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Stratégies rhétoriques pour contrer les discours conspirationnistes anti-vax (Covid-19) : la campagne #ThinkBeforeSharing

Roberta Martina Zagarella et Marco Annoni
Cet article est une traduction de :
Rhetorical Strategies of Counteracting Conspiracy-based Dissent on COVID-19 Vaccines: the #ThinkBeforeSharing Institutional Campaign [en]

Résumé

Le but de cet article est d’explorer la manière dont les institutions peuvent contrer les théories du complot en utilisant des ressources discursives appropriées. Nous analysons, en utilisant une approche rhétorique, la première campagne d'information européenne lancée en 2020 pour lutter contre les théories du complot sur les vaccins Covid-19. Sur cette base, nous proposons une série de recommandations pratiques pour aider les institutions à contrer les théories du complot par des campagnes d’information.

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Texte intégral

Introduction

1La lutte contre les théories du complot a pris une importance toute particulière pendant la crise de la Covid-19. L’effort de recherche sans précédent d’un vaccin efficace contre ce virus s’est accompagné d’un déluge de fausses informations – également appelé « infodémie » – et d’une série croissante de théories du complot (Ball et Maxmen 2020, Bertin et al. 2020, EU DisinfoLab 2020). Dans ce contexte, cet article se structure autour de deux questions de recherche : 1) Comment les institutions peuvent-elles gagner la confiance des citoyens lors d’une crise telle qu’une pandémie ? 2) Quels éléments discursifs devraient faire partie d’une campagne institutionnelle contre les théories du complot ?

  • 1 Cet article a été rédigé dans le cadre d’un projet mené par le CNR (Consiglio Nazionale delle Ricer (...)

2Pour répondre à ces interrogations, nous adoptons une méthodologie rhétorique-argumentative qui a déjà servi de cadre d’analyse à l’exploration d’autres discours conspirationnistes dans le domaine de la santé1. Comme nous l’avons déjà expliqué ailleurs (Zagarella et Annoni 2019, v. aussi Zagarella 2015), cette approche s’inspire de la pensée philosophique d’Aristote et des nouvelles théories de la rhétorique et de l’argumentation ; elle étudie les discours persuasifs en contexte. Sa méthodologie s’appuie sur les principes de l’« analyse argumentative », qui examine l’utilisation du langage dans son contexte pour décrire et expliquer comment le discours oral et écrit a des effets tangibles sur l’auditoire (Amossy 2021). Cette posture est adoptée dans de nombreux domaines de recherche afin de comprendre la logique des échanges discursifs et d’examiner l’interaction mutuelle entre l’orateur et l’auditoire, interaction qui s’effectue grâce à la mobilisation de certaines ressources verbales dans des circonstances spécifiques (Amossy et Koren 2009).

3Cet article applique cette approche à l’analyse de la première campagne européenne visant à contrer les théories du complot liées aux vaccins contre la Covid-19. Il s’agit de l’initiative « #ThinkBeforeSharing », lancée en 2020. Cette campagne est le résultat d’efforts conjoints de la Commission européenne, de l’UNESCO, de Twitter (désormais appelé « X ») et du Congrès juif mondial. Le principal résultat de cette initiative a été la création et mise en circulation d’une série de dix infographies éducatives conçues pour aider les citoyens à identifier, démystifier, réagir et signaler les théories du complot sur les vaccins Covid-19.

4Afin d’étudier cette campagne, le présent article est organisé comme suit. Tout d’abord, nous expliquons pourquoi nous pensons qu’il est important d’étudier les effets des théories du complot, en particulier celles qui sont liées à la science. Nous présentons ensuite une étude de cas, la campagne institutionnelle #ThinkBeforeSharing, en spécifiant pourquoi nous adoptons un point de vue rhétorique. Enfin, nous analysons les infographies de la campagne #ThinkBeforeSharing à travers le concept rhétorique d’éthos, qui se réfère au caractère de l’orateur et, plus généralement, à la relation de confiance entre l’orateur et l’auditoire. Nous concluons en avançant une série de recommandations pratiques qui pourraient être utiles aux institutions pour contrer les théories du complot par le biais de campagnes d’information.

1. De la nécessité de lutter contre les théories du complot

5La définition la plus largement citée des « théories du complot » est probablement celle que propose Karl Popper. Il définit une « théorie conspirationniste de la société » comme « l’opinion selon laquelle l’explication d’un phénomène social consiste en la découverte des hommes ou des groupes qui ont intérêt à ce qu’un phénomène se produise (parfois il s’agit d’un intérêt caché qui doit être révélé au préalable) et qui ont planifié et conspiré pour qu’il se produise » (2002 : 352). Bien que la définition de Popper rende compte du fonctionnement des théories du complot, elle a été critiquée en raison de sa circularité : elle définit une « conspiration » en termes de personnes qui ont « conspiré ». Nous lui préférons donc la récente définition proposée par Sunstein et Vermeule : « a conspiracy theory can generally be counted as such if it is an effort to explain some event or practice by reference to the machinations of powerful people, who attempt to conceal their role » (2009 : 205). Des exemples bien connus de théories du complot qui correspondent à ce modèle sont la croyance que l’alunissage a été mis en scène par la NASA [Herman (Danblon et Nicolas 2010 : 217-236)], Oswald et Herman 2016, Lewandowsky, Oberauer et Gignac 2013) ou encore la croyance selon laquelle le VIH est un virus créé par l’homme (Nattrass 2012).

