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Comptes Rendus

Pascal Vimenet, Gaël Teicher (dir.), Jean-François Laguionie

Sébastien Roffat
p. 198-202
Référence(s) :

Pascal Vimenet, Gaël Teicher (dir.), Jean-François Laguionie, Annecy/Paris, Les Animés/Éditions de l'Œil, Communauté de l'agglomération d'Annecy (Musée-Château) – JPL Films, 2016, 300 p.

Texte intégral

1Le cinéaste d'animation Jean-François Laguionie bénéficie d'une belle exposition médiatique ces derniers temps depuis la sortie de son nouveau long métrage Louise en hiver. Une exposition au Musée-Château d'Annecy, une rétrospective à la Cinémathèque française, la réédition en DVD de ses films (la Demoiselle, la Traversée, et autres courts), l'édition de l'album du film Louise en hiver, la sortie d'un documentaire de Jean-Paul Mathelier (le Rêveur éveillé) et, enfin, la publication d'un ouvrage d'entretiens avec Pascal Vimenet.

2C'est de ce dernier ouvrage, édité à l'occasion de l'exposition « Les Mondes poétiques de Jean-François Laguionie » au musée-château d'Annecy (du 13 avril 2016 au 3 juillet 2016), dont le suivi éditorial a été assuré par Gaël Teicher, Freddy Denaës, assistés de Sophie Doléans (des éditions de l'Œil) en collaboration avec Pascal Vimenet et Maurice Corbet (du musée-château d'Annecy), qu'il va être question ici. Le lecteur aura grand plaisir à parcourir ce livre richement illustré mais il pourra découvrir surtout grâce aux nombreux entretiens menés avec beaucoup de finesse et d'érudition par Pascal Vimenet un Jean-François Laguionie tout en sensibilité, revenant sur une œuvre de plus de cinquante ans. Pour la première fois sans doute, Laguionie se livre longuement et sans détour à un regard rétrospectif passionnant. Ce livre est ainsi un catalogue d'exposition mais surtout une belle balade biographique aux côtés d'un réalisateur de 77 ans fourmillant encore de projets (deux longs métrages sont en gestation : le Voyage du prince et Slocum). Le documentaire, le Rêveur éveillé, un portrait de Jean-François Laguionie est offert en DVD avec l'ouvrage. Outre l'envie de voir ou revoir ses films, le lecteur aura également, à n'en pas douter, l'envie de lire du Laguionie, car le réalisateur est aussi auteur de nouvelles (les Puces de sable, Images-Images, la Statue de la liberté, le Prof de mime...) et de romans (la Vie agitée des eaux dormantes...). Il nous a paru intéressant d'examiner de plus près la gestation d'un tel ouvrage en interrogeant son auteur.

3Pascal Vimenet caressait depuis très longtemps l'idée de consacrer un jour un livre ou un film, ou les deux, à Laguionie. Mais l'opportunité a été longue à se manifester. « Mes premiers ballons d'essai, dit-il, datent de la fin des années 1980. Je peux dire que je suis venu à la critique spécialisée sur le cinéma d'animation, que j'ai développée ensuite, en découvrant son premier long métrage, Gwen, dont j'avais pu suivre tout le processus d'élaboration. Ce film me semblait représenter alors la manifestation évidente du renouvellement qui était en train de se produire dans le cinéma d'animation français, et s'inscrire en même temps dans le prolongement quasi-direct de l'héritage de Grimault. Son rythme narratif très lent, à l'opposé des modèles que tentaient d'imposer un certain cinéma de divertissement commercial et certains programmes de séries télévisées, m'enchantait, parce que le modèle implicite qu'il proposait me paraissait prendre vraiment en compte l'imaginaire, dimension essentielle pour qui tient à la liberté d'existence et d'expression. J'ai proposé à Jef (je l'appelle ainsi depuis longtemps) une interview sur son film, interview dont j'ignorais la destinée. Elle est devenue une interview-fleuve, que j'ai lentement décryptée puis proposée, sans y croire, aux Cahiers du cinéma. À ma surprise, Serge Toubiana, alors rédacteur en chef, m'a téléphoné quelques jours plus tard, en me disant que cela avait intéressé le comité de rédaction et qu'il désirait me rencontrer. Et une partie de ce travail a été publié dans les Cahiers du cinéma, dans le cadre d'un dossier consacré au cinéma d'animation dont Toubiana m'avait confié la conception rédactionnelle. Nous étions en 1985. Cela a vraiment constitué mes premiers pas de critique spécialisé. J'ai réalisé alors que tout un pan de l'histoire du cinéma n'avait pas été traité par les revues spécialisées. 

