Date de l'opération : 1992 - 1998 (FP)
Inventeur(s) : Laubenheimer Fanette (CNRS)
1La poursuite des fouilles du complexe de potiers gallo-romains a permis d'explorer en quasi-totalité le secteur artisanal et celui de l'habitat nord-est (Fig. n°1 : Plan général des fouilles). Un musée construit sur le site même a été inauguré en 1992. Par son architecture originale, il protège la plus grande partie des structures de cuisson, visibles depuis des passerelles qui les surplombent. Un colloque international intitulé 20 ans de recherches à Sallèles-d'Aude, le monde des potiers gallo-romains, organisé à Sallèles-d'Aude en 1996, a été l'occasion de présenter, notamment, des synthèses sur plusieurs travaux en cours : l'évolution globale du site et sa chronologie, certaines de ses productions, l'architecture du quartier artisanal, l'environnement, et enfin une modélisation de son fonctionnement (Laubenheimer, Fanette. 2001.). Par ailleurs, en 1995, est parue l'étude des sépultures de très jeunes enfants découvertes dans l'atelier (Duday, Henri ; Laubenheimer, Fanette ; Tillier, Anna-Marie. 1996.).
2Le quartier d'habitation nord-est se développe à partir d'une place avec un puits d'où part une large rue bordée au nord et au sud d'une rangée de maisons à auvent. La fouille, dans le prolongement de la branche sud, a permis la découverte de trois maisons supplémentaires et d'un passage (Fig. n°2 : Habitat nord-est, branche sud, fouille des nouvelles maisons). Ainsi, l'îlot sud, mieux conservé que l'îlot nord, comporte-t-il six constructions juxtaposées, édifiées d'un seul élan sur 35 m de long, il est mal conservé au-delà vers l'ouest. Quatre phases d'occupation ont été déterminées qui accompagnent les diverses étapes de la vie de l'atelier.
3Dans le secteur est de la zone artisanale, réservé à l'exploitation de l'argile, un nouveau puits d'extraction (40006) a été exploré (2,80 m de diamètre). L'accès se fait depuis la surface par un passage en pente de 2 m de long qui débouche à l'aplomb du puits, profond de plus de 4 m, comme ses voisins (Fig. n°3 : Puits d’extraction d’argile (40006) en cours de fouille). Le comblement, riche en matériaux de construction, amphores Gauloise 4 et diverses céramiques importées, se place dans le courant du IIIe s., comme celui des puits voisins. Plusieurs fosses, utilisées sans doute pour un premier stockage de l'argile, sont aménagées près du puits.
4Dans la partie la plus ancienne de l'atelier, quartier nord de la zone artisanale, durant la phase 1A, des environs de -10 à +10, ont été mis en évidence, en relation avec le four 1, l'empreinte d'un tour de potier (1006) et un bassin de stockage d'argile rectangulaire (3,9 m sur 2,5 m) bordé de tegulae. Appartenant à la phase 2 (aux alentours de 20 à 30), deux nouveaux bassins d'argile (1016 et 21032) ont été découverts (5 m x ? et 3,7 m x 3 m), toujours construits sur le même principe (Fig. n°4 : Bassin de stockage d’argile 21032 de la phase 2), au voisinage des bâtiments II et III. La première époque d'utilisation de ce dernier a été explorée (phase 2) avec son sol en terre battue sous lequel une sépulture de très jeune enfant (Fig. n°5 : Sépulture de jeune enfant contre le mur sud du bâtiment III) a été déposée contre le mur sud, dans une fosse recouverte d'une tuile (les inhumations déjà connues se localisaient dans la pièce nord du même édifice, durant la phase 3B). À la même époque, près de la porte d'entrée, un chien a été enterré, soigneusement dans une fosse, couché sur le flan, les pattes repliées (Fig. n°6 : Sépulture de chien dans le bâtiment III). Durant la phase 3B, des environs de 40 à 50-60, les niveaux de circulation sont rehaussés dans tout le secteur. Une longue construction à auvent est édifiée à l'est du bâtiment II, au sud de laquelle on creuse un puits à eau. Profond de 4,80 m, il est parementé en pierres, sur deux épaisseurs, l'ouverture est garnie de la partie supérieure d'un dolium timbré D. EP in planta pedis (Fig. n°7 : Haut de dolium timbré D. EP, réutilisé dans l’aménagement de l’ouverture d’un puits). Comme la plus grande partie du quartier artisanal ancien, le puits sera abandonné au cours de la phase 4A (des années 50-60 aux années 70-100). On note dans son comblement un lot homogène de tegulae déformées et un as augustéen de Lyon frappé entre 7 av. J.-C. et 3 av. J.-C. C'est au cours de cette même phase que sont comblés les bassins d'argile, dont le plus grand (1016) fournit un dépotoir exceptionnel de céramiques communes du Ier s., rejetées au moment du défournement (Fig. n°8 : Dépotoir de céramiques communes du I er s. ).
