstitut der DDR, Berlin, 30.10.1989, p. 1 (Teil II) : « eine Atmosphäre ständiger Kreativität und Innovation, die ausschließlich in Paris anzutreffen ist und fast ohne Unterbrechung ganzjährig Höhepunkte setzt ».

9  Une étude complémentaire a été réalisée sur des rapports de la Stasi (Ministerium für Staatssicherheit), certains écrits par les mêmes délégués envoyés à Paris, comme par exemple : MfS AGMS Nr. 14129/76, Beier, Bericht vom 10.11.1970 über die Dienstreise vom 19.-26. Oktober 1970 nach Paris, Berlin, Verwaltung für Staatssicherheit, 13.11.1970, p. 79-84. Ils sont conservés au BStU (Behörde des Bundesbeauftragte für die Unterlagen des Staatssicherheitsdienstes der ehemaligen Deutschen Demokratischen Republik).

10  Marc de Ferrière Le Vayer, « Des métiers d’art à l’industrie du luxe en France ou la victoire du marketing sur la création », Entreprises et histoire, n° 46 (2007), p. 161, 165, 168, 175-176.

11  Christophe Kleßmann, Arbeiter im Arbeiterstaat DDR. Deutsche Traditionen, sowjetisches Modell, westdeustches Magnetfeld (1945 bis 1971), Bonn, Dietz, 2007, p. 377-379 ; Anna Pelka, « Wie der Pop in den Osten kam. Mode in der DDR und in Polen in den sechziger Jahren », in : Susanne Muhle, Hedwig Richter, Juliane Schütterle (dir.), Die DDR im Blick. Ein zeithistorisches Lesebuch, Berlin, Metropol, 2008, p. 124.

12  Judd Stitziel, Fashioning Socialism : Clothing, Politics and Consumer Culture in East Germany, New York, Berg, 2005, p. 140-141 ; Günter Höhne, Erika Penti, Sher Bebo, Klassiker des DDR-Designs, Berlin, Schwarzkopf und Schwarzkopf, 2001, p. 13.

13  Larissa Zakharova, « L’Union soviétique et la mode française : histoire des contacts et des transferts culturels », in : Dominique Veillon, Michèle Ruffat (dir.), La mode des sixties, Paris, Autrement, 2007, p. 40, 42, 45, 47-48, 50 et 52-53.

14  Ce sujet n’a été mentionné jusqu’à présent que par les chercheurs du domaine, comme Judd Stitziel, Anna Pelka ou Bartlett Djurdja, et les rapports, principale source de cette étude, constituent une source encore inexploitée dans l’historiographie actuelle. L’intérêt pour le sujet est pourtant réel comme le prouve la récente exposition Sibylle, premier magazine de mode de RDA, à Rostock puis à Dresde.

15  BArch DG400/1707, Auswertung der Entwicklung der Mode im kapitalistischen Ausland, speziell der Haute-Couture in Frankreich für die Saison Herbst/Winter 1968/69. Referat für Fachtagungen, Presseveranstaltung und Schulung. Schlußfolgerung, Berlin, 31.10.1968, p. 1 : « Das kommt innerhalb der Tätigkeit im Rahmen der Ständigen Arbeitsgruppe für Fragen der Bekleidungskultur in konzentrierter Form zum Ausdruck. »

16  Ibid., p. 8 : « eine überaus kultivierte und überfeinerte Mode ». Le mot « überfeinert » n’a pas de traduction en français. Il fait référence à quelque chose qui est trop « fein », donc sur (über) ou trop raffiné, ou fin ou sophistiqué.

