Merri, M. (Ed.) (2007). Activité humaine et conceptualisation. Questions à Gérard Vergnaud
Merri, M. (Ed.) (2007). Activité humaine et conceptualisation. Questions à Gérard Vergnaud. Toulouse : Presses Universitaires du Mirail
Texte intégral
1Cet ouvrage collectif est issu d’un colloque organisé pour rendre hommage à Gérard Vergnaud. Pour les organisateurs de ce colloque, « il s’agissait donc à la fois de discuter des éléments centraux de cette œuvre et des aspects qui mériteraient également d’être repris et développés par notre communauté de recherche » (p. 7), c’est-à-dire, l’Association pour la Recherche sur le Développement des Compétences (Ardeco). Ce gros ouvrage comporte une trentaine de contributions et y est indexé un CD qui en comporte autant. Ce dernier rédigé par des auteurs qui ont eu connaissance des textes publiés dans le volume
2Cet ensemble constitue donc une somme importante de travaux présentés en référence à l’œuvre de Vergnaud. Ces contributions sont de types très divers qui débattent de problèmes théoriques soulevés dans cette œuvre ou exposent des recherches réalisées dans les perspectives théoriques développées par cet auteur. Ce qui en fait l’unité c’est justement cette référence à ce dernier dont il fait apparaître la richesse et la variété de l’œuvre en même temps qu’il l’éclaire en la prolongeant et en en discutant certains aspects. La présente analyse ne pourra qu’évoquer quelques uns des thèmes abordés avec de brefs commentaires.
3Le livre s’ouvre par une préface d’Annick Weil-Barais, Directeur de recherche en sciences de l’éducation à l’Université Paris V. Elle rappelle quelques traits généraux de la carrière de l’intéressé, la fécondité et le rayonnement de son œuvre. Elle souligne notamment l’intérêt qu’il a accordé aux processus de conceptualisation, ce qui l’a conduit à être l’un des pionniers de la fondation de la didactique des disciplines en France et l’inspirateur des recherches en didactique professionnelle.
4Dans son texte introductif à l’ouvrage intitulé « Héritages », Vergnaud analyse les influences qui ont marqué son cheminement intellectuel. Il le fait à partir de quelques auteurs privilégiés, notamment, Piaget, Trathenbrot, Saussure et Vygotski. On y voit ainsi apparaître les grands thèmes qui seront discutés ensuite dans le livre, soit qu’ils y soient illustrés ou développés, soit qu’ils fassent l’objet de commentaires critiques. Parmi ces thèmes, mentionnons : - le concept de schème, essentiel pour comprendre l’adaptation et le développement ; - « la conceptualisation comme identification des objets du monde et de leurs propriétés et relations » (p. 30) ; - le concept d’invariant opératoire avec la distinction entre théorème en acte (proposition) et concept en acte (prédicat) (p. 30) ; - la didactique des mathématiques ; - schème et situation comme « couple inséparable » (p. 33) ; - sens et signification. La suite de l’ouvrage comporte quatre parties centrées sur des thèmes majeurs de l’œuvre de Vergnaud.
5La première partie, « Rien de plus pratique qu’une bonne théorie, mais… » rassemble des textes d’auteurs qui ont une connaissance souvent approfondie des œuvres de Vergnaud avec lequel ils ont eu de nombreux échanges. Leurs commentaires en font ressortir des points critiques, forts et faibles. La didactique des mathématiques tient une place importante et on y trouve aussi des textes particulièrement intéressants de Pastré et Rabardel sur la didactique professionnelle et sa spécificité par rapport à la didactique disciplinaire. Un article de Goigoux répond à la question du titre du thème avec « si, deux ! » et présente une analyse didactique de l’activité de l’enseignant.