6Au cours des dernières décennies, des études empiriques ont montré à plusieurs reprises que les théories du complot peuvent avoir un impact significatif en influençant les comportements individuels et les perceptions du public sur des questions critiques (Miller, Saunders et Farhart 2016, Byford 2011). Dans certains pays, jusqu’à cinquante pour cent de la population croit « quelque peu » ou « fortement » à une théorie du complot et a tendance à agir en conséquence2.

7Il y a également de plus en plus d’indications que la pensée conspirationniste contribue également au rejet de la science en encourageant la croyance selon laquelle les découvertes scientifiques gênantes constitueraient un « canular » (Lewandowsky, Gignac et Oberauer 2013). De fait, les enjeux sont particulièrement importants lorsqu’une théorie du complot remet en question la sécurité des traitements médicaux. Par exemple, une étude menée en 2020 dans le cadre du projet YouGov-Cambridge Globalism (22 000 personnes dans 21 pays) a révélé qu’un grand nombre de personnes dans le monde (jusqu’à 57 %) pensent que des effets secondaires dangereux des vaccins sont dissimulés au public3. Bien avant la pandémie, ces croyances ont entraîné une baisse des taux de vaccination. En résumé, les théories du complot jouent un rôle important dans le débat public et peuvent avoir un impact critique sur notre vie individuelle et publique : elles sont omniprésentes, elles entraînent des conséquences graves ; plus elles sont diffuses, moins la science est perçue comme crédible.

8Compte tenu de leur impact, en particulier dans notre société médiatisée, il n’est pas surprenant que de nombreux chercheurs s’intéressent aux théories conspirationnistes. De plus, la pandémie de Covid-19 rend criant le besoin, pour les institutions, d’aborder ce phénomène complexe comme un problème politique et social grave.

9Comme on pouvait s’y attendre, les théories du complot sur la Covid-19 ont émergé dès que la pandémie est devenue une réalité (Oswald et al. 2022 : 2, Hughes et al. 2022)4. Un sondage YouGov5 a montré que, pendant la première phase de la pandémie, l’une des théories conspirationnistes les plus répandues était la croyance selon laquelle Bill Gates voulait utiliser une campagne de vaccination de masse contre la Covid-19 pour implanter des micropuces aux gens afin de les suivre à la trace grâce à une carte d’identité numérique. Une autre théorie du complot populaire, liée à QAnon, prétendait que les vaccins étaient des armes biologiques. De manière générale, les théories du complot liées à la récente pandémie vont de l’affirmation selon laquelle la Covid-19 a été délibérément conçue pour supprimer les libertés à l’échelle mondiale et prendre le contrôle de l’économie internationale, à l’établissement d’un lien avec des événements sans rapport tels que la technologie 5G (cf. Bodner et al. 2021). Une étude mondiale portant sur 28 pays a révélé qu’en 2020, plus de trois personnes sur dix pensaient que des individus puissants provoquaient intentionnellement la propagation du virus Covid-196. Le doute s’est installé à propos de différents sujets : la Covid-19 est-il aussi dangereuse que les autorités et les experts le prétendent ? Les vaccins contre la Covid-19 sont-ils vraiment sûrs et efficaces ? Pouvons-nous faire confiance aux entreprises pharmaceutiques à but lucratif et aux autorités médicales ? Pouvons-nous croire que le « système » essaie réellement de nous sauver ? (Mohammed et Rossi 2022)

10En conséquence, et quelle que soit la légitimité de ces doutes, une méfiance conspirationniste relative aux vaccins Covid-19 a mené à des manifestations anti-vaccination qui, dans plusieurs pays, se sont emparées du slogan féministe « mon corps, mon choix ». Plus important encore, dans certains cas, ces croyances ont conduit certaines personnes à refuser la vaccination, à ignorer les conseils de santé publique et même à préconiser des traitements non vérifiés et dangereux.

11Les théories du complot sont donc devenues un enjeu politique, incitant les autorités publiques à réfléchir à la manière dont elles peuvent inspirer la confiance quand elles justifient leurs décisions. Un article de Philp Ball et Amy Maxmen publié dans Nature rapporte l’opinion de Renée DiResta, de l’Observatoire de l’Internet de Stanford en Californie, qui résume parfaitement ce nouveau besoin de stratégie institutionnelle :

If people think the WHO [World Health Organization] is anti-American, or Anthony Fauci is corrupt, or that Bill Gates is evil, then elevating an alternative source doesn’t do much – it just makes people think that platform is colluding with that source […]. The problem isn’t a lack of facts, it’s about what sources people trust » (Ball et Maxmen 2020).