17  Ibid., p. 13 : « Die Couturiers, vor allem die jüngeren unter ihnen, haben sich von den alten Traditionen der Haute-Couture gelöst. Die Entwicklung geht mehr und mehr zu einer kultivierten Modellkonfektion. »

18  BArch DG400/1243, Willfriede Leupold, Reisebericht Teil II über den Besuch der Haute-Couture-Schauen in Paris vom 27.1.-31.1.1980, Modeinstitut der DDR Bereich Modeforschung, 26.02.1980, p. 2 : « Die einzelnen Couture-Häuser zeigten sehr unterschiedliche, individuelle Kollektionen, die sowohl kultivierte, tragbare Mode ohne Übertreibungen als auch neue Experimente ungewöhnlicher Formen enthielten. »

19  BArch DG400/2347, Elke Giese, Reisebericht zum Besuch des Internationalen Herrenmodesalon SEHM, Paris/Frankreich (2.2.89-6.2.89) – Teil I, Teil II, Teil III (Maßnahmeplan – fehlend), Berlin, Modeinstitut der DDR, 15.02.1989, p. 8 : « höchste Kultiviertheit in der Zusammenstellung der Kleidung […] die jetzige westeuropäische Männermode […] eine ästhetisch hochentwickelte Kultiviertheit für die uns vorzustellen jegliche Bilder und kulturelle Erfahrungen fehlen ».

20  BArch DG400/1707, Information über die internationale Entwicklung der Damenoberbekleidung, 02/1969, p. 1 : « Gestaltung einer modernen, zeitgemäßen Bekleidung für unsere Menschen » ; « Die Ergebnisse der Tagung waren ein Baustein zur Schaffung eines der gesellschaftlichen Entwicklungen entsprechenden modernen Bekleidungsstils in unseren Ländern ».

21  BArch DG400/1707, Auswertung der Entwicklung der Mode im kapitalistischen Ausland (note 15), p. 8 : « Im Hinblick auf die Versorgung unserer Bevölkerung ist es Aufgabe der Modefachleute, durch eine zeitnahe, bedarfsgerechte Bekleidung, die den progressiven Bedürfnissen der Mehrheit der Bevölkerung entspricht, zur Entwicklung eines modernen, aktuellen Bekleidungsstils beizutragen. »

22  BArch DG400/1259, Elisabeth Reinke, Reisebericht über den Besuch der « Semaine de la maroquinerie et articles de voyage » Paris vom 8.6.-13.6.77, Berlin, Modeinstitut der DDR Abt. Modeforschung, 16.06.1977, p. 2 et 5.

23  Nadège Ragaru, Antonella Capelle-Pogacean (dir.), Vie quotidienne et pouvoir sous le communisme. Consommer à l’Est, Paris, Éditions Karthala, 2010, p. 32.

24  D. Bartlett, Fashion East (note 7), p. 220-221.

25  J. Stitziel, Fashioning Socialism (note 12), p. 46-47.

26  BArch DG400/1707, Auswertung der Entwicklung der Mode im kapitalistischen Ausland (note 15), p. 1 : « hochentwickelten Industriestaaten des NSW […] des manipulierten Marktes und dient dem maximalen Profitstreben der Industrie im imperialistischen System ».

27  Ibid. p. 1 : « Daneben ist es auch notwendig, die Entwicklung der Mode in den Ländern des NSW laufend zu verfolgen und kritisch auszuwerten. »

28  BArch DG400/1707, Information über die internationale Entwicklung der Damenoberbekleidung (note 20), p. 4 ; BArch DG400/1416, Lore Jörn, Annemarie Kny, Reisebericht Teil II zum Besuch der Haute-Couture-Schauen und des 9. Europäischen Salons für Herrenbekleidung in Paris (3.2.-12.2.1969), Berlin, Deutsches Modeinstitut, 1969, p. 4 : « Das Suchen nach einem neuen Ausdruck in der klassischen sportlichen Eleganz führte […] zum Teil zu Überfeinerungen, die sich in den Proportionen, in der hin und wieder morbiden Farbigkeit und in dem Zusammenspiel von Trägerin und Modell wiederspiegeln und bis zum Ästhetizismus und Snobismus getrieben waren. »

29  BArch DG400/1707, Auswertung der Entwicklung der Mode im kapitalistischen Ausland (note 15), p. 5 : « Die überspitzte Exklusivität hat für unsere Modeentwicklung keine Bedeutung. »

30  T. Kupfermann, Das große DDR-Modebuch (note 1), p. 28.

31  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 5.