4C'est une étrange conjonction finalement, une friction aussi entre une pensée, celle des Cahiers, dont la doxa reposait sur un rapport à l'ontologie du réel, doxa dont j'admettais le bien-fondé, et une intuition contradictoire que je nourrissais à l'égard du cinéma d'animation, sans parvenir alors à la définir précisément, qui, pour moi, a mis le feu aux poudres. Laguionie et son cinéma, si pacifistes d'apparence, étaient donc implicitement, dans mon esprit, à l'origine d'une explosion : celle d'où devait naître un renouvellement d'une pensée critique sur cet objet si peu commenté alors, le cinéma d'animation. Ensuite, j'ai poursuivi, de place en place, un commentaire sur le cinéma d'animation de Laguionie, en dilettante, comme si je poursuivais l'idée d'une chimère, par exemple en introduisant, dans le premier programme de courts métrages d'animation d'École et cinéma d'alors (École et cinéma d'animation, que je pilotais parallèlement, en intelligence avec École et cinéma), Une bombe par hasard (1969) – justement, une bombe ! J'avais rédigé un court texte de présentation du réalisateur et une fiche sur le film. C'était très embryonnaire. Ensuite encore, Jacques Kermabon, qui connaissait mon intérêt pour le cinéma de Laguionie, m'a confié le texte qui devait lui être consacré dans Une encyclopédie du court métrage français (2004), etc. 

5Je peux donc dire que cette idée est très ancienne et m'a accompagné tout au long de mon travail autour du cinéma d'animation, sans que j'en ai eu conscience immédiatement. Mais elle est revenue en force mi-2011, lorsque le producteur Jean-Pierre Lemouland, avec qui je travaillais à un projet de film sur Frédéric Back (non réalisé), m'a sollicité pour intervenir en tant que coscénariste d'un projet filmique documentaire engagé sur Laguionie par Jean-Paul Mathelier. Je me suis beaucoup investi, en 2012, dans cette co-écriture de son film documentaire le Rêveur éveillé, un portrait de Jean-François Laguionie, qui n'est finalement sorti que l'an dernier. Cette écriture scénaristique, passionnante, a ravivé chez moi l'envie, le temps ayant passé et l'œuvre de Laguionie, enrichie, étant encore plus perceptible avec ce recul, d'interpréter, de manière plus fouillée que le permettait le film, à la fois le trajet de Laguionie et son travail de création, dans toute sa dimension. Je m'en suis ouvert à Jean-Pierre Lemouland, qui a été séduit par l'idée et a imaginé de coupler la sortie du documentaire à un ouvrage, rédigé par moi ou sous ma direction. Mais Jean-Pierre n'avait pas d'expérience d'édition et nous étions partis sur l'idée d'un livre du genre livre d'art, grand format, avec beaucoup de grandes reproductions. Nos différentes démarches n'ont pas abouti. Puis le déclic s'est produit au mois de juin 2015, au Festival d'Annecy, lorsque j'ai réalisé que Jean-Pierre Lemouland ne connaissait pas le responsable des Éditions de l'Œil, Gaël Teicher. Je les ai présentés l'un à l'autre, pensant qu'il y avait peut-être une possibilité de faire le livre dont je rêvais, sous une forme différente de celle que nous avions envisagé jusque-là. L'un et l'autre ont immédiatement réalisé qu'il fallait allier nos forces, d'autant que la perspective d'une sortie combinée l'année suivante du futur long métrage de Laguionie, Louise en hiver, que Lemouland produisait aussi, et du documentaire de Mathelier, était le moment idéal. La seule question qui demeurait était celle, angoissante, du temps de réalisation...