2. Analyse rhétorique de la campagne #ThinkBeforeSharing

12Comme nous l’avons déjà dit, les chercheurs s’intéressent de plus en plus aux théories du complot ; et la pandémie de Covid-19 a amplifié l’importance de ce sujet. En général, ils reconnaissent que les théories du complot sont un phénomène complexe qui nécessite une approche multi-perspective (Butter et Knight 2020). Les approches dominantes utilisent des méthodologies et des concepts dérivés de la psychologie et des sciences cognitives. Cependant, pour contrer efficacement la propagation des théories du complot, il est également crucial de se pencher sur leurs implications réelles – politiques, sociales, éthiques. Pour ce faire, il est essentiel de mettre en lumière les structures argumentatives et les effets persuasifs des théories du complot.

  • 7 À ce propos, v. la bibliographie reprise dans Zagarella et Annoni 2019.

13Au cours de la dernière décennie, un nombre croissant d’études ont examiné la dimension rhétorique et argumentative des théories conspirationnistes, mettant en lumière des aspects importants de leur structure et de leur fonctionnement7. L’objectif d’une approche rhétorique n’est pas de déterminer d’un point de vue prétendument neutre « qui a raison » et « qui a tort ». Il s’agit plutôt de se concentrer sur les effets persuasifs réels des théories du complot et d’analyser les conditions discursives qui favorisent leur prolifération. Nous affirmons en outre qu’une perspective rhétorique peut être utile pour explorer des stratégies visant à contrer les théories du complot et à améliorer les réponses institutionnelles. Notre changement de perspective consiste à focaliser l’attention sur les stratégies rhétoriques qui peuvent être adoptées par les institutions pour parler des théories du complot afin de limiter leur propagation et de gagner la confiance des citoyens.

14L’initiative #ThinkBeforeSharing, lancée en août 2020 par la Commission européenne et l’UNESCO, a été mise en place pour contrer les théories du complot sur la Covid-19, pour renforcer la confiance du public et pour améliorer l’accès à des informations fiables. De précédentes initiatives de ce type ont été lancées dans d’autres pays, comme en France8, par exemple. Il s’agit cependant de la première campagne de ce type lancée à échelle européenne. La campagne a été mise en œuvre conjointement par la Commission européenne et l’UNESCO, Twitter (désormais appelé « X ») et le Congrès juif mondial9. Comme l’explique son site web, cette initiative repose sur l’idée que les théories du complot ont des conséquences dangereuses pour la société. Cela est particulièrement vrai en cas de pandémie, lorsque les croyances conspirationnistes peuvent nuire à des individus, voire les tuer, conduire à ignorer les preuves scientifiques et polariser la société. Elles ciblent et discriminent les groupes vulnérables, renforcent les stéréotypes et peuvent alimenter la violence en renforçant les discours de haine et les extrémismes. « Il faut que cela cesse », affirme le site web. Nous rapportons ici le texte d’une vidéo de présentation de la campagne :

Covid-19 doesn’t discriminate.

And neither should you.

Along with the virus, conspiracy theories are spreading around the globe.

Many of these false theories target different religions, races, and nationalities.

Often they ignore science.

And claim the virus is part of a secret plot.

That it was made in a lab to harm people.

Or allow certain groups to profit financially.

These claims are not only false, they’re harmful.

They ignore science, they cause fear, they sew mistrust and incite hate.

Tune out the fake news and mistruths […].

No one is responsible for creating Covid-19 but we are all responsible for limiting the spread.

We are all in this together.

Don’t spread hate10.

15La campagne a produit dix infographies éducatives pour aider les citoyens à identifier, démystifier et contrer les théories du complot liées à la Covid-19. Ces infographies sont disponibles en dix langues (allemand, anglais, arabe, chinois, espagnol, français, italien, portugais, russe et tchèque) et ont été largement diffusées en ligne : sur les médias sociaux via le hashtag #ThinkBeforeSharing, sur le site web de la Commission européenne consacré à la lutte contre la désinformation et sur les pages de médias sociaux de l’UNESCO.

Comme l’ont remarqué Puppo, Corradi et Zoppellari dans un ouvrage collectif intitulé The Pandemic of Argumentation :

The use of images in the management of the Covid-19 emergency appears to be one of the most interesting factors from a rhetorical-argumentative point of view: brochures, posters, infographics and diagrams designed by institutional bodies and the government have now become the mainstay of official communication and, even more so, of the urban landscape and buildings (Puppo, Corradi et Zoppellari 2022: 169).

16Les ressources pédagogiques visuelles de la campagne #ThinkBeforeSharing ont été créées en consultant une série d’experts dans le domaine des études sur les théories du complot. Plus précisément, elles s’appuient sur les travaux des professeurs Butter, Lewandowsky et Cook, tous spécialisés dans ce domaine. Dans le paragraphe suivant, nous proposons d’analyser les dix infographies et les propositions des experts sous l’angle de la notion rhétorique d’éthos.