32  D. Bartlett, Fashion East (note 7), p. 8.

33  Ibid., p. 223.

34  Ibid., p. 172 : « We just cannot keep up with running behind », citation extraite de Walter Ulbricht, « Über Standardisierung und Mode », Neues Deutschland, 13.08.1959.

35  BArch DG400/1243, Willfriede Leupold, Reisebericht Teil II über den Besuch der Haute-Couture Schauen in Paris vom 27.7.-31.7.1980 mit 9 Modezeichnungen, Berlin, Modeinstitut der DDR, 12.08.1980, p. 6 : « Das Sortiment der Festkleider wurde bereits unter Pkt. 2.4. beschrieben und hat in dieser aufwendigen, kostümhaften Gestaltung für die DDR keine Bedeutung. »

36  D. Bartlett, Fashion East (note 7), p. 213.

37  Ragaru/Capelle-Pogacean (dir.), Vie quotidienne et pouvoir sous le communisme (note 23), p. 29.

38  BArch DG400/2347, Institutsdirektor Pr. Dr. sc. Hartmann, Reisebericht (in 3 Teilen) zum Besuch der Prêt-à-Porter des Französischen Modeinstituts und der Firma Carlin International vom 2.2.1989 bis 6.2.1989, Berlin, Modeinstitut der DDR, 15.02.1989, p. 8 : « eine innovative, ständig zu ergänzende komplexe Kollektion mit vielen kaufanreisenden aufeinander abgestimmten Neuheiten in der Farbe, Silhouette und vor allem dem Stoffeinsatz sowie den sorgfältigen und qualitativ hochwertigen Detailausführungen und Accessoires ».

39  Günter Höhne, Das große Lexikon : DDR-Design, Cologne, Komet, 2008, p. 18.

40  BArch DG400/2347, L. Knöchel, Reisebericht zum Besuch (note 8), p. 2.

41  BArch DG400/1417, Karl-Ernst Schubert, Teil II zum Reisebericht über den Besuch des Internationalen Salons für Damenkonfektion in Paris (19.4.-27.4.1968), Berlin, Deutsches Modeinstitut, 14.06.1968, p. 13 : « Die damit erzielte Vielfalt im Charakter des Angebotes läßt die Schlußfolgerung hinsichtlich des modisch zu undifferenzierten DDR-Binnenangebotes zu, daß die Betriebe der DDR stärker und zielstrebiger eine betriebsindividuelle Handschrift in der Gestaltung ihrer Kollektionen anstreben müssen. Die Betriebe müssen sich eine klarere Vorstellung von „ihrer Kundin“ erarbeiten, ein Programm für ihren speziellen Kundenkreis, ohne dabei aktuelle, gemeinsame Gestaltungstendenzen zu ignorieren. »

42  M. de Ferrière Le Vayer, « Des métiers d’art à l’industrie du luxe » (note 10), p. 165 et 175-176.

43  François Baudot, La mode du siècle, Paris, Éd. Assouline, 2006, p. 170-173, 234-238 et 276-280.

44  BArch DG400/2347, L. Knöchel, Reisebericht zum Besuch (note 8), p. 17.

45  Ibid., p. 18 : « Die kreativen Potenzen der Gestalter sind zu fördern, persönliche Handschriften zu profilieren. Analog zu den progressiven Kollektionen der jungen Pariser Createure und etablierten Stilisten sind individuelle geprägte Designerkollektionen zu experimentieren. »

46  J. Stitziel, Fashioning Socialism (note 12), p. 45-46.

47  Ibid., p. 44-45.

48  Ibid., p. 94-96 ; pour le détail voir p. 94-118.

49  BArch DG400/1243, Direktive zur Informationsreise nach Paris vom 18.10.-22.10.1980 zum Besuch des Salons International du Prêt-à-Porter Féminin (Internationaler Salon für Damenkonfektion), Berlin, Modeinstitut der DDR, 15.09.80, p. 2; BArch DG400/2347, L. Knöchel, Reisebericht zum Besuch (note 8), p. 1.