6Je ne disposais même pas d'un an pour l'écrire, en tenant compte des divers obstacles pratiques et techniques. Il fallait obtenir un feu vert de Laguionie, sollicité de toutes parts, et une disponibilité. Il fallait aussi, avant tout, se mettre d'accord entre nous sur la nature de la publication, d'autant plus que l'engagement des Éditions de l'Œil sur ce projet, pour l'inclure dans sa collection, désormais reconnue, des « Animés », impliquait de travailler avec son partenaire permanent, le musée-château d'Annecy. Je connais bien Maurice Corbet, son attaché de conservation au patrimoine et responsable de la collection unique mondialement d'objets et de pièces liés au cinéma d'animation. Je travaille depuis une quinzaine d'années en tant qu'expert aux acquisitions d'œuvres nouvelles pour lui et nous avons collaboré plusieurs fois à des ouvrages et à des expositions. Au début de l'été 2015, nous nous sommes vus Corbet, Teicher, Lemouland et moi, après avoir obtenu un accord de principe de Laguionie. Et nous avons défini l'orientation éditoriale du futur ouvrage, dont le principal de l'écriture m'a été confié, et dont le suivi éditorial dépendait de Teicher, Corbet et moi-même. Et une idée supplémentaire, proposée par Corbet, fut celle de faire une exposition au musée-château sur une partie de l'œuvre de Laguionie. L'idée était donc, au final, d'essayer de faire un ouvrage le plus complet possible, très richement illustré, avec une présentation de la nature de l'exposition (Corbet), une biographie développée, une partie analytique sur les films, une évocation de l'expérience très singulière du studio de La Fabrique – qui me revenait –, un regard extérieur (confié à Lucie Cabanes, responsable de la collection d'art contemporain du musée-château d'Annecy) et une préface que nous avons souhaité confier à Xavier Kawa-Topor.

7Jean-François Laguionie pouvait me recevoir chez lui fin septembre. De mon point de vue, malgré la connaissance antérieure que j'avais de ses films et de ses livres (je ne voulais pas négliger cette dimension), il était indispensable de pouvoir nous voir plusieurs jours de suite à la fois pour parler librement, pour que je puisse découvrir de visu une partie de ses archives graphiques et écrites et pour évoquer ensemble son parcours, toujours un peu incomplet ou contradictoire selon les publications de circonstance consultées. Nous avons passé quatre jours intenses, à nous remémorer des moments antérieurs, à discuter sur le cinéma (et pas seulement son cinéma), sur la littérature, sur la vie, tout cela dans une ambiance extrêmement conviviale et d'amitié. Jef m'avait donné son accord pour que j'enregistre nos conversations à bâtons rompus. Donc, il n'y pas eu, à proprement parler, un nombre de questions définies, plutôt des grands thèmes que j'avais listés (au moins une quinzaine), plus quelques questions de détail que je voulais éclaircir, mais chacun d'entre eux renvoyait à des radicelles diverses et variées. Ces quatre jours ont été l'occasion d'un énorme brassage d'idées, de convictions, de faits, de documents originaux formidables et même de visionnements de projets en cours, inclus Louise en hiver, qui était en pleine post-production. C'était évidemment très stimulant. Et je crois qu'il faut ce type de stimulation pour écrire avec conviction et intérêt pour le lecteur sur une œuvre filmique ou littéraire. Il faut la pénétrer et tenter de la comprendre de l'intérieur, faire le lien entre celui qui l'a conçue et les résultats qu'il en a tirés. Ce rapport d'équilibre instable, très fragile, entre la pensée première et l'œuvre dite finie n'est pas suffisamment pris en compte, habituellement, à mon sens. C'est ce qui peut distinguer un travail, tel que celui que nous avons mené dans ce livre, d'un travail de commentaire de presse. Bien que nous fussions pressés par le temps, je suis parti du principe qu'avec Laguionie particulièrement, rien ne pourrait avoir lieu si nous ne prenions pas notre temps. Surtout, je ne voulais pas m'enfermer, avant même d'avoir commencé à écrire, dans un projet trop prédéfini. Ce qui pouvait se dire durant ce moment allait déterminer la forme réelle et future de l'ouvrage. C'est d'ailleurs ainsi que l'idée d'une balade biographique, ballottée entre réel et imaginaire, s'est progressivement précisée et imposée à moi. Il fallait que mon écriture puisse non seulement rendre compte d'un corpus factuel mais traduire surtout la nature de l'esprit de Laguionie, sa manière de parler de son parcours, de sa vie, sa façon vagabonde, en coq-à-l'âne, de fonctionner.