3. La confiance institutionnelle : les infographies de la campagne #ThinkBeforeSharing

17Dans le Conspiracy Theory Handbook, Lewandowsky et Cook consacrent une section à la question « Comment parler à un théoricien du complot » (2020 : 10). Ils présentent quatre éléments clés. Il faudrait : enrôler des messagers de confiance, éviter le ridicule, faire preuve d’empathie et affirmer la pensée critique. Ces notions sont respectivement reprises dans les recommandations suivantes11:

– Des messagers de confiance : « le contre-discours issu d’anciens membres de groupes extrémistes (« repentis ») est mieux perçu et mémorisé plus longuement que les discours issus d’autres sources. »

– Évitez le ridicule : « tenter de déconstruire un mythe avec agressivité ou dérision, ou en affichant la volonté de ‘gagner’ un débat, c’est prendre le risque de voir son argumentation rejetée de manière absolue. Il faut cependant souligner que la dérision, face au grand public, a montré des résultats positifs. »

– Montrez de l’empathie : « il est préférable de montrer de l’empathie envers son interlocuteur et d’essayer d’établir une communication bienveillante. L’objectif étant de favoriser l’ouverture d’esprit de son contradicteur, il est nécessaire d’adopter une attitude exemplaire. »

– Affirmez votre esprit critique : « les partisans de théories du complot se considèrent eux-mêmes comme des penseurs critiques, prémunis contre les thèses officielles. Il peut s’avérer efficace de mettre l’accent sur cette pensée critique à condition de la réorienter vers une meilleure évaluation des théories conspirationnistes soutenues. »

Les auteurs ajoutent une note de précaution :

Il faut également garder à l’esprit que les vrais complots existent. Cependant, les caractéristiques du raisonnement conspirationniste (CONSPIR) ne permettent pas de découvrir de telles machinations. Au contraire, un raisonnement classique, fondé sur un scepticisme mesuré, des preuves robustes et de la cohérence, est nécessaire pour dévoiler les véritables tentatives de tromperie.

18Nous pensons que ces éléments ne sont pas seulement utiles dans une discussion avec les adeptes de la théorie du complot. Ils sont probablement encore plus importants lorsqu’il s’agit de s’adresser au grand public afin de le sensibiliser, de rétablir la confiance dans les experts scientifiques et de minimiser les dégâts de la crise épistémique à laquelle nous sommes confrontés. En fait, les éléments identifiés par Lewandowsky et Cook, en particulier les trois premiers, reposent sur l’obtention de la confiance du public. En termes rhétoriques, ils s’appuient sur la dimension de l’éthos, que nous examinerons plus loin.

19Comme annoncé, nous analysons notre cas d’étude sous l’angle spécifiques de l’un des trois moyens techniques de persuasion – les preuves techniques – de la rhétorique aristotélicienne : l’éthos, le pathos et le logos, qui se réfèrent respectivement au caractère de l’orateur, à l’état émotionnel de l’auditoire et à l’argument lui-même. Selon la taxinomie aristotélicienne, les preuves techniques sont produites dans et par le discours. Elles diffèrent des preuves extra-techniques qui existent indépendamment du discours, qui lui préexistent. Ce sont des éléments tels que des documents écrits ou des aveux. Il convient de souligner que les preuves techniques se soutiennent mutuellement et qu’aucun de ces éléments ne peut être considéré comme dominant (Rhét. : 1355b-1356a). Dans notre analyse, nous nous concentrons sur l’éthos, qui fait donc référence au caractère de l’orateur et, plus généralement, à la relation de confiance qui s’établit entre orateur et auditoire. En effet, selon la tradition aristotélicienne, « il y a persuasion par le caractère de l’orateur quand le discours est ainsi fait qu’il rend celui qui parle digne de foi » (1356a 5). En général, selon Aristote, un orateur digne de confiance s’efforce de se présenter comme une personne faisant preuve de sagesse pratique, de bon sens (phronesis), de vertu (arête) et de bienveillance (eunoia) (1378a6). Il est intéressant de noter que la confiance n’est jamais gagnée par des arguments explicites sur la fiabilité de l’orateur. Au contraire, l’éthos se manifeste implicitement dans les choix stylistiques, lexicaux et argumentatifs : l’éthos se montre plus qu’il ne se dit (Zagarella 2015, Amossy 1999, 2010, Herman 2022).

  • 12 https://ec.europa.eu/info/live-work-travel-eu/coronavirus-response/fighting-disinformation/identify (...)

20Afin d’étudier les éléments éthotiques à prendre en considération pour proposer des campagnes institutionnelles fiables à propos des théories conspirationnistes, nous analyserons les dix infographies proposées à partir des recommandations fournies par Lewandowsky et Cook pour « gagner la confiance du public ». Ces infographies sont disponibles sur le site de la Commission européenne.12

3.1. Évitez le ridicule

21« Éviter le ridicule » est probablement la recommandation la plus pertinente formulée par Lewandowsky et Cook. Les théories du complot sont souvent associées à un manque d’intérêt pour la vérité et considérées à la fois comme un vice moral et une privation psychologique (Danblon 2020). Néanmoins, personne n’est au-dessus des théories du complot, pas même ceux qui étudient ce sujet. Par conséquent, déconstruire ou ridiculiser agressivement une théorie du complot, ou se concentrer sur la victoire d’un argument, pourrait s’avérer autodestructeur.