50  BArch DG400/2347, L. Knöchel, Reisebericht zum Besuch (note 8), p. 5 : « Die Mode wie ein Spiel, eine Leidenschaft, ein Fest – Mode, die Spaß macht. »

51  J. Stitziel, Fashioning Socialism (note 12), p. 42-43.

52  G. Höhne, Das große Lexikon : DDR-Design (note 39), p. 18.

53  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 36-37 ; BArch DG400/1707, A. Kny, Information für leitende Kader, p. 16.

54  BArch DG400/1416, Karl Beyer, Reisebericht Teil II über den Besuch von Firmen für textile Neuheiten (14.4.-20.4.1969), Berlin, 1969, p. 24.

55  BArch DG400/2347, Elke Giese, Reisebericht zum Besuch des Internationalen Herrenmodesalon SEHM (note 19), p. 9 : « Mode ist scheinbar wieder zum Statussymbol geworden, man will mit ihr zeigen, welchen Platz man in der Gesellschaft einnimmt. »

56  Comme par exemple BArch DG400/769, Erika Bläser, Dienstreisebericht zu dem Besuch der « Mode-Woche » München (13.-17.4.1977), Berlin, Ministerrat der DDR Amt für industrielle Formgestaltung, 20.05.1977, p. 12.

57  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 9.

58  BArch DG400/1265, Gudrun Specht, Reisebericht Teil II über die Ergebnisse nach dem Besuch der 36. Veranstaltung des Salons Prêt-à-Porter Féminin Paris, Frankreich (20.10.-25.10.1978), Berlin, Modeinstitut der DDR, 04.12.1978, p. 5 : « Folgende neue Tendenzen sind erkennbar : neues Leitbild der femininen Frau, – Rückkehr zu Weiblichkeit, Chic und Eleganz, den den Körper und seine Formen in den Vordergrund stellen ; ein sehr femininer Stil, schlank, körpernah, mit klar betonter Taille, z. T. unterstrichen […] mit Farben und Accessoires […] aber auch mit Varianten der jungen oder klassischen Eleganz. »

59  BArch DG400/1243, W. Leupold, Reisebericht über den Besuch vom 27.1.-31.1.1980 (note 18), p. 2.

60  D. Bartlett, Fashion East, p. 190 (note 7).

61  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 4.

62  BArch DG400/1243, Direktive zur Informationsreise nach Paris vom 27.1.-31.1.1980 zur Haute Couture, Berlin, Modeinstitut der DDR, 21.12.1979, p. 1.

63  Chantal Metzger (dir.), La République démocratique allemande. La vitrine du socialisme et l’envers du miroir (1949-1989-2009), Bruxelles, P.I.E. Peter Lang, 2010, p. 154.

64  J. Stitziel, Fashioning Socialism (note 12), p. 59.

65  Konrad Jarausch, Hannes Siegrist, Amerikanisierung und Sowjetisierung in Deutschland 1945-1970, Francfort-sur-le-Main, Campus, 1997, p. 252-254.

66  Ibid., p. 256-257 et 261.

67  Frédéric Monneyron, La mode et ses enjeux, Paris, Klincksieck, 2005, p. 103.

68  Anna Pelka, « Zum Verhältnis von Mode, Ideologie und Nachfrage in kommunistischen Diktaturen », Aus Politik und Zeitgeschichte, n° 1-3 (2014), p. 24-31, mis en ligne le 23.12.2014, http://www.bpb.de/apuz/198382/zum-verhaeltnis-von-mode-ideologie-und-nachfrage-in-kommunistischen-diktaturen?p=all (sans pagination), consulté le 06.05.2018.