8Ce principe d'approche a plu, je crois, à Jef, qui, en conséquence, a accepté d'aller plus loin qu'à l'accoutumée. Il s'est laissé aller à des confidences inédites. Il m'a notamment confié un texte, que j'ai un peu évoqué dans l'ouvrage, texte pour un projet à présent en cours, qui m'a beaucoup touché, parce qu'il éclairait rétrospectivement son parcours, mettait en scène des éléments de sa biographie. C'était d'une grande sensibilité et très révélateur de certains des ressorts qui l'animent depuis toujours...

9Finalement j'ai disposé d'environ quatre à cinq mois pour rassembler et synthétiser non seulement ce matériau brut, enregistré et photographié, mais également tout ce que j'avais pu accumuler de notations au sujet de l'œuvre de Laguionie depuis le temps que je la fréquentais, c'est-à-dire depuis ses débuts en 1965. Cette immense matière m'a permis d'introduire à un premier travail d'analyse de l'ensemble de ses réalisations filmiques, en travaillant sur la spécificité de chaque film et en essayant de montrer quels liens ils entretiennent les uns avec les autres. Là aussi, j'avais prévu de travailler sur un aller-retour : j'ai proposé à Laguionie de consacrer une partie de notre temps à évoquer un à un, dans leur ordre chronologique de leur réalisation, chacun de ses films, pour disposer d'un contre-point par rapport au discours plus théorique que j'étais en train d'élaborer. Dans l'ensemble, à ce stade du travail, je ne lui faisais pas part de ma propre perception. J'attendais plutôt que ses remarques, ses anecdotes sur tel ou tel tournage, sa propre perception critique de ses films viennent alimenter ma réflexion. Dans le courant février 2016, cet ensemble s'était peu à peu fixé et sédimenté sous formes des textes qui composent, pour une part, le livre publié. Ils se sont articulés, dans un dernier temps de gestation de l'édition, avec les textes de Corbet, Cabanes et Kawa-Topor. Avec l'éditeur, je les ai travaillés jusqu'au dernier moment, en avril 2016. Le livre était prêt pour le festival d'Annecy 2016, accompagné d'un travail de photogravure des documents sélectionnés vraiment remarquable.

10Ce qui m'intéresse et m'intrigue, depuis les tout débuts, dans l'œuvre de Laguionie, ce sont plusieurs aspects qui viennent se compléter à notre insu. Au début, le caractère muet de l'œuvre. Les films sont totalement mimodramatiques et la combinaison de leur univers premier de papier découpé, de leur chromatisme et de leur traitement musical, tient lieu de langage. Un onirisme et une poétique puissants s'en dégagent. Mais, sous couvert d'un ensemble qui satisfait l'œil et laisse rêver la pensée, sous couvert d'une certaine joliesse, tous ces premiers films font preuve aussi d'ironie, d'un esprit caustique, satirique, en prise avec le réel sociétal de leur contexte d'élaboration. Cette critique est éloignée de l'esprit de caricature et trouve plutôt ses sources du côté d'une certaine poésie de l'absurde et libertaire. Cette image muette, qui entretient aussi un rapport avec l'arte povera, tient un discours très contemporain sur nos entraves et nos libertés... Ces films et les textes que Laguionie a écrits sont autant de fables poétiques modernes. C'est cela que j'ai voulu explorer avec ce travail, tenter de vérifier cette hypothèse de départ, d'identifier les mécanismes à l'œuvre, analyser comment l'œuvre avait évolué à partir de cette origine et voir où cette intuition de départ pouvait me mener. C'est-à-dire que je voulais évidemment aller plus loin que ce que j'avais pu écrire lapidairement au début et ne pas simplement répéter ce qui avait pu être énoncé par différents critiques auparavant, ni me contenter de répéter ce que Laguionie dit lui-même de son œuvre. Il y a une force du dessin, des formes et de la couleur chez Laguionie, une véritable réflexion de mise en scène des matériaux constitutifs de l'animation, un sens tragi-comique de la dramaturgie, qui renvoient souvent à la part qui nous échappe le plus : la nuit, la rêverie, le rêve, le fantasme, la fantasmagorie, l'onirisme – et qui le rapproche évidemment d'un certain post-surréalisme. 