22Les infographies #ThinkBeforeSharing exposent au moins trois exemples louables sur la manière de parler à quelqu’un qui pourrait croire en une théorie du complot sans tomber dans le ridicule ou avoir recours au blâme.

  • 13 Cet exemple a à voir avec le conseil relatif à l’empathie (objet de la prochaine section): reconnai (...)

23Tout d’abord, toutes les infographies comportent le message suivant, écrit en lettres majuscules et bien en évidence : « Avertissement : la pandémie de COVID-19 a entraîné une hausse des théories du complot dangereuses et trompeuses. Il peut être difficile de les identifier et de trouver le meilleur moyen de les contrer » (c’est nous qui soulignons). Le ton de ce message est rassurant et favorise un sentiment de proximité entre les promoteurs de la campagne et le public. Il reconnaît implicitement que nous sommes tous confrontés à quelque chose de difficile, susceptible d’erreurs, et que personne n’est à blâmer pour avoir adhéré à des théories du complot13.

24Ensuite, pour renforcer l’idée d’une certaine complexité, c’est-à-dire pour souligner la nécessité d’une compréhension fine des nuances liées à la diffusion des théories du complot et pour mettre en garde contre une simplification excessive, la campagne souligne également que « De véritables conspirations, de faible ou de grande ampleur, existent ». Elle donne l’exemple d’une conspiration récente pour illustrer ce point :

Voici un exemple de vraie conspiration : En 2006, la cour de district de Washington D.C. (États-Unis) a reconnu des grands industriels du tabac coupables de complot. Des décennies durant, ils ont dissimulé des preuves confirmant les risques du tabagisme sur la santé pour augmenter leurs ventes. 

25L’infographie fournit également une référence bibliographique, apportant ainsi une contribution méthodologique importante à la qualité de la campagne.

26Troisièmement, les infographies 1 et 4 renvoient au principe des bonnes intentions, reconnaissant la possibilité que certaines personnes expriment sincèrement des inquiétudes sur des questions spécifiques et cherchent des réponses ou des explications qui correspondent à leur vision du monde ou à leurs expériences personnelles : « Bien que la plupart de ceux qui propagent les théories du complot y croient sincèrement, d’autres les utilisent avec cynisme dans ce but » (infographie 4, nous soulignons). Cette déclaration insiste sur l’idée que les personnes qui adhèrent à une théorie du complot ne méritent pas toujours d’être blâmées ou culpabilisées, leurs actions sont souvent motivées par de bonnes intentions et par l’authenticité. Cela étant dit, les actions de certains individus qui propagent intentionnellement des théories du complot afin de polariser la société et d’alimenter l’extrémisme violent sont déplorables.

3.2. Montrez de l’empathie

27Les infographies disponibles fournissent également un exemple qui montre comment les ressources rhétoriques peuvent nous aider à faire preuve d’empathie. La notion d’empathie est étroitement liée à la dimension du pathos, laquelle fait référence aux éléments du discours qui amènent l’auditoire à ressentir certaines émotions et à émettre des jugements basés sur ces émotions. Dans la tradition rhétorique, les états émotionnels sont considérés comme faisant partie d’un jugement rationnel : une personne vertueuse accomplit des bonnes actions car elle est motivée par des émotions appropriées. Il est important de noter que la rhétorique d’Aristote souligne que les personnes jugent différemment en fonction de ce qu’elles ressentent, mais aussi qu’un orateur qui veut provoquer des émotions ne doit pas parler « en dehors du sujet » (Rhét..1378a1). Faire preuve d’empathie peut être une stratégie efficace pour susciter chez le public la sensation d’être compris et de partager ses sentiments avec l’orateur (dans notre cas : l’institution qui promeut la campagne). Lewandowsky et Cook recommandent ainsi qu’ « il est préférable de montrer de l’empathie envers son interlocuteur et d’essayer d’établir une communication bienveillante » (2020 :10).

28En outre, ils ajoutent : « l’objectif étant de favoriser l’ouverture d’esprit de son contradicteur, il est nécessaire d’adopter une attitude exemplaire » (ibid.). Montrer de l’empathie renforce la compréhension mutuelle, prévient les émotions négatives – qui peuvent impacter le jugement – et sert également à renforcer l’éthos de l’orateur.

29Dans cette logique, l’’infographie 3 souligne que « La Covid-19 suscite peurs et inquiétudes. Dans ce contexte, il est naturel de se sentir dépassé et de chercher des réponses » ; de plus, « Personne n’est à l’abri des préjugés ou des peurs, qui peuvent nous conduire à adhérer à une théorie du complot » (nous soulignons). Le ton est à la fois réconfortant et respectueux, encourageant le public à réfléchir à ses peurs, ses valeurs et ses croyances. La communication vise à souligner combien il est facile de tomber dans le piège rassurant des théories du complot ; ensuite, elle inverse la perspective en montrant à quel point les institutions qui comprennent – et partagent – le sentiment d’incertitude causé par la crise pandémique peuvent être rassurantes. Des études récentes menées par Kjeldsen et al. ont reconnu que dans des circonstances de crise :

the expression of uncertainty and ignorance may itself support an éthos of expertise, because awareness of uncertainty and ignorance may be taken as a sign of competence (phronesis). […] Finally, when the experts rhetorically move from scientific uncertainty to moral certainty, they demonstrate character (arete) and good will (eunoia), because this move invites the public to participate in deliberations about measures and policies. At the same time the experts preserve their éthos of scientific expertise because even though they inform the public about the scientific and situational circumstances, the experts are still in a privileged epistemological position to determine the possible ways of action in a situation of uncertainty (Kjeldsen, Mølster et Ihlen 2022 : 100).