5Dans la partie sud de l'atelier, le très grand bâtiment IX, inaugurant une phase d'activités nouvelles (aux environs des années 30 à 40, phase 3A) avec des fours de très grande taille, a été fouillé dans sa totalité (Fig. n°9 : Vue du bâtiment IX). Il comporte, dans un premier temps, au centre, deux fours jumeaux dont la sole mesure 5,40 m de diamètre, et deux galeries latérales qui sont consacrées au tournage : trois empreintes de tours (Fig. n°1 : Plan général des fouilles0) et trois bassins d'argile de petite taille ont été découverts (Fig. n°1 : Plan général des fouilles1). L'ensemble fonctionne ainsi jusqu'à la fin de la phase 4A vers 70-100 de notre ère. Des transformations interviennent au cours de la phase 4B, avec l'abandon du premier grand four 12 et la construction d'un petit four circulaire 15 (diamètre de la sole 2,2 m) dans la fosse d'accès, tandis que, dans la galerie, un four de taille moyenne (numéro 9, à sole rectangulaire de 3,2 m x 3,4 m) est édifié. Au cours de la phase 5 (des années 150-200 aux environs de 300), ces deux derniers fours sont abandonnés, comme le four 13 qui fournit dans son comblement une intéressante série de cruches en céramique commune d'un répertoire nouveau (Fig. n°1 : Plan général des fouilles2). Un dernier four [numéro 14, (Fig. n°1 : Plan général des fouilles3)] est alors construit mordant sur la galerie sud et s'ouvrant dans la fosse du four 13. Il est de taille moyenne avec une sole rectangulaire (3 m x 2,57 m).
6Entre la partie nord et la partie sud de l'atelier, au cours de la phase 4A (des années 50-60 aux années 70-100), une très vaste galerie (X), en forme de L, asymétrique, d'une ampleur exceptionnelle puisqu'elle se développe sur plus de 100 m de long, est construite pour le tournage. Elle est couverte d'un toit à deux pentes soutenu en son centre par une ligne de poteaux dont la base a été retrouvée. L'empreinte de dix-huit tours de potiers répartis le long des murs a été relevée [ (Fig. n°1 : Plan général des fouilles3) ou (Fig. n°1 : Plan général des fouilles4)]. Certains ont été reconstruits plusieurs fois au même endroit, mais on peut finalement compter quatorze emplacements différents qui ont pu fonctionner ensemble. Par ailleurs, la galerie est équipée de trois bassins de stockage d'argile parmi les plus grands (jusqu'à 4,5 m de longueur). Cet édifice sera utilisé jusqu'à la fin de l'activité de l'atelier (fin du IIIe s.), et connaîtra divers aménagements, notamment, durant la phase 5, au IIIe s. : la construction d'un four de taille moyenne à sole rectangulaire (2,6 m x 2,8 m) à l'extrémité de sa branche est (numéro 8) et d'un autre très petit (numéro 17) dans la branche ouest à sole circulaire (1,3 m de diamètre).
7Le quartier nord de l'atelier connaît une nouvelle occupation au cours de la phase 5, avec la construction, au-dessus des anciens édifices arasés du vaste bâtiment (VI) à plan carré, dont nous avons fini l'exploration. En son centre, le four 7 à sole rectangulaire (4,7 m x 3,4 m) est jouxté par un four de très petite taille (numéro 16, à sole rectangulaire 1 m x 0,6 m) qui s'appuie contre sa façade ouest [ (Fig. n°1 : Plan général des fouilles5) a et b].
8Enfin des aménagements tardifs très arasés sont réalisés dans la zone la plus orientale : fondations dégradées d'un bâtiment avec canalisation extérieure (Fig. n°1 : Plan général des fouilles6).
9Des analyses archéomagnétiques ont été réalisées sur dix fours par Philippe Lanos, et Yannick Garcia (UMR 153, « Civilisations atlantiques et Archéosciences », université Rennes 1) qui proposent une datation de la dernière cuisson. Les résultats confrontés aux données archéologiques et architecturales ont contribué à l'établissement des phases chronologiques.
10L'analyse de près de cinq mille deux cents charbons de bois provenant des couches d'utilisation de dix fours appartenant aux diverses phases de l'atelier a été réalisée par Lucie Chabal, UPRESA 5059 du CNRS « Paléobotanique, Environnement et Archéologie » institut de Botanique à Montpellier. Elle a permis de tracer un panorama des bois utilisés et de leur évolution à travers le temps.
11L'analyse de la faune (mille soixante-deux fragments osseux) a été réalisée par Philippe Columeau, UMR 6573 du CNRS.
12Le reste du mobilier est en cours d'étude, en vue d'une publication globale de la fouille.