11C'est tout cela qui m'a attiré, parce que je savais que tout n'avait pas été dit au sujet de son travail créatif ou même, c'est prétentieux de le dire, que rien n'avait été dit. Mais je le pense un peu tout de même. L'interprétation n'avait pas encore eu lieu. J'ai essayé d'engager cette interprétation et je crois avoir ouvert quelques pistes, notamment autour de son idiolecte, comme Roland Barthes a désigné une façon spécifique d'écrire. Cet idiolecte, de façon très singulière, entrelace, dans ses films et ses récits littéraires, les thèmes de l'intemporalité avec ceux d'une spatialité étrange, dont les décors qui la constituent sont autant de masques dissimulant un jeu d'opposition et une lutte sourde entre deux pulsions : de vie et de mort. Si j'aime les récits de Laguionie, je les aime pour leur caractère duel, pour ce qu'ils paraissent être apparemment et pour ce qu'ils sont profondément : des allégories. Du coup, j'ai adoré revisiter non seulement ses courts métrages jusqu'à la Traversée de l'Atlantique à la rame mais également ses longs métrages, de Gwen à Louise en hiver, en passant notamment par le Château des singes ou le Tableau, parce que prenait forme tout à coup une logique cachée. C'était un jeu de piste. Et, dans ce labyrinthe extraordinaire, Laguionie avait dû lui-même se perdre plus d'une fois, comme j'y ai erré aussi. Chez lui, une image, filmique ou littéraire, en cache toujours une autre. La question était, comme en archéologie ou en psychanalyse, d'essayer de comprendre ce qu'elle recouvrait, de risquer quelques hypothèses et, du coup, de pulvériser quelques idées toutes faites à son propos – comme celle qui consiste à penser qu'il y a eu une rupture entre un cinéma qui aurait été artisanal lorsqu'il était de court métrage, et contraint aux seules lois de l'industrie lorsqu'il est passé au long métrage.

12Il est certain que dans ce processus d'écriture, d'assemblage – qui, de mon point de vue, est de même ordre que le travail de montage pour un film –, et d'interprétation, rien n'aurait pu avoir lieu sans le sentiment de complicité qui nous a animés au départ du projet de livre. Je connais Jef depuis très longtemps et nous sommes en effet amis. C'est une amitié que l'on peut qualifier de très particulière..., dans la mesure où je l'ai connu par l'intermédiaire de mon père, qui était peintre mais faisait, par ailleurs, partie de l'équipe historique, constitutive du studio des Gémeaux de Paul Grimault et André Sarrut. À ce titre, j'ai eu la chance de connaître Laguionie jeune, alors que j'étais moi-même très jeune, et de pouvoir admirer ses premiers films non seulement dès leur sortie mais, à plusieurs reprises, alors qu'il ne faisait encore qu'en parler. J'ai eu ensuite la chance d'établir un lien d'amitié indépendant avec lui dès ma jeunesse universitaire et de le conserver durant les décennies qui ont suivi. J'ai été l'un des témoins, pour ces raisons, de la naissance du studio de La Fabrique. Nous nous connaissons donc sur un plan personnel. Nous ne nous sommes jamais perdus de vue. Pour autant, je connais aussi très bien la timidité et la retenue de Laguionie. Ce caractère ne me garantissaient aucun « scoop », lors de la réalisation du livre, et pouvait même être un obstacle. D'une certaine façon, il n'y a pas eu de « scoop » d'ailleurs. Et pourtant, entre le travail de co-écriture du documentaire et l'écriture du livre, quelque chose a eu lieu avec lui qui, comme pour un tableau, est de l'ordre de touches subtiles, de détails ajoutés presque à la dérobée, discrètement, qui m'ont donné au final, quand j'en ai eu pleinement conscience, la possibilité de m'en saisir pour les assembler en bouquets et démontrer, je l'espère, que nous n'avions pas encore totalement saisi ce que son œuvre nous transmettait. Comme il me l'a répété, durant ce travail, il me faisait confiance (malgré sa défiance des discours abstraits et théoriques), et cette confiance nous a nourris tous deux. » (Propos recueillis le 14 avril 2017).

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Pour citer cet article

Référence papier

Sébastien Roffat, « Pascal Vimenet, Gaël Teicher (dir.), Jean-François Laguionie »1895. Mille huit cent quatre-vingt-quinze, 82 | 2017, 198-202.

Référence électronique

Sébastien Roffat, « Pascal Vimenet, Gaël Teicher (dir.), Jean-François Laguionie »1895. Mille huit cent quatre-vingt-quinze [En ligne], 82 | 2017, mis en ligne le 01 juin 2017, consulté le 12 septembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/1895/5504 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/1895.5504

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Auteur

Sébastien Roffat

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