3.3. Des messagers de confiance

30Une dernière question cruciale concerne le rôle des « messagers de confiance ». Avec ce concept, Lewandowsky et Cook font référence, de façon secondaire, à l’argumentation par l’exemple et l’argumentation par le témoignage. Plus précisément, ils évoquent l’efficacité des contre-messages créés par d’anciens membres d’une communauté extrémiste, appelés les « repentis » (exiters) (Lewandowsky et Cook 2020 : 10).

31Bien que les infographies n’utilisent pas directement ce type d’argumentation, l’infographie 7 s’y réfère avec les conseils suivants : lorsque vous parlez à quelqu’un qui croit fermement en une théorie du complot, vous pouvez l’encourager à poser des questions et favoriser un débat ouvert, faire des demandes détaillées sur sa théorie pour susciter l’autoréflexion, être prudent et utiliser une variété de sources sur le thème, etc. Il est également suggéré de solliciter « d’anciens conspirationnistes dignes de confiance, qui ont cru à ces mêmes théories avant de s’en détourner » (nous soulignons). Lorsqu’un contre-argument à une théorie du complot provient d’un ancien membre de la communauté, il a plus de chances d’être accepté parce qu’il semble cohérent avec les valeurs du groupe. Ces personnes ont une expérience et une compréhension de première main de l’état d’esprit et des motivations des membres actuels, ce qui peut contribuer à l’élaboration de stratégies de contre-message efficaces. Bien qu’un exiter ne fasse plus techniquement partie du groupe, son expérience personnelle antérieure au sein du groupe lui confère une position unique pour fournir des informations et des perspectives qui peuvent apparaitre plus persuasives aux yeux de l’auditoire concerné que des messages provenant de sources institutionnelles ou d’experts scientifiques.

4. L’éthos dans les campagnes institutionnelles : trois éléments supplémentaires

32Dans cette section, nous proposons trois recommandations clés supplémentaires pour aider les institutions à concevoir des campagnes éducatives visant à contrer les théories du complot.

33Premièrement, nous attirons l’attention sur un phénomène omniprésent que nous appelons « l’hubris épistémique » : la tendance à considérer les citoyens comme mal informés, analphabètes ou de mauvaise foi tout en se plaçant sur un piédestal. Une occurrence similaire de cette notion est reprise dans un article qui traite de la question d’une épistémologie du vice et de l’importance de la prendre en considération lorsque l’on étudie des thèmes sociétaux. L’article de Baird et Calvard comprend l’analyse d’un ensemble de quatre vices épistémiques majeurs qui imprègnent actuellement de nombreuses organisations sociétales : la malveillance, l’insouciance, l’injustice et l’hubris.  Selon Baird et Calvard « Epistemic hubris is an inflated sense of epistemic privilege and pride » (2018 : 270). Étroitement liée au pouvoir, à l’arrogance et à l’excès de confiance, elle se manifeste, selon les auteurs, de deux manières. La première est la conviction que certains d’entre nous bénéficient d’une autorité, voire d’une supériorité épistémique face à d’autres qui en manque. Cette conviction implique une inférence faussée depuis le départ quant à l’état de connaissances et d’expertise de l’un face à l’autre.

Importantly, we would add that it is not simply an error of judgment which qualifies epistemic hubris as an epistemic vice. It is of course possible to misjudge a situation or to be incorrect without being hubristic. It is the agent’s conviction of their infallibility and epistemic superiority that is constitutive of this vice (ibid.).

La deuxième manifestation de l’hubris épistémique est :

The conviction that one has the right or privilege not to know, or not to need to know. […] Feelings of power can reduce empathy, compassion, and attentiveness to others, and […] may reinforce a leader’s privileges to not know or care about matters deemed trivial or beneath them (ibid.).

34Nous proposons un troisième indicateur de l’hubris épistémique : la croyance arrogante que les personnes à qui l’on parle sont mal informées ou analphabètes et/ou ont des opinions biaisées. En ce sens, l’hubris épistémique a trait à la relation qui s’établit entre interlocuteurs et qui implique une vision biaisée de l’état des connaissances d’autrui ainsi qu’une attitude paternaliste, voire condescendante, lors de la communication.