69  BArch DG400/2347, L. Knöchel, Reisebericht zum Besuch (note 8), p. 5.

70  BArch DG400/1259, Direktive zur Informationsreise nach Paris vom 21.10.-26.10.77 zum Besuch des Salons International du Prêt-à-Porter Féminin (Internationaler Salon für Damenkonfektion), Berlin, Modeinstitut der DDR, 23.09.1977, p. 2.

71  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 4 : « Das Suchen nach einem neuen Ausdruck in der klassischen sportlichen Eleganz führte neben vielen noch beispielhaften Lösungen. »

72  BArch DG400/1259, Willfriede Leupold, Reisebericht Teil II über den Besuch des Salons International du Prêt-à-Porter Féminin, Paris, vom 21.10.-28.10.1977, Berlin, Modeinstitut der DDR Abt. Modeforschung, 01.12.1977, p. 3-4 : « eine elegante, weiche Klassik ».

73  Ibid., p. 6 : « bei Bekleidung im klassischen Stil, zeigt eine geringfügige Verkürzung ».

74  BArch DG400/1265, Vera Schwenteck, Schlußfolgerung und Maßnahmen für den VHB Exquisit, Berlin, Modeinstitut der DDR, 1978, p. 1 : « Weiterentwicklung und Kultivierung der Klassikmode für DOB und HOB unter besonderer Herausarbeitung eines hohen Modeinhaltes und hochwertige Erzeugnisqualität. »

75  BArch DG400/1259, W. Leupold, Reisebericht über den Besuch vom 21.10.-28.10.1977 (note 72), p. 3-4 : « eine elegante, weiche Klassik ».

76  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 22 : « Eine selbstverständliche, sehr elegant aufgefaßte Sportlichkeit bestimmte den Stil der auf dieser Fachmesse ausgestellten HOB » et p. 24-25.

77  BArch DG400/1259, E. Reinke, Reisebericht über den Besuch vom 8.6.-13.6.77 (note 22), p. 3-4.

78  D. Bartlett, Fashion East (note 7), p. 201-202.

79  Ibid., p. 174.

80  Katja Selbmann, « 10 Jahre Deutsches Modeinstitut : 10 Jahre Dienst an der Schönheit », Sibylle, 5 (1962), p. 9.

81  D. Bartlett, Fashion East (note 7), p. 212.

82  BArch DG400/1416, Jörn/Kny, Reisebericht zum Besuch (note 28), p. 5-6.

83  D. Bartlett, Fashion East, p. 175 (note 7).

84  BArch DG400/1416, K. Beyer, Reisebericht über den Besuch (note 54), p. 2 et 15.

85  Ibid., p. 16.

86  BArch DG400/1243, Schubert, Reisebericht Teil III über den Besuch der Haute-Couture Schauen in Paris vom 27.7.-31.7.1980 (Schlußfolgerung und Maßnahmen), Berlin, Modeinstitut der DDR, 12.08.1980, p. 1.

87  BArch DG400/1259, W. Leupold, Reisebericht über den Besuch vom 21.10.-28.10.1977 (note 72), p. 4.

88  J. Stitziel, Fashioning Socialism (note 12), p. 49-50.

89  Ibid., p. 148-152.

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Pour citer cet article

Référence papier

Jonas Kachelhoffer, « La mode en RDA, une mode française ?  »Revue d’Allemagne et des pays de langue allemande, 51-1 | 2019, 227-245.

Référence électronique

Jonas Kachelhoffer, « La mode en RDA, une mode française ?  »Revue d’Allemagne et des pays de langue allemande [En ligne], 51-1 | 2019, mis en ligne le 02 juillet 2020, consulté le 24 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/allemagne/1628 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/allemagne.1628

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Auteur

Jonas Kachelhoffer

Assistant Patrimoine chez Givenchy, Paris, et étudiant de Master 2 « Mode et industries créatives » à l’École Duperré et à la Sorbonne-Nouvelle Paris 3. Cet article est tiré d’un mémoire de master d’histoire contemporaine dirigé par Ségolène Plyer et soutenu le 13 septembre 2018 à l’Université de Strasbourg.

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