6La deuxième partie, « Questions, alternatives et compléments » inclut plusieurs chapitres centrés sur les schèmes qui approfondissent la notion et la situent dans différents cadres théoriques, avec des aspects critiques sur la conception de Vergnaud. Citons, par exemple, l’article de Richard (Schèmes, procédures et organisation), celui de Bronckart qui situe la position de Vergnaud par rapport à celles de Piaget et de Vygotski et discute du statut des schèmes. L’article de Rogalski qui débat de l’architecture des schèmes, de leur histoire et de leur place dans les compétences. Clot titre sa contribution « Le schème, les invariants et les variations ». Mayen traite de la théorie des schèmes et des médiations.
7La troisième partie, « Plus loin sur la conceptualisation » présente des points de vue et des réflexions sur les perspectives théoriques de Vergnaud avec des suggestions pour des exploitations et prolongements ultérieurs. Marianne Lacomblez confronte les points de vue de Faverge et de Vergnaud sur le thème de la variabilité et des invariants dans le développement de l’activité.
8La dernière partie, « Individu et société » rassemble des textes dans lesquels leurs auteurs montrent comment les idées de Vergnaud ont inspiré et imprégné leurs recherches. On voit ainsi cités des champs variés : situations scolaires, didactique des mathématiques et des sciences, analyse des compétences professionnelles, démocratisation des apprentissages.
9Dans une dernière partie, Vergnaud répond à des questions qui lui ont été posées dans certaines des communications précédentes. Nous ne reprendrons ici que ses commentaires concernant le thème qui nous intéresse plus directement ici, celui de la conceptualisation. Cette définition, tout d’abord : « j’entends par conceptualisation l’identification des objets du monde, de leurs propriétés, relations et transformations. Cette identification résulte d’une perception directe ou quasi directe, ou d’une construction. Cette construction peut être personnelle, elle est aussi culturelle » (p. 342) : Piaget privilégiant la première, Vygotski, la seconde. Vergnaud résume provisoirement son point de vue de la manière suivante : « s’il faut étudier la conceptualisation pour comprendre ce qu’est un concept, c’est parce que la connaissance est adaptation et que c’est un processus avant d’être un produit. La clé de voûte théorique, dans l’analyse de ce processus, c’est le couple situation/schème : couple dialectique s’il en est, parce qu’on n’a pas l’un sans l’autre » (p. 344). Les autres thèmes abordés répondent à des problèmes plus théoriques et éclairent quelques points critiques.
10Dans les dernières pages de ses réponses, Vergnaud présente le contenu du CD-Rom joint. Sorte de complément au livre, il ne sera pas commenté ici. Il comporte des communications qui sont regroupées autour de quatre thèmes : 1) Schèmes et situations, 2) Champs conceptuels et champs professionnels, 3) L’individuel, le collectif et le culturel dans la conceptualisation, 4) Connaissances implicites, explicites et perception : regards croisés.
11L’abondance des contributions rassemblées dans cet ouvrage montre que les conceptions de Vergnaud ont influencé, sous des formes diverses, de multiples recherches menées dans des champs variés. La didactique tient une grande place dans cette œuvre. L’ouverture de celle-ci à la didactique professionnelle qui amène à prendre en compte l’analyse de l’activité en situation de travail a fait apparaître des rapports avec les perspectives de recherche existant en ergonomie. Il en est résulté un enrichissement réciproque de ces deux grands domaines, didactique professionnelle et ergonomie, que Pastré a particulièrement bien souligné et illustré en montrant le rôle essentiel joué par Vergnaud dans cette histoire.
12Ce livre peut intéresser tous ceux qui ont à faire avec l’activité et son analyse. Il montrera aux ergonomes le profit qu’ils peuvent tirer d’une meilleure connaissance des recherches en didactique professionnelle.
Pour citer cet article
Référence électronique
Jacques Leplat, « Merri, M. (Ed.) (2007). Activité humaine et conceptualisation. Questions à Gérard Vergnaud », Activités [En ligne], 5-2 | octobre 2008, mis en ligne le 15 octobre 2008, consulté le 25 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/activites/2057 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/activites.2057
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