35Nous considérons que le ton des messages institutionnels relatif aux théories du complot doit éviter l’hubris épistémique, y compris dans ses formes implicites. Sinon, ces messages risquent de polariser le débat et d’être perçus comme faisant automatiquement partie de l’« élite », généralement accusée de conspirer contre les citoyens (Zagarella et Annoni 2019). Dans notre étude de cas, un cas exemplaire de cette attitude peut être remarqué dans l’infographie 2 qui utilise les catégories de l’improbable/vraisemblable plutôt que celles du faux/vrai pour suggérer comment reconnaître une théorie du complot. Ce changement de format linguistique, qui permet une plus grande nuance, reflète la position des concepteurs de l’infographie, qui se sont positionnés comme n’étant ni des radicaux ni des extrémistes binaires. Ce changement conceptuel permet d’éviter la dérision, de faire preuve d’humilité et d’éviter le risque de verser dans une attitude arrogante à l’égard des personnes qui ont des difficultés à reconnaître les théories du complot.

36Une deuxième suggestion, connexe, consiste à prendre conscience de ce que l’on appelle l’« effet de la troisième personne », c’est-à-dire la tendance à supposer que d’autres personnes sont plus influencées par les théories du complot que ne l’est l’orateur lui-même. L’effet de la troisième personne a été souligné pour la première fois dans les années 80 par W. Phillips Davison (1983) et récemment, il a été repris et utilisé par le psychologue Rob Brotherton. Il a identifié plusieurs biais cognitifs impliqués dans l’adhésion aux théories du complot et aux fake news (2020).

Davison put the effect down to a kind of innocent egocentrism […]. More recent research suggests that we underestimate not just other people’s knowledge, but their basic ability to come to their own reasoned conclusions. We tend to think over people as less rational and more conformist than ourselves. Our own beliefs, we think, are based on objective knowledge or experiences. Other people’s beliefs are more likely the results of mindlessly following the group (Brotherton 2020 : 35).

37À nos yeux, l’absence d’hubris épistémique et la conscience de l’effet de la troisième personne contribuent à la construction d’un éthos adéquat pour les institutions qui promeuvent des campagnes de lutte contre les théories du complot. Ces recommandations complètent les conseils discutés dans le paragraphe précédent : faire preuve d’empathie et d’humilité, éviter le blâme et le ridicule, et prendre les gens au sérieux sont autant de facteurs qui contribuent à une communication institutionnelle de qualité.

38Enfin, une troisième et dernière recommandation pour la communication institutionnelle serait celle de faire attention à l’utilisation de l’expression même de « théorie du complot ». En effet, cette expression est loin d’être neutre ; elle est souvent utilisée dans un sens péjoratif et peut servir d’insulte.

It seems to provide a diagnosis of a flawed and delegitimized way of thinking, the aim of which is often simply to end discussion. The term can serve as an insult, implying that one does not need to take seriously the claims made by an interlocutor, because they are outlandish and absurd, perhaps even wrong by definition. (Butter et Knight 2020: 3).

39Dans une interaction discursive, qualifier l’autre personne de « théoricien du complot » peut avoir pour effet de créer une dichotomie et de placer le locuteur dans une position de supériorité intellectuelle de savoir (l’hubris épistémique que nous cherchons à éviter). Ainsi, comme l’explique Julien Giry :

Les mots ou expressions « complotisme/iste », « conspirationnisme/iste » ou encore « théories du complot » se sont progressivement imposés dans le vocabulaire et le débat public où ils sont communément connotés de manière négative et péjorative. Ils suscitent une sorte de crainte ou de rejet instinctif envers celles ou ceux, acteurs individuels ou collectifs, qui y souscrivent ou qui sont désignés comme tels. Dès lors, ces acteurs se voient affublés d’une « labellisation infamante » qui, comme une étiquette, produit des effets hétéronomiques de disqualification dans divers champs sociaux parmi lesquels les champs poli­tique, social, médiatique ou bien économique.

L’auteur ajoute :

Dès lors, une double difficulté se pose à la fois pour les chercheurs, les journalistes et les pou­voirs publics autour des enjeux de définition, des effets qu’ils produisent et des usages qu’ils en­traînent. Il s’agit d’abord de trouver une sorte de bonne mesure qui consiste à faire un bon usage, c’est-à-dire à la fois prudent et parcimonieux, des termes énoncés plus haut afin d’éviter un premier écueil qui consisterait à voir immédia­tement dans toutes critiques radicales du modèle néo-libéral une forme plus ou moins explicite de complotiste […].

À l’opposé, seul un examen ad hoc et approfondi de chacune des situations rencontrées peut permettre de déterminer si, oui ou non, nous sommes en présence de théories du complot ; le qualificatif ne doit en aucun cas être déterminé ex ante en fonction de nos préférences, préjugés, clichés ou toutes autres formes de prénotions (Giry 2017 : 6-7).

40Lorsqu’elle est utilisée de manière superficielle et irréfléchie, l’étiquette « théorie du complot » comporte également des implications politiques importantes, qui ne peuvent être examinées en détail ici. Soulignons seulement le risque que l’accusation de conspiration devienne un dispositif d’exclusion. Il s’agit là d’une raison supplémentaire de faire preuve de prudence lorsque l’on aborde les théories du complot dans des articles de revues, des documents de recherche ou dans des contextes institutionnels.

Conclusions

41Les théories du complot doivent être considérées comme un problème politique, social et éthique sérieux. Une meilleure compréhension de la pensée conspirationniste a des implications importantes dans l’appréhension des relations entre science et société. Pour ces raisons, des contre-campagnes institutionnelles sont mises en place dans le monde entier dans le but de renforcer la confiance du public et d’améliorer l’accès à des informations fiables.

42Dans cet article, nous soutenons qu’il est essentiel de fournir un compte rendu discursif des théories du complot, en particulier dans le cadre du débat sur la santé, et de soutenir les institutions dans cette entreprise. Pour atteindre cet objectif, la perspective rhétorique peut aider à réorienter la recherche vers la mise en œuvre de contre-réponses publiques. Plus précisément, nous avons montré que la notion rhétorique d’éthos, qui met l’accent sur la crédibilité de l’orateur, est particulièrement importante lorsqu’il s’agit d’examiner le ton de la communication institutionnelle sur les conspirations en temps de crise.

43Nous pensons donc qu’il faudrait accorder plus d’attention à la manière dont les institutions discutent des théories du complot et renforcent leur crédibilité par le biais de ressources discursives. En outre, une analyse plus approfondie et pluridisciplinaire est nécessaire de la part des universitaires et des autres parties prenantes afin de fournir et garantir les meilleurs conseils possibles aux organes institutionnels. Dans cet article, notre intention se limitait à une discussion sur certains concepts clés qui, à notre avis, peuvent contribuer à la construction d’un éthos institutionnel digne de confiance.

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Notes

1 Cet article a été rédigé dans le cadre d’un projet mené par le CNR (Consiglio Nazionale delle Ricerche, IT). Ce projet se concentre sur l’impact des théories du complot dans les domaines de la science et de la santé publique. Une version préalable de cet article a été présentée à l’occasion du 17e congrès de la International Pragmatics Conference (2021), au sein du panel Manufacturing Dissent : Manipulation and Counter-Manipulation in Times of Crisis, organisé par Cornelia Ilie. Nous tenons à remercier nos interlocuteurs et l’auditoire pour les échanges que nous avons eu à cette occasion. Nous aimerions aussi remercier Elvira Passaro pour son aide dans la constitution de la bibliographie.

2 https://0-www-statista-com.catalogue.libraries.london.ac.uk/chart/18196/belief-in-conspiracy-theories-in-the-united-states/

3 https://yougov.co.uk/topics/international/articles-reports/2021/01/18/global-where-believe-conspiracy-theories-true

4 Des problèmes de communication similaires ont été observés concernant des précédentes épidémies, avec la grippe espagnole de 1918, avec les grippes porcine et aviaire au 19e siècle, ou encore avec les épidémies d’Ebola et de Zika (Taylor 2019).

5 https://today.yougov.com/politics/articles/29917-republicans-democrats-misinformation; https://d3nkl3psvxxpe9.cloudfront.net/documents/20200522_yahoo_coronavirus_crosstabs.pdf, p. 130 [consultés le 18 juin 2024].

6 Gallup International, March 2020: https://www.gallup-international.com/fileadmin/user_upload/surveys_and_news/2020/GIA_SnapPoll_2020_COVID_Tables_final.pdf [consulté le 28 juin 2024].

7 À ce propos, v. la bibliographie reprise dans Zagarella et Annoni 2019.

8 www.conspiracy-watch.info; https://www.nord.gouv.fr/Actualites/Actualites/Prevention-Sensibilisation-des-plus-jeunes-au-decryptage-de-l-information [consultés le 18 juin 2024].

9 Cf. https://en.unesco.org/news/new-resources-counter-covid-19-conspiracy-theories-through-critical-thinking-and-empathy; https://ec.europa.eu/info/live-work-travel-eu/coronavirus-response/fighting-disinformation/identifying-conspiracy-theories_en [consultés le 18 juin 2024].

10 https://www.youtube.com/watch?v=B4h1_u13IVU [consulté le 18 juin 2024].

11 https://skepticalscience.com/docs/ConspiracyTheoryHandbook_French.pdf pour la traduction française utilisée ici.

12 https://ec.europa.eu/info/live-work-travel-eu/coronavirus-response/fighting-disinformation/identifying-conspiracy-theories_en [consulté le 18 juin 2024].

13 Cet exemple a à voir avec le conseil relatif à l’empathie (objet de la prochaine section): reconnaitre les difficultés de l’auditoire à équilibrer son rapport aux théories du complot peut être un signe d’empathie.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Roberta Martina Zagarella et Marco Annoni, « Stratégies rhétoriques pour contrer les discours conspirationnistes anti-vax (Covid-19) : la campagne #ThinkBeforeSharing »Argumentation et Analyse du Discours [En ligne], 33 | 2024, mis en ligne le 15 octobre 2024, consulté le 17 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/aad/8839 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12hvp

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Auteurs

Roberta Martina Zagarella

CID Ethics-CNR, Roma (Italie)

Marco Annoni

CID Ethics-CNR, Roma (Italie)

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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